Russie : le COVID-19 se propage, les écoles sont contraintes de fermer dans de nombreuses régions

Des enfants prennent un repas pendant une pause dans une école de Moscou, le lundi 18 janvier 2021. (AP Photo/Pavel Golovkin)

Une semaine après la rentrée scolaire du 1er septembre, des dizaines de régions de Russie signalent la fermeture de salles de classe à tous les niveaux du système éducatif, de la maternelle aux lycées, en raison d'épidémies et d'infections touchant des milliers d'enfants, jeunes et enseignants. Les familles russes sont à présent confrontées à une crise de COVID-19, dans une situation qui évolue pareillement à celle observée aux États-Unis ces dernières semaines.

À Saratov, 21 écoles, 20 crèches, trois lycées professionnels et plusieurs instituts ont dû envoyer des centaines d'étudiants et des dizaines de professeurs en quarantaine. À Vologodsky, 34 classes ont du être fermées dans 27 écoles. À Volgograd, les enfants de 28 classes sont passés à l'enseignement en ligne la semaine dernière. Dans l'Altaï, où des fermetures automatiques sont déclenchées lorsque plus de 20 pour cent des enseignants sont malades, 30 classes ont fermé dans 20 établissements. D’autres régions forcées de prendre des mesures similaires sont, sans être les seules, celles d’Adygea, Chelyabinsk, Kemerov, Ekaterinbourg, Perm, Nizhegorodsky, Krasnodar, l'Ossétie du Sud, Kouzbass et la deuxième plus grande région métropolitaine du pays, Saint-Pétersbourg.

Cette ville a enregistré ces derniers jours une augmentation rapide du nombre de patients gravement malades dont 10 à 15 hospitalisations d'enfants par jour, deux à trois fois plus qu'en janvier. Cela s'ajoute à une situation qui s'aggravait déjà pour les jeunes. En seulement trois mois cet été, Saint-Pétersbourg a connu le même nombre d'hospitalisations chez les moins de 18 ans que de mars à septembre de l'année dernière.

Le gouvernement russe ne publie pas régulièrement de statistiques officielles sur les infections à coronavirus chez les enfants, obligeant les analystes à se tourner vers les informations publiées par les agences de santé locales pour dresser un portrait de la situation. Les médias nationaux russes rendent à peine compte de la catastrophe en cours.

Juste avant la réouverture des écoles le 1er septembre, le ministère russe de la Santé a révélé qu'un demi-million d'écoliers – sur un nombre total de près de 7 millions de cas officiels – avaient déjà été infectés par le virus au cours de l'année et demie précédente. Les infections chez les nouveau-nés ont augmenté de 26 fois par rapport à l'hiver, selon le pédiatre moscovite Evgeny Timakov ; « si des adultes tombent malades dans une famille, dans 80 à 90 % des cas, les enfants tomberont également malades », a-t-il expliqué.

Dans la première moitié d’août, avant même que les écoles n'ouvrent leurs portes, la République de Sakha signalait une augmentation de 30 pour cent des cas chez les enfants, la région de Saratov une hausse de 57 pour cent chez les moins de 6 ans, et les médecins locaux de l'Altaï, du Kamtchatka et du Bachkortostan ont déclaré qu'ils voyaient plus d'enfants malades.

Aujourd'hui, la Russie est confrontée à une nouvelle vague liée à la propagation du variant Delta et à la réouverture des écoles.

La ville de Kazan, a signalé pour une seule journée dans la dernière semaine, 500 cas d'enfants atteints d'infections respiratoires. À Kouzbass, une augmentation des cas de coronavirus chez les enfants a fait basculer la région dans la « zone rouge » et entraîné une prolongation des heures d'ouverture des cliniques pédiatriques et une augmentation des services d'urgence. Cela s'ajoute à une augmentation d’infections de COVID-19 dans l'ensemble de la population en Russie cet été, qui, bien qu'en légère baisse, reste bien au-dessus des baisses précédentes avec un nombre de cas quotidiens d'environ 18 000 en moyenne au cours de la dernière semaine.

Alors que les responsables gouvernementaux cherchent en public à minimiser le danger d'une « quatrième vague », il est clair que celle-ci a déjà commencé et ils étaient bien conscients de ce qui se passerait quand des millions d'écoliers reprendraient le chemin de l’école. Le journal Nezavismaya Gazeta arapporté que les ministères de l'Éducation et des Sciences et de l'Enseignement supérieur anticipaient des transitions généralisées vers l'apprentissage en ligne à mesure que la COVID-19 se propagerait dans les écoles.

Les experts affirment que des investissements massifs dans les systèmes de filtration de l'air sont nécessaires pour arrêter la progression de la maladie, mais jusqu'à présent, la seule disposition prise dans les écoles, s’il y en a de prises, concerne l’installation de systèmes UV anti-germicides, dont l'achat est financé par les budgets des collectivités et, dans certains cas, des comités de parents. Ces efforts, ainsi que d'autres mesures d'atténuation limitées telles que le port du masque, la distanciation sociale, les contrôles de température, le nettoyage des surfaces et, dans certaines écoles, la vaccination obligatoire du personnel, ne peuvent pas transformer les écoles délabrées de la Russie en espaces sûrs.

Comme les responsables gouvernementaux et les médias l'ont fait dans le monde entier, les dirigeants russes et les principaux médias ont longtemps défendu l'idée que les enfants avaient tendance à ne pas contracter le COVID-19 et, s'ils étaient infectés, à ne pas tomber gravement malades. C'est faux. Les pédiatres de Tomsk ont récemment rapporté que 40 pour cent de leurs patients atteints de COVID-19 ont dû consulter un cardiologue, 19 pour cent un spécialiste de l'immuno-allergie et 10 pour cent un rhumatologue après une infection. Dans l'Altaï, le médecin-chef d'une polyclinique pour enfants a noté que les médecins devaient traiter les nourrissons rétablis du COVID-19 pour des complications à long terme des voies urinaires.

Les décès d'enfants dus au coronavirus, dont les données ne sont pas publiées par le gouvernement, augmenteront dans les semaines et mois à venir, à l’image de ce qui se passe dans des pays comme les États-Unis et le Royaume-Uni.

Il n'y a eu que deux décès liés au COVID-19 de signalés récemment parmi la population de moins de 18 ans dans le pays, dont un bébé de deux mois à Tula et un enfant de 12 ans à Novossibirsk ; bien que dans ce dernier cas, le ministère local de la Santé a insisté pour dire que la véritable cause était une maladie génétique sous-jacente.

Les décès quotidiens de coronavirus en Russie, entre 750 et 800 depuis la mi-juillet, ne montrent aucun signe de ralentissement malgré une faible baisse du nombre des cas. Il est de notoriété publique que ces chiffres sont une sous-estimation flagrante, les autorités attribuant systématiquement les décès dus au COVID-19 à d'autres causes si un patient présente une autre comorbidité. Des estimations indiquent que le nombre réel de morts pourrait être jusqu'à cinq fois plus élevé que les 187 000 officiellement reconnus. Le taux de mortalité dû au COVID-19 a augmenté tout au long de cette année, et juillet a été jusqu'à présent pour la Russie le mois le plus meurtrier de la pandémie avec plus de 50 000 décès liés au coronavirus.

(Article paru en anglais le 11 septembre 2021)

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