Le gouvernement de l’Ontario appelle à la «normalisation» de la COVID-19 en publiant son plan de réouverture des écoles

Le gouvernement progressiste-conservateur ultradroitiste de l’Ontario a publié un plan de réouverture des écoles de la province qui préconise explicitement une politique meurtrière d’infection massive des élèves, des éducateurs et de leurs proches.

Le plan est censé servir de base à une reprise complète de l’enseignement en classe au début du mois prochain, pour la première fois depuis la mi-avril. Au printemps dernier, le gouvernement avait été contraint d’ordonner à tout l’Ontario de passer à l’apprentissage en ligne, au milieu d’une troisième vague catastrophique de la pandémie qui submergeait les hôpitaux et avait déjà conduit les bureaux médicaux locaux de la santé de Toronto, Peel et d’autres régions à imposer la fermeture des écoles.

Publié mardi dernier, le plan du gouvernement ne fournit aucun détail sur la façon dont les épidémies de la COVID-19 seront gérées ni sur les critères de fermeture des écoles.

Manifestation du 18 janvier 2021 des enseignants à l’école secondaire Westmount de Montréal contre la politique de réouverture imprudente des écoles du gouvernement du Québec (Photo: Robert Green)

Soulignant que ces omissions flagrantes dans le plan de 26 pages étaient intentionnelles, le Dr Kieran Moore, médecin hygiéniste en chef de l’Ontario, en répondant à une question sur la façon dont les fermetures d’écoles seraient décidées, a affirmé: «Je ne vois vraiment pas nos écoles fermer à l’automne, en hiver et au printemps. Je ne peux vraiment pas envisager ou voir la fermeture de quelque école que ce soit en Ontario, ni de collèges ou d’universités.»

Moore a poursuivi: «Nous devons normaliser la COVID-19 pour nos écoles.» Affirmant que la COVID-19, qui a déjà tué plus de 26.600 Canadiens, s’apparente à la grippe saisonnière, le médecin-chef de l’Ontario a déclaré qu’à tout moment, on pouvait s’attendre à ce que de 10 à 15 % des élèves soient infectés. «Mais ils se rétablissent, ils récupèrent et retournent en classe», a déclaré Moore.

À la lumière de ce que l’on sait de la menace que représentent le virus et ses variants pour les enfants, ces déclarations ainsi que le plan de rentrée scolaire du gouvernement ne sont rien de moins que criminels. Au cours des six premiers mois de cette année, près de 1500 enfants sont morts à cause de la COVID-19 au Brésil, où le virus est devenu l’une des principales causes de décès chez les jeunes. En Indonésie, où le variant Delta sévit, plus de 100 enfants sont morts chaque semaine de juillet.

L’épidémiologiste Eric Feigl-Ding, l’un des principaux experts de la COVID-19, a récemment lancé une mise en garde: «Que l’on se le dise: 1 % de tous les cas confirmés de COVID-19 chez les enfants conduisent à une hospitalisation. Est-ce vraiment un niveau acceptable de morbidité infantile que nous allons permettre dans la société?» Pour transposer cela à la situation en Ontario, cela signifie que si 20 % des quelque 1 million d’élèves des écoles élémentaires de la province étaient infectés (une estimation prudente étant donné que pas un seul d’entre eux ne sera vacciné en septembre), 2000 d’entre eux se retrouveraient à l’hôpital.

Le gouvernement de l’Ontario est non seulement prêt à «permettre» de tels niveaux d’infection et de décès, mais il prend des mesures concrètes pour les faciliter. Le plan de retour à l’école ne contient aucune directive pour le dépistage des élèves asymptomatiques et aucune obligation de vaccination pour les élèves ou le personnel. Bien que le regroupement des élèves en petits groupes reste formellement en place, les exceptions à la règle sont si nombreuses qu’elles lui ôtent tout sens. Par exemple, les autobus scolaires sont autorisés à circuler sans restriction, les élèves peuvent se mélanger dans les espaces communs comme les bibliothèques et les cantines, la cohorte ne sera pas appliquée pendant les activités de clubs et les sports après l’école, et les sports d’intérieur à haut niveau de contact, comme le hockey et le basketball, sont autorisés. Même les cours de musique pourront reprendre, Moore encourageant les élèves à chanter et à jouer des instruments à vent, deux moyens infaillibles de propager un virus aérien comme la COVID-19.

Le variant Delta, plus contagieux et mortel, qui fait des ravages dans le monde entier, est déjà bien établi en Ontario, où il représente plus de 90 % de toutes les nouvelles infections à la COVID-19. Dimanche, l’Ontario a enregistré plus de 400 cas quotidiens pour la première fois depuis le début du mois de juin, et les taux d’infection ont connu une forte tendance à la hausse depuis le début du mois. Le Dr David Naylor, coprésident du Groupe de travail sur l’immunité face à la COVID-19 du gouvernement fédéral, a tweeté dimanche dernier: «La propagation communautaire s’accélère partout au Canada, même dans les provinces qui ne sont pas passées au mode «Full BoJo» (c’est-à-dire qui n’ont pas suivi l’exemple du premier ministre britannique Boris Johnson et abandonné toutes les mesures anti-COVID). J’espérais autre chose, mais je n’ai plus aucun doute: automne pénible en perspective».

Et pourtant, l’élite dirigeante au Canada s’apprête à abandonner tout effort pour contenir le virus. Moins d’une semaine avant que le plan de rentrée des classes du gouvernement Ford ne soit rendu public, le gouvernement populiste de droite du Parti conservateur uni de l’Alberta a annoncé que toutes les restrictions liées au virus seront abolies à partir du 16 août. Même les personnes infectées par la COVID-19 ne seront plus tenues de s’isoler.

Ces politiques irresponsables, qui menacent la vie de milliers d’enfants et d’adultes, sont facilitées par le premier ministre Justin Trudeau et son gouvernement libéral fédéral. Tout au long de la pandémie, ce dernier a poursuivi une stratégie des «profits avant la vie» visant à protéger la richesse des grandes entreprises et des super-riches au détriment de la santé, du bien-être et de la vie même des travailleurs et de leurs familles. Il a notamment mené la campagne de retour au travail et à l’école.

À l’occasion, Trudeau a cyniquement exploité la division constitutionnelle des pouvoirs fédéraux et provinciaux pour mettre une certaine distance rhétorique entre ses libéraux fédéraux et les plans de réouverture irresponsables mis en œuvre par les gouvernements de droite radicale de l’Alberta, de l’Ontario, du Manitoba, de la Saskatchewan et du Québec. Cependant, le cadre de ces plans a été établi par Trudeau dans le discours du Trône de son gouvernement l’automne dernier, qui déclarait que toutes les restrictions relatives à la COVID-19 doivent être «à court terme» et appliquées au «niveau local».

Les enseignants, les parents et les étudiants s’opposent largement à la campagne criminelle de l’élite dirigeante en faveur de la rentrée des classes, qui vise à libérer les parents pour qu’ils puissent retourner travailler et faire des profits pour les super riches. Mais cette opposition est étouffée par les syndicats du secteur de l’enseignement, qui sont déterminés à faciliter la réouverture de toutes les écoles.

La Fédération des enseignants de l’Ontario (FEO), qui représente environ 83.000 enseignants de l’élémentaire et autres travailleurs du secteur de l’enseignement, appuie le plan de réouverture du gouvernement. Tout ce qu’elle propose, ce sont quelques modifications mineures qui ne feront que très peu, voire rien, pour réduire la vague d’infections qui déferlera sur la province si le plan de rentrée des classes est mis en œuvre. «Les risques globaux seraient réduits dans l’ensemble du système scolaire public si le gouvernement mettait en œuvre des mesures clés comprenant l’accès à des jours de maladie payés, l’amélioration de la ventilation et la réduction de la taille des classes», a poliment noté la FEO dans une déclaration adressée au gouvernement Ford le mois dernier.

L’ancien président de la Fédération des enseignants des écoles secondaires de l’Ontario (FEESO), Harvey Bischof, qui a récemment quitté son poste syndical bien rémunéré pour se présenter sous la bannière des néo-démocrates proaustérité et proguerre aux élections ontariennes de l’année prochaine, a versé des larmes de crocodile sur les risques liés au plan de réouverture. Il a déclaré sur les ondes de BNN le mois dernier que les membres de la FEESO étaient inquiets à l’idée de retourner dans des classes pleines comptant jusqu’à 30 élèves. Il a ajouté que les enseignants étaient furieux qu’aucun fonds supplémentaire ne soit mis à disposition pour embaucher plus de personnel afin de réduire la taille des classes.

Après avoir brossé ce tableau désastreux, Bischof a ensuite clairement indiqué à son auditoire d’affaires que la FEESO ne sanctionnerait aucune action collective des enseignants contre le cours homicide du gouvernement. À la question de son interlocuteur: «Que se passera-t-il en septembre si les enseignants ne se sentent pas en sécurité?», Bischof a répondu: «Cela dépend de circonstances individuelles... Si un membre a un problème médical sous-jacent, nous nous attendons à ce qu’il obtienne une documentation médicale et ensuite nous nous attendons à un accommodement médical dans ces circonstances auquel l’enseignant a légalement droit... Dans certains cas, on pourrait potentiellement voir l’utilisation de la Loi sur la santé et la sécurité au travail et le refus de travailler lorsqu’un travailleur refuse un travail dangereux.»

Le message de Bischof et de la bureaucratie de la FEESO aux enseignants est clair: «Vous êtes laissés à vous même. Il n’y aura pas de lutte collective. En septembre, allez chercher un certificat médical si vous avez un problème de santé. Si vous ne vous sentez pas en sécurité au travail, opposez-vous tout seul contre votre école et déposez un rapport personnel auprès de la Commission des relations de travail de l’Ontario. Votre syndicat n’entreprendra aucune action collective au travail. Nous ne mobiliserons aucun autre enseignant en solidarité pour repousser avec force ce plan de réouverture irréfléchi, qui met en danger la vie des enseignants, des élèves et de leurs familles. Nous ne ferons en aucun cas quelque chose de scandaleux comme appeler à une grève générale pour mobiliser les millions d’enseignants et de membres du personnel de soutien à l’enseignement en Ontario et de partout ailleurs au Canada pour forcer des changements réels en politique. Non, vous êtes tous seuls. Merci pour vos cotisations syndicales!»

Les enseignants et le personnel de soutien à l’enseignement ainsi que leurs partisans parmi les élèves et les parents, doivent tirer les conclusions nécessaires du refus obstiné des syndicats de faire quoi que ce soit pour protéger la santé et la vie des travailleurs de l’enseignement et des enfants en résistant contre la campagne de rentrée des classes. Il faut construire un mouvement de masse de la classe ouvrière pour lutter pour la fermeture de toutes les écoles et des lieux de travail non essentiels, avec compensation complète pour tous les travailleurs, payée par les patrons et l’État, ainsi que l’adoption de tests de masse, la recherche des contacts, l’isolement des patients infectés, des directives de ports du masque et des vaccinations pour supprimer la transmission de la COVID-19. Ce mouvement doit unifier les éducateurs au niveau international, car ce n’est que sur la base d’une stratégie mondiale plaçant la protection de la vie humaine avant le profit des sociétés que la pandémie pourra être combattue.

Nous encourageons tous les éducateurs qui souhaitent lutter pour ce programme à contacter le Comité de sécurité pancanadien du personnel scolaire de la base (CSPPB) au cersc.csppb@gmail.com.

(Article paru en anglais le 10 août 2021)

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