Un rapport de l'ONU documente l'impact mondial du changement climatique

Le dernier rapport publié par le Groupe d'experts intergouvernementaux sur l'évolution du climat (IPCC) lundi matin va au-delà de tous les documents scientifiques mondiaux précédents. Il lie définitivement l'activité humaine industrielle et agricole au changement climatique et le changement climatique à des événements météorologiques spécifiques comme les récentes sécheresses, canicules, tempêtes et inondations.

Climate Change 2021 : la base scientifique physique (Source : Twitter/IPCC_CH)

Quelque 234 scientifiques ont résumé les résultats de plus de 14 000 études distinctes, mais le langage du rapport est dépouillé de la langue de bois bureaucratique habituelle qui afflige les agences des Nations Unies, principalement pour dissimuler les conflits de classe et les intérêts nationaux. Cela s'explique en partie par le fait que ce rapport se limite aux preuves physiques du changement climatique et évite toute discussion sur les conséquences sociales ou les propositions politiques – ces deux aspects feront l’objet de rapports prévus à la publication l’année prochaine.

Néanmoins, le langage est beaucoup plus fort que les études précédentes de l’IPCC. Le résumé destiné aux décideurs politiques déclare: « Il est sans équivoque que l'influence humaine a fait réchauffer l'atmosphère, les océans et les terres. Des changements généralisés et rapides dans l'atmosphère, l'océan, la cryosphère et la biosphère se sont produits. »

Ils mettent en garde que « l'influence humaine a fait réchauffer le climat à un rythme sans précédent au cours des 2000 dernières années au moins », ajoutant que « le réchauffement observé est provoqué par les émissions provenant des activités humaines… »

« Les preuves des changements observés dans les extrêmes tels que les canicules, les fortes précipitations, les sécheresses et les cyclones tropicaux et, en particulier, leur attribution à l'influence humaine, se sont renforcées », poursuit le rapport.

Il note que de 1850 à nos jours, l'activité humaine a fait augmenter la température moyenne du globe de 1,1 degré Celsius, principalement à travers la combustion d’énergies fossiles comme le charbon, le gaz et le pétrole.

Une nouvelle augmentation de 0,4 degré, portant l'augmentation totale à 1,5 degré Celsius, aura lieu au cours de la prochaine décennie, quelles que soient les mesures politiques adoptées. C'est la conséquence inévitable des émissions de dioxyde de carbone qui ont déjà eu lieu, ainsi que d'autres processus qui sont désormais passés.

Le rapport est le plus convaincant lorsqu'il applique les nouveaux développements de la modélisation des données, de la mesure par satellite et de la science de l'attribution (établissant les liens de causalité) pour rendre compte de l'impact du changement climatique au plan régional et même local. Les États-Unis ont par exemple été divisés en parties occidentale, centrale et orientale, chacune considérée séparément et comme partie d’un ensemble mondial.

Contrairement au dernier rapport de ce genre, publié en 2013, ce document de l’IPCC relie directement le changement climatique à des événements tels que les récentes inondations en Allemagne et en Belgique, le dôme thermique au-dessus du nord-ouest du Pacifique, les sécheresses et les incendies de forêt dans l'ouest des États-Unis et l'est de la Méditerranée, et la fréquence et l'intensité croissantes des ouragans et des cyclones.

L'alerte sonnée par les scientifiques n'est donc pas seulement générale, mais concrète et spécifique. S'il n'y a pas de réponse concertée, systématique et globale aux dangers, ces catastrophes seront de plus en plus fréquentes et de plus en plus importantes.

La perspective de conditions météorologiques extrêmes plus sévères aux deux extrémités du spectre (sécheresse et tempêtes) est en partie liée à un simple rapport physique. Plus la température de l'air est élevée, plus celui-ci peut absorber et stocker de vapeur d'eau. Les précipitations peuvent être plus abondantes, mais les sécheresses peuvent aussi être plus longues et plus sévères puisque l'eau est détournée ailleurs.

Une atmosphère de 1,1 degré plus chaude qu'à l'ère préindustrielle produit déjà des changements désastreux dans les précipitations, les vagues de chaleur et les tempêtes de neige. La hausse inévitable de 1,5 degré aura plus de conséquences. Une hausse de 2 degrés, sans parler de 3 ou 4, signifierait que des catastrophes de l'ordre des inondations en Allemagne et en Chine se produisent chaque semaine ou chaque jour.

A cela s'ajoute l'impact disproportionné du réchauffement climatique sur les régions polaires arctique et antarctique, et surtout sur leurs immenses formations glaciaires qui une fois fondues, ne peuvent être facilement reconstituées dans les conditions d'une planète se réchauffant.

Les données objectives sont absolument irréfutables: le dioxyde de carbone dans l'atmosphère a atteint un sommet saisonnier de 419 parties par million cette année, le plus élevé en deux millions d'années, d'après les archives fossiles.

Bon nombre des conséquences du réchauffement climatique sont déjà irréversibles, au moins à l'échelle de plusieurs décennies. L'augmentation de la température et de l'acidité des océans a déjà tué de vastes étendues de récifs coralliens dans le monde ; le niveau de la mer a augmenté régulièrement d'un pouce [2,54 cm] tous les dix ans pendant plus d'un siècle.

Des catastrophes à l'échelle véritablement mondiale, comme la désintégration des calottes glaciaires du Groenland ou de l'Antarctique, ou la dislocation du Gulf Stream, se profilent à l'horizon s'il n'y a pas de changement significatif dans la trajectoire des processus climatiques.

Le nouveau rapport établit le cadre d'une prochaine conférence de 197 nations à Glasgow, en Écosse en novembre ; prochaine étape d'un processus sans fin et infructueux comprenant déjà les accords de Paris de 2015 dans lesquels les mêmes pays s’étaient engagés à prendre des mesures volontaires pour limiter la hausse des températures mondiales à 1,5 degré Celsius au-dessus du niveau préindustriel.

Cette conférence n'a conduit à aucune amélioration concrète. Elle a été suivie par le retrait des États-Unis sous le gouvernement Trump, dirigé par un ignare scientifique, porte-parole des industries à énergies fossiles, qui qualifiait les affirmations de réchauffement climatique de complot chinois.

Le remplacement de Trump par Biden permet le rétablissement d'un consensus mondial superficiel, qui sera dûment ratifié à Glasgow au moyen d’un rafistolage diplomatique. Mais aucune assemblée d'États-nations capitalistes n'est capable de faire face à la menace existentielle du changement climatique, quelle que soit la rhétorique de Biden et de son envoyé pour le climat, John Kerry, l’ancien sénateur et secrétaire d'État (et avocat de la violence et de l'agression impérialistes américaines).

Le changement climatique est une menace mondiale, mais il est inextricablement lié au développement du système capitaliste. Ce n'est pas le développement industriel en soi, comme le laisse entendre le rapport de l’IPCC, qui est à l'origine de la crise climatique. C’est le développement des forces productives sous l'égide de la classe dirigeante capitaliste sur la base du profit privé et du système d'État-nation, qui a donné lieu au désastre auquel l'humanité est aujourd'hui confrontée.

Traiter efficacement et rationnellement le changement climatique ne peut pas plus être laissé aux mains de l'aristocratie financière mondiale que la gestion de la pandémie mondiale. Tous deux nécessitent la mobilisation de la seule classe sociale qui défendra, tout en abolissant les relations sociales irrationnelles, exploiteuses et monstrueusement autodestructrices du système de profit, tout ce qui est progressiste dans la science et la technologie modernes. C’est à dire la classe ouvrière internationale, sous la direction du parti mondial de la révolution socialiste.

(Article paru en anglais le 10 août 2021)

Loading