Selon une enquête de la Fédération étudiante collégiale du Québec en 2021, un étudiant locataire sur 3 manquerait d’argent pour subvenir à ses besoins. À l’Université de la Colombie-Britannique, c’est 57% des étudiants qui éprouvent des difficultés financières en lien avec le logement et 62% qui s’inquiètent quant à leurs capacités de faire l’épicerie en raison du coût des logements.
Comme à l’international, l’inflation a atteint des seuils jamais vus au Canada en 40 ans. Après avoir atteint 8,1% en juin, le taux d’inflation s’élevait à 6,9% pour le mois de septembre suite à une baisse des prix de l’essence. Le prix des aliments, lui, a continué d’augmenter pour atteindre une hausse de 11,4% en septembre. Quant aux frais de scolarité, ils ont augmenté en moyenne de 2,3% à l’échelle du pays dans la dernière année, atteignant 7,7% en Alberta et 6,8% à Terre-Neuve-et-Labrador.
Partout au pays, le prix des logements a crû dans la dernière année. À London en Ontario, le prix moyen du 4 et demi (logement classique de 2 chambres) a augmenté de 23% pour atteindre 2060$ par mois. À Victoria, en Colombie-Britannique, le même type de logement a augmenté de 34% pour une moyenne de 2836$ alors que dans le Grand Toronto, le prix moyen d’un logement atteignait 2167$ en novembre 2021, en hausse de 4,3% par rapport à 2020. À Montréal, le logement de 2 chambres est passé à 1958$ par mois en moyenne, soit une hausse de 5,7% dans la dernière année.
Selon une enquête du groupe Fostering Learning and Awareness on Student Housing (Favoriser l'apprentissage et la sensibilisation au logement étudiant – FLASH), qui est la plus grande étude statistique menée sur la question du logement étudiant, 7 étudiants sur 10 déboursent plus de 30% de leur revenu pour se loger, dépassant ainsi ce qui est considéré comme le seuil d’abordabilité.
Il y a un manque chronique de logements partout au pays. Dans plusieurs grandes villes, le taux d’inoccupation est inférieur à 3% (seuil d’équilibre) comme à Vancouver (0,8%) et à Toronto (1,6%). Dans d’autres villes comme à Montréal, si le seuil général est jugé adéquat, c’est le taux d’inoccupation pour les loyers de moins de 1000$ (entre 1,0% et 2,2%) qui souligne l’état de crise.
Selon la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), c’est plus de 3,5 millions d’unités de logement de plus qu’il faudrait construire d’ici 2030. Considérant que les taux actuels prévoient une augmentation de seulement 2,3 millions d’unités d’ici la fin de la décennie, le manque de logements risque de s’accroitre, ce qui entrainera une pression supplémentaire sur le budget des travailleurs et des étudiants.
Cette montée en flèche des loyers est la conséquence directe de la spéculation immobilière des grands investisseurs qui a gagné en intensité avec la pandémie de COVID-19 pour leur procurer des profits encore plus importants. Dans les cas où ces promoteurs ont construit des unités, ces nouveaux logements ne comptent souvent que des appartements de luxe à des prix exorbitants qu’aucun travailleur ni étudiant ne peut se permettre.
Par conséquent, de nombreux étudiants doivent prendre des décisions difficiles quant à leurs études ou se tourner vers des solutions de derniers recours. Plusieurs «choisissent» d’aller dans des universités en dehors des grands centres pour éviter les loyers et le coût de la vie trop élevés. D’autres doivent se loger à une plus grande distance de leurs écoles, ce qui implique des coûts de déplacement plus élevés. Certains étudiants vont même jusqu’à faire 3h de voiture par jour afin de rester chez leurs parents.
Dans d’autres cas, des étudiants doivent se résoudre à vivre à plusieurs dans de petits logements ou dans des logements inadéquats où les problèmes de salubrité sont omniprésents. Certains sont même forcés de dormir dans leur voiture ou de camper. Dans les pires situations, des étudiants doivent demander de l’aide des refuges pour ne pas dormir dans la rue. Au Covenant House Toronto en Ontario, un refuge pour jeunes sans-abris, c’est 1 personne sur 3 qui est étudiant.
En raison du caractère incompressible du loyer, les étudiants doivent couper ailleurs, y compris dans la nourriture, pour arriver à la fin du mois. De plus en plus d’étudiants doivent se tourner vers les banques alimentaires pour se nourrir, contribuant largement à une hausse de leur achalandage de 35% entre mars 2019 et mars 2022.
Dans certains organismes qui s’occupent de l’aide alimentaire, comme à l'Alma Mater Society à l’Université de la Colombie-Britannique, des étudiants font la file durant des heures uniquement pour mettre la main sur quelques denrées. À l’Université d’Alberta, on distribue autant de paniers par semaine qu’on pouvait en distribuer par mois il y a 2 ans. À l’Association des étudiants de L’École de gestion, qui gère le Bac alimentaire de l’Université du Québec à Montréal, les 150 places de réservations disponibles pour accéder au service se remplissent en à peine 24 à 48 heures.
Avec les coûts qui ne cessent de croitre, y compris les frais de scolarité, les aides gouvernementales sont assorties de critères d’accessibilité de plus en plus restrictifs et de montants largement insuffisants. À titre indicatif, le gouvernement du Québec prévoit une aide maximale de 1013$ par mois.
Même avec l’aide de leur famille, qui subit également les impacts de la hausse du coût de la vie et des attaques sur les conditions de vie, de nombreux étudiants sont contraints de contracter des prêts ou des marges de crédit pour finir leurs études et de s’endetter de dizaines de milliers de dollars. La majorité des étudiants doivent travailler, souvent 2 emplois et maintenant même 3 emplois, tout en allant aux études, ce qui est en soi un travail à temps plein. De plus, avec une hausse moyenne des salaires cette année bien inférieure à l’inflation, les étudiants voient une baisse de leurs salaires réels déjà misérables.
Nombre d’étudiants internationaux sont confrontés à cette réalité, mais de manière plus prononcée. Outre les manœuvres douteuses de propriétaires qui leur font signer des baux à distance pour des appartements insalubres qu’ils n’auront pas visités, ils doivent payer des frais de scolarité beaucoup plus élevés. Par exemple, alors qu’un étudiant canadien de premier cycle déboursera en moyenne 6.834$ pour l’année 2022-2023, c’est 36.123$ que devra débourser en moyenne un étudiant international.
Face à ces conditions intolérables, des étudiants commencent à s’organiser et à faire entendre leur colère. À l’Université de la Colombie-Britannique, des centaines d’étudiants ont manifesté le 21 octobre dernier pour demander une plus grande contribution de l’université par rapport à l’insécurité alimentaire. Le 2 novembre, des centaines d’autres étudiants de l’Université Mémorial de Terre-Neuve ont exigé un retour du gel des frais de scolarité (en vigueur de 1999 à 2022), dont l’abandon a fait plus que doubler le coût des études à l’automne 2022.
Au Canada comme partout dans le monde, les jeunes et les travailleurs sont confrontés à un assaut tous azimuts sur leurs conditions de vie et de travail. Après des décennies de coupes systématiques dans les services publics, la classe dirigeante canadienne veut maintenant faire payer aux travailleurs et aux jeunes les centaines de milliards de dollars qu’elle a dépensés pour son sauvetage des banques et des grandes entreprises dans les premiers mois de la pandémie, et pour sa participation auprès de Washington à une guerre impérialiste en Ukraine contre la Russie.
La lutte pour le droit au logement et à l’éducation est indissociable d’une lutte contre le système capitaliste qui subordonne toutes les ressources de la société au profit privé et menace l’humanité d’une confrontation mondiale entre puissances nucléaires.
Les jeunes et les étudiants doivent se tourner vers la classe ouvrière internationale – la seule force sociale ayant la volonté et la capacité d’offrir une issue progressiste au capitalisme pourrissant, sur la base d’un programme socialiste qui mettra au premier plan les besoins sociaux des masses et non le profit individuel.
Nous appelons tous ceux qui sont d’accord avec une telle perspective à contacter le Mouvement international des jeunes et des étudiants pour l’égalité sociale (IYSSE – International Youth and Students for Social Equality).
Pour plus d'informations et pour rejoindre le IYSSE, visitez wsws.org/iysse.