Londres : 200.000 personnes participent à une manifestation contre le génocide, alors qu'Israël s’apprête à détruire Rafah

Plus de 200.000 manifestants ont défilé samedi à Londres contre le génocide israélien en cours, lors de la onzième manifestation nationale organisée dans la capitale britannique depuis octobre dernier.

La manifestation faisait partie des manifestations organisées dans toute l'Europe, avec des marches à Paris, Berlin, Copenhague, Amsterdam, Milan, Oslo, Helsingborg, Aarhus et dans d'autres villes. Celles-ci coïncidaient avec la Journée de la Terre, qui commémore les événements sanglants du 30 mars 1976, lorsque six Palestiniens ont été tués par les forces israéliennes alors qu'ils se soulevaient pour protester contre l'expropriation et l'occupation des terres palestiniennes par Tel-Aviv.

La participation à Londres a été d'autant plus remarquable que la marche s'est déroulée pendant le week-end de Pâques, alors qu'une grande partie du réseau ferroviaire britannique était fermée en raison de travaux de maintenance programmés, ce qui a ajouté des heures aux temps de trajet. Des milliers de personnes ont manifesté dans d'autres villes.

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À Londres, les manifestants se sont rassemblés à Russell Square avant de descendre The Strand et de se retrouver à Trafalgar Square où un rassemblement a eu lieu.

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L'opposition soutenue contre le génocide des Palestiniens par Israël et la nervosité ressentie dans les cercles dirigeants quant à ses implications dans l'élargissement de l'opposition ont trouvé leur expression dans les reportages des médias.

Les médias britanniques minimisent notoirement l’ampleur des manifestations majeures qui menacent les intérêts de l’élite dirigeante. Pourtant, samedi, le Guardian et ITV News ont rapporté avec précision que sa taille était supérieure à 200.000 personnes. Cela contrastait avec ce qui s'était passé en novembre dernier, lorsque l'indignation massive avait éclaté face à l'ampleur de l'invasion meurtrière d'Israël, lorsque le Guardian avait réussi l’exploit de rapporter non pas une manifestation de 800.000 personnes qui avait paralysé Londres, mais un rassemblement d’« environ 300 000 personnes ». Il a régulièrement affirmé que d’autres grandes manifestations nationales pour Gaza avaient réuni « des milliers de personnes ».

Le Guardian a également rapporté des commentaires faits à partir de la tribune, se concentrant sur l'ancien chef travailliste Jeremy Corbyn, qui, selon le Guardian, « a critiqué le gouvernement britannique pour la poursuite du “macabre et épouvantable commerce d'armes avec Israël” […] Il a déclaré : “Ce que nous observons en réalité en direct à la télévision mondiale est la destruction de la vie, la destruction gratuite de la vie à Gaza. Et nos gouvernements ne peuvent toujours pas se résoudre à prononcer les mots cessez-le-feu permanent, ne peuvent toujours pas se résoudre à mettre un terme à l'horrible commerce d'armes avec Israël et à la fourniture d'armes provenant d'usines en France, en Allemagne, de notre pays et les États-Unis, qui tuent des gens à Gaza”.»

Le discours de Diane Abbott, qui, comme Corbyn, a été expulsée du parti parlementaire travailliste par le chef travailliste sir Keir Starmer, a également été cité. Le Guardian a rapporté que « les députés de Hackney North et de Stoke Newington ont accusé les politiciens britanniques d’“apporter un soutien de façade à un cessez-le-feu”».

Sky News a également ressenti le besoin de s'écarter de ses reportages hostiles habituels sur les manifestations de Londres. Le correspondant Tom Cheshire a cité dans sa dépêche des commentaires de Ben Jamal, un représentant de la Campagne de Solidarité Palestinienne.

Cheshire a écrit que depuis novembre dernier, « le contexte des manifestations a changé […] Lorsque des centaines de milliers de personnes ont défilé en novembre, le gouvernement britannique n'avait pas pour position d'appeler à un cessez-le-feu. Aujourd’hui – sans doute en partie grâce aux manifestations – c’est le cas ».

Citant le soutien officiel à une récente résolution bidon de cessez-le-feu aux Nations Unies, Cheshire « a demandé à [Jamal] si des manifestations comme celle-ci – et le maintien de l’ordre requis pour les surveiller – étaient toujours nécessaires, alors que le gouvernement britannique veut plus ou moins la même chose ? »

Jamal a répondu en précisant que « la position du gouvernement à l’heure actuelle est de soutenir une pause temporaire et la position du gouvernement à l’heure actuelle est de continuer à vendre des armes à Israël ».

Le changement de ton dans les reportages, passant de la description par le gouvernement des manifestations comme des « marches de haine antisémites » à une apparente objectivité, a également amené la police métropolitaine à revenir sur ses promesses de mettre en œuvre une répression. Seules quatre personnes ont été arrêtées samedi, malgré la déclaration du sous-commissaire Andy Valentine qui a déclaré 48 heures avant l'événement qu'une « action rapide et décisive » suivrait toute activité jugée criminelle par la police.

Une opportunité d’arrestations massives a été fournie par une provocation organisée par une centaine de sionistes agitant des drapeaux israéliens lors d’une « contre-manifestation » alors que la marche principale touchait à sa fin à Aldwych.

La police fait barrage à la contre-manifestation sioniste, le 30 mars 2024.

Le rassemblement sioniste, protégé par des rangs de policiers, n'a pas atteint son objectif de déclencher une violence qui aurait pu être utilisée par le gouvernement et la police pour justifier la répression des manifestations contre la guerre. Sur les réseaux sociaux, des images montraient divers sionistes en train de réprimander la police pour son inaction.

Comme déjà indiqué, la tribune lors de l'événement de cette semaine était dominée par des personnalités de la « gauche » pro Corbyn ; Corbyn lui-même, Abbott, Zarah Sultana et Richard Burgon, président du Socialist Campaign Group.

Tous ont continué à promouvoir la fiction selon laquelle Israël pourrait être contraint de mettre un terme à ses massacres en suppliant les députés parlementaires britanniques à exiger un cessez-le-feu. Il ne manquait que d’exercer davantage de pression et protestations auprès du Parti travailliste pro-guerre.

Pour souligner le caractère servile d’une telle « opposition », la banderole indiquant « Pas de cessez-le-feu, pas de vote » – promouvant des manifestations lors des prochaines élections générales contre le Parti travailliste et qui a été la pièce maîtresse de toutes les manifestations récentes – n’était visible nulle part samedi.

Résumant la perspective en faillite de la Coalition Stop the War, Chris Nineham , leader de la tendance de pseudo-gauche Counterfire, a déclaré lors du rassemblement : « Nous allons de l'avant, nous avons défié les interdictions, nous nous sommes débarrassés d'une ministre de l’Intérieur [Suella Braverman], nous avons créé une crise au sein du Parti travailliste , et même si la résolution de l'ONU de la semaine dernière était bien trop peu et trop tard, elle est le signe qu'à l'échelle mondiale, Israël est isolé. »

Chris Nineham s'exprimant lors du rassemblement à Trafalgar Square, le 30 mars 2024

Il faut tirer les conclusions inverses. Les États-Unis et les autres puissances impérialistes continuent de marcher aux côtés d’Israël : les seuls désaccords tactiques qui sont exprimés sont sur la manière d’écraser les Palestiniens sans attiser une opposition mondiale encore plus grande à leurs crimes.

Mettre fin au génocide à Gaza n’exige pas de faire appel à Starmer et à son parti de criminels alliés au gouvernement Sunak, à l’administration Biden et à Netanyahou. La solution est de construire un mouvement anti-guerre international de masse de la classe ouvrière pour contrecarrer leur conspiration meurtrière par des blocus, des grèves et une lutte politique de masse pour le socialisme.

(Article paru en anglais le 1er avril 2024)

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