Les Teamsters et le NPD saluent la loi de retour au travail contre les ambulanciers en grève à Terre-Neuve

Les services d’ambulance du secteur privé ont été entièrement rétablis dans les régions rurales de Terre-Neuve mardi soir après l’adoption d’un projet de loi ordonnant la fin immédiate d’une grève de quatre jours menée par 120 chauffeurs et travailleurs paramédicaux, représentés par la section 855 des Teamsters. Depuis de nombreuses années, le gouvernement provincial finance des sociétés d’ambulance privées pour couvrir les vastes régions rurales de Terre-Neuve. Il existe 25 exploitants d’ambulances privées et 22 exploitants d’ambulances communautaires. Le gouvernement leur verse un total de 34 millions de dollars en financement global pour leurs services.

La grève de quatre jours visait sept de ces fournisseurs, qui appartiennent à l’homme d’affaires local Bob Fewer. Au départ, les travailleurs avaient entrepris une campagne de «travail selon la convention», mais après que la direction ait victimisé un travailleur pour sa participation à l’action syndicale, tous les travailleurs ont cessé le travail. Les services locaux de pompiers volontaires, renforcés par quelques ambulances des autorités de santé publique proches, ont assuré une couverture d’urgence de base pendant la grève.

Les ambulanciers du secteur public, principalement basés dans les zones urbaines, sont soumis depuis de nombreuses années à des restrictions en matière de grève totale. Avant qu’ils puissent obtenir le droit légal de faire la grève, leur syndicat et leur employeur doivent s’entendre sur la désignation d’un nombre déterminé de travailleurs comme étant «essentiels», ce qui rend illégal le fait de cesser le travail.

Avec l’adoption du projet de loi 24, la province a pour la première fois étendu la limitation du droit de grève des «employés essentiels» à une partie des travailleurs du secteur privé.

Rassemblement, en octobre 2022, d’infirmières de Terre-Neuve manifestant contre le sous-financement chronique et la pénurie de personnel dans le cadre de la campagne «Beyond Broken» [Plus que brisé] du Registered Nurses’ Union. [Photo: Newfoundland and Labrador Federation of Labour/Facebook]

Le projet de loi 24 assujettit également les ambulanciers et les travailleurs paramédicaux privés aux dispositions du Code du travail de la province en vertu desquelles un employeur ou un syndicat, invoquant une impasse dans les négociations contractuelles, peut faire appel à la Commission provinciale du travail pour en imposer une par le biais d’un arbitrage exécutoire.

La nouvelle loi a reçu l’appui des trois partis à l’assemblée provinciale – le gouvernement libéral de la grande entreprise, l’opposition conservatrice et le Nouveau Parti démocratique. Tous ont applaudi avec enthousiasme lorsque la loi a été adoptée. Les Teamsters eux-mêmes ont fait campagne pour la loi de retour au travail, établissant un nouveau principe réactionnaire qui ouvre la porte à la possibilité de soumettre tout groupe de travailleurs du secteur privé à des restrictions de leur droit de grève.

De plus, en appuyant cette loi, le syndicat des Teamsters a ouvert la porte à ce que le conflit actuel soit réglé par l’arbitrage exécutoire de la Commission provinciale du travail, notoirement favorable aux entreprises.

Les chauffeurs et les ambulanciers employés par Bob Fewer sont gravement sous-payés et ne bénéficient d’aucun régime de retraite. Une gréviste a déclaré aux journalistes que son frère, qui travaille dans un fast-food, gagne plus d’argent par semaine qu’elle. Les ambulanciers sont également tenus de terminer tout trajet qui dépasse le temps de travail prévu, sans rémunération supplémentaire.

Les travailleurs, sans contrat depuis 2020, ont travaillé avec diligence pendant les premiers ravages de la pandémie de COVID-19. Fewer a ralenti les négociations pendant toute cette période, allant jusqu’à ne pas assister à une session cruciale lors d’un processus de conciliation ordonné par le gouvernement.

Il ne fait aucun doute que les ambulanciers mal payés remplissent une fonction essentielle de santé publique. C’est donc une parodie qu’ils travaillent pour un employeur privé dont la seule préoccupation – comme l’a souligné sa conduite impitoyable pendant les négociations contractuelles – est de gonfler son propre compte en banque. Pour le gouvernement comme pour le propriétaire privé, les travailleurs sont «essentiels», sauf lorsqu’il s’agit de leurs salaires, de leurs avantages sociaux et de leurs conditions de travail.

L’empressement des Teamsters à supporter des lois qui restreignent encore davantage le droit de grève et favorisent le recours à l’arbitrage exécutoire devant les tribunaux du travail est la procédure habituelle du syndicat.

L’an dernier, lors de la grève de 3.000 ingénieurs, chefs de train et travailleurs de gare de triage du Canadien Pacifique, le syndicat a cédé aux pressions de l’entreprise et du gouvernement libéral fédéral et a accepté un processus par lequel un arbitre nommé par le gouvernement dicterait les conditions d’emploi des travailleurs du CP. Sans aucune consultation, et encore moins un vote, le syndicat des Teamsters a ordonné aux 3.000 travailleurs pour lesquels il négocie de retourner au travail 36 heures seulement après avoir débrayé, et a cédé son droit légal d’entreprendre toute action syndicale jusqu’à l’expiration de la convention collective, qui reste à déterminer, dans plusieurs années. Comme on pouvait s’y attendre, l’arbitre a imposé une misérable «augmentation» salariale annuelle de 3,5% sur deux ans, ce qui, compte tenu d’un taux d’inflation deux fois plus élevé, constitue une énorme baisse de salaire en termes réels.

Le recours à un arbitre nommé par l’État et favorable aux entreprises pour déterminer les «conventions collectives» des travailleurs et travailleuses est devenu la réponse standard de la bureaucratie des Teamsters. Huit des neuf conflits de travail les plus récents au CP ont été «résolu » par l’arbitrage, ce qui permet de préserver la politique des profits avant la sécurité sur les chemins de fer. Et dans pratiquement tous les cas, le syndicat lui-même a sanctionné, voire salué, l’arbitrage contraignant. En 2019, lors d’une puissante grève à la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada (CN), les Teamsters ont complètement capitulé et mis fin à la grève après que le gouvernement ait menacé de rendre le débrayage illégal.

La législation anti-ouvrière contre les ambulanciers s’inscrit dans le cadre des attaques imminentes du gouvernement libéral de Terre-Neuve contre le système de santé de la province. Déjà, plus de 20% de la population n’a pas de médecin de famille. La pénurie d’infirmières dans les hôpitaux a atteint des proportions de crise. Malgré cela, le gouvernement s’apprête à mettre en œuvre les principales recommandations de son rapport 2021 de l’équipe de redressement économique du premier ministre (également connu sous le nom de rapport Greene). Parmi une longue liste de mesures réactionnaires, le rapport préconise une réduction massive de 25% des subventions de fonctionnement accordées aux autorités sanitaires provinciales et des mesures supplémentaires pour privatiser le système de soins de santé.

Parmi les recommandations les plus ambitieuses figure la demande au gouvernement de renégocier les régimes de rémunération avec les syndicats du secteur public. Les «éléments clés» visés comprennent la conversion des pensions «en un régime collectif à cotisations définies en trois ans», un gel des salaires et des changements draconiens dans les pratiques de travail. Le rapport exige également que «dans l’éventualité où un règlement négocié ne serait pas possible, le gouvernement provincial devrait recourir à une législation qui sera efficace.»

(Article paru en anglais le 26 janvier 2023)

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