Comité International de la Quatrième Internationale
Comment le Workers Revolutionary Party a trahi le trotskysme

Comment Healy fit la cour aux Baassistes

Healy, Banda et Slaughter portent la responsabilité politique de la mort de centaines de milliers d’ouvriers, de paysans et de jeunes massacrés lors de l’invasion irakienne de l’Iran en 1980 et à la prolongation réactionnaire de cette guerre par la République islamique bourgeoise bien que la défense de son territoire eût été assurée.

Comme nous l’avons déjà documenté, le WRP fournit un soutien sans principe aux Baassistes de droite, allant jusqu’à approuver l’assassinat de militants du Parti communiste pendant l’hiver 1978-1979. Les liens entre Healy et les Baassistes irakiens se sont resserrés après que Saddam Hussein eût renversé et assassiné le président de longue date, Al-Bakr, en juillet 1979 et effectué une purge impitoyable de tous ses éventuels opposants politiques dans la direction du Parti Baath. Parmi les assassinés, on pouvait compter Talib Suwailh, un membre de l’exécutif du bureau central de la fédération des syndicats de l’Irak, qui, quelques semaines seulement avant son exécution sur la base d’accusations mensongères était assis à la même tribune que Healy lors de la conférence de la « All Trades Unions Alliance » (l’aile syndicale du WRP) le premier juillet 1979 et avait personnellement salué les délégués. La purge sanglante qui suivit fut à peine mentionnée par le News Line et la direction de Healy ne protesta pas contre la mort de Suwailh qu’elle ne mentionna même pas.

Au lieu de cela, après que les bourreaux aient effectué leur travail sanglant, le News Line du 10 août 1979 a rapporté avec enthousiasme la marche organisée par les gangsters de Saddam Hussein dans les rues de Bagdad pour se vanter de la mort de leurs opposants. Ce numéro du journal a approuvé les exécutions et a accepté l’affirmation de Hussein que les 55 condamnés étaient des « traîtres » en publiant les fausses assurances de ce dernier qui déclarait que sa dictature « combattra partout l’oppression, soutiendra partout le droit et partout les pauvres [et] luttera partout contre l’exploitation. »

Il était évident que le bouleversement politique à l’intérieur du Parti Baath faisait partie de la réaction qui eût lieu au sein de la bourgeoisie irakienne contre la révolution iranienne et que le coup monté par Hussein était le signe d’une orientation vers des rapports plus étroits avec l’impérialisme américain ainsi que vers la préparation d’un conflit militaire avec l’Iran. La direction de Healy a cependant refusé de faire une analyse sérieuse de ce qui se passait en Irak. Au contraire, elle a intensifié son adulation obscène de la dictature bonapartiste de Hussein.

Les mois suivants, de nombreux articles ont été publiés qui n’étaient rien d’autre que de la publicité pour le compte du régime irakien. Le contenu politique de l’orientation exprimée dans ces articles était une capitulation complète devant la bourgeoisie irakienne. En Grande-Bretagne, le résultat de tels articles ne pouvait être que l’affaiblissement de la conscience politique des membres du parti et des ouvriers avancés, en les conditionnant insidieusement pour de futures capitulations politiques dans leur propre pays. L’incessante glorification des Fronts populaires au Moyen-Orient ne pouvait que contribuer à obscurcir les frontières de classe à l’échelle internationale – facilitant par là même les relations sans principe que Healy était déjà en train de nouer en Grande-Bretagne avec les bureaucrates syndicaux et les centristes du Labour Party.

Une formidable éducation déformée et faussée des ouvriers et de la jeunesse, membres du parti, et la désorientation du Comité international à l’intérieur duquel le WRP exerçait une influence excessive, étaient déjà en bonne voie. Le capital théorique du mouvement trotskyste, accumulé au cours de six décennies de lutte contre le stalinisme et le révisionnisme, était systématiquement pillé par Healy et ses complices du comité politique du WRP et de la rédaction du News Line.

Dans un article du 25 juin 1980, intitulé «  l’Irak va aux urnes  » et écrit par le commis voyageur de Healy à Bagdad, Alex Mitchell, on chanta les louanges d’un plébiscite frauduleux monté de toutes pièces par Hussein pour légitimer son régime sanglant. Même en torturant son imagination à l’extrême on ne pourrait ni considérer l’article de Mitchell comme un écrit politiquement cultivé ni y voir une analyse marxiste. Non pas que l’on eut pu traiter Mitchell d’ignare, il exécutait plutôt une politique bien déterminée, élaborée par Healy et Banda sur la base de la résolution du Quatrième congrès, qui avait sanctifié la domination du mouvement anti-impérialiste et national par la bourgeoisie.

L’application de cette politique en ce qui concerne l’Irak signifiait la flagornerie politique vis-à-vis de l’Etat bonapartiste. Plaisantant sur l’impuissance politique de l’Assemblée nationale – c’est-à-dire sur l’absence de toute forme crédible des droits démocratiques pour la classe ouvrière – Mitchell a cité ainsi en l’approuvant un des représentants baassistes « Nous ne voulons pas de forum de discussion ».

Faisant sienne la prémisse réactionnaire du droit des Baassistes à la direction de la nation irakienne, Mitchell fit la remarque suivante : « Ce qui frappe le plus chez les gens qui s’attroupaient devant le bureau de vote, c’est la diversité des couches sociales et des classes qu’ils représentent. »

A peu près la moitié de l’article était consacrée à tenter de ridiculiser un journaliste communiste de l’Inde qui avait suggéré que les Baassistes auraient employé la force pour obtenir un succès électoral assurant la confirmation du régime baassiste. Mitchell s’est opposé, à grand renfort de sarcasmes, au comportement de journalistes indiens et sri lankais qui « se sont lancés dans un interrogatoire épouvantable des officiels supervisant le scrutin... Des officiels harassés ont passé plus de 90 minutes à donner des réponses détaillées à toutes les questions, mais les super-démocrates et moralistes électoralistes n’étaient toujours pas convaincus. » Ces lignes démontrent le profond mépris de Mitchell à l’égard des droits démocratiques de la classe ouvrière et des masses opprimées.