Travailleurs de Deere: formez des comités de grève pour préparer la grève dans toute l’entreprise mercredi soir!

Pour en savoir plus sur la manière de rejoindre le comié des travailleurs de base de John Deere, envoyez un courriel à deerewrfc@gmail.com ou un SMS au (484) 514-9797.

Le rejet colossal, par les travailleurs de Deere dimanche, du contrat pro-entreprise soutenu par le syndicat des «Travailleurs de l’automobile unis» (United Auto Workers – UAW), par un vote négatif à 90 pour cent, est une indication puissante que les travailleurs sont prêts et déterminés à se battre après avoir subi des décennies de concessions imposées par l’UAW.

Les travailleurs de Deere se lèvent et disent: «C’est notre heure!». Lors des réunions précédant les votes de dimanche et dans de nombreux commentaires sur Facebook, les travailleurs ont exigé la grève et dénoncé l’UAW pour avoir une fois de plus promu un contrat dicté par l’entreprise.

Un ouvrier de John Deere sur la chaîne de montage (YouTube/John Deere)

Comme le reconnaissent de nombreux travailleurs, il n’y aura peut-être plus jamais de moment aussi exceptionnellement favorable pour faire grève et obtenir de sérieuses avancées pour eux-mêmes, leurs familles, les retraités et la prochaine génération. Deere a réalisé des bénéfices records cette année et des milliards de plus depuis le dernier contrat, douteusement «ratifié» par une marge supposée de 180 voix en 2015.

L’entreprise a déjà du mal à embaucher et à conserver un nombre suffisant de travailleurs pour faire avancer son important carnet de commandes. La hausse des revenus agricoles alimente une demande encore plus forte pour les équipements extrêmement complexes et précieux que les travailleurs de Deere produisent.

Les travailleurs étant dans une position aussi forte, il est temps d’agir! Des comités de grève de la base doivent être formés dans chaque usine et entrepôt de Deere afin de préparer une grève dans toute l’entreprise mercredi soir, que l’UAW y appelle ou non. Pour qu’il y ait une lutte sérieuse, les travailleurs eux-mêmes doivent se charger de l’organiser.

L’UAW, pour sa part, n’a aucune intention de mener quelque lutte que ce soit, comme le montre son bilan des 40 dernières années et toutes ses actions dans les prétendues «négociations» avec l’entreprise cette année. Les travailleurs entrent donc dans une bataille sur deux fronts: contre Deere et contre l’UAW.

La conspiration permanente de l'UAW avec Deere

Dans une annonce laconique de trois phrases sur le rejet du contrat dimanche soir, le vice-président de l’UAW Chuck Browning, responsable des départements équipements agricoles et Ford du syndicat, a déclaré que l’équipe de négociation de l’UAW se réunissait à nouveau à Moline, dans l’Illinois, lundi, et qu’un délai pour le début de la grève était fixé à 23h59 ce mercredi 13 octobre.

Browning et ses collègues bureaucrates grassement payés sont manifestement stupéfaits et effrayés par l’ampleur de l’opposition à leur accord avec Deere, qu’ils avaient tenté de faire accepter en prétendant à tort qu’il contenait des «gains substantiels» pour les travailleurs. Maintenant ils fon traîner les choses, espérant gagner du temps et trouver un moyen d’éviter une grève et de faire passer les mêmes conditions de base exigées par l’entreprise: des augmentations de salaire inférieures à l’inflation, des attaques contre les pensions pour les nouveaux employés, et la poursuite des concessions précédentes en matière de soins de santé et de prestations de retraite.

Il n’y a aucune raison de croire que l’UAW va maintenant «comprendre le message» des 90 pour cent de votes négatifs et mettre fin à sa collusion avec Deere qui dure depuis des décennies.

Tout au long de l’année, l’UAW a tenu les travailleurs de Deere dans l’ignorance de ses négociations avec l’entreprise. Quelques minutes après l’expiration à minuit du contrat de six ans précédent, au 1er octobre, alors que les travailleurs commençaient à arrêter la production, le syndicat a annoncé une prolongation de deux semaines. L’UAW a ordonné la poursuite du travail au mépris du vote d’autorisation de grève quasi unanime de septembre.

Plus tard cet après-midi là, après que les travailleurs se soient emparés des médias sociaux pendant la nuit et la matinée pour exprimer leur indignation face à cette prolongation de dernière minute et exiger une grève, l’UAW a annoncé qu’elle était parvenue à un accord de principe avec l’entreprise qui contenait des «gains économiques importants», selon les termes de Browning.

L’UAW a gardé le secret sur les détails de l’accord, ignorant les demandes des travailleurs qui réclamaient la publication immédiate du contrat complet et une semaine pour l’étudier. Les sections locales ont répondu au mécontentement croissant par la censure pure et simple, en désactivant les commentaires sur leurs pages Facebook et en disant avec arrogance aux travailleurs que «la négativité n’est pas la bienvenue».

Lors des réunions «d’information» qui ont précédé le vote du contrat dimanche, les responsables de l’UAW ont réagi avec colère aux condamnations de l’accord par les travailleurs, insistant sur le fait qu’il s’agissait d’un «bon accord» et du meilleur accord que l’entreprise pouvait faire.

S’il restait encore des doutes sur qui l’UAW représente désormais, de telles actions devrait les dissiper une fois pour toutes. L’UAW est un représentant des entreprises, acheté et payé, qui leur sert de police du travail, qui fait respecter leurs exigences et qui passe continuellement outre la volonté démocratique des travailleurs. On ne peut se fier à rien de ce que disent les responsables de l’UAW.

Les prétendus comités de négociation nationale de l’UAW ont déjà montré qu’ils méprisaient totalement les revendications des travailleurs. À savoir: des augmentations suffisamment importantes pour compenser des années de stagnation et de gel; la fin du système d’échelons; le rétablissement des prestations de soins de santé; des pensions payées par l’entreprise pour tous les travailleurs et les retraités; et de sérieuses améliorations des conditions de travail.

Les prétendues «négociations» — en réalité il s’agit des pourparlers conspirateurs avec Deere — ont été menés par des bureaucrates de la classe moyenne supérieure tels que Browning (rémunération 2020, 204.338 dollars); le directeur de la région 8 de l’UAW, Mitchell Smith (219.086 dollars); et le directeur de la région 4 de l’UAW, Ron McInroy (214.322 dollars). Ils ont tous travaillé en étroite collaboration avec les escrocs et les corrompus du conseil exécutif de l’UAW, qui purgent aujourd’hui une peine derrière les barreaux. Le cours pro-entreprise du siège national de l’UAW a également reçu le soutien indéfectible de ses lève-mains obéissants au niveau local.

Les «négociateurs» de l’UAW vivent dans un univers complètement différent des besoins quotidiens, des intérêts, des préoccupations et de l’exploitation des travailleurs qu’ils prétendent représenter. Les travailleurs doivent exiger leur démission immédiate et leur remplacement par des délégations de travailleurs de confiance, élus parmi la base de chaque site de Deere, y compris les travailleurs expérimentés, les nouveaux employés et les retraités.

Les travailleurs de Deere sont dans une position extrêmement forte, et pas seulement en raison de la pénurie actuelle de main-d’œuvre et des bénéfices records de l’entreprise. Le rejet massif du contrat dimanche est le dernier d’une série de votes de ce type cette année, les travailleurs défiant en nombre croissant les accords de concession soutenus par le syndicat. Parmi les plus notables, citons:

  • «Warrior Met» en Alabama, où les mineurs de charbon ont rejeté un accord soutenu par l’UMWA par 1.006 voix contre 45 en avril et sont en grève depuis lors.
  • Volvo Trucks en Virginie, où les travailleurs ont rejeté trois accords de concessions soutenus par l’UAW entre mai et juillet.
  • Frito-Lay à Topeka, où les travailleurs ont rejeté quatre contrats proposés par le syndicat BCTGM.
  • Dana Cie, un fabricant de pièces automobiles et fournisseur de Deere, où les travailleurs ont également rejeté à 90 pour cent un contrat de concession. Le contrat a été soutenu par l’UAW et le syndicat des métallurgistes USW à la fin du mois d’août.

Les leçons de la lutte chez Volvo

L’expérience vécue chez Volvo Trucks au début de l’année est particulièrement cruciale à étudier pour les travailleurs de Deere, afin de comprendre quelle est la stratégie de l’UAW et comment la combattre.

Chez Volvo, l’UAW avait initialement appelé à une grève limitée de deux semaines en avril, avant d’annoncer un accord de principe et de mettre fin à la grève sans organiser de vote sur l’accord ni même en divulguer les détails. Les travailleurs de Volvo ont été outrés d’apprendre quelques jours plus tard que les «gains économiques importants» annoncés par l’UAW étaient en fait des augmentations de salaire inférieures à l’inflation, des augmentations importantes des coûts des soins de santé, le maintien du système de niveaux et des attaques importantes sur les conditions de travail.

Après que les travailleurs ont rejeté cet accord à 90 pour cent, et un accord pratiquement identique également soutenu par le syndicat quelques semaines plus tard. L’UAW a estimé qu’elle n’avait pas d’autre choix que d’appeler à une deuxième grève en juin. Elle l’a fait, cependant, pour éviter une rébellion totale des travailleurs et dans le but de saboter la grève.

L’UAW a maintenu un black-out total sur la lutte, la dissimulant aux ouvriers de l’automobile et aux autres travailleurs, de peur qu’ils ne s’inspirent de la position courageuse des grévistes de Volvo.

L’UAW a délibérément limité la grève à l’usine Volvo de New River Valley en Virginie, refusant d’appeler les travailleurs des usines Mack Trucks appartenant à Volvo dans le Maryland et en Pennsylvanie, malgré les appels persistants à une action conjointe des travailleurs.

En même temps, l’UAW a utilisé son contrôle du fonds de grève de près de 800 millions de dollars pour étrangler économiquement la lutte, affamant les travailleurs sur les piquets de grève avec 275 dollars par semaine d’indemnités de grève. Cette situation s’est produite alors que des centaines de responsables et d’employés de l’UAW à la mal nommée «Solidarity House» continuaient à percevoir leurs salaires à six chiffres.

Pendant tout ce temps, le secrétaire-trésorier de l’époque, Ray Curry, qui dirigeait le département des poids lourds de l’UAW, a joué le rôle de principal conspirateur. Il a supervisé les pourparlers et il a signé chaque contrat favorable à la compagnie, déclarant que chacun d’entre eux était «le meilleur qu’ils allaient obtenir». Au milieu de la deuxième grève de Volvo, en juillet, Curry a pris la présidence de l’UAW.

De l’autre côté, le Comité des travailleurs de base de Volvo a joué un rôle central dans le rassemblement de l’opposition à l’entente entre la compagnie et l’UAW. Le comité s’est efforcé de briser l’isolement imposé à la grève, en faisant appel au soutien de Mack Trucks et des travailleurs de l’automobile, ainsi que des travailleurs de Volvo à l’échelle internationale. Cet appel a trouvé une réponse initiale puissante, puisque les travailleurs de Volvo en Belgique ont lancé une grève sauvage contre un accord secret conclu par le syndicat belge pour allonger leur semaine de travail, peu après avoir appris la lutte de leurs collègues en Virginie.

Après que les grévistes de Volvo ont rejeté un troisième accord entre l’UAW et l’entreprise, et alors que la lutte menaçait de s’étendre, le syndicat a conspiré avec l’entreprise pour imposer un nouveau vote sur le même contrat quelques jours plus tard. Au mépris total des droits démocratiques des travailleurs, l’entreprise et l’UAW ont déclaré que le contrat serait imposé, quel que soit le résultat du vote.

L’opposition à l’accord est néanmoins restée intense parmi les travailleurs. Le 14 juillet, après un retard inexpliqué de plusieurs heures, l’UAW a déclaré que l’accord avait été ratifié par une marge de seulement 17 voix sur plusieurs milliers, et a ensuite ignoré tous les appels à un recompte ou à un autre vote. Si l’UAW a pu faire respecter l’accord dans l’immédiat, par l’intimidation et les mensonges, elle l’a fait au prix d’un discrédit encore plus grand, et les travailleurs de Volvo sont retournés à l’usine de New River Valley d’humeur défiante.

Formez des comités de grève de la base!

Les plus de 10.000 travailleurs de Deere constituent un puissant bataillon de la classe ouvrière industrielle. Ils doivent reconnaître qu’ils se préparent à entrer dans la guerre de classe plus large qui se développe alors que les travailleurs aux États-Unis et dans d’autres pays prennent position contre les demandes incessantes des entreprises pour l’accélération des cadences et les nouvelles attaques sur les salaires et les avantages sociaux.

Les conditions contre lesquelles luttent les travailleurs de Deere ont été fortement intensifiées par les conséquences de la réponse désastreuse de la classe dirigeante à la pandémie de COVID-19. Alors que les travailleurs de Deere ont été désignés comme «essentiels» depuis l’apparition du coronavirus, afin que l’entreprise puisse continuer à produire des équipements et à augmenter ses profits, l’attitude réelle des dirigeants de l’entreprise, ainsi que de l’UAW, a été mise en évidence par leur proposition de contrat insultante, ainsi que par leur indifférence croissante face à la propagation du COVID-19 sur le lieu de travail.

Les pénuries de semi-conducteurs et les autres perturbations de la chaîne d’approvisionnement déclenchées par la pandémie se poursuivent, poussées par l’anarchie de la production capitaliste. Devant le refus des gouvernements et des grandes entreprises du monde entier de mettre en œuvre les politiques nécessaires à l’éradication du virus, la crise de la pandémie s’approfondit. Déterminées à isoler leurs profits de l’impact de leurs propres politiques criminelles, Deere, leurs bailleurs de fonds de Wall Street et l’élite des entreprises dans son ensemble sont maintenant déterminés à contenir et à faire baisser les coûts de main-d’œuvre et à intensifier l’exploitation des travailleurs.

Les travailleurs de Deere ont cependant des alliés bien plus forts et plus nombreux. Il y a des centaines de milliers et des millions de travailleurs aux États-Unis et dans le monde qui cherchent un moyen de mettre fin aux bas salaires et aux conditions de travail intolérables. Cela inclut les dizaines de milliers de travailleurs de Deere au Mexique, au Brésil, en Allemagne, en Inde et dans d’autres pays. Il s’agit également des 3.500 travailleurs de Dana spécialisés dans les pièces automobiles que l’UAW et l’USW continuent de maintenir au travail grâce à une prolongation de contrat au jour le jour, ainsi que des travailleurs d’autres fabricants d’équipements agricoles et lourds tels que Caterpillar, Case IH et Volvo.

Les travailleurs de Deere doivent faire appel à leurs frères et sœurs de toutes ces entreprises et d’autres pour obtenir un soutien et une lutte commune. Mais la mobilisation de cette immense force sociale nécessite de nouvelles organisations, des comités d’usine de la base, indépendants des syndicats pro-entreprises.

Les travailleurs de Deere ont déjà franchi les premières étapes cruciales en créant la semaine dernière le Comité de la base des travailleurs de Deere. Le comité a publié une déclaration à l’approche du vote appelant au rejet du contrat, qui a été lue des milliers de fois, et qui posait les exigences minimales suivantes pour qu’un accord soit acceptable:

  • La fin immédiate du système d’échelons en rétablissant des soins de santé et des pensions entièrement payés pour tous les travailleurs
  • Une augmentation générale des salaires de 30 pour cent pour compenser les années de gel et de stagnation des salaires
  • Une clause d’indexation annuelle sur le coût de la vie pour suivre l’inflation
  • Des prestations de soins de santé entièrement payées pour les retraités et leurs veuves, sans co-paiements ou primes
  • L’abolition du régime d’amélioration de la productivité (CIPP), sans perte de salaire
  • Pas d’heures supplémentaires obligatoires, afin que nous ayons du temps à consacrer à nos familles, et une rémunération à taux et demi pour les heures supplémentaires volontaires au-delà de huit heures et les week-ends.
  • La supervision par les travailleurs des protocoles de sécurité afin d’arrêter la propagation du COVID-19. Le droit d’arrêter la production et de fermer l’usine pour un nettoyage complet, avec une compensation garantie aux travailleurs pour tout le temps manqué en cas d’épidémie de COVID-19.

Ce comité doit maintenant être élargi, en établissant des liens et en se coordonnant avec les comités de grève de la base sur chaque lieu de travail de Deere. Ces comités constitueront un moyen essentiel pour les travailleurs de partager des informations et de contourner la censure et le black-out de l’UAW. Ils leur permettront de développer et d’exécuter une stratégie basée sur les besoins des travailleurs et non sur les intérêts de l’entreprise.

Nous invitons les travailleurs à s'informer sur la possibilité de rejoindre le Comité des travailleurs de la base de John Deere. Envoyez un courriel à deerewrfc@gmail.com ou un SMS au (484) 514-9797.

(Article paru d’abord en anglais le 12 octobre 2021)

Loading