Allemagne : des politiciens de premier plan tentent d’empêcher la répétition des élections à Berlin

La décision de la Cour constitutionnelle du Land de Berlin d’ordonner que soit répétées les élections à la Chambre des députés (parlement du Land) le 12  février a suscité une vive opposition dans les milieux dirigeants et au gouvernement fédéral. Quarante-trois hommes politiques ont demandé à la Cour constitutionnelle fédérale [qui siège à Karlsruhe] une injonction provisoire. Ils veulent s’assurer qu’on stoppe l’élection, bien que la campagne électorale ait déjà commencé.

Andy Niklaus, candidat du SGP et chauffeur de bus berlinois, sur un piquet de grève avec des enseignants en grève [Photo : WSWS].

Il s’agit là de bien plus que la crainte de politiciens, comme ceux du Parti de Gauche, de perdre leurs sièges et postes dans de nouvelles élections. Le fait que la Cour constitutionnelle ait jusque là refusé de débouter la plainte, malgré qu’elle ne relève clairement pas de sa compétence, montre qu’il y a un large soutien dans la classe dirigeante pour bloquer l’élection.

L’annulation d’une nouvelle élection serait une attaque fondamentale portée aux droits démocratiques de la population. Le scrutin initial de septembre 2021 ne respectait en rien les normes d’une élection libre et équitable, comme l’a établi sans doute possible la Cour constitutionnelle de Berlin. Des milliers d’électeurs avaient dû attendre pendant des heures, n’avaient pas pu voter du tout ou avaient reçu des bulletins de vote non valables.

Si cette pseudo-élection est légitimée par la Cour constitutionnelle fédérale et que la répétition nécessaire de l’élection est arrêtée cela reviendra à l’abolition d’élections démocratiques. L’élite dirigeante sera alors en mesure de saboter les élections à volonté et de faire passer sa politique détestée sans aucun égard pour les électeurs.

C’est précisément ce que vise cette tentative de stopper une nouvelle élection à Berlin. Ceux qui tirent les ficelles veulent empêcher que la politique de guerre et de dévastation sociale que tous les partis mettent implacablement en œuvre, au niveau national comme dans les Lands, soient abordée dans une élection. Face au plus grand réarmement depuis Hitler et à la montée explosive des tensions de classe, le droit de vote doit être suspendu.

Le Sozialistische Gleichheitspartei (Parti de l’égalité socialiste, SGP) déclare la guerre au cartel des partis de l’establishment et à sa tentative de stopper les élections. Nous participons aux élections du Land de Berlin pour donner une voix et une perspective socialiste à l’opposition généralisée à leur politique droitière et militariste. Nos rassemblements publics contre la politique de guerre, les milliers d’affiches que nous avons posées et les dizaines de stands d’information que nous avons organisés rencontrent déjà une grande résonnance. Nous mobiliserons l’opposition à toute tentative d’empêcher l’élection.

Les efforts visant à empêcher cette élection se trament dans le dos de la population, sous forme d’une véritable conspiration. Les 43  plaignants ne se manifestent pas ouvertement, et même la Cour constitutionnelle fédérale refuse de les nommer dans les procédures publiques. On sait cependant que 26 d’entre eux sont députés de Berlin (au parlement du Land) ou de conseils d’arrondissement berlinois.

Le fait que le cabinet d’avocats Redeker Sellner Dahs se soit chargé de représenter ces hommes politiques prouve que le gouvernement fédéral soutient leur plainte, car il représente habituellement le gouvernement fédéral dans toutes les affaires juridiques importantes. Il a par exemple représenté le ministère de l’Intérieur contre le Sozialistische Gleichheitspartei lorsque celui-ci a intenté une action en justice contre sa surveillance par l’‘Office pour la protection de la Constitution’ (le nom donné au renseignement intérieur allemand). Les avocats de ce cabinet ont justifié cette surveillance par le fait que le SGP se battait pour une «société démocratique, égalitaire et socialiste». La tentative d’empêcher qu’on renouvelle l’élection s’inscrit dans cette tradition anti-démocratique.

Le cabinet d’avocats garde strictement secret le mémoire de 250  pages qui s’oppose à la décision de la Cour constitutionnelle de Berlin et à la répétition de l’élection. Selon les médias, le document contient «de sérieuses allégations contre le verdict de celle-ci».

La Cour constitutionnelle fédérale participe au secret, elle refuse de publier les noms ou les plaidoiries. La Cour aurait dû rejeter l’affaire immédiatement, car elle n’est tout simplement pas compétente. Des experts renommés en droit constitutionnel – comme le professeur émérite de Berlin Ulli Battis et le professeur de Cologne Ulrich Vosgerau – ont déclaré catégoriquement qu’à Berlin seule la Cour constitutionnelle berlinoise était compétente pour décider de nouvelles élections au niveau du Land.

Mais la Cour constitutionnelle fédérale n’a jusque là pas rejeté l’action en justice. Après qu’elle fut déposée, le 15  décembre, elle a demandé à «toutes les parties de la procédure» de soumettre des commentaires écrits avant le 10  janvier. Même après l’expiration de ce délai, la Cour de Karlsruhe n’a toujours pas fait de déclaration. Il est clair que de vives disputes se déroulent dans les coulisses, qu’on garde secrètes vis-à-vis du public.

Nous exigeons donc la publication immédiate des noms des plaignants et de tous les mémoires déposés auprès de la Cour, ainsi que le rejet de l’action en justice. La population a le droit de savoir de quelle manière on tente de la priver de son droit de vote.

De plus doivent encore être répétées les élections au Bundestag (parlement fédéral) à Berlin. Elles ont eu lieu en même temps que les élections du Land et dans les mêmes bureaux de vote, et les mêmes erreurs se sont produites.

Jusqu’à présent, le Bundestag a décidé – avec les voix de la coalition ‘tricolore’ des sociaux-démocrates (SPD), des libéraux-démocrates (FDP) et des Verts – que les élections au parlement fédéral ne devaient être répétées que dans 431 des 2.257  circonscriptions électorales de Berlin. Un organe issu d’une élection entachée d’irrégularités et en partie illégale a décidé comment, quand et dans quelle mesure l’élection devait être répétée. Plusieurs actions en justice ont déjà été intentées contre cette décision du Bundestag.

Alors que le gouvernement fédéral organise le retour du militarisme allemand, qu’on lance à nouveau les chars allemands contre la Russie et que l’élite dirigeante risque sciemment une guerre mondiale nucléaire, les partis du Bundestag se prépare à priver la population du droit de vote.

Le SGP ne l’acceptera pas. Nous menons une campagne électorale intensive contre la conspiration droitière du Bundestag et du parlement de Berlin. Nous lançons un appel à tous ceux qui refusent d’accepter l’aggravation constante des inégalités sociales, la destruction des systèmes de santé et d’éducation et finalement la destruction nucléaire de notre planète: soutenez la campagne électorale du SGP! Inscrivez-vous dès maintenant en tant que soutien actif et votez SGP le 12  février!

(Article paru d’abord en anglais le 18  janvier 2023)

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