Les sociaux-démocrates et les ex-staliniens embarquent la Finlande et la Suède dans l'OTAN

La demande d'adhésion de la Finlande et de la Suède à l'alliance militaire de l'OTAN a été réalisée en étroite collaboration avec les grandes puissances impérialistes, qui considèrent l'intégration des pays scandinaves comme cruciale pour l'ouverture d'un deuxième front dans leur guerre pour soumettre la Russie.

Contrairement à l'affirmation selon laquelle Helsinki et Stockholm sont passées de «neutres à pro-OTAN» du jour au lendemain en réponse à l'invasion réactionnaire de l'Ukraine par la Russie, leur adhésion à l'alliance militaire occidentale, comme la guerre elle-même, a été préparée dans une conspiration en coulisses pendant de nombreux années. L'invasion de l'Ukraine par Poutine n'a servi que de prétexte pour déclencher des plans d'expansion de l'OTAN rédigés bien avant le 24 février 2022.

Les Marines américains travaillent aux côtés des membres de l'infanterie mécanisée suédoise pendant BALTOPS 22. (source : US Marines/Twitter) [Photo: US Marines]

Les formalités entourant l'adhésion d'Helsinki et de Stockholm à l'OTAN restent à finaliser, la Turquie refusant de fournir le consentement unanime requis pour entamer la procédure d'adhésion en raison des inquiétudes suscitées par le soutien des deux pays aux groupes nationalistes kurdes. Cependant, depuis qu'Helsinki et Stockholm ont déposé leurs candidatures officielles à la mi-mai, l'impérialisme américain a décidé d'adopter une politique du fait accompli pour faire des pays scandinaves des membres de facto de l'alliance. Le général Mark Milley, président des chefs d'état-major interarmées américains, s'est rendu à Stockholm ce mois-ci avec un cuirassé américain pour coïncider avec l'accueil par la Suède de l'exercice militaire BaltOps 22, une provocation de l'OTAN contre la Russie dans la mer Baltique impliquant 45 unités maritimes, 75 avions, et 7 000 militaires qui a commencé le 5 juin et se termine le 17 juin. La semaine dernière, la Finlande a annoncé le lancement de plans de construction de barrières le long de sa frontière de 1 300 kilomètres avec la Russie, citant la menace de «guerre hybride» de la Russie envoyant des migrants dans le pays.

Le rôle politique le plus important dans la transformation de la Finlande et de la Suède en États de première ligne dans la guerre de l'OTAN avec la Russie a été joué par les sociaux-démocrates et les partis de la pseudo-gauche, dont une grande partie du soutien politique substantiel dont ils ont bénéficié tout au long du XXe siècle était fondé sur leur opposition déclarée au militarisme et à la guerre. Ils sont devenus les principaux fauteurs de guerre et jouent un rôle essentiel pour étouffer l'important scepticisme populaire qui persiste parmi la population envers l'OTAN.

La Première ministre finlandaise Sanna Marin s'exprime au Parlement finlandais à Helsinki, en Finlande, le lundi 16 mai 2022. (AP Photo/Martin Meissner) [AP Photo] [AP Photo]

Les gouvernements finlandais et suédois sont actuellement dirigés par des partis sociaux-démocrates. La Première ministre finlandaise Sanna Marin et la Première ministre suédoise Magdalena Andersson sont les dirigeantes des partis sociaux-démocrates de leur pays. Marin dirige une coalition de cinq partis qui comprend la Ligue verte et l'Alliance de gauche ex-stalinienne, tandis qu'Andersson gouverne dans une administration minoritaire tolérée au parlement par les Verts suédois et l'ex-Parti de gauche stalinien.

Des opposants au militarisme aux faucons de guerre de l'OTAN

Les sociaux-démocrates suédois sont allés plus loin que les autres partis sociaux-démocrates d'Europe occidentale en accordant des réformes sociales à la classe ouvrière dans les années 1950 et 1960. Ces acquis, y compris des augmentations de salaire relativement généreuses et des services sociaux étendus, faisaient partie d'une politique soutenue par l'élite dirigeante suédoise qui cherchait à réglementer la lutte des classes par un système de négociation collective nationale et de cogestion syndicat/entreprise. Cela a été rendu possible par la neutralité de la Suède pendant la Seconde Guerre mondiale, qui a laissé intacts une grande partie de ses principaux secteurs industriels et manufacturiers tandis que ses concurrents européens étaient en ruine.

Plus fondamentalement, le développement économique de la Suède dépendait de la stabilisation temporaire du capitalisme mondial dans l'après-guerre, rendue possible par la trahison des luttes révolutionnaires ouvrières par la bureaucratie stalinienne qui ont éclatées après la guerre et de la capacité des États-Unis, la puissance impérialiste prééminente, à garantir la renaissance du système capitaliste.

Les sociaux-démocrates étaient associés dans la conscience populaire à la gratuité des soins de santé et de l'éducation, à une aide sociale généreuse et à la garde d'enfants gratuite, ce qui a créé une société - le Folkhemmet (maison du peuple) - qui contrastait fortement avec la pauvreté écrasante vécue par des masses de travailleurs suédois deux générations plus tôt au début du XXe siècle. Les sociaux-démocrates devaient également leur popularité à une position ferme, du moins en public, contre la violence et la répression militaires, qu'elles soient employées par l'impérialisme américain ou la bureaucratie stalinienne en Union soviétique.

Le ministre Olof Palme (deuxième à gauche) participe à la procession aux flambeaux avec l'ambassadeur du Nord-Vietnam à Moscou Nguyen Tho Chan (troisième à gauche) (source: Creative Commons/ Scanpix ) [Photo by Scanpix / CC BY 4.0]

En 1968, le ministre de l'Éducation Olof Palme, qui deviendra Premier ministre suédois un an plus tard, s’est joint à une manifestation contre la guerre du Vietnam à Stockholm avec l'ambassadeur du Nord-Vietnam à Moscou. Dans un célèbre discours, Palme a déclaré: «La démocratie est un système de gouvernement exigeant. Elle exige le respect des autres. On ne peut pas imposer un système de gouvernement à une nation de l'extérieur. Le peuple doit avoir le droit de décider de son propre destin. Elle présuppose donc le droit national à l'autodétermination. La démocratie exige la justice. On ne peut pas gagner un peuple en remplissant les poches de ceux qui sont déjà riches alors que les pauvres sont poussés dans une détresse toujours plus profonde. On ne peut répondre à la demande de justice sociale par la violence et le pouvoir militaire.»

Washington répondit en rappelant son ambassadeur à Stockholm pour des consultations. Plus tard en 1968, Palme condamna le déploiement de troupes soviétiques en Tchécoslovaquie par la bureaucratie stalinienne pour écraser le Printemps de Prague.

Dans un autre discours diffusé à la radio nationale en décembre 1972, peu de temps après que le gouvernement social-démocrate eut officiellement reconnu le Nord-Vietnam, Palme compara le bombardement américain de Hanoï aux crimes des nazis d'Hitler. «(L)es bombardements sont une atrocité», a-t-il déclaré. «Et de cela, nous avons de nombreux exemples dans l'histoire moderne. Ils sont généralement rattachés à un seul nom: Guernica, Oradour, Babi Yar, Katyn, Lidice, Sharpeville, Treblinka […] Maintenant un autre nom vient s'ajouter à la liste : Hanoï, Noël 1972».

L'opposition de Palme et des sociaux-démocrates à l'agression impérialiste américaine n'avait pas un caractère de principe. Les sociaux-démocrates ont poursuivi une politique de «non-alignement» militaire, largement soutenue par les cercles dirigeants suédois. Le maintien de la distance entre Stockholm et les deux blocs de la guerre froide a permis à la Suède de servir de canal clé pour les opérations de collecte de renseignements contre l'Union soviétique par les puissances impérialistes, avec lesquelles la Suède a conclu un accord de partage de renseignements dès 1954. Cela a permis aux entreprises et aux diplomates suédois d'établir des contacts avec les pays en développement et les mouvements de libération nationale considérés comme une menace «communiste» par l'impérialisme américain et ses alliés. La Suède a ainsi assumé un rôle disproportionné sur la scène mondiale compte tenu de la taille relativement petite du pays, et fut étiqueté comme une «superpuissance humanitaire».

Les critiques publiques des sociaux-démocrates à l'égard de la violence impérialiste américaine leur ont assuré un soutien populaire substantiel. Palme est resté Premier ministre jusqu'en 1976, concluant plus de quatre décennies de régime social-démocrate continu. Son assassinat dans des circonstances troubles en février 1986, date à laquelle il était à nouveau Premier ministre depuis plus de quatre ans, a exprimé des tensions sociales et politiques croissantes qui déchiraient la société suédoise alors que l'ère de stabilité capitaliste d'après-guerre cédait la place à des crises croissantes.

La social-démocratie finlandaise et le stalinisme dans l'après-guerre

Bien que la domination de la social-démocratie en Finlande ait été moins prononcée, les sociaux-démocrates étaient le plus grand parti pendant la majeure partie de l'après-guerre. Ils ont généralement recueilli environ 25 pour cent des voix et ont joué un rôle important dans le développement de la politique étrangère neutre d'Helsinki pendant la guerre froide.

Signature du Traité d'amitié, de coopération et d'assistance mutuelle entre l'Union soviétique et la Finlande à Moscou le 6 avril 1948. Signé par le ministre soviétique des Affaires étrangères Vyacheslav Molotov (assis), suivi du dirigeant soviétique Joseph Staline (debout, derrière Molotov). À gauche de Staline se trouvent le premier ministre finlandais Mauno Pekkala, à la droite de Staline se trouvent les ministres des Affaires étrangères Carl Enckell et Reinhold Svento, ministre de l'Intérieur Yrjö Leino et les députés Urho Kekkonen, Onni Peltonen et JO Söderhjelm. (source: Creative Commons/Source inconnue/Auteur inconnu) [Photo by Unknown author / CC BY 4.0]

Le Parti communiste stalinien de Finlande (SKP) a également joué un rôle de premier plan dans la politique officielle. L'un des plus grands partis staliniens à l'ouest du rideau de fer, le SKP est entré au gouvernement après la fin de la Seconde Guerre mondiale pour stabiliser le capitalisme finlandais. Il a été intimement impliqué dans les négociations du Traité d'amitié, de coopération et d'assistance mutuelle avec l'Union soviétique en 1948 garantissant la poursuite d'une économie de marché en Finlande et stipulant le statut neutre d'Helsinki dans les affaires mondiales. Le traité obligeait Helsinki à payer des réparations à l'Union soviétique pour sa participation aux côtés des nazis à la guerre d'extermination contre l'URSS et exigeait de la Finlande qu'elle résiste à toute attaque de «l'Allemagne et de ses alliés», une formulation largement interprétée comme signifiant les puissances occidentales, sur l'Union soviétique effectuée via le territoire finlandais. Mauno Pekkala, membre du SKP, a assisté à la cérémonie de signature du traité à Moscou en avril 1948 en tant que Premier ministre finlandais.

La Ligue démocratique populaire finlandaise (SKDL), une alliance électorale dominée par les staliniens, resta en dehors du gouvernement de 1948 à 1966, recueillant environ 20 pour cent des voix aux élections législatives. À la fin des années 1960 et au début des années 1970, il participa à plusieurs gouvernements dirigés par les sociaux-démocrates. En 1990, alors que le programme de restauration capitaliste de Gorbatchev en Union soviétique battait son plein, le SKDL s'est transformé en Alliance de gauche, qui détient actuellement deux postes ministériels dans le gouvernement pro-OTAN de Marin.

La dissolution de l'Union soviétique

La dissolution stalinienne de l'Union soviétique et la restauration du capitalisme en Russie et dans toute l'Europe de l'Est ont fondamentalement changé le cadre politique et géostratégique sur lequel reposait la «neutralité» finlandaise et suédoise. Presque immédiatement après la fin de l'URSS, les deux pays scandinaves ont pris des mesures pour subordonner plus directement leur politique étrangère à l'impérialisme américain et européen. La Finlande a renégocié son traité de 1948 avec la Russie en 1992 pour lui permettre plus de liberté pour participer aux alliances occidentales. Trois ans plus tard, la Finlande et la Suède rejoignirent l'Union européenne.

Les sociaux-démocrates ont joué un rôle de premier plan dans l'approfondissement des relations de la Suède et de la Finlande avec les principales puissances impérialistes, à commencer par leur adhésion au Partenariat pour la paix (PFP) de l'OTAN en 1994. Le PFP a servi de mécanisme pour intégrer 13 pays de l'ancienne sphère d'influence soviétique à l'OTAN et renforcer la coopération avec l'Ukraine.

Le secrétaire américain à la Défense William S. Cohen (à gauche), le président finlandais Martti Ahtisaari (2e à partir de la gauche) et le ministre russe de la Défense, le maréchal Igor Sergeyev (2e à partir de la droite), sont rejoints par un interprète (à droite) alors qu'ils se rencontrent pour de nouvelles discussions à la place présidentielle d'Helsinki, en Finlande, le 17 juin 1999. Les participants discutent des détails de la participation de la Russie aux efforts de maintien de la paix au Kosovo. (source: Creative Commons/Helene C. Stikkel) [Photo by Helene C. Stikkel / CC BY 4.0]

Maartti Ahtisaari, président de la Finlande de 1994 à 2000, est devenu l'un des partisans sociaux-démocrates les plus fervent de l'adhésion à l'OTAN. Ahtisaari, le principal négociateur de l'Union européenne visant la reddition de la Serbie en juin 1999 lors du bombardement sans pitié de Belgrade par l'OTAN, a déclaré en 2014: «La Finlande aurait dû faire partie de toutes ces organisations internationales auxquelles les démocraties occidentales appartiennent depuis longtemps. Cela inclut l'OTAN.»

Forces suédoises en Afghanistan (source : Creative Commons/ Brindefalk de Karlskrona, Suède) [Photo by Brindefalk from Karlskrona, Sweden / CC BY 4.0]

Sous le gouvernement social-démocrate de Göran Persson, la Suède a officiellement abandonné sa neutralité en matière de politique étrangère au début de 2002. Cela a coïncidé avec l'envoi de troupes suédoises pour soutenir les forces d'occupation de l'OTAN au Kosovo et en Afghanistan. Les avions de guerre suédois ont rejoint par la suite le bombardement brutal de la Libye par l'OTAN, qui a coûté la vie à des dizaines de milliers de personnes et plongé le pays dans une guerre civile qui se poursuit à ce jour.

Le coup d'État de Maïdan de 2014 soutenu par l'Occident, mené par les forces fascistes qui a conduit au renversement du président ukrainien pro-russe Viktor Ianoukovitch à Kiev, a été saisi en Scandinavie pour légitimer un renforcement militaire majeur. Citant l'annexion de la Crimée par la Russie, une réponse à l'établissement d'un régime pro-occidental à Kiev qui a persécuté les Ukrainiens russophones, la Suède a initié une augmentation massive des dépenses de défense. La Finlande et la Suède sont toutes deux devenues des «partenaires d'opportunités améliorées» grâce à l'Initiative d'interopérabilité des partenariats de l'OTAN, lancée lors du sommet de l'OTAN de 2014 au Pays de Galles, permettant aux partenaires de participer à des exercices et d'adopter les normes de l'OTAN. L'Ukraine était un autre «partenaire d’opportunité amélioré».

Char britannique Challenger 2 en action lors de l'exercice Arrow, un exercice du Corps expéditionnaire conjoint qui s'est tenu en Finlande en mai 2022 (source : Defence Equipment & Support/Twitter) [Photo: Defence Equipment & Support]

Le gouvernement dirigé par les sociaux-démocrates de Stefan Löfven, dont la majorité parlementaire dépendait du soutien des Verts et du Parti de gauche, a signé un accord de défense nordique avec la Finlande et les membres de l'OTAN, le Danemark, la Norvège et l'Islande en 2015. En 2017, Helsinki et Stockholm ont rejoint la Force expéditionnaire conjointe (JEF), une alliance dirigée par les Britanniques de membres baltes et nordiques de l'OTAN, visant explicitement à affronter la Russie.

La guerre USA-OTAN avec la Russie et la ruée vers l'adhésion à l'OTAN

Cette histoire montre clairement l'absurdité des reportages des médias affirmant que la Finlande et la Suède ont fait volte-face dans leur politique étrangère après l'invasion de l'Ukraine par le président russe Vladimir Poutine. Les projets d'adhésion de Stockholm et d'Helsinki à l'OTAN ont longtemps mûri et n'attendaient qu'un prétexte pour être mis en œuvre.

La Finlande et la Suède ont été intimement impliquées dans la série de provocations de l'OTAN qui ont conduit aux invasions de Poutine. Leurs armées ont participé à des exercices dirigés par l'OTAN avec l'Ukraine en mer Noire et dans la région de la Baltique. En décembre 2021, le même mois que l'administration Biden a rejeté l'appel de la Russie pour des négociations sur les garanties de sécurité, la Finlande a finalisé un accord avec Washington pour acheter 64 avions de chasse F-35 à Lockheed Martin. L'accord, qui équivaut à un pays de la taille de l'Allemagne achetant plus de 900 avions de combat, était le plus gros achat militaire de l'histoire finlandaise.

Immédiatement après l'invasion russe, la Suède et la Finlande sont rapidement passées en mode de guerre totale. Les sociaux-démocrates ont obtenu un soutien quasi unanime au parlement suédois le 28 février pour envoyer des armes et du matériel militaire à l'Ukraine, la première fois que la Suède envoyait officiellement des armes à un pays en guerre depuis la Guerre d'Hiver entre la Finlande et l'Union soviétique en 1939.

Un nid de mitrailleuse finlandaise Maxim M-32 pendant la Guerre d'Hiver (source: Creative Commons/auteur inconnu) [Photo by unknown author / CC BY 4.0]

La décision a vu l'ex-Parti de gauche stalinien adopter pleinement la fièvre de la guerre. Lors d'une réunion de la direction du parti le 27 février, le parti a initialement pris la décision de s'opposer à la fourniture d'armes à l'Ukraine. Mais après que cinq députés ont rompu les rangs au parlement le lendemain et soutenu le transfert d'armes, une deuxième réunion des dirigeants le 1er mars a renversé la position du Parti de gauche deux jours plus tôt s'opposant à la fourniture d'armes à l'Ukraine.

Nooshi Dadgostar, cheffe du Parti de gauche s'exprimant au Parlement le 7 juillet 2021 (Creative Commons/Frankie Fouganthin-Eget arbète) [Photo by Frankie Fouganthin-Eget arbete / CC BY 4.0]

Nooshi Dadgostar, cheffe du parti de gauche a presque déclaré son soutien à l'adhésion à l'OTAN dans une diatribe nationaliste plus tard en mars. «Ma position est que nous sommes plus en sécurité en Suède si nous sommes en dehors de toute alliance militaire», a-t-elle déclaré. «Mais il est important que nous ayons un large accord. Que nous le fassions ensemble comme un seul peuple et une seule nation. Je ne suis pas souvent d'accord avec Carl Bildt [un ancien Premier ministre conservateur et défenseur de longue date de l'adhésion à l'OTAN], mais sur cette question, je le suis. Il y a la gauche et il y a la droite, mais l'armée suédoise, c'est tous les Suédois ensemble.»

La pseudo-gauche finlandaise s'est comportée de manière tout aussi vénale. Après avoir affirmé en juin 2019 lors des pourparlers sur leur participation au gouvernement dirigé par les sociaux-démocrates qu'elle le ferait à condition que la Finlande ne rejoigne pas l'OTAN pendant le mandat du gouvernement, l'Alliance de gauche a adopté la candidature de la Finlande à l'OTAN. Nonobstant l'opposition formelle de l'Alliance de gauche à l'OTAN, la cheffe du parti Li Andersson a déclaré début mai que si le gouvernement dans lequel elle occupe le poste de ministre de l'Éducation déposait une demande d'adhésion à l'OTAN, elle n'y verrait pas une raison pour démissionner de son poste. «L'Alliance de gauche était autrefois assez unanime sur cette question, mais il y a maintenant deux camps distincts au sein du parti et beaucoup ne sont pas sûrs de leur position», a déclaré Andersson à la suite d'une réunion de la direction du parti le 7 mai.

Andersson a reçu le soutien d'une réunion conjointe du conseil du parti et du groupe parlementaire, qui a voté par 52 voix contre 10 pour rester au gouvernement si une demande d'adhésion à l'OTAN était déposée. L'«opposition» de l'Alliance de gauche à l'OTAN ne l'était que sur le papier. Andersson l'a rendu explicite le 12 mai, déclarant son soutien à une candidature à l'OTAN.

Trois jours plus tard, un vote écrasant en faveur de l'adhésion à l'OTAN a eu lieu au conseil national des sociaux-démocrates, avec 53 des 60 membres présents votant pour rejoindre l'alliance. S'adressant au Parlement le 17 mai, la Première ministre Marin a déclaré : «Notre environnement de sécurité a fondamentalement changé.»

La transformation de la Finlande et de la Suède en États de garnison de première ligne dans la guerre entre les États-Unis et l'OTAN avec la Russie par les mêmes forces politiques qui ont affirmé pendant des décennies qu'il était possible de rester en dehors des rivalités entre grandes puissances et de réformer le capitalisme en une société plus pacifique et «juste» est une leçon politique pour les travailleurs à l'échelle internationale. L'aggravation de la crise du capitalisme mondial, exprimée dans le danger d'une guerre mondiale, la croissance des inégalités sociales et une pandémie mortelle qui a tué des millions de personnes, n’a épargné aucun pays du monde. Les fantasmes politiques fondés sur l'esprit de clocher national et les réformes au coup par coup, que les «progressistes» du monde entier justifiaient en se référant au «modèle suédois», se sont avérés illusoires.

Pour s'opposer à la guerre et à la montée de la crise sociale, les travailleurs de Suède, de Finlande et de toute la Scandinavie ne peuvent revenir à l'époque de la «neutralité» social-démocrate en matière de politique étrangère et de compromis social au niveau national. La restabilisation provisoire du capitalisme d'après-guerre et l'équilibre des forces entre les grandes puissances qui ont rendu ces politiques possibles ont depuis longtemps disparus. Ce qu'il faut, c'est la construction d'un mouvement anti-guerre de masse basé sur une nouvelle orientation politique: l'unification de la classe ouvrière en Suède et en Finlande avec leurs frères et sœurs de classe à travers l'Europe et dans le monde sur la base d'un programme socialiste et internationaliste. Cette lutte nécessite la création de sections du Comité international de la Quatrième Internationale dans toute la région scandinave.

(Article paru en anglais le 12 juin 2022)

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