Après le tir de missile ukrainien sur la Pologne, l’OTAN accélère l’envoi d’armes en Europe orientale

La semaine dernière, l’Ukraine a tiré au moins un missile sur la Pologne, tuant deux civils polonais, dans le but d’accuser Moscou et d’entraîner l’OTAN directement dans la guerre avec la Russie.

Même si les États-Unis et d’autres membres de l’OTAN ont rejeté l’affirmation de l’Ukraine selon laquelle c’était la Russie qui avait tiré le missile la semaine dernière, les alliés de l’OTAN continuent à déployer des armes en Ukraine et dans les pays voisins.

Des missiles Patriot sont vus à l’aéroport de Rzeszow-Jasionka, le vendredi 25 mars 2022 (AP Photo/Evan Vucci). [AP Photo/Evan Vucci]

Mercredi, les États-Unis ont annoncé le versement de 400 millions de dollars supplémentaires en armes à l’Ukraine, dont des missiles sol-air NASAMS, des missiles à longue portée HIMARS, des missiles antiradiations et des centaines de véhicules militaires.

À ce jour, cela porte la valeur des livraisons d’armes américaines à l’Ukraine à 19,7 milliards de dollars, un chiffre que le gouvernement Biden a proposé de doubler dans une demande de financement envoyée au Congrès la semaine dernière.

Le ministre britannique de la Défense, Ben Wallace, a annoncé que le Royaume-Uni allait envoyer une série d’hélicoptères Sea King en Ukraine, marquant ainsi la première fois que Londres envoie des aéronefs pilotés dans le pays.

Lundi, le ministre polonais de la Défense, Mariusz Błaszczak, a annoncé que l’Allemagne stationnerait des missiles Patriot de fabrication américaine à sa frontière avec l’Ukraine, soulevant la perspective qu’un membre de l’OTAN puisse potentiellement abattre un avion russe opérant au-dessus de l’espace aérien ukrainien.

«Je proposerai de déployer ce système près de la frontière avec l’Ukraine», a déclaré Błaszczak avant son entretien téléphonique prévu avec la ministre allemande de la Défense, Christine Lambrecht.

Błaszczak a tweeté que «la ministre allemande de la Défense a confirmé sa volonté de placer des batteries Patriot près de la frontière», disant avoir reçu cette offre «avec satisfaction».

En mars, l’Allemagne et les Pays-Bas ont déployé une batterie de missiles Patriot en Slovaquie, à laquelle s’est ensuite ajoutée une batterie américaine.

La Pologne avait précédemment demandé des batteries de missiles Patriot aux États-Unis, pour un montant de 4,75 milliards de dollars.

Le déploiement de missiles allemands à la frontière de l’Ukraine était si provocateur que même le New York Times, l’un des principaux partisans de l’intervention américaine en Ukraine, a exprimé son inquiétude.

Dans un article intitulé «Des missiles pour la Pologne soulèvent des questions sur la position de l’OTAN dans la guerre en Ukraine» (Missiles for Poland Raise Questions on NATO Stance in Ukraine War), le Times écrit: «Le risque que représente la situation a été mis en évidence cette semaine lorsque la Pologne a annoncé qu’elle avait accepté une offre allemande de systèmes de défense aérienne Patriot et qu’elle les déploierait “près de la frontière” avec l’Ukraine».

Le Times note que «les plans de la Pologne pour déployer [les missiles] près de la zone de conflit signalent les inquiétudes croissantes que sa propre sécurité pourrait être en danger, et que la guerre à côté pourrait s’étendre, par accident ou par dessein».

«Que se passe-t-il si notre radar montre que des missiles arrivent et qu’ils doivent être interceptés à l’intérieur de l’Ukraine?» a demandé un analyste militaire qui s’est entretenu avec le Times.

Il a noté la possibilité que «des missiles Patriot opèrent dans l’espace aérien ukrainien», ce qui, commente le Times, «compromettrait l’approche non interventionniste de l’OTAN dans la guerre, et son engagement ferme à soutenir l’Ukraine avec des armes tout en évitant à tout prix toute implication à l’intérieur du pays qui pourrait être utilisée comme prétexte par Moscou pour une escalade».

Significativement, le Times a déclaré qu’il ne pouvait pas déterminer si les systèmes de missiles seraient sous contrôle allemand ou polonais, notant que «le ministère de la Défense à Varsovie n’a pas répondu aux questions sur qui serait en charge».

Les États-Unis construisent actuellement une base militaire à Redzikowo, en Pologne, qui, selon eux, est exclusivement destinée à la défense antimissile. L’installation aura la capacité de tirer des missiles offensifs, dont le Tomahawk.

Les responsables russes ont déclaré que la base américaine en Pologne était l’une des principales causes de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, les responsables russes affirmant que si l’Ukraine rejoignait l’OTAN, elle deviendrait une zone de transit pour les armes.

Plus tôt cette année, le président russe Vladimir Poutine a prévenu que si l’Ukraine rejoignait l’OTAN, «elle sera remplie d’armes. Des armes offensives modernes seront déployées sur son territoire, tout comme en Pologne et en Roumanie».

Alors même que les États-Unis et l’OTAN continuaient d’utiliser la frappe sur la Pologne comme prétexte pour intensifier leur implication dans la guerre, des questions sans réponse persistaient au sujet de l’incident de la semaine dernière.

L’Associated Press a annoncé qu’elle avait licencié James LaPorta, le journaliste qui aurait écrit le premier jet de l’article basé sur la déclaration d’un responsable anonyme des services de renseignement, et selon lequel la Russie avait tiré le missile.

L’Associated Press a refusé de fournir plus de détails sur l’identité de la source anonyme ou sur la personne qui, au sein de l’agence de presse, a pris la décision de publier le flash d’information.

Le 16 novembre, le lendemain de l’attaque, l’Associated Press a publié un rectificatif de son précédent reportage, en écrivant ce qui suit:

Dans les versions précédentes d’un article publié le 15 novembre 2022, l’Associated Press a rapporté à tort, sur la base d’informations fournies par un haut responsable des services de renseignement américains s’exprimant sous couvert d’anonymat, que des missiles russes avaient pénétré en Pologne et tué deux personnes. Des informations ultérieures ont montré que les missiles étaient de fabrication russe et très probablement tirés par l’Ukraine pour se défendre contre une attaque russe.

Mardi, les États-Unis ont annoncé le versement d’une aide économique supplémentaire de 4,5 milliards de dollars à l’Ukraine. Cette annonce fait suite à une demande de la Maison-Blanche, publiée le jour même où l’Ukraine a lancé des missiles sur la Pologne, visant à doubler le montant total dépensé par les États-Unis pour les livraisons d’armes à l’Ukraine.

Mercredi, le Parlement de l’Union européenne a voté pour désigner la Russie comme un «État soutenant le terrorisme».

Dans le même temps, la Russie a poursuivi ses frappes de missiles sur les villes ukrainiennes, mettant hors service les infrastructures énergétiques et déclenchant une vague de coupures de courant dans tout le pays.

Malgré les préoccupations évidentes de certaines parties de l’establishment politique américaine et européenne quant à la rapidité de l’escalade de la guerre, tant en intensité qu’en étendue géographique, la provocation d’une guerre terrestre majeure sur le continent européen risque d’entraîner l’ensemble du continent dans la spirale du conflit.

(Article paru en anglais le 24 novembre 2022)

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