«Nous devons nous unir en tant que classe et vous défendre»

Les travailleurs de Kellogg’s bénéficient d’un large soutien pour avoir défié la trahison du syndicat et les menaces de bris de grève

Après que les 1.400 travailleurs de Kellogg’s en grève ont rejeté le contrat proposé par le syndicat BCTGM, les travailleurs de différentes industries à travers le pays appuient avec enthousiasme leur position courageuse.

Travailleur en grève à Memphis, Tennessee (Photo: BCTGM)

Les travailleurs de Kellogg’s dans quatre usines à Omaha, au Nebraska, Battle Creek, au Michigan, Lancaster, en Pennsylvanie, et Memphis, au Tennessee, sont en grève depuis deux mois contre le géant multinational de l’agroalimentaire. Lors d’un vote tenu en début de semaine, ils ont rejeté un contrat soutenu par le syndicat, qui prévoyait des augmentations bien inférieures au taux d’inflation. Les travailleurs veulent en particulier abolir le système à deux niveaux, qui verse aux travailleurs dits «transitoires» des salaires et des avantages bien inférieurs à ceux des travailleurs «de l’ancien régime».

Après cette puissante réprimande adressée à la fois au BGTGM et à l’entreprise, Kellogg’s a annoncé qu’elle allait de l’avant avec son projet d’engager des briseurs de grève pour remplacer les travailleurs dont bon nombre travaillent depuis des décennies à produire des bénéfices pour la multinationale basée à Battle Creek. Pour exprimer l’hostilité de la population à l’égard de ces briseurs de grève, les utilisateurs de Reddit aux États-Unis et dans le monde ont inondé jeudi l’entreprise de fausses demandes d’emploi afin de perturber les efforts de Kellogg’s d’embauche de briseurs de grève.

Un travailleur de Kellogg’s a déclaré au WSWS que l’accord soutenu par le syndicat «était un cheval de Troie. Ils ne vous disent pas que la transition d’un régime à l’autre était plus longue que le contrat de cinq ans». Parmi les messages publiés sur les médias sociaux avant le vote, un autre travailleur Kellogg’s a déclaré: «On ne nous dit jamais vraiment sur quoi on vote, jusqu’à ce qu’on accepte puis qu’on lise le texte complet et qu’on se rende compte qu’on s’est encore fait avoir. Comment pensez-vous que nous nous sommes retrouvés dans cette situation en premier lieu? Ne vous précipitez pas. Comprenez ce que vous acceptez. Vous devrez vivre avec pendant les prochaines années».

Andy, un travailleur de Kellogg’s en grève, a écrit: «C’est honteux que je doive même voter sur cette entente absolument POURRIE»! Ken, un autre travailleur, a abondé dans le même sens: «“Honteux” est l’une de mes pensées également. Ken Hurley [responsable des relations de travail chez Kellogg’s] s’associe avec le BCTGM et c’est sur cela que nous votons?» Kimberly a ajouté, à propos de la trahison du syndicat: «Je me demande qui s’est fait graisser la patte!»

Travailleurs de Kellogg’s à Battle Creek, au Michigan (Photo: BCTGM)

Appui venant des travailleurs de l’automobile et de John Deere

Dans des commentaires adressés au WSWS, des travailleurs de tout le pays ont exprimé leur solidarité avec les travailleurs de Kellogg’s. Un ouvrier automobile de Detroit a déclaré: «Un message aux travailleurs de Kellogg en grève. Votre lutte est notre lutte. Partout, les travailleurs en ont assez des politiques d’entreprise qui les obligent à travailler plus longtemps pour un salaire de plus en plus bas. En tant qu’ouvrier de l’UAW, je peux vous dire de première main que notre comité de négociation international a manipulé directement les membres pour faire passer un contrat pro-entreprise qui a supprimé des protections vitales telles que le paiement des heures supplémentaires.

«Aussi ridicule que cela puisse paraître, nous avons été FORCÉS de travailler sept jours consécutifs de 12 heures – tout en SUPPRIMANT LA RÉMUNÉRATION DES HEURES SUPPLÉMENTAIRES en laissant l’entreprise répartir les heures sur deux «périodes de paie». Un détail qui a été commodément omis de nos «faits saillants». Même si c’est contraire à la loi, personne au ministère du Travail ou au Conseil national des relations du travail (National Labor Relations Board – NLRB) n’a l’intention de défendre les travailleurs. Ils refusent catégoriquement de reconnaître quelque faute que ce soit.

«En tant que travailleurs, nous sommes seuls face à ces géants de l’entreprise qui possèdent notre gouvernement. La seule chose qui puisse mettre fin à cette domination tyrannique sur la classe ouvrière, c’est que les travailleurs eux-mêmes s’organisent depuis l’atelier jusqu’en haut».

Un membre du comité de la base de l’usine Faurecia Gladstone à Columbus, dans l’Indiana, a dénoncé l’assaut briseur de grève chez Kellogg’s. «Nous avons vu cela dans une grève après l’autre. Les syndicats imposent des contrats après que la classe ouvrière les ait refusés. Les travailleurs de Kellogg’s doivent former un comité de la base. Tous les comités de base doivent se mobiliser et parler à leurs membres et appuyer les gens de Kellogg’s et arrêter cela.

«Peut-être que tous les comités de base du monde entier devraient demander à leurs membres de débrayer pendant une journée. Ils veulent nous menacer de nous licencier et de nous remplacer. Nous devons nous en prendre à eux avant qu’ils ne s’en prennent à nous.

«C’est un problème mondial. Nous devons organiser un débrayage mondial et voir ce que les capitalistes en pensent. Nous, la classe ouvrière, avons le pouvoir. Ils sont peu nombreux. Nous sommes nombreux. Et nous pouvons y arriver. Nous devons juste nous coordonner, nous rassembler et mettre la classe capitaliste à genoux. Ça n’a plus aucun sens.

«Nous devons confier aux comités de base la responsabilité de veiller à ce que les travailleurs soient pris correctement en charge, au lieu de permettre aux syndicats d’agir comme les forces de police des entreprises. Travailler 12 ou 18 heures par jour, sept jours sur sept, c’est inhumain! C’est de l’esclavage, et nous avons aboli l’esclavage il y a bien longtemps».

Un ouvrier automobile de l’usine Mack Truck à Allentown, en Pennsylvanie, a également exprimé son soutien aux travailleurs de Kellogg’s en grève. «Je fais partie du comité de base des travailleurs de Mack», a-t-il déclaré. «Je voulais vous dire à tous que je suis très fier de la lutte que vous avez été prêts à mener pour vos collègues travailleurs de Kellogg’s, de la grève pour abolir un système injuste d’échelons, et de la lutte que vous menez pour améliorer les choses pour la classe ouvrière.

«C’est vous qui menez ce combat, et pour l’instant vous êtes seuls. Le BCTGM n’a pas fait d’effort sérieux en votre nom, car un effort sérieux aurait permis d’atteindre le reste de la classe ouvrière pour obtenir un soutien. Le syndicat BCTGM n’a pas fait cela.

«Je suis votre grève à travers le WSWS et je veux que tous ceux avec qui je travaille fassent grève avec vous. Je veux que les travailleurs du monde entier reconnaissent que les attaques contre vous tous sont des attaques contre nous tous. Nous avons le pouvoir d’arrêter Kellogg’s si nous sommes assez nombreux à nous lever et à le faire. Nous devons nous rassembler en tant que classe et vous défendre».

Parlant des trahisons des syndicats, il a ajouté: «L’UAW a également trahi nos collègues plus tôt cette année. Ils nous ont obligés à manipuler des cabines de briseurs de grève lorsque les travailleurs qui les peignent normalement à l’usine Volvo de New River Valley, en Virginie, se sont mis en grève. Ils avaient aussi une “représentation syndicale” et ils ont été trahis. Notre syndicat, l’UAW, a orchestré la trahison et le vôtre vous fait la même chose.

«Le syndicat BCTGM a fait une tentative dégoûtante pour creuser un fossé entre vous et les travailleurs de Kellogg’s au Mexique, au lieu de vous unir à eux pour apporter plus de puissance à votre grève. Nous pouvons empêcher ces entreprises de profiter de nous, mais c’est nous qui devons le faire. Ce ne sont pas les syndicats ou les politiciens qui vont le faire à notre place. Nous devons créer des comités de la base, commencer à communiquer entre nous et coordonner nos efforts. Nous pouvons gagner ensemble».

Un travailleur de John Deere à Waterloo, dans l’Iowa, a déclaré: «L’entreprise va tout mettre en œuvre pour vous faire peur. Mon conseil serait de vous entendre avec vos collègues et de rester forts. Ne laissez pas le syndicat jouer à ses petits jeux d’esprit avec vous».

Un vétéran de Deere à Ottumwa, dans l’Iowa, a ajouté: «J’ai lu que certains travailleurs actuels de l’échelon inférieur ne seront pas autorisés à passer aux salaires supérieurs avant des années. C’est ridicule et effrayant quand une entreprise se soucie aussi peu de ses employés.» Partout, les entreprises veulent avoir «juste des paysans et leurs maîtres», a-t-il dit.

Il a encouragé les grévistes à se serrer les coudes, ajoutant qu’ils avaient besoin du soutien des camionneurs et des travailleurs des fournisseurs de Kellogg’s pour soutenir leur lutte.

Le soutien des travailleurs de Nabisco et de Frito-Lay

Les travailleurs de Nabisco et de Frito-Lay, dont les grèves ont été trahies par le BCTGM au début de l’année, ont exprimé leur soutien aux travailleurs de Kellogg’s. Un travailleur de Nabisco en Virginie a mis en garde contre la trahison du syndicat: «Continuez à défendre ce que vous pensez mériter». Il s’est réjoui du rejet de l’accord de capitulation, notant: «C’est ce que nous aurions dû faire».

Alors que l’on a dit aux travailleurs de Nabisco que le contrat de capitulation qu’ils ont été forcés d’accepter par le syndicat était une «victoire», les travailleurs ont déclaré au WSWS que le contrat n’a apporté aucun gain. En fait, le travailleur de Nabisco en Virginie a déclaré: «C’est toujours la même routine. Nous travaillons sept jours par semaine avec des équipes de 16 heures. C’est la même chose qu’avant la grève. L’entreprise fait ce qu’elle veut. Il n’y a eu que des formes de représailles depuis que nous sommes revenus.»

Un travailleur de Frito-Lay, trahi par le BCTGM plus tôt cette année, a applaudi les grévistes. «Restez forts et continuez le combat. N’abandonnez pas. Sachez que vos frères et sœurs des autres industries sont conscients et qu’ils vous soutiennent. Le système à deux niveaux vise à maintenir les travailleurs divisés. C’est votre droit de le rejeter. Cela montre que vous vous souciez de votre avenir et de ceux de vos collègues.

«Quand j’écoute les travailleurs de Kellogg’s, je vois ma propre expérience chez Frito-Lay: de longues heures, un faible salaire, des conditions dangereuses, un rythme élevé. Je compatis avec eux. Cela ne fait que renforcer ma conviction que nous sommes tous solidaires. Il n’y a aucune préoccupation pour la sécurité des travailleurs avec la pandémie de COVID-19. Les masques ne sont pas imposés. Au contraire, ils sont activement découragés par la direction. La formation est limitée au strict minimum. On s’attend à ce que les personnes s’acquittent de leurs tâches presque immédiatement avec très peu de formation, ce qui ne fait que contribuer à des conditions dangereuses. C’est une porte tournante. C’est le genre de travail pour lequel la plupart des gens qui ont travaillé toute leur vie ne peuvent supporter plus de six mois maximum, et ce, dans les meilleures circonstances.

«Pour les personnes qui ont une famille, des enfants, c’est un sérieux défi. La dernière chose qu’ils veulent, c’est la stabilité des travailleurs avec un roulement constant. Cela crée encore plus de division entre les travailleurs, ça sème la méfiance et encourage les conflits. Bien sûr, l’entreprise a fait de tout cela une science. Si elle peut tirer 90 jours de vous, elle sera satisfaite. Je me suis senti exploité à l’extrême. Quand vous regardez autour de vous et que vous voyez vos collègues de travail, les dommages, les dommages mentaux et physiques, vous vous brisez le corps. Et pour quoi faire? Pour la richesse de l’entreprise et de quelques privilégiés?

«Le nationalisme anti-mexicain du BCTGM doit également être rejeté d’emblée. En tant que travailleur, vous devriez vous demander quelles différences j’ai avec mes collègues mexicains. Passez outre la propagande du syndicat et du gouvernement. Mes collègues travailleurs de Kellogg’s: ignorez Bernie Sanders et les politiciens. Vous avez bien plus d’intérêts communs avec vos frères et sœurs mexicains que de différences.

«Vous devez continuer à étendre la lutte au-delà de votre lieu de travail. Nouez des liens avec d’autres comités de la base, pas seulement dans votre secteur, mais dans le monde entier. Vous devez prendre conscience du pouvoir que vous possédez lorsque vous travaillez collectivement. Il est plus grand que tout ce que l’entreprise et le gouvernement peuvent vous jeter à la figure. Ce ne sera pas facile. Ce sera difficile, mais ça doit arriver. Nous entrons dans la troisième année d’une pandémie et nous sommes confrontés au spectre d’une guerre mondiale et du fascisme. Nous n’avons pas le luxe de laisser la prochaine génération régler cela. Créez immédiatement un comité de base dans vos usines. Faites passer le mot à tous vos collègues de travail».

Pour défendre les travailleurs de Kellogg’s, rejoignez le réseau national et international des comités de la base, qui ne cesse de s’étendre.

(Article paru en anglais le 10 décembre 2021)

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