COVID-19: Tandis que le bilan des décès à Shanghai s’alourdit, la Chine s’efforce de contenir l’augmentation des nouvelles infections à Pékin

Bien que la propagation des infections de COVID-19 ait été maitrisée dans tout Shanghai au cours des quatre dernières semaines de confinement, le nombre de décès commence à s’alourdir rapidement. Après avoir signalé 39 décès samedi, le lendemain, le nombre de nouveaux décès est passé à 51, selon les autorités sanitaires chinoises. Cela porte le total à 138 depuis la résurgence des cas en mars.

Étant donné que les autorités sanitaires chinoises suivent séparément les cas asymptomatiques, les cas symptomatiques et ceux qui se transforment en cas symptomatiques, l’analyse au jour le jour effectuée par le World Socialist Web Sitea révélé qu’au cours des dernières semaines, la part des cas symptomatiques de COVID a augmenté conformément à la nature de la maladie causée par le COVID. Sans surprise, la mort, en tant qu’indicateur tardif, commence à confirmer objectivement le potentiel létal du coronavirus SRAS-CoV-2 et la nécessité cruciale d’éliminer chaque foyer découvert.

La presse occidentale et d’éminents scientifiques, comme le Dr Michael Osterholm, insistent sur le fait que les statistiques officielles chinoises sur la COVID sont fausses parce que le nombre de décès est si faible. Cependant, les tendances dégagées par le suivi des reportages officiels quotidiens accessibles au public donnent un aperçu clair et essentiel de la manière dont l’infection se propage: d’abord de manière asymptomatique, puis en se transformant en maladie symptomatique, suivie de cas graves et enfin de décès. Ces données sont conformes à ce que l’on sait de la maladie et soulignent la profonde politisation de la pandémie, même parmi les experts du domaine, pour vilipender toute tentative d’élimination du coronavirus.

Les hommes comptent pour la plus grande partie des décès récents en Chine, l’âge moyen du décès étant supérieur à 80 ans. Nombre d’entre eux présentaient de multiples comorbidités qui ont contribué à leur décès. Plus de 95 pour cent des personnes décédées n’étaient pas vaccinées. Cela souligne les inquiétudes des autorités chinoises quant au faible taux de vaccination des personnes les plus âgées du pays et à l’efficacité des vaccins chinois pour prévenir les hospitalisations et les décès.

Dans l’ensemble, les cas dans le centre financier poursuivent leur trajectoire descendante, la stratégie officielle de lutte contre le virus demeurant le «zéro COVID» et la Chine étant le seul pays du monde à adhérer à des mesures globales de prévention de la pandémie. Le nombre de cas asymptomatiques est passé de 19.657, le jour précédent, à 16.983. Le nombre d’infections symptomatiques confirmées a augmenté, passant de 1.401 le jour précédent à 2.472, dont 846 étaient des conversions en maladie symptomatique.

Dans le même temps, 20.548 cas asymptomatiques ont été libérés de l’observation médicale, laissant près d’un quart de million de personnes asymptomatiques en observation. Actuellement, 29.178 patients atteints de la maladie symptomatique (12,4 pour cent des cas de COVID) sont traités dans les hôpitaux, dont 274 sont dans un état grave. Le nombre de patients dans la catégorie «grave» a augmenté de 38.

Plus de 360 experts médicaux spécialisés dans la gestion des problèmes de santé complexes ont été mobilisés dans huit hôpitaux de la ville consacrés au traitement de la COVID-19 pour aider à traiter les cas complexes. Un tiers des patients admis dans ces hôpitaux ont plus de 70 ans et souffrent de diverses affections cardiaques, rénales, pulmonaires ou hépatiques.

«Les personnes d’un âge avancé sont les plus vulnérables au coronavirus en raison de leur faible immunité et de leurs conditions physiques précaires», a expliqué Zhao Dandan, le directeur adjoint de la Commission de la santé de Shanghai, à SHINE, le service d’information numérique du Shanghai Daily.

Les efforts déployés par les autorités chinoises pour endiguer l’augmentation des infections causée par le variant Omicron posent d’énormes défis. La logistique requise est complexe et nécessite une volonté politique concertée pour assurer les efforts qui isolent et restreignent la mobilité de millions d’habitants tout en tentant de répondre à leurs besoins les plus élémentaires.

À cela s’ajoutent les pressions politiques du capitalisme financier mondial qui a méprisé tout effort scientifique visant à donner la priorité aux vies.

Vendredi, Liang Wannian, chef du groupe d’experts chargé de la réponse à la COVID-19 au pays, s’est adressé aux médias à Pékin. Il a comparé la politique du «zéro COVID» à une «assurance pour les 1,4 milliard de personnes», compte tenu des dangers posés par Omicron. «La clé est de reconnaître et de gérer efficacement la source de transmission, de couper les chaînes de transmission et de protéger les groupes vulnérables afin que l’épidémie ne rebondisse pas à grande échelle».

Il a ajouté que «cela produirait une énorme catastrophe» pour la Chine si l’on assouplissait les restrictions. «Si nous limitons les contrôles, le virus se propagera largement, et il y aura beaucoup de cas lourds et de décès chez les personnes âgées. Le nombre considérable de cas lourds pèsera sur le système médical, et si le personnel médical est infecté, les services médicaux ne pourront pas être fournis, et cela deviendra un cercle vicieux».

Dès lundi, Pékin faisait face au début d’une nouvelle vague d’épidémies, avec 29 nouveaux cas de COVID contre 22 dimanche. À cela s’est ajoutée une augmentation des cas de COVID la semaine dernière dans les provinces de Jiangsu et Hebei, Shanghai et Pékin.

L’épidémie à Pékin est attribuée à plusieurs cas découverts dans un collège du district de Chaoyang, parmi un groupe de touristes et un service de livraison. La moitié des 70 cas locaux de COVID ont été découverts dans ce district, où vivent 3,5 millions de personnes et où se trouvent plusieurs ambassades et sociétés multinationales. On a immédiatement suspendu les cours et lancé le dépistage d’un plus grand nombre d’étudiants et de professeurs dans les écoles primaires et secondaires de la région.

Toutefois, à la nouvelle de l’augmentation du nombre de décès à Shanghai, les autorités de Pékin ont réagi rapidement en lançant des tests dans toute la ville afin d’éradiquer l’épidémie avant qu’elle n’atteigne des niveaux similaires. Des mesures supplémentaires ont été prises, notamment le confinement de plusieurs complexes résidentiels où l’on a découvert des cas de COVID.

La nouvelle a provoqué une ruée vers les épiceries et les marchés pour acheter des produits de première nécessité et des aliments en prévision de ce que beaucoup ont supposé être un confinement de la ville. Le journal officiel de la ville, Beijing Daily, a écrit que les principales chaînes de supermarchés avaient doublé leurs stocks. Les heures d’ouverture ont été prolongées le dimanche, une admission implicite de ce qui allait se passer. Cependant, d’après un examen de plusieurs sources médiatiques, la population a accueilli les nouvelles sans sourciller.

La presse occidentale à grand tirage, cependant, continue de mettre l’accent non pas sur les efforts déployés pour sauver des vies, mais sur les perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales. Le magazine Timedéplore que plus de la moitié des grandes villes chinoises soient toujours soumises à des mesures de confinement ou de restriction, notamment dans les centres industriels comme Changchun, Jilin, Tianjin, Shenzhen et Guangzhou.

Le professeur Eswar Prasad, qui enseigne l’économie et la politique commerciale à l’université Cornell et qui a déjà dirigé la division Chine du FMI, a déclaré au Time: «Les perturbations déjà importantes des chaînes d’approvisionnement mondiales sont exacerbées par les confinements en Chine, ce qui ajoute aux pressions inflationnistes et aux difficultés d’approvisionnement d’un large éventail de biens de consommation.»

Richard Yu, un haut dirigeant de Huawei, a lancé un avertissement sur WeChat, la plateforme chinoise de médias sociaux: «Si Shanghai ne peut pas reprendre sa production d’ici le mois de mai, alors tous les acteurs technologiques et industriels qui ont des chaînes d’approvisionnement dans la région seront complètement paralysés, en particulier l’industrie automobile. Cela entraînera de graves conséquences et des pertes très importantes pour l’ensemble du secteur.»

Dans un rapport sur les perspectives de l’économie mondiale publié ce mois-ci, le FMI a déclaré que «les récents confinements dans les principaux centres de fabrication et de commerce en Chine aggraveront probablement les perturbations de l’approvisionnement ailleurs».

Le Wall Street Journal a rapporté que les indices des actions chinoises, le Shanghai Composite et le CSI 300, ont connu leur plus forte baisse en plus de deux ans, soit 5,1 et 4,9 pour cent. Lundi, les actions mondiales ont fortement chuté en raison des craintes de nouveaux confinements en Chine. Ces changements spectaculaires des indices boursiers ont une corrélation indirecte, mais presque linéaire, avec les vies sauvées. Ils confirment l’observation précédente, en sens inverse, selon laquelle le cours des actions a généralement augmenté avec le nombre de décès causés par la COVID.

(Article paru en anglais le 26 avril 2022)

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