Le maire démocrate d’Akron réimpose le couvre-feu alors que la police continue de se déchaîner contre les manifestants

Depuis près d’une semaine, la ville ouvrière d’Akron, située dans le nord-est de l’Ohio, a été transformée en véritable État policier par le maire démocrate Dan Horrigan, à la suite de la diffusion des images des caméras corporelles de la police montrant le meurtre brutal et criminel de Jayland Walker par la police sous une grêle de balles le 27 juin.

La police d’Akron en tenue anti-émeute arrêtant Jacob Blake Sr mercredi soir [Photo: Cortez Rice] [Photo: Cortez Rice]

L’assaut policier en cours contre les droits démocratiques des habitants d’Akron s’est poursuivi jeudi après que Horrigan, en étroite coordination avec le département fasciste de la police d’Akron et le FBI, a réimposé un couvre-feu nocturne pour le centre-ville d’Akron.

Le maire et l’ensemble de la classe dirigeante américaine sont terrifiés à l’idée que le caractère brutal du meurtre de Walker, filmé par les caméras de la police, puisse déclencher une explosion sociale similaire aux protestations nationales et internationales qui ont suivi le meurtre de George Floyd par la police en 2020.

La mort de Walker, comme celle de Floyd avant lui et les plus de 1000 personnes qui sont tuées par la police aux États-Unis chaque année, montre combien est frauduleuse l’idée selon laquelle la police, financée généreusement par les partis démocrate et républicain, existe pour protéger l’ensemble de la population et assurer la tranquillité générale. La police impose la «loi et l’ordre» capitaliste par la violence meurtrière. L’État lui confère d’immenses pouvoirs et protections pour tuer en toute impunité tous ceux qui pourraient menacer le régime capitaliste.

Le nouveau couvre-feu indéfini imposé par Horrigan a débuté à 22h jeudi et englobe le centre-ville, qui comprend le commissariat de police, deux grands hôpitaux, un parc public et les plus grands refuges pour sans-abri de la ville. Avant le début du couvre-feu, des dizaines de manifestants se sont rassemblés devant le centre de justice Harold K. Stubbs. Cependant, aucun n’était dehors une fois le couvre-feu instauré.

À 22h, seuls la police et quelques membres des médias se trouvaient devant le poste de police. Mais comme l’a rapporté Molly Walsh pour l’Akron Beacon Journal, au-delà de la zone de couvre-feu, les manifestants s’étaient rassemblés devant le domicile de Charlie Brown, le maire adjoint chargé de la sécurité publique. Un manifestant interrogé par Walsh a déclaré qu’ils protestaient devant le domicile de Brown parce que «c’est une charge contre chaque fonctionnaire de la ville qui ne fait pas tout ce qui est en son pouvoir pour publier les noms des policiers, les relever de leurs fonctions, sans salaire... nous exigeons qu’ils soient inculpés pour ces crimes et nous exigeons la justice pour Jayland Walker».

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Une vidéo publiée jeudi soir sur les réseaux sociaux confirme que la police a continué à harceler les manifestants en dehors de la zone de couvre-feu.

Les manifestations contre la violence policière ont débuté à Akron, une ville de 200.000 habitants située à environ 60 km au sud de Cleveland, le mercredi 29 juin et se poursuivent depuis. Des manifestations ont également eu lieu dans tous les États-Unis. La semaine dernière, des manifestations de soutien à Walker ont eu lieu à Columbus en Ohio, à Washington DC et à New York, et d’autres étaient prévues ce week-end.

Malgré la diffusion dimanche des images des caméras de police montrant que les policiers ont non seulement tué Walker, qui n’était pas armé, mais ont continué à lui tirer dessus bien après qu’il se soit effondré sur le trottoir, les manifestations contre la violence policière à Akron et dans tout le pays ont été majoritairement pacifiques.

On ne peut pas en dire autant de la police d’Akron. Juste avant le 4 juillet, le maire Horrigan a imposé le premier couvre-feu, après avoir annulé les célébrations du 4 juillet. Dans sa déclaration annonçant l’état d’urgence et l’imposition du couvre-feu, Horrigan a qualifié les manifestants de «violents», donnant au département de police d’Akron, qui regorge de fascistes et de racistes, un chèque en blanc pour «préserver la paix dans notre communauté».

Depuis dimanche soir, la police s’est livrée à des attaques nocturnes contre de petits groupes de manifestants et même des journalistes. La police anti-émeute ne s’est pas contentée de frapper les manifestants, mais les a délibérément ciblés avec des grenades lacrymogènes, qui, en plus de contenir des produits chimiques pouvant provoquer un avortement, sont tirées à haute vélocité et peuvent être mortelles.

Des dizaines de manifestants ont été blessés et plus de 55 ont été arrêtés sur la base de fausses accusations d’«émeutes» et de «conduite désordonnée» pour avoir prétendument violé le couvre-feu et les directives de la police. Au cours des 48 dernières heures, des manifestants détenus arbitrairement ont donné des interviews sur les conditions de détention dans les prisons de la ville, décrivant des policiers violents qui les menaçaient avec des fusils de chasse alors qu’ils restaient enchaînés par les poignets et les chevilles, tout en se voyant refuser des soins médicaux.

Parmi les personnes menottées et agressées par la police mercredi soir figurait Jacob Blake Sr, le père de Jacob Blake Jr, qui a été abattu de sept balles dans le dos en août 2020 par un policier de Kenosha (Wisconsin), le laissant paralysé. L’officier qui a tiré sur Jacob Blake a fait l’objet d’une «enquête» de l’État du Wisconsin et a été innocenté de tout acte répréhensible. Il est actuellement de retour en patrouille.

Le meurtre de Blake Jr a entraîné des manifestations multiraciales de plusieurs jours contre la violence policière à Kenosha. Comme à Akron, en réponse aux demandes de la communauté ouvrière pour que la police rende des comptes, le maire démocrate de Kenosha a fait venir des forces de police supplémentaires et a imposé un couvre-feu.

La police de Kenosha ainsi que la police d’État et les agents fédéraux ont permis aux milices fascistes de prendre la ville d’assaut, de violer le couvre-feu et d’agresser les manifestants. Cela a créé les conditions pour que Kyle Rittenhouse, ardent partisan de Trump et membre honoraire des Proud Boys, voyage depuis l’Illinois, entre dans la ville et tire sur trois manifestants, en tuant deux.

Lors de son procès l’année dernière, Rittenhouse a été acquitté de tous les chefs d’accusation après que le juge pro-Trump qui supervisait le procès a interdit tout témoignage et toute preuve qui aurait pu mettre en évidence la nature politique des meurtres ou l’association de Rittenhouse avec des groupes de miliciens fascistes.

Alors que Rittenhouse est libre, Blake Sr fait l’objet d’un mandat d’arrêt. Bien que Blake Sr souffre d’un handicap et se trouvait sur le trottoir lors de la manifestation de mercredi, la police l’a violemment arrêté, ce qui a provoqué une crise et l’a rendu inconscient.

Blake Sr a été transporté aux urgences de l’hôpital général d’Akron mercredi soir. L’hôpital a été verrouillé par la police, qui a refusé de laisser entrer les proches de Blake. Pendant plusieurs heures mercredi soir, l’état de Blake était inconnu des amis et de la famille.

Un autre manifestant contre la violence policière arrêté mercredi soir par la police d’Akron était Bianca Rice, tante de Breonna Taylor. Taylor, une technicienne des urgences afro-américaine de 26 ans, a été assassinée dans son appartement par trois policiers de Louisville (Kentucky) en mars 2020. Les policiers ont effectué une descente sans préavis dans son appartement et l’ont abattue dans son sommeil. Aucun des policiers qui l’ont assassinée n’a été inculpé pour son meurtre.

Blake Sr a été inculpé d’émeute, de résistance à l’arrestation, de refus de dispersion et de trouble de l’ordre public. Rice fait face aux mêmes accusations, moins celle de résistance à l’arrestation.

Aucun des policiers qui ont assassiné Jayland Walker n’a été arrêté ou même identifié.

(Article paru en anglais le 8 juillet 2022)

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