Les districts scolaires du sud des États-Unis rouvrent leurs portes dans le contexte de l’aggravation de la pandémie de coronavirus qui a infecté des dizaines de milliers de personnes, remplissant les hôpitaux au maximum et entraînant un besoin désespéré de personnel et d’équipements d’urgence. Cela inclut les hôpitaux pédiatriques qui, dans de nombreuses régions, comptent plus de patients qu’à aucun autre moment de la pandémie.
Quelques jours après la réouverture, les districts scolaires de toute la région ont signalé des milliers d’infections au COVID-19 et beaucoup sont revenus à un enseignement virtuel à court terme. Néanmoins, la classe dirigeante, menée par le gouvernement Biden et les gouvernements des États républicains, reste fermement convaincue que l’enseignement en personne doit reprendre, sacrifiant la vie des enfants au profit des sociétés alors que leurs parents retournent au travail.
Le personnel enseignant et les parents sont furieux et désespérés en voyant les enfants soumis à des conditions dangereuses. Sur les médias sociaux, les enseignants font circuler des pétitions dans le but de faire pression sur les politiciens et les directeurs afin qu’ils appliquent au moins des stratégies d’atténuation ou qu’ils stoppent complètement l’apprentissage en personne.
Dans la section des commentaires de ces pétitions, de nombreux parents plaident désespérément en faveur des options d’apprentissage virtuel, qui ont été presque totalement supprimées dans tout le pays.
Un signataire a écrit sur une pétition texane: «Le gouverneur Abbott met les futurs Texans en danger. Il prétend être pro-vie et se soucier des enfants. Je suppose que cela ne s’applique qu’aux enfants à naître. De nombreux enfants qui sont ici maintenant vont mourir à cause de ses actions directes. Il doit porter la responsabilité de tous les décès qui surviendront sous ses ordres».
Un autre a commenté: «Que se passera-t-il dans les écoles publiques du Texas lors de la prochaine épidémie de Covid après que le gouverneur Abbott ait déclaré qu'il n'y aurait pas de classes virtuelles? Est-ce que lui et d'autres porteront la responsabilité du carnage?»
Il faut souligner que les politiques du Parti démocrate et du président Biden sont responsables d’enhardir les attaques de la droite contre la science et les mesures de santé publique menées dans les États républicains.
Le conseiller économique de Biden, Brian Deese, a admis que la véritable priorité dans la réouverture des écoles est la «pénurie de main-d’œuvre» due au manque de «garderies et d’écoles.» C’est sous le gouvernement de Biden que les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC) ont demandé aux personnes vaccinées de cesser de porter le masque, même s’ils avaient la preuve définitive que les personnes vaccinées peuvent contracter et propager le virus.
Quelques jours après la réouverture, les districts de la région ont signalé des centaines de cas, des épidémies et des fermetures d’écoles. À La Nouvelle-Orléans, où le port du masque est obligatoire, on a signalé 116 cas actifs lundi. Dans les écoles, 638 élèves et membres du personnel ont été placés en quarantaine, avant même l’ouverture de tous les campus. Bien que l’école soit ouverte, le ministère de la Santé de Louisiane n’a pas encore repris son suivi hebdomadaire des cas de COVID-19 de la maternelle à la terminale.
Au Mississippi, où de nombreux districts n’ont pas communiqué de données, 841 élèves et 347 membres du personnel ont été déclarés positifs depuis le 1er août. Pour la semaine se terminant le 6 août, 4.435 élèves ont été mis en quarantaine.
En Géorgie, les districts de la région métropolitaine d’Atlanta ont signalé des centaines de cas quelques jours seulement après la rentrée des classes. Les écoles du comté de Gwinnett ont signalé 166 cas en deux jours seulement. La Dre Cherie Drenzek, épidémiologiste au département de la santé publique de Géorgie, a déclaré à 11Alive qu’ils ont constaté une augmentation de 100 pour cent des cas chez les enfants âgés de 5 à 17 ans au cours des deux dernières semaines.
Comme l’indiquent les pétitions du personnel enseignant et des parents, l’hostilité à la réouverture des écoles est largement répandue. Dans le comté de Duval, en Floride (Jacksonville), 96 enseignants étaient absents le premier jour d’école, par rapport à 80 absents le premier jour de l’année scolaire précédente.
Dans tout le Sud, les hôpitaux sont débordés. Selon l’Associated Press, le Mississippi, la Géorgie, la Floride et la Louisiane comptaient pour plus de 40 pour cent de toutes les hospitalisations dans le pays le 5 août. À La Nouvelle-Orléans, une personne victime d’une crise cardiaque a été «renvoyée de six hôpitaux avant de trouver une salle d’urgence qui pouvait l’accueillir», a rapporté la National Public Radio.
Le responsable de la santé de l’État du Mississippi, le Dr Thomas Dobbs, a prévenu lundi sur Twitter que l’État s’attend à 500 nouvelles hospitalisations dans les jours à venir, mais qu’il n’y aura pas de place pour ces patients: «nous avons ZÉRO lit de soins intensifs dans les hôpitaux de niveau 1-3, et nous avons plus de 200 patients qui attendent une chambre aux urgences». De même, la Floride a dépassé mardi les 15.000 hospitalisations, le nombre le plus élevé à ce jour durant la pandémie.
Les stocks de fournitures sont faibles en Floride. L’État a demandé 300 respirateurs au gouvernement fédéral cette semaine après que les stocks de l’État aient été épuisés, selon un document du ministère de la Santé et des Services sociaux obtenu par ABC. Le gouverneur républicain Ron DeSantis – qui a affirmé ne pas être au courant de cette demande – a interdit les décrets de port du masque dans les écoles et a menacé de retenir les fonds des districts scolaires qui le défient. La Floride compte actuellement le plus grand nombre d’enfants hospitalisés à cause du COVID de tous les États.
Au Texas, tout en poursuivant une politique similaire d’interdiction des décrets de port du masque dans les écoles, le gouverneur républicain Greg Abbott a demandé l’aide de personnel extérieur à l’État, les hôpitaux étant débordés. Il a également demandé à l’Association des hôpitaux du Texas de reporter les procédures médicales électives. Les districts scolaires de tout l’État défient son interdiction concernant les masques et il fait face à de multiples poursuites pour faire annuler cette interdiction.
Le gouverneur de l’Arkansas, Asa Hutchinson, a été contraint de faire marche arrière après avoir signé un projet de loi qui interdit les directives de port du masque obligatoire au niveau de l’État et des collectivités locales. Maintenant que la loi est promulguée, il doit attendre que le projet de loi soit amendé ou que les tribunaux jugent l’interdiction inconstitutionnelle. Mardi, seuls huit lits de soins intensifs étaient disponibles dans l’État.
Le sud des États-Unis a des taux de vaccination parmi les plus bas du pays. Selon le site «Our World in Data», moins de 40 pour cent de la population des États du Mississippi, de la Louisiane, de l’Alabama, de l’Arkansas et de la Géorgie sont entièrement vaccinée. La Floride et le Texas présentent des taux légèrement plus élevés, avec respectivement 49 pour cent et 46 pour cent de personnes entièrement vaccinées. En Louisiane, seuls 13 pour cent des enfants éligibles (âgés de 12 à 17 ans) sont vaccinés. Dans l’ensemble du pays, seuls 25 pour cent des enfants éligibles âgés de 12 à 15 ans sont entièrement vaccinés, selon les données des CDC.
Les hôpitaux pédiatriques sont également à un point de rupture. Le Dr Mark Kline, médecin-chef de l’hôpital pour enfants de La Nouvelle-Orléans qui accueille des patients de toute la côte du Golfe, a déclaré à l’émission «Good Morning America» que l’hôpital attend du personnel médical fédéral pour pallier le manque de personnel: «Nous étions déjà à court de personnel, ayant perdu un certain nombre d’employés au cours de l’année 2020… La Louisiane et la région dans son ensemble connaissent une véritable pénurie de professionnels».
S’adressant au canal radio WDSU, le Dr Kline a déclaré que la moitié des 18 enfants actuellement admis dans son hôpital sont âgés de moins de deux ans. Le taux de positivité des tests pour les enfants de Louisiane est de 25 pour cent. Il a noté qu’il était «très préoccupé» par le fait que les écoles ouvrent maintenant et craint que «les mesures d’atténuation que nous avons utilisées dans le passé, y compris le port du masque, la distanciation sociale et le lavage des mains, ne soient pas aussi efficaces pour ce virus».
À l’échelle nationale, 93.824 cas de COVID-19 chez l’enfant ont été signalés au cours de la semaine se terminant le 5 août, selon l’Académie américaine de pédiatrie, et 15 pour cent de tous les nouveaux cas étaient des enfants.
Le mensonge selon lequel la réouverture des écoles en cas de pandémie est dans l'intérêt primordial du bien-être mental et social des enfants est mis à nu par les données qui continuent d’affluer sur les effets à long terme des infections au COVID-19, même «légères» ou asymptomatiques. S’exprimant sur les effets du COVID-19 sur les enfants, notamment sur les performances scolaires, le Dr Avindra Nath, chef des infections du système nerveux à l’Institut national des troubles neurologiques et des accidents vasculaires cérébraux, a déclaré au New York Times: «Ils sont dans leurs années de formation. Si l’on commence à prendre du retard, c’est très difficile parce que les enfants perdent aussi leur propre confiance en eux. C’est une spirale descendante».
En outre, des données récentes publiées dans The Lancet indiquent que les lésions cérébrales dues aux infections au COVID-19 peuvent être comparables à un accident vasculaire cérébral pour les patients hospitalisés ou à un empoisonnement au plomb pour ceux qui ont des difficultés respiratoires, mais ne nécessitent pas d’hospitalisation.
Dans les semaines à venir, tandis que les districts vont continuer de rouvrir dans le Sud et à travers les États-Unis, les éducateurs seront une fois de plus poussés à lutter: contre le gouvernement Biden qui soutient que les écoles doivent être ouvertes, contre les politiciens républicains qui interdisent les stratégies d’atténuation dans les écoles, et contre les organisations frauduleuses qui prétendent représenter le personnel enseignant.
La présidente de la Fédération américaine des enseignants (American Federation of Teachers – AFT), Randi Weingarten, et la présidente de l’Association nationale de l’éducation (National Education Association – NEA), Becky Pringle, exigent que les écoles rouvrent entièrement en personne. L’année dernière, alors que les enseignants du pays mouraient par centaines, voire par milliers, aucune des deux organisations n’a levé le petit doigt pour mobiliser leurs millions de membres dans une grève nationale afin d’empêcher la réouverture des écoles et les décès inutiles. Les centaines de débrayages sauvages et de protestations à travers les États-Unis ont été systématiquement isolés, tandis que les sections locales travaillaient avec diligence pour démoraliser les enseignants qui demandaient de l’aide. On ne peut avoir ni confiance ni espoir dans ces organisations.
Les enseignants doivent tirer les leçons de la dernière année scolaire afin de se préparer à celle qui commence. Surtout, ils doivent reconnaître que pour gagner, il faut construire de nouvelles organisations, indépendantes des syndicats et des partis politiques capitalistes. Comme l’a écrit le Parti de l’égalité socialiste dans sa déclaration: «N’envoyez pas les enfants dans des écoles dangereuses». Les enseignants et les parents doivent former des comités de base pour arrêter la campagne de réouverture des écoles et sauver la santé et la vie des enfants et des travailleurs scolaires.
Le 1er mai, le Comité international de la Quatrième Internationale a lancé l’Alliance ouvrière internationale des comités de base (IWA-RFC) afin d’organiser les travailleurs dans une offensive commune pour exercer leur force collective, changer le cours de la pandémie et mettre fin aux souffrances et aux morts inutiles. La revendication de fermeture des écoles et des lieux de travail non essentiels jusqu’à ce que la pandémie soit contenue doit être popularisée dans chaque école, usine, lieu de travail et quartier à travers les États-Unis et dans le monde. Il faut préparer dans chaque pays pour une action de grève générale à l’échelle nationale qui se combinera à un mouvement de grève coordonné au niveau mondial.
Le personnel enseignant, les parents et tous les travailleurs qui sont d’accord avec la demande de fermer l’apprentissage en personne jusqu’à ce que la pandémie soit éradiquée doivent s’inscrire aujourd’hui pour construire un comité de base dans leur région. Il n’y a pas de temps à perdre!
(Article paru en anglais le 12 août 2021)