Lutte Ouvrière couvre la répression policière des émeutes de protestation en France

Le groupe français pseudo-de gauche Lutte Ouvrière (LO), a réagi aux récentes émeutes déclenchées par le meurtre de Nahel M, 17 ans, par la police à Nanterre, en banlieue parisienne, le 27 juin, en dénonçant les jeunes de la classe ouvrière qui y ont participé.

Le régime du président Emmanuel Macron a répondu à la révolte des travailleurs et des jeunes en mobilisant 45.000 policiers lourdement armés pour réprimer les manifestations. Peu après le début des émeutes, les syndicats de police ont déclaré qu’ils étaient en «guerre» contre «ces hordes sauvages». Avec le soutien bruyant du Rassemblement national de Marine Le Pen, la police, aidée par des éléments d’extrême droite, a réprimé brutalement les manifestations.

Un policier en train de viser lors d’une manifestation vendredi 30 juin 2023 à Strasbourg, dans l’est de la France. [AP Photo/Jean-Francois Badias]

Plus de 4.000 personnes, pour la plupart des adolescents, ont été arrêtées au cours de manifestations qui ont duré une semaine. Le gouvernement a envoyé une circulaire aux procureurs de la République exigeant une «réponse rapide, ferme et systématique» contre les personnes arrêtées et, s’il s’agit de mineurs, contre leurs parents. La Première ministre Elisabeth Borne a menacé: «Si le cadre légal existant n’est pas suffisant, alors, le cas échéant, on fera évoluer la loi».

LO s’est rangé derrière cette répression d’Etat, dénonçant non pas la police fascisante et sa répression violente, mais les jeunes révoltés pour avoir causé d’importants dégâts matériels dans les banlieues françaises.

Dans un éditorial publié le 5 juillet, «L’espoir n’est ni dans la résignation ni dans la violence destructrice», Nathalie Arthaud, porte-parole de LO, écrit: «La furie destructrice qui a frappé certains quartiers suscite la consternation, le désarroi, et même la colère. Et pour cause! Ce ne sont pas les bourgeois qui voient leur voiture, leur restaurant chic, leur terrain de tennis ou de golf partir en fumée. Ce sont les femmes et les hommes des classes populaires qui se retrouvent démunis, sans centre social, sans magasin pour leurs courses, sans transport pour se rendre à leur travail».

Arthaud tient des propos sinistres qui reprennent le discours policier selon lequel les banlieues françaises sont peuplées de ceux qui ne connaissent que le crime.

Elle écrit: «Les actes de ceux qui ont passé plusieurs nuits à casser tout qu’ils avaient à leur portée, y compris le centre de vacances dans lequel leur petite sœur était inscrite, ou le bus médical où leur mère allait se faire soigner, témoignent d’un manque de conscience dramatique. Parmi eux se retrouvent d’ailleurs de petits voyous et les trafiquants, qui se moquent pas mal de mettre la vie des habitants en danger.».

S’opposer à la méthode politiquement futile des émeutes ne change rien au fait qu’elles sont une réponse désespérée des sections les plus pauvres et les plus politiquement réprimées des travailleurs et de la jeunesse à des années d’attaques de la part du gouvernement Macron, ses forces de police fascisantes agissant en troupes de première ligne.

Dans des conditions où la police a assassiné de sang-froid un jeune non armé et a ensuite réprimé les manifestants à l’aide de grenades, de balles en caoutchouc et même de blindés, accuser les manifestants de mettre «la vie des habitants en danger» est une calomnie absurde favorable à une police lourdement armée et protégée.

La réponse de LO aux émeutes révèle que dans la lutte entre les jeunes de la classe ouvrière vivant dans la pauvreté et l'État capitaliste de la classe des milliardaires, elle est fermement du côté de ce dernier. Cela montre que la prétendue adhésion de la LO au trotskysme n'est qu'une supercherie. LO fait partie des “eunuques méprisables” dont parle Trotsky dans son ouvrage “Leur morale et la nôtre”, qui dénoncent la violence des opprimés dans leur lutte contre leurs oppresseurs:

«Un propriétaire d’esclaves qui, par la ruse et la violence, enchaîne un esclave, et un esclave qui, par la ruse ou la violence, brise les chaînes – que ces méprisables eunuques ne viennent pas nous dire qu’ils sont égaux devant un tribunal de la moralité».

Dans le même article, Arthaud s’interroge: «Comment se faire respecter de la police»? Alors que la police assassine cette jeunesse pauvre et la dénonce comme une horde sauvage, LO encourage la jeunesse ouvrière à réfléchir à comment elle peut gagner le respect des gardes armés de l’État capitaliste!

La LO rejette la responsabilité des émeutes sur les «voyous et les trafiquants» pour dissimuler son propre rôle dans la création des conditions politiques qui existent aujourd’hui en France. Si les jeunes de la classe ouvrière estiment que le seul moyen de s’opposer à l’austérité et à la violence policière est l’émeute, c’est parce qu’ils savent que les syndicats et leurs soutiens de la pseudo-gauche dans les partis comme LO feront tout ce qu’ils peuvent pour réprimer leur lutte.

Les émeutes ont eu lieu dans le sillage des manifestations de masse et des grèves de millions de travailleurs, qui ont duré plus de quatre mois, contre les coupes dans les retraites décidées par Macron. Des millions de travailleurs et de jeunes français ont fait l’expérience que leur mouvement a été étranglé par les bureaucraties syndicales pro-capitalistes et leurs appendices politiques petits-bourgeois alors même que plus de trois quarts de la population s’opposaient à la réforme des retraites et que les deux tiers étaient favorables au blocage de l’économie par une grève générale pour vaincre Macron.

Le rôle de LO dans cette trahison n’empêche pas Arthaud de clamer cyniquement que «la révolte destructrice de cette jeunesse est la conséquence de l’absence d’organisation du camp des travailleurs, de son manque de combativité et de politisation».

C'est là un méprisable mensonge. Contrairement aux affirmations de LO, il existe une colère sociale massive, qui s’est manifestée dans la récente explosion des protestations des jeunes contre le régime Macron et la violence policière, ainsi que dans les grèves contre la réforme des retraites. Mais les travailleurs et les jeunes estiment que les organisations de la pseudo-gauche, comme LO, et les syndicats qu'elles soutiennent, n'offrent aucune perspective d'avenir.

LO est ancrée dans les bureaucraties syndicales nationales financées par l’État et le patronat, et leur système en faillite de négociations avec Macron. Ce parti est organiquement hostile à toute perspective révolutionnaire. Au lieu de mobiliser les travailleurs et les jeunes dans une lutte pour faire tomber Macron, elle joue le rôle sinistre de créer la confusion politique dans la classe ouvrière et de canaliser toute opposition derrière les syndicats.

La révolte des jeunes contre la répression policière a mis à nu la faillite de LO et d’autres forces de la pseudo-gauche comme La France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon et le Nouveau parti anticapitaliste. Bien que ces organisations aient obtenu des millions de voix aux élections et comptent des milliers de membres, elles s’opposent à la mobilisation indépendante de la classe ouvrière contre la politique d’austérité et contre la guerre de l’OTAN en Ukraine, supervisée par le gouvernement Macron en alliance avec les bureaucraties syndicales.

Dans un contexte d’escalade de la guerre et de résurgence des luttes de classe en France et dans le monde, cette situation objectivement révolutionnaire révèle le fossé de classe qui sépare le Parti de l’égalité socialiste (PES), la section française du Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI), de tout un milieu des classes moyennes et de la pseudo-gauche.

La répression policière qui a suivi l’assassinat de Nahel M. a confirmé l’avertissement lancé par le PES dans le mouvement de protestation de masse des travailleurs contre la coupe des retraites. Le PES a expliqué que si Macron gouvernait contre la volonté du peuple, la seule solution pour les travailleurs était de lancer une vaste mobilisation politique de la base contre Macron. L’objectif devait être de préparer une grève générale pour faire tomber Macron et abolir la présidence française et ses pouvoirs draconiens.

Cela nécessite la formation de comités de la base indépendants des diverses bureaucraties syndicales parmi les travailleurs et les jeunes, dans les usines, sur les lieux de travail et dans les quartiers populaires, afin de diriger et d’élargir la lutte politique pour faire tomber le régime de Macron.

Le capitalisme traverse une crise mortelle, qui n’est pas moins grave que celle qu’il a connue lorsque Hitler préparait la guerre en Europe et que Trotsky fondait la Quatrième Internationale en 1938. La lutte pour les droits démocratiques et sociaux, que la bourgeoisie attaque au plan international dans le cadre de la crise économique et de sa marche à la guerre, nécessite l’unification de la classe ouvrière au niveau international sur la base d’une perspective socialiste révolutionnaire.

LO est issue du groupe centriste Barta qui déclarait sa sympathie pour le trotskysme en paroles mais refusait de rejoindre la Quatrième Internationale pour lutter pour sa perspective révolutionnaire internationale. Quatre-vingt-cinq ans plus tard, le rejet continu par LO de l’internationalisme révolutionnaire l’amène à défendre la répression de l’État capitaliste.

Alors que les travailleurs de toute l’Europe entrent en lutte contre l’austérité et l’escalade de la guerre, le programme historique du trotskysme défendu par le CIQI est plus important que jamais. Se battre pour ce programme signifie rejeter les positions réformistes, démoralisées et anti-trotskystes des organisations de la pseudo-gauche comme LO, et que les travailleurs et les jeunes se tournent vers la construction de la direction révolutionnaire, le PES.

(Article paru d’abord en anglais le 21 juillet 2023)

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