Ces dernières semaines, les hôpitaux pédiatriques de toute la Chine ont été inondés de patients souffrant de diverses maladies respiratoires, ce qui a suscité une inquiétude croissante dans le pays et au niveau international.
La crise de santé publique en Chine a commencé à la mi-octobre et n’a fait que s’aggraver. Le 23 octobre, un parent dans le service de pédiatrie de l’hôpital général de l’Université Médicale de Tianjin a publié sur les réseaux sociaux un message indiquant qu’il y avait 100 personnes dans la file d’attente et qu’ils avaient dû attendre trois heures pour que leur enfant soit examiné par un médecin. Un commentaire répondant à l’article indiquait que plus de 900 patients faisaient la queue à la porte de l’hôpital pour enfants de Tianjian, tandis qu’un autre notait que plus de 2.000 enfants étaient alors sous thérapie intraveineuse à l’hôpital pour enfants de Pékin, situé à quelques 140 kilomètres de là.
À la mi-novembre, des informations de plus en plus nombreuses faisaient état de la fermeture forcée d’écoles en raison de la propagation de la maladie. Le 13 novembre, un message sur les réseaux sociaux mentionnant la fermeture d’écoles à Shenzhen fut suivi de nombreux commentaires relatant des expériences similaires dans le Yunnan, le Shandong, Pékin, le Guangdong, le Jilin et le Hebei.
Au cours de la semaine écoulée, des articles ont fait état d’une nouvelle détérioration de la situation.
Le 19 novembre, les responsables de l’hôpital de l’amitié Chine-Japon à Pékin ont annoncé: «Le nombre de patients attendant d’être examinés en pédiatrie dépasse désormais 400, et le temps d’attente est estimé à plus de 6 heures. Nous suggérons de se rendre dans les cliniques pédiatriques voisines afin de réduire la pression. Des temps d’attente et des expériences similaires ont été signalés à l’Institut de pédiatrie de la capitale à Pékin, ainsi que dans d’autres hôpitaux du pays.
On ne sait pas encore exactement quels agents pathogènes sont responsables de ce déluge d’hospitalisations d’enfants, mais les rapports gouvernementaux indiquent que la principale infection qui se propage est le mycoplasme pneumonie, ainsi que la grippe, l’adénovirus, le virus respiratoire syncytial (VRS) et le SRAS-CoV-2, le virus causant le COVID-19.
On suppose également que la soudaine montée des hospitalisations pourrait être due au fait que le mycoplasme pneumonie acquiert une résistance aux antibiotiques de la classe des macrolides. Ces dernières années, la Chine a connu un degré de résistance aux antibiotiques plus élevé que la plupart des pays, et des rapports indiquent que le Zithromax, le macrolide le plus largement prescrit dans le pays, est désormais inefficace chez près de 80 pour cent des enfants.
Enfin, on craint également qu’un nouvel agent pathogène dangereux, la grippe A/H9N2 (grippe aviaire), ne se propage sans qu’on le sache, en raison d'une surveillance sanitaire insuffisante en Chine. La possibilité d'une circulation du H9N2 a été évoquée par Epiwatch, un système australien d'alerte précoce en cas de pandémie, basé sur l'intelligence artificielle, qui a détecté des informations faisant état d'éventuelles infections par le H9N2.
Mardi, le programme de surveillance des maladies émergentes (ProMED), l’un des plus grands systèmes publics de signalement des maladies émergentes et des épidémies au monde, a publié une version abrégée d’un rapport sur la crise réalisé par le média taïwanais FTV News, avec des commentaires du rapporteur du ProMED, Dan Silver.
Le rapport de FTV News décrit ainsi la crise croissante à Pékin et dans le Liaoning, qui sont séparés par 800 kilomètres: «Avec l’épidémie de pneumonie en Chine, les hôpitaux pour enfants de Pékin, du Liaoning et d’autres endroits ont été submergés d’enfants malades, et les écoles et les classes étaient sur le point d’être suspendues. Les parents se sont demandé si les autorités ne dissimulaient pas l’épidémie».
L’article citait ainsi un habitant de Pékin: «Beaucoup, beaucoup sont hospitalisés. Ils ne toussent pas et n’ont aucun symptôme. Ils ont juste une température élevée (fièvre) et beaucoup développent des nodules pulmonaires».
L’article poursuit en disant que «certaines classes ont même été complètement annulées. Non seulement tous les élèves sont malades, mais les enseignants sont également infectés par la pneumonie».
Silver a commenté l’article ainsi:
Cet article suggère l’existence d’une épidémie généralisée d’une maladie respiratoire non diagnostiquée dans plusieurs régions de Chine, Pékin et le Liaoning étant distants de près de 800 km. On ne sait pas du tout quand cette épidémie a commencé, car il serait inhabituel qu’un si grand nombre d’enfants soient touchés aussi rapidement. Le rapport n’indique pas que des adultes ont été touchés, ce qui laisse supposer une certaine exposition dans les écoles. ProMED attend des informations plus précises sur l’étiologie et l’étendue de cette maladie préoccupante en Chine.
Il est trop tôt pour prévoir s’il pourrait s’agir d’une nouvelle pandémie, mais comme me l’a dit un jour un sage virologue spécialiste de la grippe: «L’horloge de la pandémie tourne, mais nous ne savons pas quelle heure il est».
En réponse à cet article et à l’absence de données adéquates venant des autorités chinoises, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a adressé mercredi à la Chine «une demande officielle d’informations détaillées sur l’augmentation des maladies respiratoires et les cas de pneumonie chez les enfants», comme l’indique un communiqué de presse de l’OMS publié le même jour.
Examinant le contexte immédiat de cette crise le communiqué de l’OMS dit:
Lors d’une conférence de presse tenue le 13 novembre 2023, les autorités chinoises de la Commission nationale de santé ont signalé une augmentation de l’incidence des maladies respiratoires en Chine. Les autorités chinoises ont attribué cette augmentation à la levée des restrictions relatives au COVID-19 et à la circulation d’agents pathogènes connus tels que la grippe, le mycoplasme pneumonie (une infection bactérienne courante qui touche généralement les jeunes enfants), le virus respiratoire syncytial (VRS) et le SRAS-CoV-2 (le virus à l’origine du COVID-19). Les autorités ont souligné la nécessité d’améliorer la surveillance des maladies dans les établissements de santé et les communautés, et de renforcer la capacité du système de santé à prendre en charge les malades.
L'OMS a ajoutait:
Le 22 novembre, l’OMS a demandé des informations épidémiologiques et cliniques supplémentaires, ainsi que des résultats de laboratoire concernant ces groupes de cas signalés chez les enfants, par l’intermédiaire du mécanisme du règlement sanitaire international. Nous avons également demandé des informations supplémentaires sur les tendances récentes de la circulation des agents pathogènes connus, notamment la grippe, le SRAS-CoV-2, le VRS et le mycoplasme pneumonie, ainsi que sur la charge actuelle qui pèse sur les systèmes de soins de santé. L’OMS est également en contact avec des cliniciens et des scientifiques par l’intermédiaire de ses partenariats et réseaux techniques existants en Chine.
Mercredi, le site officiel de la municipalité de Pékin a publié un article indiquant que «le directeur adjoint et épidémiologiste en chef du CDC de Pékin, Wang Quanyi, a déclaré qu’à juger par le nombre de visiteurs à l’hôpital pour enfants et à l’Institut de pédiatrie de la capitale, la propagation de mycoplasme pneumonie a reculé et se situe désormais au quatrième rang des maladies respiratoires infectieuses de l’enfant. Les trois premières places sont occupées par la grippe, l’adénovirus et le virus respiratoire syncytial».
L’article ajoute que «Wang Quanyi a déclaré qu’en raison de la propagation simultanée de plusieurs agents pathogènes, il y aura une tendance à la hausse du nombre total d’infections, ce qui peut conduire à une période de plateau prolongée où le nombre reste élevé. Cela entraînera également une augmentation de la demande de soins de santé. Les organismes de soins de santé doivent être prêts à faire face à cette pression.
La levée du zéro-COVID et l’effondrement de la santé publique
Il reste à savoir précisément quels agents pathogènes se propagent actuellement en Chine et pourquoi tant d’enfants sont hospitalisés, mais la cause sous-jacente de cette crise est sans aucun doute l’effondrement de la santé publique en Chine et dans le monde au cours de l’actuelle pandémie de COVID-19.
Comme l’indique la Commission nationale chinoise de la santé dans son rapport du 13 novembre, la recrudescence actuelle des infections respiratoires est directement imputable à la levée de la politique «zéro-COVID» il y a un an.
Bien qu’elle ne le dise pas, le fait est que ce vaste programme sanitaire d’élimination du virus a été incroyablement efficace pour stopper la propagation du SRAS-CoV-2 et a eu pour effet involontaire de limiter radicalement de nombreux autres agents pathogènes respiratoires. Ce phénomène a été observé dans le monde entier en 2020 et pendant une grande partie de l’année 2021, où l’on pense que des mesures d’atténuation même limitées ont éliminé les virus de la grippe de la famille B/Yamagata, tout en éliminant pratiquement d’autres souches de grippe, ainsi que le VRS.
En dehors de la Chine, l’abandon total de toutes les mesures d’atténuation en réponse à l’émergence de la variante Omicron en novembre 2021 a entraîné l’infection et la réinfection massives de la majorité de la population mondiale par le SRAS-CoV-2 et une résurgence du VRS, de la grippe, de l’adénovirus et d’autres agents pathogènes. Il y a un an, suite à la fin de tout semblant de santé publique, une vague similaire d’hospitalisations d’enfants s’est abattue sur les États-Unis et de nombreux autres pays.
La réponse universelle de l’establishment politique et des médias bourgeois a été de ne rien faire pour améliorer la santé publique et pour empêcher la propagation de ces agents pathogènes. Au contraire, ils ont proclamé que la plus jeune génération avait simplement accumulé une «dette d’immunité» pendant des mois, voire des semaines de confinement en 2020 et de mesures d’atténuation limitées jusqu’en 2021. Il est significatif que cette notion droitière et sans fondement, de «dette immunitaire», circule aujourd’hui sur les réseaux sociaux en Chine.
À l’époque, le Dr Anthony Leonardi, immunologiste, avait réfuté cette affirmation non scientifique en écrivant: «Nous ne devons pas nous bercer d’illusions en pensant que les infections confèrent réellement un avantage ou qu’elles constituent une dette qui doit être payée. Elles ressemblent plutôt à une taxe que nous faisons payer aux enfants parce que notre civilisation n’est pas assez développée pour prévenir les maladies virales qui entraînent l’hospitalisation de milliers d’enfants chaque année».
Le Dr Leonardi a attiré l’attention sur le grand nombre de recherches démontrant que le COVID-19 peut causer des dommages importants au système immunitaire.
Le Parti communiste chinois (PCC) a brusquement levé les mesures de Zero-COVID en Chine en novembre-décembre 2022, en réponse à une offensive implacable des trusts américains et européens, dont Nike et Apple, qui menaçaient de délocaliser leur production en Inde et dans d’autres pays. En tant que garant d’une main-d’œuvre bon marché pour le capitalisme mondial et déterminé à maintenir ses propres profits, le régime capitaliste du PCC a sacrifié la santé de la population chinoise pour s’assurer que ses relations avec l’Occident ne soient pas rompues.
Tous les médias d’entreprise, et ceux des partis politiques de la pseudo-gauche qui se prétendent faussement socialistes, ont fait de la propagande au nom des puissances impérialistes occidentales en faisant campagne pour la levée du zéro-COVID. Seuls le World Socialist Web Site et le Comité international de la Quatrième Internationale se sont opposés à cette politique réactionnaire, appelant à l’extension d’une stratégie mondiale d’élimination utilisant toutes les mesures sanitaires disponibles pour stopper la pandémie une fois pour toutes.
Les conséquences de l’arrêt du zéro-COVID ont été terribles: les 1,4 milliard d’habitants du pays ont été soumis à une vague catastrophique d’infections massives et de décès, des estimations indiquant qu’à la fin du mois de décembre la quasi-totalité de la population avait été infectée et qu’à la fin de janvier entre 1 et 3 millions de personnes avaient péri.
Depuis, la Chine a connu une deuxième vague d’infections massives entre avril et juillet 2023. Par la suite, les cas se sont stabilisés à un niveau de base très élevé, similaire à celui observé dans le reste du monde après la deuxième vague d’infection massive par le sous-variant Omicron BA.2 au printemps 2022.
Les réinfections par COVID-19 sont désormais omniprésentes en Chine. Le 15 octobre, le mot-clé «une quatrième infection [COVID]» a connu une augmentation stupéfiante de 707 621 pour cent. Les messages sur les réseaux sociaux concernant les quatrième, cinquième et même sixième infections sont désormais de plus en plus fréquents dans tout le pays. Chaque jour, on peut trouver de nombreux messages de nouveaux patients atteints de COVID longue durée souffrant d’affections souvent débilitantes, telles que fatigue extrême, troubles neurologiques, problèmes cardiaques, difficultés respiratoires et bien d’autres encore.
En réponse à un sondage en ligne demandant combien de fois les gens avaient été infectés par le COVID-19, 38 pour cent ont répondu «une fois», 38 pour cent ont répondu «deux fois», 15 pour cent ont répondu «trois fois ou plus» et seulement 9 pour cent ont répondu «jamais». Étant donné que ce sondage a été réalisé par un blogueur qui préconise une protection stricte contre le COVID-19, le pourcentage de personnes qui n’ont jamais été infectées ou qui ne l’ont été qu’une fois est probablement beaucoup plus élevé que dans la population en général.
Compte tenu des dommages que le COVID-19 peut causer au système immunitaire, l’infection et la réinfection massives de l’ensemble de la population chinoise est sans aucun doute un facteur contribuant au pic actuel d’hospitalisations d’enfants.
Fondamentalement, ce qu’il faut, c’est prévenir la transmission des maladies, y compris celle du SRAS-CoV-2, du mycoplasme pneumonie, de la grippe, de l’adénovirus, du VRS et de toutes les autres maladies infectieuses, tant en Chine qu’à l’étranger.
Il est important de noter que toutes les maladies identifiées jusqu’à présent comme se propageant en Chine sont des agents pathogènes respiratoires connus pour se propager par voie aérienne. Ainsi, la modernisation des systèmes de ventilation et l’utilisation universelle de masques N95 dans les lieux publics intérieurs permettraient de réduire rapidement la charge de morbidité actuelle. Associés à des tests de masse, à la recherche des contacts et à d’autres mesures de santé publique, ces virus pourraient être rapidement éliminés en Chine et dans le monde entier.
Un tel programme d’élimination mondiale, pour tous ces agents pathogènes et d’autres encore, nécessite une expansion considérable du financement et des ressources en matière de santé publique. L’expérience de la pandémie de COVID-19 a prouvé que rien de moins que la réorganisation socialiste de la société mondiale garantira la mise à disposition de ces ressources. Le Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI) est le seul parti politique au monde à lutter pour un tel programme socialiste de santé publique, et nous demandons instamment à tous ceux qui, en Chine et dans le monde, soutiennent ce programme de nous contacter dès aujourd’hui.
(Article publié en anglais le 24 novembre 2023)