La grève nationale des employés du secteur public sri-lankais exige la démission du président

Des centaines de milliers d’employés de l’État ont organisé vendredi une grève et des manifestations dans toute l’île pour demander la démission du président Gotabhaya Rajapakse et de son gouvernement. Ils s’opposent également aux pénuries et aux augmentations massives des prix. Le front syndical organisateur a affirmé qu’environ un demi-million de personnes ont participé à la manifestation.

Des employés de l’administration publique, des agents de développement et des travailleurs du secteur de la santé figuraient parmi les participants. Des manifestations ont eu lieu dans plusieurs districts, dont Anuradhapura, Polonnaruwa, Rathnapura, Monaragala, Kandy, Matara, Kurunegala et Colombo.

Des travailleurs du secteur public défilent à Kandy le 8  avril [Image : Facebook-Development Officers Service Union].

Cette grève, qui fait suite à des manifestations antigouvernementales dans tout le pays, est significative. Elle indique que la classe ouvrière soutient la lutte pour évincer le régime Rajapakse.

Le mouvement de protestation est entré dans sa deuxième semaine. Les travailleurs, les femmes au foyer, les étudiants des universités et des écoles organisent quotidiennement des manifestations et des marches dans de nombreuses régions du pays. Ils se trouvent poussés par des conditions sociales intolérables et des attaques contre les droits démocratiques. Des millions de personnes souffrent de l’inflation galopante, des pénuries de carburant et d’autres produits de base, et des coupures d’électricité quotidiennes.

Vendredi, de nombreux travailleurs du secteur public ont brandi des pancartes écrites à la main et ont scandé des slogans tels que: Le président rentre chez lui! Chassons le gouvernement! Ne permettez pas le racisme! Arrêtez l’augmentation des prix des biens et la pénurie de produits de base!

The Friday protest was called by Trade Union Coordinating Centre (TUCC), a collective of four dozen unions. Some unions are controlled by the Janatha Vimukthi Peramuna (JVP) while others posture as independent.

La manifestation de vendredi a été convoquée par le Centre de coordination des syndicats (Trade Union Coordinating Centre – TUCC), un collectif de quatre douzaines de syndicats. Certains syndicats sont contrôlés par le parti Janatha Vimukthi Peramuna (JVP) tandis que d’autres se présentent comme indépendants.

Des travailleurs du secteur public manifestent à Kuruvita à Ratnaputa [Image : Facebook Development Officers Service Union].

Les syndicats ont été contraints d’appeler à la grève en raison de la pression généralisée exercée par leurs membres pour qu’ils se joignent aux manifestations antigouvernementales. Le TUCC a cependant tout fait pour limiter l’action. Certains employés ont été appelés à faire grève tandis que d’autres étaient invités à porter des brassards noirs pour montrer leur opposition au gouvernement.

Le TUCC a appelé à la manifestation, non pas pour organiser une véritable lutte des travailleurs pour évincer le gouvernement, mais pour détourner la colère des travailleurs et prévenir le développement d’un tel mouvement.

Ravi Kumudesh, le président de la Fédération des professionnels de la santé, s’exprimant à Colombo, a tonné: «Le gouvernement doit partir!» Cependant, dans le même souffle, il a déclaré qu’il devait être remplacé par un gouvernement auquel «on peut faire confiance et qui gouverne sur la base du parlement». Si le gouvernement ne démissionne pas, il a prévenu que les syndicats «descendront dans la rue après le Nouvel An [les 13 et 14 avril] et rejoindront la lutte du peuple».

Wasantha Samarasinghe, du syndicat «Inter Company Workers Union», dirigé par le JVP, a fait écho à Kumudesh en disant: «Rentrez chez vous, donnez une chance aux gens de choisir une gouvernance selon leurs souhaits». Il a averti: «Si le gouvernement ne part pas, la classe ouvrière entrera en lutte après le nouvel an».

Ces déclarations sont une imposture. Les syndicats procapitalistes cherchent à faire retomber la pression et à promouvoir les partis d’opposition discrédités tels que le JVP comme une alternative progressiste à Rajapakse. Aucune solution n’existe au sein du système capitaliste à l’immense crise sociale et économique à laquelle font face les travailleurs.

Au cours des deux dernières années, une série de luttes ont éclaté parmi les travailleurs des secteurs public et privé. Dans chaque cas, les syndicats — y compris certains du TUCC — ont affirmé que la pression obligerait le gouvernement Rajapakse à faire des concessions. Lorsque le gouvernement a rejeté sans ménagement leurs revendications salariales, les responsables syndicaux ont déclaré qu’ils comprenaient que c’était une crise financière et ont mis fin aux grèves.

Travailleurs du secteur public en grève au Lipton Roundabout à Colombo [Image : Facebook Development Officers Service Union].

Lors des manifestations de vendredi, les membres du Parti de l’égalité socialiste (PES) ont distribué des tracts de la dernière déclaration du parti. Ils présentent un programme d’action socialiste pour la classe ouvrière afin qu’elle puisse lutter pour ses intérêts de classe. Les travailleurs qui ont parlé au WSWS ont condamné le gouvernement Rajapakse et ont exprimé leur méfiance et leur colère envers les syndicats et les partis d’opposition.

Janaka, un employé de bureau, a déclaré: «C’est difficile de faire face au coût de la vie. L’inflation augmente rapidement. Elle est maintenant de 18 pour cent. La valeur de la roupie s’est effondrée. Ce troupeau de dirigeants doit être chassé. C’est pourquoi je suis venu à cette manifestation. Je n’ai voté pour aucun parti capitaliste. Le peuple a besoin d’un gouvernement alternatif avec une solution aux problèmes du peuple».

Un technicien de laboratoire de l’hôpital de Mahiyanganaya a déclaré: «En fait, nous devons réduire les dépenses sur tout, car les prix augmentent rapidement. J’ai deux filles et notre famille dépend d’un seul curry [repas par jour]». Il a ajouté que même s’il faisait 250 heures supplémentaires, il ne serait payé que pour 80 heures, car le gouvernement a réduit le paiement des heures supplémentaires.

«Les syndicats ne sont pas prêts à organiser une lutte unie contre l’augmentation du coût de la vie ou les problèmes de salaire. Ils travaillent avec les partis capitalistes et conspirent pour trahir les luttes des travailleurs. Comme vous l’avez dit, il convient vraiment de désigner les syndicats comme la police industrielle».

«Le gouvernement dit qu’il doit payer une énorme dette, mais le peuple ne leur a pas demandé de s’endetter et le gouvernement n’a pas dépensé l’argent de la dette pour nous».

Sakthika Sathkumara, un agent de développement, a déclaré au WSWS: «Je ne suis pas satisfait d’avoir une grève symbolique d’un jour au milieu d’une attaque aussi importante contre les conditions de vie et de travail des masses. Compte tenu de la crise croissante dans le pays, une grève générale illimitée de la classe ouvrière aurait déjà dû être lancée».

«Mais aucun des syndicats n’appelle à une telle lutte. La raison en est que si les travailleurs s’unissent, ils sauront à quel point ils sont puissants en tant que classe. Si cela se produit, les syndicats ne seront pas en mesure de garder les travailleurs sous leur contrôle».

«En fait, ce sont les syndicats qui empêchent la classe ouvrière d’entrer en lutte et de lancer un véritable défi au gouvernement. Lorsque le gouvernement mettra en place les conditions du FMI, ce sont les travailleurs des services publics qui seront durement touchés. Je pense que si les travailleurs sont politiquement désarmés, ils ne seront pas en mesure de contrer cette attaque. Les travailleurs doivent former des comités d’action en tant que leurs propres organisations indépendantes».

(Article paru d’abord en anglais le 12 avril 2022)

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