Le chef du Parti vert, Robert Habeck, préconise de fournir à l’Ukraine des armes allemandes et de lui fournir plus de soutien militaire. Cette demande du coprésident des Verts n’était pas un lapsus résultant de l’inexpérience de la politique étrangère, comme le prétendent certains commentaires des médias, mais plutôt que les Verts intensifient délibérément la politique de guerre contre la Russie qu’ils mènent depuis longtemps.
Le week-end dernier, dans une situation tendue, le chef des Verts, Robert Habeck, s’est rendu en Ukraine à l’invitation du président ukrainien Volodymyr Selenskyj. Kiev intensifie sa confrontation militaire avec la Russie et l’OTAN mène ses plus grandes manœuvres depuis la fin de la guerre froide directement à la frontière russe, sous le nom de «Defender Europe 2021». Elles vont durer jusqu’à la mi-juin.
Dans la délégation de Habeck figurait aussi Manuel Sarrazin, un député du Bundestag (parlement fédéral) qui siège au Comité des Affaires étrangères pour les Verts et le député vert du Parlement européen Viola von Cramon-Taubadel, qui est membre du Comité des Affaires étrangères de l’UE et a déjà effectué de multiples visites en Ukraine, où elle est responsable de suivre les projets économiques allemands et européens.
Après des entretiens avec Selenskyj et le chef militaire adjoint, le général de division Eduard Moskaljow, qui était à la tête de la délégation, Habeck a déclaré qu’il considérait que «le souhait de l’Ukraine de se faire livrer des armes était justifié étant donné la guerre dans l’est du pays». Les armes prétendument défensives seraient difficiles à refuser au pays, a-t-il déclaré.
Habeck a ajouté que les Verts étaient, bien sûr, un parti issu du pacifisme. Chaque conflit militaire était un malheur, a-t-il dit, et «quand des gens meurent, c’est toujours mauvais». Mais «si vous examinez un peu le conflit entre les rebelles prorusses et l’armée ukrainienne», vous ne pouvez pas empêcher Kiev au moins d’essayer de se défendre.
Lorsque les représentants des médias ont souligné que cela contredisait la formulation du programme du Parti vert, qui rejette les exportations d’armes vers les zones de guerre, et les directives actuelles du gouvernement allemand, Habeck a répondu qu’il avait explicitement fait référence aux armes défensives pour la légitime défense.
Pour soutenir le chef de son parti, le politicien vert chargé de la défense Tobias Lindner a énuméré les systèmes d’armes dits défensifs. Il a écrit sur Twitter: «Parlons des systèmes qui sont souvent utilisés dans des types d’opérations telles que la défense ou pour gagner du temps, c’est-à-dire antichars, antiaériens, et en plus, le déminage, la reconnaissance.»
Sur Deutschlandradio, dont le journaliste a accompagné les Verts lors du voyage, Habeck a réitéré sa demande le lendemain. Il a dit qu’il comprenait que l’Ukraine se sentait seule. Les véhicules blindés pourraient être utilisés pour transporter des blessés ou pour déminer et devraient donc être livrés à Kiev.
La visite sur le front avait été impressionnante, a-t-il dit, «mais les déclarations qui ont provoqué toute l’agitation maintenant» n’ont pas été une réaction spontanée à la situation désastreuse sur le terrain, mais le résultat «d’une analyse politique qui avait déjà été faite avant que je ne commence mon voyage».
L’Allemagne ne tient pas suffisamment compte des intérêts de sécurité de l’Ukraine, achève le gazoduc Nord Stream 2 et tente de lever les sanctions contre la Russie, a-t-il déclaré. Dans le même temps, a-t-il ajouté, il y avait un renforcement de troupes russes contre l’Ukraine. «La Crimée a été annexée. Et l’Allemagne ne fournit pas de matériel d’évacuation sanitaire, d’équipement de vision nocturne, d’élimination des explosifs et munitions, et je l’ai dit clairement une fois. Il faut au moins faire un minimum pour que les gens n’interprètent pas nos paroles comme de la moquerie.»
L’Ukraine a également défendu la sécurité de l’Europe, a déclaré Habeck dans l’interview de Deutschlandradio. Si le pays devait perdre le conflit sur la Crimée, a-t-il dit, il y a un risque que la Russie agisse dans d’autres régions de la même manière qu’elle l’a fait en Crimée. Il a déclaré que l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN était souhaitable mais pas encore réalisable dans la situation actuelle. L’OTAN n’était pas encore préparée à cela, car la situation n’était «pas assez tirée au clair», comme l’a dit Habeck.
La visite de Habeck et ses entretiens à Kiev sont directement liés à une nouvelle initiative du gouvernement ukrainien visant à reconquérir la péninsule de Crimée.
La soi-disant «Stratégie pour la récupération de la Crimée» est basée sur une coopération étroite avec le gouvernement américain. Début mai, le secrétaire d’État américain Antony Blinken était à Kiev pour des entretiens et a assuré le président Selenskyj du «soutien indéfectible des États-Unis». Blinken a annoncé que l’aide militaire considérable du gouvernement américain serait considérablement élargie. Dans le cadre d’un partenariat de sécurité, 300 millions de dollars par an vont à l’avenir être attribués par Washington à Kiev pour le développement de l’armée.
Blinken était accompagné de Victoria Nuland, sous-secrétaire d’État aux Affaires politiques. Nuland était l’un des partisans les plus agressifs du coup d’État soutenu par les États-Unis et l’UE qui a renversé le président prorusse élu Viktor Ianoukovitch en 2014 et porté au pouvoir un gouvernement d’extrême droite opposée à Moscou.
La même année, une conversation enregistrée entre Nuland, qui était secrétaire d’État adjointe à l’époque, et l’ambassadeur américain en Ukraine, Geoffrey Pyatt, fut rendue publique. Les deux intéressés discutaient carrément de la composition du gouvernement qu’ils réclamaient après le coup d’État de Kiev.
(Article paru en anglais le 29 mai 2021)