Les travailleurs de Volvo Truck en Virginie exigent de voir la totalité de l’entente tandis que l’UAW propose un autre accord de capitulation

Les travailleurs de Volvo à Dublin, en Virginie, exigent la publication de l’intégralité du contrat après que le syndicat United Auto Workers (UAW) ait annoncé que ses négociateurs avaient conclu un autre accord, cette fois pour une convention collective de six ans couvrant les quelque 3000 travailleurs de l’usine de New River Valley.

Travailleurs de Volvo Truck en grève [Source: UAW Local 2069/Facebook].

Le comité de négociation de la section 2069 de l’UAW a publié une déclaration jeudi après-midi indiquant qu’il avait «apporté des modifications» à l’accord de principe précédent, que les travailleurs ont rejeté à 91 % le 16 mai. Cependant, la déclaration ne fournissait que des détails sommaires, ce qui a encore plus irrité les travailleurs. De plus, les travailleurs affirment que l’UAW a délibérément programmé le vote de ratification pour le mercredi 2 juin, juste après le congé du Memorial Day, dans l’espoir que le taux de participation soit plus faible car de nombreux travailleurs seront en vacances.

Dans une déclaration publiée jeudi sur le site Web du syndicat national, le secrétaire-trésorier et directeur du département des poids lourds de l’UAW, Ray Curry, qui a négocié le dernier accord de capitulation, a affirmé que les travailleurs «ont obtenu des gains encore plus solides en matière de rémunération équitable, d’avantages sociaux et de protection de la sécurité d’emploi». Dans une insulte à l’intelligence des travailleurs de Volvo, le directeur de la région 8, Mitchell Smith, a déclaré: «Par respect pour nos membres, nous nous abstiendrons de discuter des détails publiquement jusqu’à ce que les membres de Volvo Truck puissent être pleinement informés.»

Ray Curry [Source: UAW]

L’annonce de l’accord est venue le lendemain de la publication d’une lettre ouverte à l’UAW par le comité de base des travailleurs de Volvo (VWRFC), qui a mené la lutte contre le contrat. Les travailleurs «n’accepteront aucun contrat négocié à huis clos», a déclaré le comité, «pour la simple raison que cela ne ferait que produire une autre capitulation». La lettre, qui a été largement diffusée et s’est répandue «comme une traînée de poudre», selon les travailleurs, décrit ce que le VWRFC considère comme «la base minimale d’un accord que les travailleurs accepteront», notamment des améliorations substantielles des salaires et des avantages sociaux, l’abolition du système salarial à plusieurs échelons et la protection de la journée de huit heures.

Les travailleurs se font dire qu’ils peuvent «poser des questions» sur l’accord lors des réunions qui commencent tôt ce matin dans le hall de la section 2069 de l’UAW. Les travailleurs ont rapporté que la dernière fois que cela s’est produit, le président de la section locale 2069, Matt Blondino, et les responsables locaux ont menacé de ne pas répondre aux travailleurs qui les défiaient, en disant: «S’ils n’aiment pas le contrat, ils peuvent trouver un autre emploi.»

«Le peu d’informations sur ce contrat montre que ce n’est qu’un remaniement des mots de l’ancien», a déclaré au WSWS un travailleur d’assemblage ayant peu d’ancienneté. «Nous voulons voir l’intégralité du contrat. Si vous achetiez une voiture, vous chercheriez le titre de propriété et vous verriez s’il y a des arriérés d’impôts sur la voiture. Vous voulez savoir ce que vous achetez. Nous voulons que le contrat soit publié dans son intégralité, et pas seulement les “faits saillants”.

«Quand vous le lisez et que vous comparez le langage au contrat précédent, vous pouvez voir qu’il n’a rien à voir avec les cinq principaux problèmes que les travailleurs ont notés dans le sondage. Au lieu de cela, ils ont mis un salaire plus élevé pour les retraités et les assurances. Ils en ont besoin, mais il s’agit d’arrondir les angles pour que les anciens partent plus tôt. Il n’y a vraiment rien pour les autres. Mais ce n’est pas comme il y a 11 ans, quand ils ont obtenu du groupe central qu’il nous vende pour une meilleure rémunération. Maintenant, tout le monde veut être ensemble.»

Après l’annonce de l’entente de principe, le travailleur a déclaré qu’il avait été au téléphone toute la matinée de vendredi avec des travailleurs s’opposant au nouvel accord. «Si vous êtes un employé de Volvo, cela vous dit à peu près ce que notre section locale et le principal syndicat pensent de nous. Il ne faut pas être sorcier pour savoir que quelqu’un reçoit un pot-de-vin. Il n’y a pas de chiffres. Ils disent qu’il y a une diminution des primes, mais quelle est cette diminution? Il n’y a aucune explication à ce qu’ils ont envoyé. C’est comme s’ils disaient: “Faites-nous confiance”».

Dépliant du comité de négociation L. 2069 [WSWS Media]

«L’entreprise et le syndicat ont conclu un accord, mais les travailleurs n’en veulent pas. Nous voulons faire la grève, les gens sont en colère. Samedi et dimanche, il y aura des réunions avec les responsables syndicaux – je ne voudrais pas être à leur place. Mais il n’y aura pas de vote sur la question avant le Memorial Day, soit dans presque deux semaines. Ils veulent nous garder là-dedans, pour faire sortir les camions. Ils stockent des camions dans d’autres endroits. Amazon est en colère parce qu’ils veulent leurs camions. Mais personne ne veut être là-dedans. Pourquoi devrais-je travailler pour leur faire gagner de l’argent alors que c’est ce qu’ils offrent?»

Le mois dernier, l’UAW a brusquement mis fin à une grève de deux semaines juste au moment où elle créait une grave pénurie de stocks. L’exécutif Curry de l’UAW a ordonné aux travailleurs de retourner dans l’usine sans leur permettre de voir l’accord ni de voter sur celui-ci. Au fur et à mesure que les détails sont apparus, l’opposition s’est accrue, jusqu’au vote de dimanche dernier où les travailleurs ont massivement rejeté l’accord.

La lettre du VWRFC a déclenché une vague d’opposition dans l’usine. Certains travailleurs ont commencé à faire circuler une pétition, qui a recueilli plus de 1000 signatures, afin de révoquer les responsables syndicaux locaux et le comité de négociation. D’autres dénoncent les dizaines de milliers de dollars que l’UAW verse aux responsables syndicaux locaux pour leur «formation», en plus de leur salaire chez Volvo.

Un membre du VWRFC a décrit l’effusion de sentiments refoulés comme un «réveil» des travailleurs de l’usine.

Face à une rébellion croissante des travailleurs, qui ont maintenant une direction au sein du comité de base des travailleurs de Volvo, l’UAW a recours aux mensonges et à l’intimidation pour tenter de faire passer l’accord. «Il est clair que la lettre ouverte à l’UAW envoyée par le comité de base a un effet», a déclaré un vétéran de Volvo. «L’UAW dénonce le WSWS et a peur que tout le monde se soit retourné contre le syndicat après qu’il ait ramené cette question. Tout le monde va voter contre. Ils discutent entre eux, et tout le monde va se serrer les coudes comme nous l’avons fait la dernière fois.

«Ils nous menacent maintenant en disant que si le nouvel accord de principe n’est pas voté, nous serons en grève pendant trois à cinq mois parce que c’est le mieux qu’ils peuvent faire. Ils essaient de nous faire peur. Nous sommes prêts à débrayer. Nous étions prêts la dernière fois. Mais ils nous ont remis au travail».

Le travailleur a déclaré que le président de la section locale, Blondino, dit aux travailleurs de voter oui parce que l’entreprise a fait un pas en avant et a changé beaucoup de choses. «Rien n’a changé», a dit le travailleur. «Ils ont étiré la période à six ans avec une augmentation de 12%. Cela ne représente que 2 % par an, moins que les 3 % du dernier accord de principe. Dans le nouvel accord, ils ont réduit les frais personnels de 4000 à 2000 dollars par an, ou de 56 à 36 dollars par semaine. D’ici à ce que le nouveau contrat arrive à six ans, il sera de 3000 $. En d’autres termes, dans le prochain contrat, ils commenceront à 3000 $ et le pousseront ensuite à 6000 $ ou 7000 $. Tout tourne autour de l’assurance et des avantages. Une augmentation de salaire ne signifie rien si nos coûts de soins de santé augmentent.»

Matt Blondino [Source: UAW L. 2069]

Un autre jeune travailleur de l’assemblage a déclaré: «En raison de la pandémie, beaucoup d’entreprises ont poussé leurs camions à leurs limites, bien au-delà de ce qu’ils auraient dû faire. Volvo, Freightliner et d’autres entreprises reçoivent de nombreuses commandes pour relancer l’économie. Nous avons beaucoup plus d’influence que nous le pensons».

Jeudi, le Comité de base des travailleurs de Volvo a diffusé une nouvelle déclaration, qui commence ainsi:

Pris de court par l’échec de l’UAW à faire passer son contrat malgré notre opposition, Volvo fait des pieds et des mains. Un cadre de Volvo et un cadre d’Amazon se sont rendus en Virginie pour donner des ordres aux directeurs d’usine et à l’UAW afin de faire passer un contrat aussi vite que possible. Volvo a un accord pour vendre des camions à Amazon, et ils ne veulent pas que nous, les travailleurs, soyons un obstacle.

En réponse, l’UAW a maintenant annoncé un «nouvel» accord de principe qu’il va essayer de faire passer en force avec des mensonges et des menaces. Nous avons distribué hier une lettre ouverte aux responsables de l’UAW, mais ces derniers n’ont pas compris le message. Le «nouvel» accord est une version légèrement reformulée de l’«ancien» accord que nous avons rejeté à 91 %.

Le comité de base des travailleurs de Volvo est en train de se constituer comme la véritable voix des travailleurs de l’usine. En opposition à l’UAW et à ses efforts pour diviser les travailleurs, le comité se bat pour unifier tous les travailleurs et relier leurs luttes à celles des travailleurs des usines de Mack-Volvo du Maryland, de Pennsylvanie et de Floride, ainsi qu’à celles des travailleurs de toute l’industrie du camion et de l’automobile.

Le comité de base des travailleurs de Volvo invite les travailleurs à rejoindre et à construire le comité en le contactant par courriel à volvowrfc@gmail.com ou par texto au (540) 307-0509.

(Article paru en anglais le 21 mai 2021)

Loading