Opposez-vous à l’état d’urgence draconien! Non à la dictature présidentielle! Abolissez la présidence exécutive!

Le Parti de l’égalité socialiste (PES) condamne la proclamation de l’état d’urgence par le président Gotabhaya Rajapakse vendredi dernier et exige sa levée immédiate.

La déclaration de l’état d’urgence est en préparation pour écraser la classe ouvrière et la lutte menée depuis un mois par les travailleurs qui exigent la démission du président et la fin de la misère sociale créée par une inflation galopante et des pénuries chroniques de produits de première nécessité.

Des milliers d’étudiants et de travailleurs se rassemblent sur Parliament Road à Colombo pendant la grève générale du 6 mai 2022

Lors des grèves générales d’une journée du 28 avril et du 6 mai, la classe ouvrière a démontré son immense pouvoir social dans la lutte pour ces revendications. Vendredi dernier, les travailleurs indépendants, les pauvres des campagnes, les pêcheurs et les petits entrepreneurs se sont également joints à la grève générale et au hartal (fermeture de tous les magasins et des petites entreprises), paralysant l’ensemble de l’économie de l’île.

La grève et le hartal ont terrifié la classe dirigeante et l’ensemble de l’establishment politique – le gouvernement comme l’opposition – y compris les syndicats qui ont appelé à la grève.

La réaction de Rajapakse à la grève de vendredi dernier a été d’imposer immédiatement l’état d’urgence afin de renforcer ses pouvoirs exécutifs autoritaires déjà étendus. En vertu de la loi sur l’état d’urgence, il peut déployer l’armée et la police pour arrêter des personnes sans mandat, interdire les grèves, les manifestations et les réunions, imposer des couvre-feux et la censure des médias, et proscrire des partis politiques.

Le président a déjà fait le premier pas dans le déploiement de l’armée en annulant tous les congés des membres des forces de sécurité. L’armée, renforcée au cours des 26 années de guerre communautaire anti-tamoule, elle est la plus importante par habitant en Asie du Sud et est fortement politisée. Au cours des deux dernières années, Rajapakse a intégré des officiers supérieurs de l’armée à des postes clés de l’administration civile.

L’affirmation de Rajapakse selon laquelle il a invoqué les pouvoirs d’urgence pour maintenir «les fournitures et les services essentiels à la vie de la communauté» est un mensonge éhonté. Son régime et la classe capitaliste ont déjà complètement perturbé «les fournitures et les services essentiels à la vie de la communauté», créant des conditions intolérables pour les travailleurs et les pauvres.

Alors que le régime de Rajapakse mobilise les militaires, les syndicats démobilisent la classe ouvrière. Visiblement ébranlés par ce qu’ils ont appelé le «succès inattendu» de la grève et du hartal de vendredi dernier et craignant une confrontation avec le gouvernement, les syndicats ont annulé la grève générale illimitée qui devait commencer mercredi prochain et l’ont remplacé par des manifestations symboliques: des rassemblements quotidiens de travailleurs à l’heure du déjeuner.

Si le président et le gouvernement ne démissionnent pas, ils déclarent qu’ils organiseront une marche vers le parlement national le 17 mai et exigeront une solution. Leur solution, comme ils l’ont déjà expliqué, est que les partis d’opposition capitalistes – principalement le Samagi Jana Balawegaya (SJB) et le Janatha Vimukthi Peramuna (JVP) – forment un gouvernement intérimaire et que des élections anticipées soient ensuite organisées.

C’est une solution pour la classe dirigeante et non pour la classe ouvrière. Tous les partis parlementaires – le gouvernement et l’opposition – se sont engagés à imposer les diktats draconiens du Fonds monétaire international en échange d’un renflouement d’urgence. Comme l’a déclaré le ministre des Finances, Ali Sabry: «La situation va empirer avant de s’améliorer… Les quelques années à venir seront douloureuses».

Le Parti de l’égalité socialiste (PES) condamne la décision perfide des syndicats d’annuler la grève générale de cette semaine. Cela ne fait que donner au président Rajapakse le temps de mobiliser l’armée tout en complotant à huis clos avec les partis d’opposition. Il a offert le poste de premier ministre au chef du SJB, Sajith Premadasa, qui l’a refusé, mais il a déclaré que son parti soutiendrait un régime intérimaire de l’extérieur.

Si la situation est laissée entre les mains des syndicats, la classe ouvrière sera trahie. Ce sont ces mêmes syndicats qui ont trahi toutes les luttes des travailleurs – y compris les travailleurs de la santé et les enseignants – au cours des deux dernières années. Les dirigeants de la Fédération des professionnels de la santé, Ravi Kumudesh et Saman Ratnapriya déclarent ouvertement qu’ils avaient appelé leurs membres à des grèves et des manifestations non pas pour lutter pour les droits des travailleurs, mais pour «gérer leur colère».

La tâche urgente à laquelle la classe ouvrière est confrontée est de mobiliser sa force de manière indépendante pour vaincre la menace de répression militaire de Rajapakse et de lutter pour un programme politique qui représente ses intérêts de classe.

Le PES exhorte les travailleurs à former immédiatement leurs propres comités d’action démocratiquement élus, indépendants des syndicats et des partis capitalistes, dans chaque usine et lieu de travail, dans les plantations et dans les banlieues et villes ouvrières.

Le PES est prêt à aider à la création de ces comités d’action, comme nous l’avons déjà fait pour les travailleurs des plantations et des services de santé. Nous encourageons les travailleurs et les jeunes à nous contacter.

Nous sommes d’accord sur le fait que le président Rajapakse et son gouvernement doivent partir, mais cela ne suffit pas.

● Le PES exige l’abolition de la présidence exécutive, qui est maintenant utilisée pour préparer une dictature présidentielle soutenue par l’armée.

● Le PES exige l’abrogation de toutes les lois répressives. Il s’agit notamment de la loi sur la sécurité publique qui a permis au président d’invoquer l’état d’urgence; la loi sur les services publics essentiels qui est utilisée pour criminaliser les grèves industrielles; et la loi sur la prévention du terrorisme qui permet les arrestations arbitraires et la détention prolongée sans procès.

Dans le contexte de la crise profonde du capitalisme au Sri Lanka et dans le monde, la classe dirigeante est déterminée à défendre ses profits et ses richesses en imposant de nouveaux fardeaux énormes aux travailleurs. La classe ouvrière a besoin d’un programme politique basé sur les principes socialistes et internationalistes afin de lutter pour ses besoins sociaux.

Le PES propose les revendications suivantes comme base de la lutte politique et industrielle des comités d’action:

● Pour un contrôle démocratique des travailleurs sur la production et la distribution de tous les biens et ressources essentiels à la vie des gens! Nationalisez les banques, les grandes entreprises, les plantations et les autres grands centres névralgiques de l’économie!

La classe capitaliste exploite sa possession des moyens de production et de distribution afin d’amasser d’énormes profits. La seule façon pour la classe ouvrière de subvenir à ses besoins essentiels est de les retirer des mains des capitalistes et de faire l’inventaire des ressources afin qu’elles puissent être utilisées pour mettre fin à la souffrance et à la misère actuelles.

● Répudiez toutes les dettes étrangères! Refusez les exigences d’austérité du FMI et de la Banque mondiale qui représentent les banquiers et les institutions financières internationales des classes capitalistes!

Le gouvernement Rajapakse justifie ses dures mesures d’austérité afin de rembourser des milliards de dollars aux banquiers internationaux. La classe ouvrière n’a pas accumulé ces dettes et ne devrait pas être forcée de les payer. L’argent des remboursements devrait plutôt être utilisé pour mettre à la disposition des travailleurs de la nourriture, du carburant, des médicaments et d’autres produits essentiels à des prix abordables.

  • Saisissez les richesses colossales des milliardaires et des grandes entreprises!
  • Selon la World Inequality Database, en 2021, les 10 pour cent les plus riches de la société sri-lankaise détenaient 63,8 pour cent de la richesse totale de l’île, tandis que les 50 pour cent les plus pauvres n’en détenaient que 4,3 pour cent. Cette vaste richesse, créée par la classe ouvrière, doit être saisie et distribuée selon les besoins sociaux.
  • Annulez toutes les dettes des agriculteurs, des pêcheurs et des petits entrepreneurs pauvres et marginaux! Rétablissez toutes les subventions, y compris les subventions aux engrais pour les agriculteurs!
  • En permettant aux masses rurales opprimées et les exploitants de petites entreprises – qui sont accablés par des dettes élevées, des intrants coûteux et des prix qui ne répondent pas à leurs besoins – de surmonter leurs problèmes économiques écrasants, la classe ouvrière deviendra un pôle d’attraction.
  • Assurez des emplois pour tous avec des conditions de travail décentes et sûres!
  • Si le FMI arrive à ses fins, il y aura une avalanche de destruction d’emplois. Laissés entre les mains des syndicats, les emplois, les salaires et les conditions de travail seront encore négociés à la baisse, comme c’est le cas depuis des années.
  • Indexez les salaires au coût de la vie!

L’augmentation rapide de l’inflation – près de 30 pour cent en avril sur une base annuelle – a déjà rongé considérablement les salaires. L’inflation des denrées alimentaires a atteint 46,6 pour cent en avril et de nombreux travailleurs ne sont pas en mesure de nourrir correctement leurs familles. Augmentez immédiatement les salaires pour compenser les pertes passées et indexez les salaires sur une base mensuelle au coût de la vie.

  • Affectez des dizaines de milliards de dollars aux programmes sociaux, y compris l’éducation et les soins de santé gratuits, en garantissant des services de haute qualité à tous ceux qui en ont besoin!

Les gouvernements successifs ont privé l’éducation et les soins de santé publics de financement tout en injectant de l’argent dans l’expansion des forces militaires et policières qui sont maintenant prêtes à réprimer le mouvement de protestation de masse.

La trahison des syndicats impose aux comités d’action la nécessité d’organiser une lutte unifiée afin de défendre la classe ouvrière contre la répression de l’État, évincer le gouvernement Rajapakse et veiller à ce que les droits des travailleurs passent avant les profits des super-riches.

Les travailleurs – cinghalais, tamouls et musulmans – ont tous participé à la grève générale de vendredi dernier sur la base de leurs intérêts de classe communs. Toute tentative de diviser la classe ouvrière en attisant l’hostilité et la haine communautaires doit être combattue.

Cette lutte politique soulève inévitablement la question de savoir quelle classe gouvernera. Nous avertissons qu’un gouvernement capitaliste – qu’il s’agisse du régime Rajapakse ou d’un gouvernement intérimaire – ne reculera devant rien pour imposer les exigences du capital financier international et recourir à l’armée pour réprimer toute opposition.

La mise en place de comités d’action indépendants à travers l’île et le développement d’une lutte politique unifiée permettront de gagner le soutien des masses rurales et d’établir la base d’un gouvernement ouvrier et paysan pour refaçonner la société selon des politiques socialistes.

Il n’y a pas de solution nationale à la crise économique au Sri Lanka. Elle fait partie de la crise du capitalisme mondial qui s’aggrave rapidement, intensifiée par la pandémie de COVID-19 et maintenant par la guerre par procuration des États-Unis et de l’OTAN contre la Russie en Ukraine.

Les travailleurs du monde entier sont confrontés à des attaques similaires. La classe ouvrière du Sri Lanka doit se tourner vers ses frères et sœurs de classe en Inde, dans toute l’Asie du Sud et à travers le monde pour une lutte commune contre le capitalisme.

En construisant des comités d’action, les travailleurs sri-lankais peuvent coordonner leur lutte avec celles des travailleurs du monde entier en adhérant à l’Alliance ouvrière internationale des comités de base (IWA-RFC) lancée par le Comité international de la Quatrième Internationale.

Ce qui est surtout nécessaire, c’est la construction d’une direction révolutionnaire au Sri Lanka et au niveau international. Nous exhortons les travailleurs et les jeunes à rejoindre le PES, la section sri-lankaise du CIQI, et à en faire le parti de masse nécessaire qui pourra diriger les luttes à venir.

(Article paru en anglais le 9 mai 2022)

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