La ligne de front dans la lutte des travailleurs de l'automobile: lutte des classes contre promotion du Parti démocrate par l’UAW

La Lettre d'information des travailleurs de l’Automobile du WSWS et le Réseau des comités de base des travailleurs de l’Automobile organisent conjointement une réunion dimanche à 15 heures (heure de l'Est) sur comment les travailleurs de l'automobile peuvent faire gagner leurs revendications dans la lutte pour les contrats de 2023.

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À un peu plus de trois semaines de l’expiration des contrats des Trois Grands (GM, Ford, Stellantis) le 14 septembre, les travailleurs de l’automobile doivent faire le point sur la situation et se préparer consciemment à la bataille qui les attend.

Le vote des travailleurs de Lear à Hammond (Indiana), qui a rejeté à 75 pour cent un deuxième contrat soutenu par l’UAW (United Auto Workers), montre clairement que les travailleurs n’accepteront pas d’autres concessions aux entreprises et qu’ils sont déterminés à revenir sur des décennies d’abandons de la part de l’UAW.

Les travailleurs de Stellantis Warren Truck quittent l'usine après la première équipe.

Dans le même temps, les constructeurs automobiles sont retranchés derrière leurs positions. Ils rejettent d’emblée les demandes d’annulation des concessions écrasantes qui ont appauvri les travailleurs et ont garanti deux cent cinquante milliards de dollars de bénéfices rien que dans la dernière décennie. Selon les médias, Ford prévoit d’utiliser des cols blancs pour faire tourner les entrepôts de pièces détachées en cas de grève.

Le président de l’UAW, Shawn Fain, a rendu publique une série de propositions de contrats populaires pour garder le contrôle d’une main-d’œuvre de plus en plus rétive et déterminée. Mais lui et le reste de la bureaucratie UAW ont bien l’intention de trahir la lutte des travailleurs pour des augmentations de salaire massives, le rétablissement des indemnités de vie chère (COLA), l’abolition des paliers, des retraites payées par l’entreprise pour tous et la fin de l’abus des intérimaires. L’écart entre ce que dit Fain et ce que fait la bureaucratie UAW est visible dans sa trahison de la grève de 40 jours des travailleurs des batteries Clarios dans l’Ohio – qui s’est soldé par des augmentations sous l’inflation et une journée de travail de 12 heures sans heures supplémentaires – et dans sa tentative de faire passer un bradage similaire chez Lear en Indiana.

Les actes de Fain et de l’appareil UAW sont bien plus significatifs que ses paroles creuses. Les dirigeants de l’UAW sont en discussion permanente et intense avec le gouvernement Biden et les démocrates sur la manière de contenir la résistance des travailleurs de l’automobile et d’imposer les diktats des entreprises.

Vu que Fain & Cie conspirent avec Biden et les démocrates, les travailleurs doivent s’organiser dès maintenant pour empêcher une défaite de leur lutte, qui entraînerait des concessions et des suppressions d’emplois historiques, affectant non seulement l’industrie automobile, mais encore de larges pans de la classe ouvrière.

Comme l’histoire l’a montré maintes fois, les travailleurs ne remporteront la victoire qu’en mobilisant leur force indépendante. Des comités de la base doivent être organisés dans chaque usine, entrepôt et lieu de travail pour que les travailleurs puissent réellement communiquer entre eux. Ces comités leur permettront de tisser des liens entre les usines et les entreprises. Ils fourniront également les structures organisationnelles nécessaires aux travailleurs pour surmonter la trahison préparée par la bureaucratie de l'UAW.

Joe Biden et Shawn Fain, président du syndicat de l’automobile United Auto Workers. [AP Photo/Joe Lamberti/Mike Householder]

La conspiration pro-patronat entre l’appareil UAW et le Parti démocrate a été parfaitement mise en évidence par la présence de la députée Haley Stevens au rassemblement du «Dimanche de la solidarité» au siège de la Région 1 de l’UAW à Warren (Michigan) le 20 août. En 2009, Haley Stevens faisait partie du Groupe de travail de la Maison-Blanche sur l’Automobile, du président Obama, qui exigeait que les membres de l’UAW acceptent des concessions massives, dont la réduction de moitié des salaires pour les nouveaux embauchés, l’élimination de l’indemnité de vie chère et une vaste extension des travailleurs intérimaires, en échange d’un renflouement de GM et Chrysler par l’État.

En récompense de la collaboration de l’UAW – y compris de Fain, qui a voté pour que l’équipe nationale de négociation UAW-Chrysler accepte ces concessions massives – la Maison-Blanche d’Obama et Biden avait remis à l’appareil UAW des milliards de dollars en actions de GM et Chrysler, ainsi que le contrôle du fonds fiduciaire VEBA pour les soins de santé des retraités, financé par l’entreprise.

Lors de son intervention au rassemblement de l’UAW, Stevens a félicité les responsables syndicaux d’avoir fait «ces concessions à l’époque». Elle a assuré à Fain & Co. que Biden préparait une nouvelle récompense pour l’appareil de l’UAW en échange de sa coopération dans la transition vers les véhicules électriques, qui entraînera une nouvelle série d’attaques massives contre l’emploi et le niveau de vie. «Maintenant, nous avons une autre grande transition. Mais le fait est, mes amis, que nous ne ferons pas de transition sans l’UAW et sans votre juste part».

Stevens et les autres démocrates qui ont défilé au rassemblement, comme la sénatrice Debbie Stabenow, sont peut-être les plus proches alliés de Fain & Cie, mais ils sont les ennemis impitoyables de la classe ouvrière. En novembre dernier, ils se sont joints à des centaines de démocrates et de républicains au Congrès pour interdire une grève de 110.000 cheminots et imposer un contrat pro-patronat négocié par Biden, que les travailleurs avaient précédemment rejeté.

La représentante américaine Haley Stevens au rassemblement du « Dimanche de solidarité » de l'UAW le 20 août 2023 [Photo: UAW]

Fain a eu des discussions quasi-quotidiennes avec le gouvernement briseur de grève de Biden sur la manière de garder le contrôle sur des ouvriers de l’automobile de plus en plus rebelles. La Maison-Blanche a dépensé beaucoup d’énergie pour ravaler la façade de la bureaucratie de l’UAW, impliquée jusqu’au cou dans la corruption, l’acceptation de pots-de-vin des entreprises et le détournement des cotisations syndicales. Cela comprend l’approbation par le ministère du Travail d’une élection bidon de l'UAW qui a exclu 90 pour cent des membres du syndicat et mis Fain au pouvoir avec seulement 3 pour cent des votes de la base.

Avec la grève en cours des scénaristes et des acteurs, l’opposition massive aux contrats bradés chez UPS et sur les docks, et le militantisme croissant des travailleurs de la santé et de l’éducation, Biden s'appuie sur la bureaucratie de l’UAW pour étrangler ceux de l’automobile. Il s’agit d’empêcher toute nouvelle perturbation des profits du patronat américain et des plans du gouvernement visant à faire payer à la classe ouvrière ses préparatifs d’extension de la guerre contre la Russie et lancer une Troisième Guerre mondiale contre la Chine.

Il est essentiel que les travailleurs de l’automobile comprennent cette collusion pour préparer leur propre réponse. Il ne suffit pas de s’opposer à de nouvelles concessions. Cette opposition doit être organisée. Les travailleurs ne peuvent pas «attendre pour voir» et être pris au dépourvu lorsque Fain et la bureaucratie de l’UAW présenteront leur inévitable contrat de capitulation. Ils doivent s’organiser pour opposer la volonté des travailleurs aux décisions illégitimes de la bureaucratie de l’UAW.

Will Lehman, ouvrier de Mack Trucks et candidat socialiste à la présidence de l’UAW, a obtenu près de 5.000 voix au premier tour des élections de l’UAW grâce à son programme d’abolition de la bureaucratie de l’UAW et de transfert du pouvoir et de la prise de décision aux travailleurs des ateliers. Le soutien à la campagne de Lehman montre qu’il existe une base solide pour l’extension du réseau des comités de la base, contrôlés par les travailleurs eux-mêmes, et non par les bureaucrates syndicaux, afin d’unir les travailleurs à temps plein et à temps partiel, de premier et de second palier, de l’automobile et des équipementiers.

Comme l’a dit un ouvrier à temps partiel de l’usine Stellantis Jeep à Toledo (Ohio), «nous devons frapper les entreprises automobiles avec toutes nos 18 roues».

Pour préparer une telle lutte, les comités de la base doivent exiger et défendre les mesures suivantes:

  1. Les indemnités de grève doivent être portées à 750 dollars par semaine afin que le fonds de grève, alimenté par les cotisations des travailleurs, puisse être utilisé pour montrer aux entreprises que les travailleurs sont prêts à mener une lutte soutenue.
  2. Toutes les négociations doivent être supervisées par les travailleurs de la base et des rapports détaillés présentés chaque jour à l’ensemble des membres. On ne peut accorder aucune confiance aux vagues «mises à jour» de Fain, qui dissimulent ce qui est discuté dans le dos des travailleurs.
  3. Il faut préparer une grève totale pour fermer l’industrie de l’automobile et des pièces détachées. Les travailleurs doivent rejeter tous les efforts visant à limiter les travailleurs à des grèves «de cinéma» dans quelques usines de composants, ce qui ne serait que le prélude à une nouvelle capitulation. En élargissant le Réseau des travailleurs automobiles de la base, les travailleurs en grève pourront s’unir à ceux du spectacle, d’UPS et aux dockers, ainsi qu’à d’autres secteurs de la classe ouvrière, pour mener une lutte commune.
  4. La lutte doit être étendue à toute l’Amérique du Nord et au-delà. Il est impossible pour les travailleurs de lutter efficacement contre les entreprises transnationales géantes si leur lutte est limitée aux États-Unis.

Pour la première fois depuis des décennies, les contrats des travailleurs canadiens des Trois Grands (Ford, General Motors et Stellantis) expirent quelques jours après ceux des États-Unis. Dans le même temps, les travailleurs mexicains, comme ceux de GM à Silao, de Lear ou d’autres fabricants de pièces automobiles à Matamoros et Ciudad Juárez, ont cherché maintes fois à s'unir à leurs frères et sœurs américains pour lutter contre les salaires de misère et la propagation mortelle du COVID-19 dans les usines. Dans le monde entier, depuis les travailleurs de Volkswagen en Allemagne jusqu’aux 150.000 métallurgistes en Turquie dont les contrats expirent en septembre, les travailleurs de l’automobile sont confrontés à la même lutte contre la destruction des emplois et des salaires, et contre la collusion entre bureaucraties syndicales et gouvernements capitalistes.

En opposition à la saleté nationaliste anti-chinoise et anti-mexicaine débitée par la bureaucratie de l’UAW pour couvrir sa collaboration avec les constructeurs automobiles et avec la politique de guerre du gouvernement Biden, l’Alliance internationale des travailleurs des comités de base (initiales anglaises IWA-RFC) coordonne la lutte des travailleurs au-delà des frontières. Cela permettra de jeter les bases d’une puissante contre-offensive industrielle et politique de la classe ouvrière internationale pour mettre fin aux inégalités sociales, à la guerre et au système de profit capitaliste, et pour réorganiser la vie économique pour répondre aux besoins des producteurs du monde entier, les travailleurs de tous les pays.

(Article paru d’abord en anglais le 22 août 2023)

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