Des travailleurs de l’automobile à Détroit inspirés par la grève chez Volvo, choqués que l’UAW affame les grévistes avec 225 € d’indemnités de grève par semaine

Lorsqu'une équipe de reportage du World Socialist Web Site a visité une usine de pièces automobiles Dana Incorporated, dans la banlieue de Détroit, dans la chaleur de mardi après-midi, un groupe de travailleurs était en pause à l'extérieur, transpirant et reprenant son souffle au milieu de leur quart de travail.

Les reporters du WSWS ont parlé aux travailleurs de la puissante grève de 3 200 travailleurs de l'automobile, lancée lundi à l'usine Volvo de New River Valley à Dublin, en Virginie ; à ce moment, tout le groupe de 10 à 15 travailleurs prêta une oreille attentive.

Travailleurs de l'automobile chez Warren Truck [Crédit : AP Photo/Paul Sancya ]

Le WSWS les a informés que les grévistes de Virginie avaient rejeté à 90 pour cent deux accords salariaux proposés par le syndicat UAW et que celui-ci avait forcé les travailleurs à reprendre le travail sans même voir le contenu du premier accord provisoire. Les travailleurs de Dana n'avaient entendu parler de la grève ni par les médias ni par l'intermédiaire de l'UAW, qui « représente » les travailleurs des pièces détachées à l'usine de Dana.

Lorsque les journalistes du WSWS ont demandé aux travailleurs ce qu'ils en pensaient, il était clair que personne ne leur avait jamais demandé leur avis auparavant. La direction et l'UAW a l'habitude de donner des ordres et d'exiger que les travailleurs obéissent dans les usines de pièces détachées comme celle-ci, où les salaires sont bas et le taux d'exploitation élevé.

Il s'est avéré que les travailleurs avaient beaucoup à dire. La nouvelle de la grève en Virginie a soudain libéré leur parole et les a incités à dénoncer les conditions déplorables dans leur propre usine. Cette réaction montre à la fois l'impact puissant que cette grève peut avoir sur la classe ouvrière dans son ensemble et pourquoi l'UAW et les grands médias sont si désireux d'empêcher les travailleurs d'en prendre connaissance.

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Légende: Les militants du WSWS font campagne en soutien à la grève de Volvo à l'usine de Sterling Heights Assembly Plant, dans la banlieue de Detroit

« Ce lieu est un bateau de négriers ! » a crié un jeune travailleur de colère. « On est fatigués. On sue sang et eau là-dedans! »

Un travailleur plus âgé hocha la tête en signe d'accord et dit :« il n'y a pas de ventilation là-dedans! Il fait 109 degrés [42° Celsius] dans l'atelier ». Le groupe a catégoriquement exprimé son accord. « C’est vrai, c'est un problème majeur », a déclaré un autre travailleur. « Il fait une chaleur d'enfer », dit encore un autre.

Lorsque les journalistes du WSWS ont demandé ce que l'UAW faisait à ce sujet, les travailleurs se sont exclamés: « Rien », « c'est de la merde ! »

Les journalistes du WSWS ont dit aux travailleurs que les grévistes de Virginie étaient obligés de survivre avec seulement 275 $ [225 €] d'indemnités de grève hebdomadaires, tandis que des centaines de cadres de l'UAW à leur siège faussement nommé de Solidarity House gagnaient plus de 100 000 $ par an et continuaient de toucher leur plein salaire.

« 275 $ pour une grève ? » a demandé un ouvrier stupéfait. Les ouvriers levaient les yeux au ciel ou secouaient la tête. Un autre travailleur a déclaré que les grévistes devaient recevoir «au moins» 1 000 dollars d'indemnités de grève de la caisse de l'UAW.

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Légende: Les journalistes du WSWS discutent de la grève chez Volvo avec des ouvriers de l’usine de pièces détachées de Dana

Les travailleurs ont également été consternés d'apprendre que l'UAW ne couvrait pas les frais dentaires, optiques, auditifs et d'invalidité des grévistes. L'UAW continue de payer des centaines de dollars l'heure aux avocats qui défendent les responsables de l'UAW poursuivis en justice pour avoir accepté des pots-de-vin du patronat en échange de trahir les intérêts des travailleurs.

Shawn, qui, en tant que travailleur temporaire, n'a droit à aucune représentation de l'UAW à l'usine, a déclaré à propos de l’arrêt de la couverture maladie par l’entreprise: «C'est n’importe quoi. Ils ont de bonnes raisons d'être en colère. S'ils ne sont pas licenciés, on ne devrait pas leur arrêter la couverture des soins de santé et ils ne devraient pas les payer. »

Les travailleurs voulaient envoyer des messages de soutien aux grévistes de Virginie.

Sam, un ouvrier ayant passé sept ans dans l'usine, a déclaré: « Je soutiens la grève des ouvriers de Volvo, nous sommes dans le même bateau. »

D'autres travailleurs qui ont souhaité garder l’anonymat ont dit: « Tenez bon, continuez à vous parler, continuez à faire attention et restez forts », « Bonne chance ! » « Vous devez être solidaires, et nous sommes à vos côtés. »

Lorsqu'on leur a demandé s'ils avaient des conseils à donner aux travailleurs en grève de Volvo, ces travailleurs les ont prévenus de ne pas faire confiance à l'UAW. « Nous pensons que ce sont des escrocs, vous avez tout à fait raison », a déclaré un travailleur, ajoutant: « Ces gens gagnent 90 000 $, 100 000 $ par an pour une semaine de quarante heures. » Lorsqu'on lui a dit que les travailleurs avaient mis en place un comité de la base pour diriger les affaires eux-mêmes, un travailleur a déclaré: « Bon sang, voilà une bonne idée. »

Pendant la discussion, un représentant de l'UAW s’est approché des journalistes du WSWS alors qu'ils continuaient à parler avec le groupe. Le responsable a tenté de dire aux travailleurs que le WSWS était une source d'information étrangère « orchestrée au Brésil » et que « tout ce que les socialistes aiment faire, c'est parler ».

Les journalistes du WSWS ont répondu en disant que les travailleurs ne voulaient pas entendre de provocations anti-communistes. Quant à l'allégation d’ « aimer parler », les journalistes du WSWS ont déclaré que les dirigeants de l'UAW avaient parlé beaucoup devant le tribunal fédéral avant d’être envoyés en prison pour avoir accepté des pots-de-vin des patrons. Les travailleurs ont répondu en riant et en criant: « Cela semble juste », « vrai ! » Le responsable de l'UAW a été contraint de se retirer de la discussion.

Les journalistes du WSWS ont également fait campagne à l'usine de montage de Sterling Heights de Stellantis, et les travailleurs ont envoyé des déclarations de soutien aux grévistes de Volvo. « Nous les soutenons », a déclaré Mike, un sentiment partagé par d'autres à l'usine.

Contre le black-out des médias et de la confédération syndicale AFL-CIO, le World Socialist Web Site se bat pour attirer l'attention de sections plus larges de travailleurs sur ce tournant crucial de la lutte des classes. La campagne de mardi parmi les travailleurs des pièces détachées de Detroit est un petit mais vigoureux exemple de la façon dont les travailleurs de l'automobile et ceux de toutes les industries sont impatients de prendre la défense des travailleurs de Volvo en Virginie, dans une lutte commune contre les sociétés automobiles et le système capitaliste.

(Article paru en anglais le 9 juin 2021)

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