Sous la houlette du Premier ministre Justin Trudeau, l’ensemble de l’establishment politique canadien, de la « gauche » à la droite dure, s’est joint au chœur impérialiste des condamnations du soulèvement palestinien et a déclaré que le régime d’extrême droite de Netanyahou devrait recevoir un chèque en blanc pour organiser un assaut horrible et criminel sur Gaza.
Un peu plus de deux semaines après s’être levés à l’unisson pour applaudir un criminel de guerre nazi, les chefs de tous les partis du Parlement canadien se sont unis pour approuver le « droit » de l’État israélien à massacrer gratuitement les Palestiniens et qualifier l’opposition à la répression israélienne d’ « antisémite ».
Trudeau, qui dirige un gouvernement dont le soutien au régime israélien a été aussi ferme que celui de son prédécesseur conservateur, a déclaré dans un communiqué publié sur X : « Le Canada condamne fermement les attaques terroristes actuelles contre Israël. Ces actes de violence sont totalement inacceptables. Nous sommes aux côtés d’Israël et soutenons pleinement son droit à se défendre... La vie civile doit être protégée. »
Il serait difficile de combiner plus d’hypocrisie et de mensonges dans une déclaration aussi courte. Tout d’abord, les actions militaires contre Israël sont le produit d’un soulèvement populaire de masse, comme le montre l’ampleur des opérations, et non d’une « attaque terroriste ». Il est inconcevable, compte tenu de la surveillance omniprésente exercée par Israël et des mesures de sécurité prises depuis longtemps dans la bande de Gaza, qui ont transformé ce territoire densément peuplé en une prison à ciel ouvert, qu’une attaque de l’ampleur de celle lancée par le Hamas ait pu avoir lieu sans le soutien actif d’une grande partie des 2,3 millions d’habitants de la bande de Gaza.
Deuxièmement, Israël ne se « défend » pas, mais lance une répression génocidaire sur l’ensemble de la population palestinienne. À l’instar des régimes les plus oppressifs de l’histoire, Netanyahou et ses ministres ont traité les Palestiniens de « bêtes humaines » et de « sauvages » pour justifier la coupure de l’approvisionnement en eau, en nourriture, en électricité et en carburant à Gaza et un bombardement aérien qui a déjà rasé des quartiers entiers. Pour Trudeau, il semblerait que les seuls civils qui comptent sont les Israéliens, tandis que l’ensemble de la population palestinienne peut faire l’objet d’un massacre punitif illégal.
Trudeau a été rejoint dans son enthousiasme pour la sauvagerie du gouvernement israélien par le chef conservateur Pierre Poilievre et le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD) Jagmeet Singh. S’exprimant lors d’un événement de « solidarité » avec Israël à Ottawa lundi soir, auquel assistait également Trudeau, Poilievre a qualifié le Hamas de « mal dans sa forme la plus pure » et de « culte de la mort terroriste sadique, démoniaque et génocidaire ».
Singh a été plus discret, mais il s’est néanmoins joint sans équivoque à la condamnation universelle du soulèvement de masse en le qualifiant d’ « attaque terroriste ». Il a écrit : « Je condamne fermement ces horribles attaques du Hamas contre Israël. Les civils ne devraient jamais être pris pour cible et tous les otages doivent être libérés immédiatement. Nous craignons ce que les jours à venir nous réservent. Le terrorisme et la violence ne résolvent rien. »
L’élite politique québécoise – qu’il s’agisse des fédéralistes convaincus, des autonomistes-chauvins de la CAQ au pouvoir dans la province ou des indépendantistes – a également condamné de manière uniforme la « violence » du soulèvement palestinien. Ils ont affirmé avec force le « droit » de l’État israélien, massivement armé et qui réprime chaque jour violemment la population palestinienne, à « se défendre ». Dans une déclaration publiée sur X, le Bloc québécois, le parti frère fédéral du Parti québécois indépendantiste, a déclaré qu’il « condamnait fermement l’attaque terroriste du Hamas contre Israël et sa population civile ».
L’appui indéfectible de l’ensemble de l’appareil politique officiel du Canada à l’offensive du gouvernement israélien s’est manifesté lors d’un rassemblement lundi à Toronto auquel ont participé le premier ministre progressiste-conservateur de l’Ontario, Doug Ford, la vice-première ministre Chrystia Freeland et la maire néo-démocrate de Toronto, Olivia Chow. Chow a été présentée par ce qui reste de la « gauche » du NPD et de sa périphérie de la pseudo-gauche pendant sa campagne électorale au début de l’année comme une candidate de la transformation. Elle a consacré son intervention de lundi à une dénonciation virulente des manifestants qui sont descendus dans la rue pour soutenir les Palestiniens.
Le soutien unanime des cercles dirigeants canadiens au gouvernement d’extrême droite de Netanyahou n’est pas une surprise. En tant que partenaire stratégique et militaire clé de l’impérialisme américain depuis plus de trois quarts de siècle, le Canada soutient à bout de bras, depuis des décennies, le régime israélien. Les forces armées canadiennes entretiennent des liens étroits avec les forces de défense israéliennes et le Canada est un important fournisseur d’équipements militaires.
Ottawa a également défendu sans relâche Israël contre toute critique de ses violations flagrantes des droits de l’homme aux Nations unies, en particulier au cours des deux dernières décennies, lorsque les gouvernements israéliens successifs ont abandonné toute prétention à soutenir une solution « à deux États » et ont intensifié la « colonisation » de la Cisjordanie. Le Canada a été pratiquement le seul à voter avec les États-Unis à plusieurs reprises contre des résolutions condamnant la violence aveugle utilisée contre les populations palestiniennes de Gaza et de Cisjordanie.
La volonté de la classe dirigeante canadienne et de ses représentants politiques de soutenir la violence la plus impitoyable a également été démontrée tout au long de la guerre impérialiste menée par les États-Unis et l’OTAN contre la Russie. Ils inondent l’Ukraine d’armes, rejettent cavalièrement les inquiétudes concernant la possibilité que la guerre dégénère en guerre nucléaire, les qualifiant d’apaisement, et jurent que le massacre doit se poursuivre jusqu’à ce que la Russie soit éliminée en tant que « menace stratégique ». Avec le soutien de tous les partis, le Canada a envoyé plus de 2 milliards de dollars d’armes au régime d’extrême droite de Kiev, notamment des chars, des véhicules militaires, des munitions et des systèmes antiaériens. Le Canada a joué un rôle majeur dans la préparation et le déclenchement de la guerre, notamment en aidant à intégrer le bataillon Azov d’extrême droite dans l’armée ukrainienne à la suite du coup d’État fasciste de 2014 à Kiev, dans lequel Ottawa a également joué un rôle majeur.
Les méthodes que l’impérialisme canadien est prêt à utiliser pour atteindre ses intérêts ont été révélées lorsque tous les députés de la Chambre des communes, Trudeau en tête, se sont levés le 22 septembre pour applaudir Yaroslav Hunka, un vétéran de la Division Galicie de la Waffen-SS. Cette division, dont les membres avaient prêté serment d’allégeance à Adolf Hitler, a été impliquée dans l’Holocauste et le massacre de dizaines de milliers de Polonais en Galicie.
Quiconque pense qu’il est exagéré de dire que l’impérialisme canadien est prêt à approuver et à participer à des crimes de guerre d’une telle ampleur devrait lire les commentaires à glacer le sang qui inondent les principaux médias canadiens. L’éditorial de mardi du Globe and Mail, porte-parole de l’élite financière de Bay Street, en est un exemple typique. Sous le titre « Le Canada doit soutenir Israël » (Canada must stand with Israel), il demande au gouvernement Trudeau de soutenir l’attaque génocidaire de l’État israélien contre Gaza, et de ne pas broncher devant ce qu’il appelle « les victimes civiles collatérales ».
« Les affirmations et la solidarité sont assez faciles pour le moment », a déclaré le Globe, « mais elles deviendront plus difficiles à maintenir lorsqu’Israël commencera à déraciner le Hamas de la bande de Gaza, comme il doit le faire... Il sera tentant, à mesure que les pertes augmenteront inévitablement, de tomber dans l’idée facile que les deux parties au conflit doivent convenir d’un cessez-le-feu... »
« Il ne s’agit pas d’un conflit, mais d’une guerre justifiée contre le terrorisme... Et un cessez-le-feu devra intervenir au moment choisi par Israël, une fois qu’il estimera que la menace posée par le Hamas a été éliminée... »
L’ « élimination » du Hamas, une organisation qui jouit d’un soutien important dans la bande de Gaza et qui a déjà remporté des élections pour gouverner le territoire, ne peut signifier que le massacre délibéré de milliers de civils. Et si le régime israélien, qui a déjà qualifié les Palestiniens d’« animaux » et démontré par des années d’occupation brutale qu’il n’a aucun respect pour leurs droits, doit avoir les mains libres pour déterminer quand un cessez-le-feu doit avoir lieu, des morts civiles d’une ampleur sans précédent sont inévitables.
La campagne hystérique en faveur du massacre des Palestiniens émanant de la classe dirigeante est largement contestée. Des manifestations réunissant chacune des centaines de personnes ont eu lieu à Montréal, Toronto, Winnipeg et Vancouver au cours des derniers jours. Lors de la manifestation de Toronto, les manifestants ont scandé « de la rivière à la mer, la Palestine sera libre ». Un manifestant portait une pancarte avec le slogan « L’occupation est un crime, la résistance est une réponse ».
La forte sympathie de la population pour le sort du peuple palestinien a suscité une réaction furieuse de la part des politiciens et des médias. Trudeau a dénoncé toutes les manifestations de soutien aux Palestiniens, déclarant lundi : « Je condamne fermement les manifestations qui ont eu lieu, et qui ont lieu, dans tout le pays pour soutenir les attaques du Hamas contre Israël. La glorification de la violence n’est jamais acceptable au Canada ». Poilievre, qui avait encouragé l’appui pour les voyous du Convoi de la liberté d’extrême droite qui ont occupé Ottawa de manière menaçante, a déclaré : « Je condamne sans réserve tous ceux qui ont pris part aux célébrations dégoûtantes auxquelles nous avons assisté dans nos rues ».
L’élite dirigeante craint manifestement que l’opposition à l’oppression brutale subie par les Palestiniens ne s’associe à l’hostilité généralisée à la guerre impérialiste menée par les États-Unis contre la Russie, qui n’a pas encore trouvé d’expression politique positive, et au mouvement de grève croissant parmi diverses catégories de travailleurs pour défendre les salaires et les conditions de travail face à l’augmentation du coût de la vie.
C’est précisément le développement d’un tel mouvement dans la classe ouvrière qui est nécessaire pour arrêter l’assaut soutenu par l’impérialisme contre les Palestiniens et vaincre le gouvernement Netanyahou soutenu par les fascistes, qui menace les droits démocratiques et sociaux des travailleurs palestiniens et israéliens. Comme l’a écrit le Comité international de la Quatrième Internationale dans sa déclaration sur les événements en Israël, « le soulèvement en Palestine fait lui-même partie d’une éruption de colère et d’opposition qui se développe sous la forme de grèves et de protestations de masse dans le monde entier. C’est ce mouvement social, guidé par un programme et une perspective consciemment socialistes et révolutionnaires, qui doit être mobilisé pour mettre fin à la guerre impérialiste, à l’inégalité et à toutes les formes d’oppression ».
(Article paru en anglais le 11 octobre 2023)