Le New York Times demande à la Chine de mettre fin à la politique du zéro COVID «quel qu’en soit le prix».

Depuis le début du mois de mars, la Chine fait face au variant Omicron hautement contagieux du virus SRAS-CoV-2, introduit dans le pays depuis l’extérieur, avec un degré élevé de mobilisation sociale et des difficultés importantes, mais jusqu’à présent avec un succès considérable. Cela n’a pas empêché la presse bourgeoise américaine de dénoncer sévèrement et à plusieurs reprises la politique chinoise du «Zéro COVID». Des condamnations dont le vitriol augmente proportionnellement aux progrès de la Chine dans sa lutte contre les infections.

Des habitants font la queue pour la première série de tests COVID de masse dans le district de Jingan, dans l’ouest de Shanghai, en Chine, le vendredi 1er avril 2022. (AP Photo/Chen Si, File) [AP Photo/Chen Si, File]

À cet égard, le récent rapport du New York Times rédigé par Alexandra Stevenson, chef du bureau de Shanghai du journal, qui traite de l’actualité du monde financier, est particulièrement immonde. Intitulé: «Le monde a essayé d’aller au-delà du COVID. La Chine pourrait y faire obstacle», il satisfait aux préjugés d’une couche de la classe moyenne supérieure réactionnaire et dérangée qui a misé sa fortune sur des marchés financiers en constante progression.

Stevenson commence par une déclaration provocante: «Alors que le reste du monde apprend à vivre avec le COVID-19, le plus haut dirigeant chinois, Xi Jinping, veut que son pays continue à s’efforcer de vivre sans lui, quel qu’en soit le prix».

Avant d’aborder les diverses affirmations de l’article du Times, il convient d’examiner l’état actuel de la pandémie en Chine.

La vague actuelle d’infections en Chine continentale a commencé au début du mois de mars. Depuis lors, la Chine a recensé près de 750.000 cas, dont une grande majorité était asymptomatique. Grâce à de vastes mesures de santé publique, y compris des confinements et des fermetures d’entreprises, des tests dynamiques de masse et la réorientation des ressources vers la construction de centres d’isolement et le renforcement des installations de traitement médical, il a été possible de limiter le nombre de décès à moins de 600. Ils sont presque tous intervenus à Shanghai, à l’exception de deux dans la province du Jilin, dans le nord-est du pays. À titre de comparaison, sur la même période, les États-Unis ont signalé 90.000 décès dus au COVID.

Les autorités sanitaires chinoises ont fait état de 1.789 cas de COVID dimanche, dont 71 nouvellement importés. Après avoir atteint un pic de près de 27.000 à la mi-avril, le nombre de cas à Shanghai, centre financier de la Chine et épicentre de la vague Omicron, est tombé à 1.369, dont 166 étaient symptomatiques. La moyenne sur sept jours est passée sous la barre des 3.000 cas quotidiens, soit une baisse de plus de 90 pour cent par rapport au pic atteint il y a quatre semaines. En dehors de Shanghai, on a enregistré seulement 349 nouveaux cas en Chine continentale.

De nombreuses entreprises basées à Shanghai ont déjà repris leurs activités. Les responsables de la ville visent la mi-mai pour l’ouverture après avoir atteint la transmission communautaire zéro COVID. Plus de 99 pour cent de tous les nouveaux cas se trouvent actuellement parmi les personnes placées en isolement ou en quarantaine, soit 2 millions des 26 millions d’habitants de la ville. Près de 18 millions de résidents (70 pour cent) se trouvent dans des zones de précaution désignées, notamment des communautés, des villages, des entreprises et d’autres sites sans cas positif depuis plus de deux semaines.

La stratégie d’élimination semble prometteuse malgré les affirmations répétées des médias bourgeois selon lesquelles Omicron ne peut être éliminé. Les décès ont été maintenus au niveau le plus bas possible, la vie a été préservée et le pays est en train de faire la transition vers la réouverture de ses centres de production et de distribution. Compte tenu de ces prémisses, on doit demander à Stevenson ce qu’elle entend par l’intention de la Chine de vivre sans COVID «quel qu’en soit le coût»? Le coût pour qui? De toute évidence, elle ne se soucie que du coût financier pour les investisseurs occidentaux, et non du coût en vies humaines pour le peuple chinois.

La veille de la parution du rapport de Stevenson dans le Times, le président Joe Biden a reconnu dans une déclaration préenregistrée superficielle, de seulement 213 mots, que plus d’un million d’américains sont morts du COVID. Il s’agit du même président qui a déclaré, en tant que candidat en octobre 2020, qu’un Président comme Trump, qui avait permis plus de 200.000 décès dus au COVID, devrait être démis de son poste. Pourtant, sous le mandat de Biden à la Maison-Blanche, plus de 600.000 personnes ont perdu la vie du fait de la pandémie.

Stevenson n’a pas mentionné que cela faisait partie du «coût» de la vie avec le COVID.

Elle ne reconnaît pas non plus que le Timesa joué un rôle central dans la promotion de la politique d’«immunité collective» qui s’est transformée au cours des deux dernières années en «vivre avec le virus», car les classes dirigeantes des pays impérialistes n’ont cessé de donner la priorité aux profits sur les vies, laissant la pandémie se répandre, plutôt que d’imposer des fermetures temporaires des activités commerciales qui se sont avérées efficaces pour arrêter la propagation du virus. Cette politique de «laisser faire» a entraîné la mort de plus de 20 millions de personnes dans le monde, plongé des centaines de millions de personnes dans la pauvreté et contraint des milliards de personnes à faire face aux multiples conséquences sanitaires d’infections chroniques par un virus qui infectera encore et encore les populations.

Thomas Friedman a été le premier à utiliser l’expression «le remède ne peut pas être pire que la maladie» dans une colonne du Timespubliée le 23 mars 2020, dans laquelle il affirmait que les mesures telles que les fermetures d’établissements et d’écoles pour bloquer la propagation du virus SRAS-CoV-2 étaient inacceptables, car elles détruiraient l’économie. Le gouvernement Trump et les médias ont repris ce slogan parce qu’il servait les intérêts du capital financier. Maintenant, il sert de base à la politique du gouvernement Biden.

La duplicité de Stevenson apparaît quand elle écrit: «Pendant plus de deux ans, la Chine a maintenu ses chiffres de COVID à un niveau enviable en réagissant avec acharnement aux signes d’une épidémie par des tests et des confinements rapides. Ce succès a permis au Parti communiste de se vanter d’avoir donné la priorité à la vie sur la mort lors de la pandémie, contrairement aux démocraties occidentales où les décès dus au virus ont explosés».

Tout d’abord, la question de la priorisation n’est pas entre la vie et la mort. Stevenson dissimule le vrai problème: c’est la vie avant les profits. Et si les «démocraties occidentales» étaient jalouses des faibles chiffres du COVID en Chine, alors pourquoi n’ont-elles pas suivi les leçons des expériences chinoises en matière de santé publique et sauvé la vie de leurs populations? C’est en effet un principe de base des politiques de santé publique bien établies, remontant au 19e siècle qu’il faut donner la priorité à la chasse «acharnée» de chaque infection pour prévenir les épidémies de masse. Il ne s’agit pas d’une doctrine spécifiquement chinoise et elle n’a rien à voir non plus avec la politique stalinienne du Parti communiste chinois.

Cependant, au lieu de traiter ces faits, Stevenson dépeint d’abord les confinements comme terribles et antidémocratiques, puis cite l’observation d’un «économiste anonyme» selon laquelle la politique est «zéro mouvement, zéro PIB».

La réalité est pourtant tout autre. L’économie de la Chine reste intacte. Son taux de mortalité par habitant de quatre par million à cause du COVID contre 3.068 décès par million pour les États-Unis a démontré la supériorité de la stratégie Zéro COVID. Le «peu importe le coût» de Stevenson n’est qu’une version plus obscène de la formule proposée par Friedman, déclarant ouvertement que lorsque la vie humaine se heurte au profit des entreprises, le profit doit l’emporter.

Il est révélateur que le seul responsable éminent de la santé qu’elle cite dans le cadre de sa diatribe anti-Chine contre le Zéro-COVID soit le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus. Il a déclaré mardi dernier: «Nous avons discuté de cette question avec des experts chinois, et nous avons indiqué que cette approche ne serait pas viable. Et compte tenu du comportement du virus, je pense qu’un changement serait très important».

Le commentaire du directeur de l’OMS est une déclaration réactionnaire qui réfute ses précédentes déclarations selon lesquelles le monde devrait se battre pour sauver chaque vie possible. Il s’agit de la même organisation qui, pendant deux ans, a résisté à l’acceptation de la preuve scientifique que le virus se transmettait par l’air plutôt que transporté dans de grosses gouttelettes. Ce commentaire ne fait que trahir, objectivement, la subordination de toutes les mesures de santé publique aux intérêts des sociétés internationales. Comme les Centres américains de contrôle et de prévention des maladies, l’agence de santé des Nations unies a été transformée en un appendice du capital financier mondial.

Stevenson cite une importante étude publiée dans Naturepar l’Université Fudan de Shanghai, qui a révélé que si Omicron pouvait se répandre librement en Chine, le pays pourrait s’attendre en six mois à 112 millions de cas symptomatiques, 5,1 millions d’hospitalisations, 2,7 millions d’admissions en soins intensifs et 1,6 million de décès, ainsi qu’à l’effondrement catastrophique de son système de santé.

Il ressort clairement de cette étude que laisser circuler le COVID en Chine serait une catastrophe colossale, non seulement pour la Chine, mais pour le monde entier, puisque 100 millions de cas supplémentaires signifient 100 millions d’occasions supplémentaires pour le virus de muter en variants encore plus mortels et infectieux.

Mais Stevenson ignore cela au profit de son obsession du coût financier plutôt que du coût humain. Elle poursuit en écrivant: «Les investisseurs et les chefs d’entreprise s’inquiètent du fait que l’adhésion rigide de la Chine à sa politique de “Zéro COVID” pourrait entraîner une chute libre de l’économie. Il est urgent que le gouvernement change de stratégie», a déclaré Fred Hu, un éminent investisseur chinois. Les avantages de la politique du zéro-COVID ne compensent plus les coûts économiques, a-t-il ajouté. S’en tenir à la stratégie Zéro-COVID décimerait son économie et saperait la confiance du public».

À l’appui de cette préoccupation, Stevenson écrit: «Selon une estimation, on a soumis près de 400 millions de personnes dans 45 villes à une forme de confinement en Chine au cours du mois dernier. Cela représente 7,2 billions de dollars de produit intérieur brut annuel».

C’est un chiffre créé dans l’esprit de l’aphorisme de Mark Twain contre «les mensonges, les foutus mensonges et les statistiques». Les procédures de confinement de la Chine sont très segmentées, les villes étant divisées en petits districts, chacun ayant des règles appliquées par des comités locaux. Si un district d’une ville de 10 millions d’habitants est sous confinement, généralement en raison d’un seul test positif, les 10 millions d’habitants sont comptabilisés dans l’estimation préparée par la banque Nomura. D’où la formulation évasive qu’emploie Stevenson: «une certaine forme de confinement».

L’auteur du Timesignore également un fait saillant qui réfute entièrement son portrait de la politique du zéro COVID comme étant répressive et antidémocratique: elle est largement populaire parmi le peuple chinois, ce qui est généralement reconnu même dans les rapports hostiles des médias.

Des Américains vivant en Chine ont fait l’éloge de cette politique, dont un qui a commenté l’article de Stevenson. Sean, qui travaille maintenant à domicile à Shanghai, écrit:

En tant qu’Américain vivant en Chine, je clique sur chaque article concernant la Chine, et beaucoup, beaucoup sont comme ceci: prendre un plaisir pervers à l’échec présumé de la politique chinoise de zéro Covid. C’est inconvenant, mais c’est aussi un délire factuel.

Les États-Unis ont près de 3.000 décès par million dus au Covid.

La Chine en a 3...

L’économie chinoise n’est pas entrée en récession:

Le produit intérieur brut (PIB) de la Chine a dépassé 114 trillions de yuans (environ 18,1 trillions de dollars) en 2021, enregistrant une augmentation de 8,1 pour cent par rapport à l’année précédente et une croissance moyenne de 5,1 pour cent au cours des deux années précédentes.

Il conclut: «Il y a tellement de désinformation motivée par l’idéologie dans les médias occidentaux que c’est exaspérant pour quelqu’un qui vit ici».

Le billet de Sean a attiré plus de 100 réponses favorables dans la section des commentaires qui a suivi l’article de Stevenson, devenant ainsi le deuxième meilleur classement des lecteurs.

Plutôt que de faire face à cette dose de réalité, le Timespréfère manifestement la supprimer, s’engageant dans sa propre forme de censure politique, non moins délétère que la variété stalinienne. Le commentaire de Sean faisant l’éloge de la politique Zéro COVID a été supprimé.

(Article paru d’abord en anglais le 16 mai 2022)

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