La Grande-Bretagne va déployer 8.000 soldats dans le cadre d’une vaste opération anti-russe

Dans le cadre de l’un des plus grands déploiements depuis la guerre froide, le gouvernement britannique a annoncé vendredi qu’il enverrait 8.000 soldats en Europe à partir du mois prochain pour participer à une série d’exercices militaires.

En date d’avril 2021, l’armée britannique comptait 86.240 soldats réguliers, ce qui signifie qu’environ 10 pour cent de l’ensemble des forces seront envoyés pour affronter la Russie.

Des chars sont chargés sur des plateformes de camions militaires tandis que des troupes et de l’équipement militaire britanniques supplémentaires arrivent à la base du Groupement tactique de l’OTAN à Tapa, en Estonie, le vendredi 25 février 2022 (AP Photo/Sergei Stepanov)

Le mouvement de troupes, qui doit prendre de l’ampleur entre avril et juin, est la dernière escalade en date de la Grande-Bretagne dans le cadre de la guerre de facto de l’OTAN contre la Russie. Il a été annoncé quelques heures après la signature par le président américain Joe Biden d’un contrat de livraison d’armes d’une valeur de 20 milliards de dollars.

Dans un communiqué de presse du ministère de la Défense (MoD), le commandant de l’armée de campagne, le lieutenant-général Ralph Wooddisse, a déclaré: «Le Royaume-Uni apporte une contribution importante à la défense de l’Europe et à la dissuasion de l’agression russe. La série d’exercices de l’armée britannique est fondamentale dans les deux cas. Nous continuons à nous déployer dans toute l’Europe, de la Baltique à la mer Égée, pour nous entraîner et combattre aux côtés de nos alliés et partenaires, en fournissant des forces puissantes, capables de soutenir l’OTAN et prêtes à le faire».

Les troupes seront principalement déployées dans le cadre d’une série de quatre jeux de guerre distincts de l’OTAN portant les noms de code Arrow, Hedgehog, Defender et Swift Response.

Le nombre exact de soldats des pays concernés n’a pas été communiqué, mais le ministère de la Défense a fait remarquer que «des dizaines de milliers de soldats des pays alliés et partenaires de l’OTAN et de la Joint Expeditionary Force (JEF) participent à ces exercices».

La JEF dirigée par le Royaume-Uni comprend neuf autres pays du «Grand Nord, de l’Atlantique Nord et de la mer Baltique»: le Danemark, l’Estonie, la Finlande, l’Islande, la Lettonie, la Lituanie, la Norvège, les Pays-Bas et la Suède. Elle a été lancée en 2014 à l’initiative du gouvernement conservateur du premier ministre David Cameron et des États-Unis et de l’OTAN.

Un communiqué du ministère de la Défense indique que «les troupes de l’escadron B des Queen’s Royal Hussars ont été déployées en Finlande cette semaine pour participer à l’exercice Arrow. Elles seront intégrées à une brigade blindée finlandaise, avec la participation d’autres partenaires, notamment les États-Unis, la Lettonie et l’Estonie. Cet exercice permettra d’améliorer la capacité des troupes britanniques et finlandaises à travailler les unes à côté des autres dans le cadre de la JEF, afin de dissuader toute agression russe en Scandinavie et dans les États baltes».

L’exercice Swift Response de l’OTAN a débuté cette semaine et «des éléments de la 16e brigade de combat d’assaut aérien et de la 1re brigade de combat d’aviation opèrent aux côtés de leurs homologues français, américains, italiens et albanais en Macédoine du Nord. 4.500 militaires participent à l’exercice, dont 2.500 soldats britanniques. L’exercice comprend des parachutages, des assauts aériens héliportés et la participation d’une compagnie de parachutistes français intégrée au groupement tactique du Régiment 2 de parachutistes et un groupement tactique italien travaillant sous une chaîne de commandement britannique».

Lors de l’exercice Hedgehog, en mai, «le Royal Welsh Battlegroup et le Royal Tank Regiment se sont entrainés à la frontière entre l’Estonie et la Lettonie aux côtés de 18.000 soldats de l’OTAN, y compris des Français et des Danois, qui font partie de la présence avancée renforcée de l’OTAN dirigée par le Royaume-Uni. Hedgehog est le plus grand exercice militaire en Estonie et a lieu tous les quatre ans».

Alors que l’opération Hedgehog est en cours, «l’exercice Defender en Pologne se poursuit jusqu’à la fin du mois de mai. Il comprend 1.000 soldats du groupement tactique King’s Royal Hussars et de l’escadron C des Light Dragoons déployés aux côtés de troupes de 11 pays partenaires, dont la Pologne, le Danemark et les États-Unis. Cet exercice implique des chars Challenger 2 et d’autres véhicules blindés déployés depuis la base avancée de l’OTAN à Sennelager, en Allemagne. Le déploiement est soutenu par la 104e Theatre Sustainment Brigade qui opère depuis le Royaume-Uni et dans des bases en Europe».

Depuis des années, la Grande-Bretagne participe aux opérations de l’OTAN, qu’elle dirige parfois, pour soutenir l’encerclement de la Russie. Au cours de l’année écoulée, ces opérations se sont intensifiées, à commencer par le lancement, en mai 2021, de l’armada du Carrier Strike Group 21 de l’OTAN dirigé par le porte-avions Queen Elizabeth.

Au début du mois dernier, plus de 3.000 marins et Royal Marines ont été déployés dans le cercle arctique, à terre, en mer et dans le ciel de la Norvège, dans le cadre de la contribution britannique à l’opération Cold Response 2022. Environ 30.000 soldats de 27 alliés et «partenaires» de l’OTAN ont participé à cette opération. Cette opération de deux semaines, qui constitue une répétition à balles réelles en vue d’une guerre sur le flanc nord de la Russie, est le plus grand exercice militaire organisé en Norvège depuis la guerre froide. Le site web des forces conjointes indique que «le plus grand navire de guerre britannique, le HMS “Prince of Wales”, a pris la tête de la flotte navale, démontrant ainsi sa capacité à agir en tant que navire de commandement de l’OTAN: un rôle qu’il tiendra jusqu’en 2022. C’était la première fois qu’un des porte-avions de la classe Queen Elizabeth de la Royal Navy se trouvait aussi loin au nord.» Le «rôle du navire dans l’exercice l’a vu fonctionner côte à côte avec un large éventail de la puissance aérienne britannique et alliée, des chasseurs furtifs F-35B Lightning aux avions uniques Osprey MV22 et aux hélicoptères Sea Stallion des Américains».

La Norvège partage une frontière terrestre de 200 kilomètres avec la Russie, les exercices de l’opération impliquant 200 avions et 50 navires se déroulant à quelques centaines de kilomètres de la Russie.

Une déclaration lundi sur l’Ukraine du secrétaire à la Défense Ben Wallace a précédé le renforcement militaire du Royaume-Uni. Wallace s’est vanté que la Grande-Bretagne avait déjà remis à l’Ukraine «plus de 5.000 missiles antichars, 5 systèmes de défense aérienne avec plus de 100 missiles, 1.360 munitions anti-structures et 4,5 tonnes d’explosifs». Quelques semaines après le début des hostilités, le Royaume-Uni a intensifié son armement de l’Ukraine avec des «missiles antiaériens Starstreak à haute et basse vélocité. Je suis en mesure de signaler à la Chambre que ces missiles sont sur le théâtre des opérations depuis plus de trois semaines et qu’ils sont déployés et utilisés par les forces ukrainiennes pour se défendre et défendre leur territoire.»

Alors que le Parlement était en vacances de Pâques, «mon équipe ministérielle… a accueilli une délégation du gouvernement ukrainien dans la zone d’entraînement de la plaine de Salisbury pour explorer d’autres options d’équipement. Cela a été rapidement suivi par l’annonce du premier ministre de l’octroi de 100 millions de livres sterling supplémentaires d’équipements militaires de fine pointe, 120 véhicules blindés, de l’approvisionnement en missiles antinavires et de munitions de haute technologie pour des frappes de précision».

Le Royaume-Uni «offre maintenant un déploiement de chars britanniques Challenger 2 à la Pologne pour combler le vide entre le don de chars par la Pologne à l’Ukraine et l’arrivée de leurs remplaçants d’un pays tiers».

La Grande-Bretagne déploie la quasi-totalité des capacités de ses forces armées de l’Arctique à la Méditerranée, s’est vanté Wallace. «Nous avons temporairement doublé le nombre de membres de la Défense en Estonie. Nous avons envoyé des militaires pour soutenir les efforts de résilience et de reconnaissance des services de renseignement lituaniens. Nous avons déployé des centaines de “Royal Marines” en Pologne. Nous avons envoyé des patrouilleurs offshore et des destroyers de la Navy en Méditerranée orientale. Nous avons également renforcé notre présence dans le ciel du sud-est de l’Europe avec quatre Typhoons supplémentaires basés en Roumanie. Cela signifie que nous avons maintenant un escadron complet d’avions de chasse de la RAF dans le sud de l’Europe, prêt à soutenir les missions de l’OTAN».

Selon un article du Daily Telegraph, «Dans un autre message adressé au Kremlin, des sous-marins d’attaque à propulsion nucléaire du Royaume-Uni, des États-Unis et de la France ont accosté à la base navale britannique de Faslane sur la Clyde [en Écosse], qui abrite la force de dissuasion stratégique du Royaume-Uni».

«En début de semaine, le HMS Audacious, un vaisseau anti-navire de la Royal Navy de classe Astute, a été vu en train de charger des missiles Tomahawk dans les installations navales de Gibraltar. Les sous-marins se préparent tous à prendre part à des exercices navals dans l’Atlantique Nord, qui doivent débuter dans les prochains jours».

Après avoir failli déclencher un conflit armé l’été dernier avec la Russie en mer Noire, lorsqu’un navire de guerre britannique est entré dans les eaux proches de la Crimée, Wallace a déclaré jeudi que le Royaume-Uni enverrait des missiles anti-navires Brimstone à l’Ukraine spécialement pour empêcher un blocus russe de la mer Noire.

Wallace a menacé de ne pas laisser la Russie «contrôler la mer Noire», car «elle ne lui appartient plus». Le Telegrapha rapporté: «La dernière évaluation des renseignements du ministère de la Défense suggère qu’il y a 20 navires de la marine russe en mer Noire, y compris des sous-marins».

(Article paru en anglais le 30 avril 2022)

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