Borne sur France2: le gouvernement veut passer en force sur les retraites

Invitée hier soir de l’émission «l’Évènement» de France2, Élisabeth Borne a insisté qu’elle imposerait sa réforme des retraites malgré l’opposition de l’écrasante majorité de la population. Le sondage Elabe «L'Opinion en direct» pour BFMTV, publié ce mercredi confirme que l'opposition à ce projet parmi les Français est forte: 71 pour cent sont contre.

[Photo by Jacques Parquier / CC BY 2.0]

La détermination de Borne de passer en force par-dessus l’opposition des travailleurs témoigne du caractère antidémocratique du régime de Macron, qui rejoint la guerre de l’OTAN contre la Russie. Les travailleurs ne peuvent rien attendre des discussions entre Borne et les appareils syndicaux qui ont négocié cette réforme avec le patronat et avec Macron. Il faut déborder ces appareils, qui canalisent les luttes ouvrières, et bâtir un mouvement international dans la classe ouvrière contre l’austérité et la guerre.

Hier soir, Borne a déclaré: «C'est indispensable de mener une réforme pour préserver notre système de retraites par répartition', même si «demander aux Français de travailler progressivement plus longtemps ça n'est pas simple». Invitée à dire si elle répéterait aujourd'hui que sa réforme est «juste», elle n'a pas osé répéter ce mot. Elle a préféré de dire: «Il faut de la justice dans la façon dont on répartit l'effort entre les Français».

La journaliste de la chaîne de télévision de l’État, Caroline Roux, a soigneusement évité de poser les questions essentielles soulevées par la réforme des retraites. La réforme vise à faire des dizaines de milliards d’économie par an en dépenses sociales alors que le gouvernement prévoit d’augmenter le budget des armées de plusieurs dizaines de milliards par an. Ceci permettra à la France, selon Macron, de participer à des guerres de haute intensité dans le cadre du conflit que se livrent l’Otan et la Russie en Ukraine.

Roux ne s’est pas non plus basée sur le rapport d’Oxfam qui a mis en avant les inégalités sociales criantes dans le monde et en France. Ce rapport a averti que l’imposition de seulement deux pour cent de la fortune des plus riches pourrait maintenir le régime des retraites actuel. La question de taxer les grandes fortunes est passée totalement sous silence.

Néanmoins, les portraits de travailleurs réalisés par France2 réfutaient les arguments de Borne et révélaient son mépris pour les travailleurs.

Alors qu’elle présentait un graphique montrant que les hommes finiraient par partir plus tard à la retraite que les femmes, Borne a dit: «Je peux vous assurer que cette réforme protège les femmes qui ont commencé à travailler tôt, les femmes qui sont dans des métiers difficiles, les femmes qui ont dû interrompre leur carrière».

Ceci était contredit par le portrait d’une monitrice d’auto-école qui a dit être «écœurée», car la réforme la forcera à partir à la retraite plus tard que prévu à cause d’une carrière hachée quand elle a eu des enfants.

L’entrevue a aussi évoqué la question des carrières longues et de la pénibilité au travail. Dans un autre portrait, Thierry, travailleur dans une usine d’outillage depuis ses 17 ans, demande à Borne: «J'espère qu'ils vont penser à ceux qui travaillent dur comme nous. Est-ce que vous y pensez?»

Borne a répondu: «Bien sûr qu'on y pense. Et d'abord, je voudrais rassurer Thierry, qui a commencé à travailler à 17 ans. Évidemment, il n'aura pas à travailler jusqu'à 64 ans. Je pense qu'il partira à 60 ans», lui répond la Première ministre.

En fait Borne se trompait, et le schéma du gouvernement qui s'affichait derrière elle indiquait qu’il partirait à 61 ans. En effet, les carrières longues comme Thierry devront cotiser 44 ans, non pas 43 ans comme les travailleurs ayant commencé leurs carrières à 21 ans.

Toute l’entrevue respirait le mépris des banquiers et des hauts fonctionnaires pour le monde du travail. Interrogée sur la pénibilité du port de charges lourdes, Élisabeth Borne affirme qu' «on va couvrir d'autres causes de pénibilité que celles qui sont prises en compte … On crée un nouveau dispositif dans lequel on va identifier les métiers qui génèrent de l'usure professionnelle'. Selon Borne, les travailleurs exerçant un de ces métiers identifiés passeront une visite médicale qui pourrait éventuellement leur permettre de partir à 62 ans.

Ceci n’engage le gouvernement à rien. Quels seront les métiers pénibles qui seront dans ce nouveau dispositif reste à définir. En plus, c’est la médecine du travail, connue pour son arbitraire et son parti pris du côté du patronat, qui déterminera au cas par cas si un travailleur peut partir plus tôt que la date prévue.

En réalité, il est évident que Macron vise à dégager des dizaines de milliards pour les actionnaires et pour la guerre, au prix de briser les corps des travailleurs qui s’approchent de la retraite. Comme le fit remarquer la journaliste, Roux, le métier de déménageur ne fait plus parti des métiers considérés comme pénibles depuis l’arrivée de Macron à l’Elysée.

Cette entrevue confirme qu’il n’y a rien à négocier avec Macron, et qu’il faut construire un mouvement socialiste, indépendant des appareils syndicaux, pour permettre aux travailleurs de faire chuter son gouvernement et prendre le pouvoir.