Les manifestations anti-vaccins en France mettent en lumière la politique de droite de Jean-Luc Mélenchon

Le week-end dernier, des dizaines de milliers de personnes ont participé en France à des manifestations contre le «passeport santé» du gouvernement Macron, qui impose de fait légalement la vaccination contre le coronavirus. Les manifestations étaient politiquement dominées et dirigées par l’extrême droite. Elles ont mobilisé à la fois des couches fascistes ouvertement opposées aux restrictions liées au coronavirus et des sections désorientées, libertaires et anti-scientifiques de la classe moyenne, opposées à la vaccination.

Aux manifestations ont appelé des partis ouvertement néo-fascistes, comme Marion Maréchal Le Pen et Florian Philippot, le leader du parti des Patriotes. Le Pen et Philippot appellent ouvertement à mettre fin aux mesures, même limitées, de lutte contre le virus. Soulignant quelles forces politiques étaient mobilisées dans ce mouvement, deux centres de vaccination contre le coronavirus ont été attaqués, dans l’Isère et les Pyrénéees, le week-end des manifestations.

Jean-Luc Mélenchon à Marseille, le 11 mai 2019. (AP Photo/Claude Paris)

Mais le principal rôle joué pour donner une image «populaire» à ce mouvement l’a été par des tendances de la pseudo-gauche comme La France Insoumise (LFI) de Jean-Luc Mélenchon.

La loi de Macron exige que toute personne qui entre dans les espaces publics, comme les cafés et les restaurants, les transports publics et les centres commerciaux, porte sur elle un «pass sanitaire» avec soit une preuve de vaccination totale, soit une guérison récente du coronavirus, soit un test négatif dans les 48 heures précédentes. Le personnel de santé est légalement tenu d’être vacciné. Mesure particulièrement réactionnaire, les tests de dépistage du coronavirus ne seront plus gratuits.

Le Parti de l’égalité socialiste ne soutient pas la loi de Macron, qui ne vise pas à arrêter la propagation du coronavirus. Cette loi vise à justifier sa politique de réouverture totale de l’économie, de suppression des mesures de distanciation sociale et de propagation du coronavirus, et à soutenir les opérations et profits du patronat. Avec des vaccinations qui n’atteignent qu’environ 40 pour cent en France, le nombre de cas quotidiens dépasse déjà les 10.000, surtout dus au variant Delta plus contagieux. La politique d’‘immunité collective’ de Macron prépare une nouvelle vague de décès.

Mais la campagne de LFI contre cette loi n’avait pas pour but de mobiliser l’opposition de la classe ouvrière à la politique d’immunité collective. Elle a au contraire soutenu cette même politique en encourageant la résistance aux vaccinations et en sapant la conscience publique de la nécessité d’une continuation de la lutte contre la pandémie.

Après l’annonce de la nouvelle loi par Macron lundi, Mélenchon et son collègue député LFI François Ruffin ont publié des déclarations qui concordaient avec la campagne de la droite contre une vaccination de masse. Ils ont approuvé les manifestations du 17 juillet sans admettre que des forces d’extrême droite dirigeaient les appels à ces manifestations.

Dans une allocution vidéo jeudi dernier, Mélenchon a attaqué la politique de vaccination universelle : «Un vaccin obligatoire semble être une mesure disproportionnée. Selon l’Organisation mondiale de la santé, tout le monde n’en a pas besoin. C’est inutile de vouloir vacciner tout le monde. Alors que cela suffit de vacciner par dessus-tout ceux qui se trouvent le plus directement mis en danger par la circulation du virus.»

C’est là une déformation pure et simple de la position de l’Organisation mondiale de la santé, qui fait activement campagne pour la vaccination la plus large possible de toute la population, à l’exception de ceux qui ne devraient pas être vaccinés pour des raisons médicales. Elle a insisté sur le fait que pour empêcher la propagation du virus, un pourcentage suffisant de la population – qui n’a pas été déterminé numériquement – doit être vacciné. Mélenchon préconise une politique opposée, anti-scientifique, consistant à ne vacciner que les personnes les plus exposées au risque de mourir.

L’OMS a averti qu’une telle politique constituait un terrain idéal pour le développement de nouveaux variants encore plus mortels. Mélenchon utilise malhonnêtement l’expression «par-dessus tout» pour confondre la question de la priorisation des vaccins avec l’objectif global de vaccination de la population.

Mélenchon s'oppose également à l'obligation de vacciner les personnels de santé. « Regardons cette liste - elle est odieuse - de ceux qui doivent se faire vacciner », a-t-il déclaré. « Nous voyons des travailleurs de la santé. Je comprends qu'ils soient indignés. Pendant des mois, ils ont été célébrés comme des héros et maintenant (...) on les montre du doigt comme des salauds'.

Les travailleurs de la santé travaillent directement avec les sections les plus vulnérables de la population, utilisant les derniers développements de la science pour sauver des vies. Il est tout à fait approprié qu’ils soient vaccinés, pour leur propre sécurité et celle de leurs patients. Cette mesure est d’ailleurs soutenue selon les sondages par plus de 70 pour cent de la population en France. Pourquoi les professionnels de la santé seraient-ils «indignés» par une exigence qui les aiderait dans leurs efforts pour stopper la pandémie, Mélenchon ne l’explique pas.

François Ruffin a également fait campagne pour saper le soutien du public à la vaccination. Dans ses diverses interventions, il minimise le danger du virus, affirmant qu’il ne présente pratiquement aucun danger pour lui-même ou pour toute personne de son âge. S’il est lui-même vacciné, il insiste pour dire qu’il s’agit d’un choix purement personnel qu’il a fait pour réduire la possibilité de restrictions liées à la distanciation sociale. Minimisant les dangers de la pandémie, Ruffin a affirmé sur BFMTV que «ceux qui se font vacciner maintenant le font moins par peur du coronavirus que parce qu’ils se disent: je veux aller au bar, au restaurant en paix, voir ma famille à l’hôpital».

Dans la même interview, Ruffin déclare que la vaccination devrait plutôt être décidée par l’individu «lorsque nous savons qu’il y a un bénéfice supérieur aux risques». Mais il s’agit là d’une supercherie. En réalité, l’avantage des vaccins qui ne provoquent des effets secondaires nocifs que chez quelques personnes par million de vaccinés sont inévitablement bien supérieurs aux risques d’un virus qui tue des dizaines de milliers de personnes par million d’infectés. Ruffin plaide effectivement contre la vaccination en tant qu’outil d’éradication du virus.

Défendant la résistance à la vaccination, Ruffin a fait valoir que la vaccination obligatoire avait «sapé un principe éthique médical fondamental: nous n’avons pas le droit d’utiliser une personne pour une autre».

«Quelle est l’alternative?» a-t-il déclaré. «Au lieu de vacciner tout le monde, nous devrions cibler massivement la population à risque.» Précisant que, de toute façon, le virus mortel continuerait à se propager dans la population, Ruffin a ajouté, «de toute façon, cela permettrait clairement d’empêcher les hôpitaux de déborder.»

Mélenchon et Ruffin justifient leur politique d’immunité collective en utilisant le même argument que l’extrême droite – à savoir que la vaccination obligatoire est une attaque contre leurs droits démocratiques et leur liberté personnelle.

Il ne s’agit pas là d’une défense des droits démocratiques. Leur argument pourrait être utilisé pour justifier une grande variété de comportements anti-sociaux, y compris la conduite en état d’ivresse, au motif que chacun a le «droit» de faire ce qui lui plaît.

À titre d’exemple, il existe actuellement 11 virus pour lesquels les vaccins sont légalement obligatoires en France. L’extension de la vaccination universelle tout au long du 20e siècle, tant en Union soviétique que dans les pays capitalistes occidentaux, a été un sous-produit des progrès de la science et du développement des soins de santé et du niveau de vie de la population, acquis à travers d’importantes luttes sociales de la classe ouvrière.

Il convient de noter qu’alors que LFI a participé aux manifestations de droite de samedi contre les vaccinations, l’organisation n’a pas lancé d’appels similaires aux manifestations et aux grèves contre la politique de «retour au travail» de Macron ou la réouverture des écoles tout au long de la pandémie.

C’est parce que la campagne contre les vaccins fait partie de leurs efforts pour normaliser la propagation du virus et justifier une politique d’immunité collective exigée par l’élite industrielle et financière.

Le gouvernement Macron a cherché à profiter des manifestations anti-vaccins ouvertement de droite pour justifier sa propre politique. Son porte-parole, Gabriel Attal, a ainsi dénoncé les rassemblements de samedi d’une «frange capricieuse et défaitiste» qui serait «heureuse de rester dans le chaos et l’inactivité». Il a opposé à cela une population «laborieuse et volontaire» qui «veut oublier le virus et travailler.» En fait, l’hésitation à l’égard de la vaccination a bien été exacerbée par la politique de Macron, qui vise depuis le début à protéger les profits et non les vies, et a été marquée par une série de mensonges et de virages à 180 degrés.

Le Parti de l’égalité socialiste se bat pour la mobilisation de la classe ouvrière à l’échelle internationale afin de mettre un terme à la pandémie de coronavirus. Cela implique la fermeture des lieux de travail non essentiels, avec compensation intégrale à tous les travailleurs et petites entreprises, et la vaccination la plus large possible de la population. Cela implique la lutte pour des gouvernements ouvriers dans toute l’Europe, la confiscation des fortunes mal acquises de l’élite financière et la réorganisation socialiste de la vie économique en fonction des besoins de la société et d’une planification scientifique, et non pas en fonction du profit privé.

(Article paru d’abord en anglais le 21 juillet 2021)

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