Malgré des taux d’infection record et le fait que le variant hautement contagieux Omicron se propage, le gouvernement fédéral et ceux des Lands poursuivent sans relâche la politique du «profit avant la vie». Ils sacrifient volontairement des dizaines de milliers de personnes dans l’intérêt des marchés financiers. C’est ce qu’ont réaffirmé les conclusions de la conférence des ministres-présidents des Lands, qui s’est tenue jeudi.

Le taux d’infection en Allemagne est désormais si élevé qu’il peut difficilement être calculé. Selon les chiffres officiels, plus de 70.000 personnes sont infectées par le coronavirus chaque jour. Toutefois, étant donné qu’un test PCR sur cinq est actuellement positif et que les laboratoires travaillent à plus de 80 pour cent de leur capacité, le nombre réel des cas est sans aucun doute bien plus élevé.

L’Institut Robert Koch (RKI), l’agence allemande de contrôle et prévention des maladies, avertit dans son rapport hebdomadaire: «il est à craindre que le nombre de maladies graves et de décès augmentera encore et que les capacités de traitement médical intensif disponibles seront dépassées». La situation dans les cliniques est déjà catastrophique.

Actuellement, 4.690 patients atteints du coronavirus reçoivent des soins intensifs, un nombre qui a plus que doublé en un mois à peine. Plus de la moitié de ces patients sont sous respiration artificielle. De nombreux hôpitaux ont atteint leur limite et les ambulances doivent de plus en plus souvent s’adresser à plusieurs cliniques avant de trouver une capacité de soins intensifs. Des patients sont transportés par avion dans tout pays pour être soignés. Trois hôpitaux allemands sur quatre reportent les opérations chirurgicales prévues.

Le nombre de décès quotidiens reste lui aussi dramatiquement élevé. Avec environ 400 décès par jour, il dépasse celui de février dernier. Et comme le nombre de décès est décalé par rapport aux nouvelles infections, on s’attend à un nombre de morts encore plus élevé dans les jours à venir.

Parallèlement, tous les partis politiques présents à la conférence conjointe du gouvernement et des Lands ont affiché leur détermination à ne prendre aucune mesure pour mettre fin à cette mortalité massive. La résolution adoptée porte principalement sur la vaccination. Les capacités de vaccination doivent être étendues, la vaccination obligatoire discutée et les régimes «2G» (vacciné ou guéri) et «2G Plus» (vacciné ou guéri plus test négatif actuel) doivent être introduits à l’échelle nationale.

La vaccination est une arme importante dans la lutte contre la pandémie, mais son efficacité dépend de son intégration dans une stratégie globale de santé publique qui vise à contenir et, à terme, à éliminer le virus. Sans une telle stratégie, les vaccinations ne peuvent pas mettre fin aux décès massifs à court terme ni éliminer le risque de voir se développer de nouvelles mutations qui compromettent la vaccination même.

Le nouveau variant Omicron en est un exemple. Mardi matin, le Financial Times a publié une interview de Stéphane Bancel, directeur du fabricant de vaccins Moderna, dans laquelle il mettait en garde: «Il n’y a pas de monde, je pense, où [l’efficacité] est au même niveau… que celui que nous avions avec Delta». Il a ajouté: «Je pense qu’il va y avoir une forte baisse. Je ne sais pas de combien, car nous devons attendre les données. Mais tous les scientifiques à qui j’ai parlé… disent que ça ne va pas être bon».

De plus, la protection conférée par le vaccin diminue fortement après cinq ou six mois, même avec le variant Delta. Selon le RKI, seuls un peu plus de 10 millions d’Allemands (12,5 pour cent) ont reçu le vaccin de rappel nécessaire. Les conséquences sont désastreuses: aujourd’hui encore, environ 46 pour cent de tous les décès dus au coronavirus en Allemagne sont dus à des infections post-vaccinales.

Malgré ce risque évident de contagion, même parmi les vaccinés, les gouvernements continuent de tolérer les rassemblements de masse. Tant que seuls 50 pour cent de la capacité est utilisée, jusqu’à 5.000 spectateurs sont encore autorisés pour les événements en salle et jusqu’à 15.000 en plein air. Les clubs et discothèques ne doivent pas fermer avant que l’incidence locale n’atteigne 350 cas pour 100.000 personnes. Les fêtes privées sont autorisées à des niveaux d’incidence encore plus élevés si le nombre de participants est limité à 50 personnes à l’intérieur et à 200 personnes à l’extérieur.

Le caractère criminel de cette politique est particulièrement évident dans le contexte des écoles. Alors que les écoles sont les moteurs de la pandémie depuis le début, le seul règlement adopté jeudi est le «rétablissement» du port obligatoire du masque pour tous les niveaux scolaires. Cependant, comme la grande majorité des écoles l’appliquent déjà, cette réglementation n’aura pratiquement aucun impact sur l’aggravation de l’incidence des infections parmi les élèves. L’incidence chez les jeunes de 5 à 14 ans est supérieure à 1000 depuis plus d’une semaine.

Des millions d’élèves non vaccinés continuent donc à être exposés au virus sans pratiquement aucune protection. La grande majorité des salles de classe n’étant pas équipées de filtres à air, les fenêtres doivent être ouvertes pour la ventilation même en hiver, dans la mesure où elles ouvrent. En raison des classes surchargées, il est impossible de maintenir les distances en classe. Ceux qui sont déjà vaccinés n’ont souvent même pas le droit d’être testés à l’école, ce qui favorise encore la propagation du virus.

La semaine dernière, le nombre d'élèves infectés a augmenté de plus de 20 000 pour atteindre environ 93 500, sans compter les 7 300 cas de coronavirus parmi les enseignants. Au total, il y a eu officiellement plus de 1 540 épidémies scolaires au cours des quatre dernières semaines. Le nombre réel est bien plus élevé car, selon le RKI, les deux dernières semaines ne peuvent pas encore être évaluées en raison des retards dans la notification. Dans le Land de Mecklembourg-Poméranie occidentale, le nombre d'infections dans les écoles a doublé au cours de la semaine écoulée. Le nombre de décès confirmés dus au COVID-19 chez les moins de 20 ans est passé à 35.

Malgré les dangers et les conséquences incalculables pour toute une génération, la classe dirigeante persiste dans sa politique de contagion massive dans l’intérêt du profit capitaliste.

En début de la semaine dernière, la nouvelle ministre de l'Éducation, Bettina Stark-Watzinger (FDP), s'est à nouveau prononcée contre les fermetures d'écoles et a clairement indiqué que c'était la ligne de conduite de tous les partis du Bundestag (Parlement). «Nous n'avons pas prévu de fermetures d'écoles dans la loi sur la protection contre les infections, même pour l'instant, car il y a un consensus entre les partis sur le fait que ce n'est pas la bonne voie à suivre», a-t-elle déclaré dans l'émission télévisée «ntv Frühstart». Elle a rejeté même les mesures minimales telles que le début anticipé des vacances de Noël.

Les syndicats sont particulièrement véhéments dans leur plaidoyer en faveur d’écoles ouvertes. «Maintenant, dans la quatrième vague, les établissements d’enseignement doivent être soutenus sans condition si nous voulons qu’ils restent ouverts le plus longtemps possible», a déclaré Maike Finnen, la présidente du syndicat de l’enseignement GEW après la conférence de jeudi. Mardi, le GEW avait publié un communiqué de presse intitulé «Garder les écoles ouvertes le plus longtemps possible».

Pour sauver des vies et mettre fin à la pandémie, les travailleurs et les jeunes doivent intervenir de manière indépendante dans le processus politique et faire appliquer les mesures d’urgence suivantes:

• Toute production non essentielle doit être immédiatement arrêtée jusqu’à ce que la maladie soit maîtrisée. Tous les travailleurs doivent recevoir un salaire à 100 pour cent, soit pour le travail à distance, soit, lorsque celui-ci est impossible, pour compenser entièrement la perte de revenu.
• Tous les commerçants, artisans indépendants, prestataires de services et petits entrepreneurs doivent recevoir une compensation complète pour toutes pertes de revenus résultant de l’arrêt de la production non essentielle.
• Tout enseignement en présentiel doit être immédiatement suspendu et remplacé par un enseignement à distance. Des milliards d’euros doivent être débloqués pour que chaque enfant et adolescent dispose de son propre ordinateur portable moderne et d’un service Internet à haut débit, ainsi que d’un environnement d’apprentissage sûr, spacieux et confortable à domicile.
• Le système public de santé doit être massivement développé et des dizaines de milliers de coordinateurs sanitaires engagés. Toute personne infectée par le virus ou exposée au virus, doit pouvoir accéder immédiatement et en temps voulu au personnel sanitaire, aux infirmières et médecins qui peuvent surveiller ses symptômes et l’aider à se mettre en quarantaine en toute sécurité, sans infecter d’autres personnes.
• Des milliers de milliards de dollars doivent être alloués à la création d’un programme mondial de vaccination. La distribution des vaccins doit être administrée par des scientifiques et des experts sanitaires qu seront mandatés pour protéger le monde entier.

En luttant pour ces revendications, les travailleurs et les jeunes doivent s’unir au sein de Comités d’action indépendants pour la Sécurité des lieux de travail et de l’éducation. Ce mercredi à 20 heures, le réseau allemand des Comités d’action tiendra sa prochaine réunion en ligne pour discuter des tâches politiques et organisationnelles nécessaires pour lutter contre la pandémie. Inscrivez-vous (en allemand) et invitez vos collègues, amis et connaissances intéressés à cet événement important.

(Article paru d’abord en anglais le 6 décembre 2021)