La prochaine étape dans la lutte des éducateurs contre la pandémie, les coupes en éducation et le danger de guerre

La lutte des éducateurs aux États-Unis a atteint une nouvelle étape avec l’abandon par l’administration Biden de toute mesure visant à stopper la pandémie de COVID-19, les nouvelles demandes de réduction des effectifs scolaires et maintenant le danger imminent d’une confrontation militaire avec la Russie.

Les récentes grèves des enseignants et des employés des écoles à Minneapolis et Sacramento à propos de salaires ravagés par l’inflation ne sont que le début d’une nouvelle vague de luttes. Dans les mois à venir, des centaines de milliers d’éducateurs à New York, Los Angeles et d’autres grandes villes seront impliqués dans des batailles contractuelles majeures.

Des enseignants protestent pour le renforcement des protocoles de sécurité COVID-19 devant le siège de l’Oakland Unified School District, le 7 janvier 2022, à Oakland, en Californie (AP Photo/Noah Berger) [AP Photo/Noah Berger]

Mais le combat va bien au-delà des termes des nouvelles conventions collectives. Les éducateurs et tous les travailleurs aux États-Unis et dans le monde entier mènent une lutte existentielle contre une nouvelle vague d’infections et de décès. Dans le même temps, les travailleurs sont confrontés aux exigences des gouvernements capitalistes, y compris l’administration Biden, qui leur demandent de supporter le coût total de la crise économique mondiale et de la course à la guerre mondiale.

Les éducateurs et les autres travailleurs américains sont poussés dans une lutte aux côtés de dizaines de millions de travailleurs et de jeunes au Sri Lanka, au Pakistan, en Tunisie, en Iran, en Grèce, en France, au Pérou, au Brésil, en Indonésie et dans d’autres pays qui s’engagent actuellement dans des protestations et des grèves de masse contre l’inflation, les pénuries de nourriture et de carburant, et l’austérité gouvernementale.

La pandémie n’est pas terminée

Alors que le sous-variant BA.2, plus transmissible et qui échappe davantage à l’immunité, balaie les États-Unis, les autorités fédérales, étatiques et locales ont abandonné le port du masque obligatoire et autres mesures de protection, insistant pour que la population «apprenne à vivre avec le virus». Un tiers des États américains – qui comptent près de 100 millions d’habitants – ont cessé de déclarer quotidiennement les cas. Nombre d’entre eux ont réduit les sites de dépistage, ce qui signifie que la gravité de la vague du BA.2 sera plus difficile à déterminer que n’importe quelle autre vague depuis le début de la pandémie.

Plus d’un million de personnes sont déjà mortes de la COVID aux États-Unis. Si l’on ajoute les 200.000 décès comptés par la mortalité excédentaire, le bilan est à peu près équivalent à celui de toutes les personnes tuées dans les guerres du pays depuis 1776. Au moins 200.000 enfants ont perdu un parent ou un proche aidant. Plus de 1300 enfants sont morts du virus, selon le CDC, auxquels s’ajoutent 7880 cas de MIS-C dévastateur et des dizaines de milliers de cas de COVID longue.

Selon un système de suivi de données non officiel, plus de 2000 éducateurs américains ont succombé au virus. Le fait qu’il n’existe aucun décompte officiel des décès d’enseignants et d’employés d’écoles donne la mesure de la valeur que la classe dirigeante accorde aux «travailleurs essentiels».

Aucune de ces morts n’était nécessaire. Dès le début de la pandémie, le gouvernement américain a donné la priorité aux profits sur la vie humaine. L’administration Trump, puis Biden et le Congrès à majorité démocrate ont acheminé des milliers de milliards de dollars de «secours en cas de pandémie» aux grandes entreprises et aux marchés financiers. En conséquence, les 735 milliardaires américains ont vu leur valeur nette bondir de 62 % pour atteindre 4700 milliards de dollars depuis le début de la pandémie.

Des milliards pour les super riches, l’inflation et l’austérité pour les travailleurs

Pendant ce temps, les salaires des travailleurs ont à peine bougé et les revenus sont engloutis par les hausses record des prix de la nourriture, du carburant et d’autres produits de première nécessité. Le financement des tests et des traitements COVID pour les personnes non assurées a également été supprimé.

Dans le nouveau budget de Biden, plus d’argent est alloué à l’armée (813 milliards de dollars) que toutes les autres dépenses discrétionnaires réunies (730 milliards de dollars). Dans le budget final, le Congrès dirigé par les démocrates a considérablement réduit les dépenses par rapport à la proposition initiale du président, y compris des milliards de dollars pour les étudiants à faible revenu, les enfants handicapés, les services de santé mentale et «Head Start».

Avec l’assèchement des fonds fédéraux non renouvelables de la loi CARES pour les écoles, les districts de tout le pays se préparent à des coupes budgétaires importantes. À New York, le plus grand district scolaire du pays, le maire Eric Adams, membre du Parti démocrate, a décidé de réduire de près d’un milliard de dollars le budget des écoles au cours des trois prochaines années, en commençant par une réduction de 215 millions de dollars l’année prochaine. Les écoles publiques de Minneapolis ont récemment annoncé des réductions de 25 millions de dollars censées permettre une maigre augmentation de 2 à 3 % des salaires des enseignants et du personnel de soutien.

Ces coupes budgétaires sauvages démontrent l’hypocrisie de Biden et du reste des politiciens du grand patronat qui ont insisté sur le fait que les enfants devaient retourner dans les écoles infectées pour protéger leur bien-être émotionnel et scolaire. Il n’y avait, et il n’y a toujours, qu’une seule raison d’ouvrir les écoles pendant la pandémie: ramener les parents au travail pour produire des bénéfices pour les entreprises.

Au cours des dernières années, les enseignants ont été à l’avant-garde de la résistance croissante de la classe ouvrière à l’austérité, aux inégalités sociales et, depuis mars 2020, à la réouverture dangereuse des écoles.

Le rôle de l’AFT et de la NEA

Le plus grand obstacle à l’unification des éducateurs au niveau national et à l’extension de la lutte pour sauver les vies et les moyens de subsistance à des sections plus larges de la classe ouvrière a été la Fédération américaine des enseignants (AFT) et l’Association nationale de l’éducation (NEA).

L’AFT et la NEA ont isolé et réprimé ces luttes et ont détourné l’opposition à Trump derrière la campagne pour élire Biden, en prétendant qu’un président démocrate «suivrait la science» concernant la pandémie et augmenterait le financement de l’éducation publique. Mais la réalité a été tout le contraire: Biden s’est précipité pour rouvrir les écoles et a approfondi l’attaque contre l’éducation publique tout en canalisant des billions supplémentaires vers les entreprises et les préparatifs militaires pour la guerre contre la Russie et la Chine.

Les syndicats pro-capitalistes et pro-guerre ont été aidés par les Socialistes démocrates d’Amérique (DSA) et d’autres organisations de pseudo-gauche dont les membres occupent des postes de direction au sein du Chicago Teachers Union (CTU), de l’United Teachers Los Angeles (UTLA) et d’autres syndicats. Tout leur discours sur le «syndicalisme de justice sociale» n’a été qu’une couverture pour la collaboration avec le Parti démocrate dans la réouverture meurtrière des écoles et l’imposition de l’austérité.

Dans le cadre de sa capitulation lors de la récente grève de 17 jours, la Minneapolis Federation of Teachers (MFT) a accepté un mémorandum réactionnaire intitulé «Educators of Color», qui accepte explicitement les licenciements et divise les enseignants selon des critères raciaux en éliminant d’abord les emplois des enseignants blancs, quelle que soit leur ancienneté.

Construisez le comité de sécurité du personnel scolaire de la base!

Le Parti de l’égalité socialiste rejette les mensonges selon lesquels il n’y a pas d’argent pour protéger les vies et améliorer considérablement l’éducation publique. Nous appelons les enseignants et les employés des écoles à s’organiser et à créer le Comité de sécurité des éducateurs, indépendant des syndicats pro-patronat, afin de lutter pour les revendications suivantes:

Mettre en œuvre toutes les mesures de santé publique nécessaires pour contenir et éliminer la transmission de la COVID-19, y compris l’enseignement à distance, les masques, les vaccins et la filtration de l’air!

L’expérience de la Chine démontre qu’une stratégie Zéro COVID, si elle est mise en œuvre à l’échelle mondiale, pourrait mettre fin à la pandémie en quelques semaines, sauvant ainsi des millions de vies. Les éducateurs et tous les travailleurs doivent exiger la fermeture temporaire des écoles et des entreprises non essentielles – avec une compensation totale pour les pertes de revenus – ainsi que des tests de masse, la recherche des contacts et la fourniture universelle de masques de haute qualité.

Le financement intégral de l’éducation publique!

Nous exigeons l’accès universel à l’Internet à haut débit, la sécurité alimentaire, les soins de santé mentale, le soutien à l’éducation spéciale et toutes les autres ressources nécessaires pour offrir aux élèves et aux enseignants une éducation publique de la plus haute qualité. Des milliards de dollars doivent être consacrés à l’embauche de nouveaux enseignants et du personnel de soutien et à de bons salaires et avantages sociaux afin que la taille des classes puisse être réduite de manière drastique.

Une augmentation immédiate de 40 % des salaires pour compenser la baisse des salaires réels au cours des cinq dernières années et des ajustements mensuels en fonction du coût de la vie pour protéger les salaires des ravages de l’inflation.

L’administration Biden a lancé un appel national aux districts pour qu’ils utilisent les fonds restants du plan de sauvetage américain pour payer les enseignants et les employés des écoles avec des primes uniques dérisoires. Les syndicats ayant accepté des augmentations minimales de 2 à 3 % à Minneapolis, Sacramento et dans d’autres villes, ainsi que des primes uniques, les enseignants et le personnel scolaire sont confrontés à des réductions des salaires réels, étant donné que l’inflation atteint 8,5 %, son plus haut niveau depuis quatre décennies.

Pour la liberté d’expression et la protection des droits démocratiques contre la censure droitière dans les salles de classe!

Les républicains mènent une campagne fasciste de censure concernant les discussions sur la race, les préférences sexuelles et l’inégalité sociale. En même temps, il y a un danger croissant que l’administration Biden et les démocrates se joignent à la campagne de censure contre les opposants à la guerre et les socialistes.

Un arrêt immédiat de la course à la guerre nucléaire!

Les travailleurs conscients de leur classe doivent s’opposer à l’invasion réactionnaire de l’Ukraine par la Russie. Mais cela ne signifie pas qu’il faut soutenir l’armement massif de l’Ukraine et l’escalade de la guerre par procuration des États-Unis et de l’OTAN contre la Russie. La confrontation avec la Russie, préparée de longue date par les États-Unis, n’est pas motivée par des objectifs humanitaires mais impérialistes, y compris les plans visant à installer un régime pro-occidental à Moscou et à s’emparer des vastes ressources énergétiques et minérales de la Russie.

Face à une crise économique et politique insoluble dans son pays, Biden espère utiliser la confrontation avec la Russie pour détourner la colère sociale vers un ennemi extérieur. Le président qui a déclaré qu’il mettrait fin aux «guerres éternelles» de l’Amérique a annoncé que l’Amérique s’engage dans une bataille de plusieurs années qui nécessitera encore plus de sacrifices en argent et en sang.

La présidente de l’AFT, Randi Weingarten, s’est rendue en Pologne le mois dernier pour feindre de compatir avec les réfugiés ukrainiens et promouvoir la propagande de guerre de Biden contre la Russie. C’est un fait historique que Weingarten n’a jamais dit un mot sur les horreurs produites par les guerres américaines en Afghanistan, en Irak, en Libye et en Syrie au cours des trois dernières décennies, qui ont causé plus d’un million de morts et la ruine de sociétés entières.

Au cours des deux dernières années, le Parti de l’égalité socialiste et le World Socialist Web Site ont aidé les enseignants et d’autres employés des écoles à mettre en place des Comités de sécurité du personnel scolaire de la base qui sont indépendants des syndicats pro-capitalistes et pro-guerre. Ces comités – qui ont été actifs à New York, en Californie, au Michigan, au Tennessee, en Pennsylvanie, au Texas, à Washington et dans d’autres États – ont permis aux éducateurs de se faire entendre, d’obtenir des informations scientifiques essentielles sur la pandémie et sur la manière de la combattre, et d’unir les éducateurs américains à nos frères et sœurs au niveau international.

Pour une lutte politique contre la guerre et l’inégalité sociale

Le développement d’organisations indépendantes de lutte de la classe ouvrière doit être lié à la mobilisation politique de la classe ouvrière contre les deux partis du patronat, les démocrates et les républicains, et le système capitaliste qu’ils défendent.

Construire une direction combative signifie reconnaître que la société est divisée entre deux classes économiques et sociales opposées, la classe ouvrière et la classe dirigeante capitaliste, dont les intérêts sont totalement irréconciliables.

Le sort de l’humanité ne peut pas être laissé entre les mains d’une élite dirigeante obsédée par les profits, qui est responsable de la mort de millions de personnes pendant la pandémie et qui menace maintenant de provoquer une guerre mondiale qui mettrait fin à la vie sur la planète. Au lieu de cela, les travailleurs de toutes origines ethniques et nationalités doivent s’unir pour prendre le pouvoir politique en main, redistribuer les richesses de la société et réorganiser la vie économique selon des lignes socialistes, basées sur la propriété collective et le contrôle démocratique des ressources de la planète.

Les éducateurs, comme tous les travailleurs, sont confrontés à d’immenses défis politiques. Mais une nouvelle force sociale, la classe ouvrière mondiale, émerge et a le pouvoir d’arrêter les bellicistes, de mettre fin à la pandémie et de garantir les besoins de toutes les populations du monde.

Afin de construire la direction nécessaire pour convertir ce mouvement spontané émergent en une lutte consciente pour le socialisme mondial, le Comité international de la Quatrième Internationale, ses Partis de l’égalité socialiste, les Étudiants et jeunes internationalistes pour l’égalité sociale, et l’Alliance ouvrière internationale des comités de base tiendront une réunion en ligne le 1er mai. Nous invitons les éducateurs, les parents et les étudiants à nous contacter pour former des comités de base et rejoindre les travailleurs du monde entier dans cette lutte commune.

(Article paru en anglais le 22 avril 2022)

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