Les ambulanciers déclenchent une troisième série de grèves en Angleterre et au Pays de Galles

Les ambulanciers ont organisé lundi un troisième débrayage national en cinq semaines à travers l’Angleterre et le Pays de Galles dans leur lutte contre l’imposition d’une prime salariale de 4 pour cent pour 2022-3 aux travailleurs du Service national de santé (National Health Service – NHS).

Les grèves menées par plus de 18.000 ambulanciers comprennent des secouristes, des techniciens, des gestionnaires d’appels et du personnel de salle de contrôle des syndicats Unison, Unite et GMB.

Grève des ambulanciers à Shaftesbury, le 23 janvier 2023

Le troisième arrêt de travail d’une journée comptait 15.000 ambulanciers d’Unison qui ont mené des actions de grève dans cinq régions: Yorkshire, nord-ouest, nord-est, sud-ouest et Londres. Ils ont été rejoints par environ 5.000 membres du personnel du NHS dans deux trusts hospitaliers de Liverpool. L’action d’Unite concernait 2.600 ambulanciers dans cinq régions, dont le nord-ouest et le nord-est, ainsi que les West Midlands, les East Midlands et le Pays de Galles. L’action du GMB couvrait environ 1.000 ambulanciers dans les West Midlands, avec un autre débrayage mardi dans le nord-ouest.

On a accordé des dérogations à nouveau afin d’assurer une couverture «pour la vie», avec des appels de catégorie 1 couverts pour garantir une réponse d’urgence pour les cas qui mettraient la vie en danger.

L’opposition du gouvernement conservateur de Sunak à la demande d’une augmentation de salaire liée au coût de la vie s’est durcie. Le ministre de la Santé Steve Barclay a accusé les ambulanciers de «perturber» les services du NHS et a déclaré que les seules négociations salariales en cours concernaient l’exercice financier à venir. Ainsi, l’augmentation salariale pour 2022-3 représente moins de la moitié du taux d’inflation.

Le secrétaire d’État aux Affaires, Grant Shapps, a déclaré il y a quinze jours que l’action des ambulanciers «mettait des vies en danger». Mais le soutien de l’opinion publique reste du côté des grèves, car il est largement reconnu que la menace pour la sécurité des patients provient des coupes sombres opérées dans le NHS par le gouvernement qui impose désormais une baisse de salaire de fait au personnel de première ligne.

On a déployé des membres des forces armées pour briser la grève en conduisant des ambulances, comme ils le font depuis le début du conflit le 21 décembre. Leur rôle est négligeable du point de vue de la couverture des urgences. L’objectif principal est politique, afin de normaliser l’utilisation de l’armée pour briser les conflits sociaux de travailleurs clés, comme elle l’a fait contre les agents des passeports dans les aéroports pendant les grèves de Noël et comme elle s’apprête à le faire contre les pompiers. Un vote de grève de plus de 30.000 membres de l’Union des brigades de pompiers (FBU) se termine lundi prochain, alors qu’une autre section critique de travailleurs des services d’urgence a reçu une offre salariale insultante, cette fois de 5 pour cent.

Grève des ambulanciers à Bath, le 23 janvier 2023

Shapps est chargé de superviser l’introduction de la législation antigrève du gouvernement Sunak par le biais du projet de loi sur les grèves afin d’interdire le type d’action entrepris par les ambulanciers et les infirmières. Le fait que cela n’a rien à voir avec la sécurité des patients est mis en évidence par le nombre de décès en décembre depuis le début des enregistrements: jusqu’à 500 personnes meurent chaque semaine en raison de retards dans les traitements d’urgence.

La semaine dernière, les syndicats GMB et Unite ont annoncé de nouvelles dates de grève, respectivement de quatre et neuf jours jusqu’au 20 mars, à compter du 6 février. Les dirigeants respectifs des deux syndicats ont fait référence au gouvernement conservateur qui «diabolise» les ambulanciers, mais n’ont fait aucune mention de la législation antigrève que la campagne de dénigrement cherche à légitimer.

Le Royal College of Nursing (RCN) ainsi que les syndicats affiliés au Trades Union Congress (TUC) – Unite, GMB et Unison – complotent pour s’assurer que les travailleurs de la santé ne se joignent même pas à la manifestation officielle du TUC le 1er février contre le projet de loi sur les grèves. C’est le cas même si des centaines de milliers de travailleurs de la fonction publique, d’enseignants et de professeurs d’université sont prêts à participer à un arrêt de travail d’une journée.

Le prochain arrêt de travail d’une journée des ambulanciers du GMB et d’Unite, le 6 février, coïncide avec le premier jour d’une grève de deux jours du RCN, qui concerne 40.000 infirmières en Angleterre et au Pays de Galles.

Les ambulanciers ont constamment soulevé la demande d’une action unifiée depuis les piquets de grève, mais la secrétaire générale d’Unite, Sharon Graham, a déclaré lundi à la radio LBC: «Il y a beaucoup, beaucoup de jours entre maintenant et le 6 février et j’espère que le gouvernement reviendra à la raison, réunira les secrétaires généraux autour de la table – nous serons là à tout moment, n’importe où – et conclura cet accord».

«J’espère donc vraiment que le 6 février n’aura pas lieu parce que le gouvernement a mis une offre sur la table.»

Les secrétaires généraux mènent une retraite indigne face aux demandes salariales de leurs membres. Graham a déclaré sur Sky News qu’Unite accepterait une offre salariale à «deux chiffres» pour ses membres – aussi faible que 10 pour cent – comme prétexte pour retirer les grèves du calendrier.

Le leader d’Unite a fait référence au secrétaire général du RCN, Pat Cullen, qui a abandonné sans cérémonie la demande de «salaire de restauration» de RPI + 5 pour cent [19 pour cent] et a offert de rencontrer le gouvernement «à mi-chemin». «Nous avons tendu un rameau d’olivier, en fait l’arbre entier, au gouvernement. Nous avons proposé de faire la moitié du chemin, alors agissez», a déclaré Cullen.

La secrétaire générale d’Unison, Christina McAnea, a même présenté le chancelier Jeremy Hunt, ancien secrétaire à la Santé, comme un champion de la cause des travailleurs du NHS. Elle a déclaré au Guardian: «Jeremy Hunt connaît le NHS mieux que quiconque au sein du cabinet».

«En tant que secrétaire à la Santé, il a négocié l’accord salarial qui a mis fin à la grève de 2015. Il a fait pression pour un salaire équitable lorsqu’il était président du comité restreint de la santé. Mais en tant que chancelier, il a choisi d’oublier tout cela. Il doit sortir de sa cachette et débloquer le financement pour mettre fin aux grèves».

Hunt était un secrétaire à la Santé largement méprisé. Entre 2012 et 2018, Hunt a supervisé des niveaux de dépenses du NHS historiquement bas, a étendu la privatisation, a supprimé les bourses pour les infirmières et s’est attaqué aux médecins juniors en 2016 pour imposer un contrat inférieur réduisant les conditions et les salaires.

La bureaucratie de tous les syndicats de la santé a déjà ouvert la voie à un accord inférieur à l’inflation en Écosse. L’offre révisée du gouvernement décentralisé dirigé par le Scottish National Party (SNP) s’élevait à une augmentation moyenne de seulement 7,5 pour cent, soit 3 pour cent de moins que la mesure inférieure de l’inflation (CPI) qui s’élève à 10,5 pour cent.

Unison et Unite ont pu obtenir une entente au rabais tout juste au-dessus du CPI, mais il a été rejeté par les membres du RCN, du GMB et du College of Midwives, qui représentent collectivement 50.000 travailleurs de la santé et qui disposent d’un mandat de grève. Le rejet a été annulé par les dirigeants syndicaux sous prétexte d’entamer des pourparlers avec Humza Yousaf, secrétaire d’État à la santé du SNP, au sujet de la rémunération pour 2023-4. L’entente implique un billet à ordre selon lequel toute amélioration de l’accord serait antidatée de trois mois seulement, jusqu’en janvier.

La BBC a rapporté qu’une antidatation similaire de l’indemnité salariale pour cette année est un scénario exploré par Barclay dans le reste du Royaume-Uni. L’autre option envisagée consiste à trouver 2 à 3 millions de livres supplémentaires dans le budget actuel sous-financé du NHS. La semaine dernière, dans une colonne pour l’Independent, Barclay a écrit: «Les augmentations de salaire pour le personnel du NHS sont inabordables – et réduiront les soins aux patients».

Le chef travailliste sir Keir Starmer a chanté le même air, exposant sa position dans le Telegraph.

En novembre dernier, le RCN a estimé que le coût du règlement de la revendication salariale des infirmières s’élèverait à 9 milliards de livres sterling, si elle était généralisée à l’ensemble du personnel du NHS, à l’exception des médecins et des dentistes. Ce chiffre est comparable à la somme versée par le gouvernement conservateur au secteur privé pour les EPI [équipements de protection individuelle] qui ont dû être retirés de la vente parce qu’ils n’étaient pas adaptés à leur usage, dans un contexte de profit criminel, alors que la pandémie se déchainait dans la population.

L’unification des travailleurs de la santé contre le sabotage de l’appareil syndical nécessite la création de comités de la base. Cela doit être lié à une lutte plus large pour mobiliser la classe ouvrière dont les intérêts sont exclus par un système politique qui place les profits des entreprises au-dessus des besoins fondamentaux de la société. Cette lutte émergera dans le cadre d’un soulèvement mondial de la classe ouvrière contre la guerre, une pandémie sans fin et des niveaux sans précédent d’inégalité sociale, par la construction de l’Alliance ouvrière internationale des comités de base.

(Article paru en anglais le 25 janvier 2023)

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