Les États européens abandonnent la distanciation sociale en plein essor de la pandémie de COVID-19

La pandémie de COVID-19, alimentée par le variant Delta, est en pleine expansion en Europe. Les nouvelles infections ont augmenté dans la dernière semaine de 43 pour cent en Europe, pour atteindre 548.000, alors que les gouvernements européens mettent fin aux mesures de distanciation sociale. Trois pays ont à eux seuls plus de 80 pour cent des cas, la Grande-Bretagne (190.294), la Russie (168.035) et l’Espagne (89.036) où les cas ont augmenté de 148 pour cent.

Dans plusieurs pays où le nombre des cas est plus faible les infections se propagent pourtant encore plus vite, ce qui laisse présager une augmentation catastrophique des cas malgré les campagnes de vaccination en cours. Les cas hebdomadaires de COVID-19 ont quadruplé au Luxembourg (961), triplé aux Pays-Bas (11.480) et en Grèce (8.504), et doublé au Danemark (3.208). Ils ont augmenté d’environ 50 pour cent en France (19.364) et au Portugal (16.469).

Le 1er juillet, le directeur de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) pour l’Europe, Hans Kluge, avait déclaré: «La semaine dernière, le nombre de cas est monté de 10 pour cent, sous l’effet de l’augmentation des contacts, des voyages, des rassemblements et de l’assouplissement des restrictions sociales». Il a également averti que le variant Delta dominerait en Europe d’ici le mois d’août, dans des conditions où 63 pour cent de la population européenne n’avait toujours pas reçu de première dose de vaccin. La moitié des personnes âgées et 40 pour cent des professionnels de la santé ne sont pas vaccinés. Dans ces conditions, «une nouvelle vague aura lieu dans la région OMS européenne».

Les projections et avertissements de Kluge sur une nouvelle vague explosant en Europe sont en train de se réaliser. Plus de 1,1 million de personnes sont déjà mortes du COVID-19 sur le continent, mais les gouvernements européens poursuivent leurs efforts avec un mépris non dissimulé pour la vie humaine, adoptant des politiques d’ouverture menant à des millions de nouveaux cas.

En éliminant les règles de distanciation sociale qui sapent les profits des entreprises, ils espèrent intensifier l’acheminement de la richesse sociale vers le sommet de la société après que pendant la pandémie de l’an dernier les renflouements bancaires aient augmenté la richesse collective des milliardaires européens de 1.000 milliards d’euros.

La Grande-Bretagne mène la tendance qui se dessine dans toute l’Europe. La France avait supprimé les règles de distanciation sociale pour les entreprises le 1er juillet, le premier ministre britannique Boris Johnson entend mettre fin à l’obligation de port de masque et aux mesures de distanciation sociale d’ici au 19 juillet. L’épidémiologiste Professeur Neil Ferguson a averti que le Royaume-Uni pourrait connaître 150.000 à 200.000 cas quotidiens d’ici la fin de l’été, mais Boris Johnson a carrément exigé que l’économie et les profits des entreprises passent avant la vie des gens.

«Nous constatons une augmentation des hospitalisations et nous devons nous réconcilier, malheureusement, avec plus de morts dus au COVID», a déclaré Johnson, ajoutant: «Nous devons mettre en balance les risques de la maladie et de la poursuite des restrictions légales, avec leur impact sur la vie et les moyens de subsistance des gens».

Une étude réalisée le mois dernier par Santé publique Angleterre donne une idée de l’ampleur du désastre qui pourrait en résulter. L’agence a montré qu’à ce jour, 117 personnes étaient mortes du variant Delta en Grande-Bretagne, dont 50 entièrement vaccinées, les vaccinations ramenant le taux de mortalité à 0,13 pour cent. Toutefois, même si ce taux de mortalité nettement inférieur devait se maintenir malgré la forte augmentation de la circulation du virus, cela signifierait 200 à 250 décès par jour en Grande-Bretagne d’ici la fin de l’été si les projections de Ferguson se réalisent.

Sur le continent européen, où les taux de vaccination sont nettement inférieurs, cela pourrait conduire à des taux de mortalité encore plus élevés.

Hier, les responsables russes ont rejeté les appels à davantage de mesures de distanciation sociale alors que plus de 700 personnes meurent du COVID-19 chaque jour en Russie. Le plus grand pays d’Europe avec une population de 146 millions d’habitants est en tête des pays européens pour les décès dus au COVID-19 (140.775), juste devant la Grande-Bretagne (128.336) et l’Italie (127.731). Pourtant, la commissaire russe au bien-être humain Anna Popova a déclaré sans détours: «Il n’y a aucune menace ou risque qui nous obligerait à confiner ou introduire des mesures restrictives plus strictes. Ce n’est pas nécessaire aujourd’hui».

En Espagne, le taux d’incidence a bondi à plus de 200 pour 100.000 habitants, et à plus de 600 chez les moins de 30 ans. Le taux de reproduction (R0), c’est-à-dire le nombre de gens contaminés par un porteur du virus, s’élève désormais à 3,3, soit le taux le plus élevé depuis le début de la pandémie. Les événements super-propagateurs lors de voyages scolaires et dans les boîtes de nuit y ont joué un rôle majeur. La région de Catalogne, où le taux d’incidence est de 380, a déclaré mardi qu’elle allait fermer les discothèques pendant 15 jours à partir de ce week-end.

Soulignant les risques encourus par les jeunes, El Pais rapporte qu’au début du mois de juillet, au moins 600 personnes de moins de 30 ans étaient en soins intensifs et 80 étaient décédées dû au COVID-19 en Espagne.

Cela démasque le coût horrifiant, en vies humaines, des fausses assurances répandues par les responsables du gouvernement espagnol du Parti socialiste (PSOE) et de Podemos. Le mois dernier, Fernando Simón, le chef du Centre de coordination des alertes et urgences sanitaires (CCAES) avait déclaré: «Nous savons que jusqu’à ce que nous ayons au moins 70 pour cent d’immunité des choses peuvent arriver, mais nous savons aussi qu’elles ne peuvent pas être comme dans le passé. (…) En aucun cas, elles ne peuvent ressembler à ce qui s’est passé en hiver, et c’est vrai aussi pour la Grande-Bretagne».

Simón a ajouté qu’il était confiant pour ce qui était de soutenir l’élimination de l’usage des masques: «Je pense que cela n’entraînera absolument aucun risque».

Alors que le COVID-19 explose aux Pays-Bas, le ministre de la Santé Ferd Grapperhaus s’est contenté de dire que le gouvernement verrait «dans les prochains jours si un renforcement des règles est justifié.» L’institut néerlandais de santé publique RIVM a déclaré qu’une nouvelle infection sur cinq pouvait être attribuée à un café, un bar ou un club et que plus de 60 pour cent des cas concernent des personnes de moins de 30 ans.

Le 28 juin, à Enschede, une fête dite «sans COVID» s’est transformée en événement de super-diffusion, 180 des 800 personnes présentes ayant été testées positives. La fête exigeait un «ticket d’entrée corona» montrant que les participants étaient vaccinés ou avaient été testés négatifs. Une fois admis, ils n’étaient toutefois pas obligés de porter de masque. Plusieurs personnes avaient apparemment falsifié leur ticket d’entrée corona, partageant un seul code QR certifiant qu’elles pouvaient assister à la fête en toute sécurité.

En France, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a rendu compte mercredi d’une réunion du Conseil national de sécurité tenue par le président Emmanuel Macron. Il a déclaré que le COVID-19 touchait plus lourdement la tranche d’âge des 20-29 ans et qu’il s’accélère dans 11 des 12 régions françaises, les régions de Paris et de Marseille étant les plus touchées. À Paris même, le taux d’incidence a de nouveau dépassé 50 pour 100.000, «seuil d’alerte» officiel du gouvernement.

Néanmoins, Attal n’a annoncé aucune nouvelle mesure et s’est contenté de demander aux citoyens de se faire vacciner. Seuls 34 pour cent des Français sont complètement vaccinés, contre 51 pour cent en Grande-Bretagne.

Macron a également l’intention de faire payer les utilisateurs pour les tests COVID-19, dès maintenant pour les visiteurs étrangers en France et à l’automne pour les citoyens et résidents permanents. Si les responsables ont déclaré que cette mesure visait à éliminer les tests de «confort» et à encourager tout le monde à se faire vacciner, certains articles indiquent que le gouvernement craignait que le coût total des tests n’atteigne plusieurs milliards d’euros cette année. Le gouvernement abandonne ainsi l’une des principales méthodes permettant de mettre en œuvre une politique de traçabilité.

Ces annonces montrent que les travailleurs ne peuvent pas compter sur les gouvernements pour arrêter la pandémie. La voie à suivre pour les travailleurs et les jeunes est la mise en place de comités de sécurité indépendants sur les lieux de travail et dans les écoles, chargés d’adopter et de contrôler des mesures de sécurité pertinentes pour stopper le virus. La question cruciale est de mobiliser la force indépendante de la classe ouvrière dans toute l’Europe et à l’international pour imposer une politique de santé rationnelle, scientifiquement guidée, afin d’empêcher que la vague à venir ne fasse des millions de victimes supplémentaires, en Europe et le monde.

(Article paru d’abord en anglais le 10 juillet 2021)

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