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L'Afrique: La crise des réfugiés en Guinée produit un désastre humanitaire

Par Barry Mason et Chris Talbot
3 février 2001

Près de 250 000 réfugiés, coincés dans la région du sud de la Guinée qui déborde sur la Sierra Leone et le Liberia, sont confrontés à une catastrophe. Bien que la presse occidentale ne fit pratiquement aucun compte rendu, l'agence des réfugiés des Nations unies UNHCR décrit la situation comme étant la crise humanitaire la plus grave actuellement.

Alors qu'une majorité de réfugiés dans les camps viennent de Sierra Leone, ayant fui la guerre civile qui dure depuis dix ans là-bas, il y a aussi des Libériens fuyant le conflit qui recommence maintenant dans ce pays, et à peu près 70 000 Guinéens qui ont été déplacés à cause des combats.

Les réfugiés sont bloqués entre les forces gouvernementales guinéennes et celles des dissidents guinéens rebelles. Des centaines de réfugiés ont été tués et plus encore ont été blessés dans des attaques menées par les deux côtés. Les réfugiés que les forces rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF) empêchent de partir au sud pour atteindre la Sierra Leone ne peuvent se déplacer vers des régions plus sûres en Guinée parce que le gouvernement les y accuse d'abriter des dissidents rebelles.

Certains réfugiés n'ont pas pu recevoir d'aide alimentaire depuis cinq mois à cause de l'intensification des combats. Un reportage de la BBC décrit une «situation infernale» à l'un des camps de réfugiés, avec «des personnes terrifiées se battant à coups de poing pour une quantité de vivres qui diminue», pendant que «des hommes de milices armées qui, alliées au côté du gouvernement guinéen durant la guerre, se pavanaient autour du camp prenant une partie des vivres déjà insuffisants.»

Selon des reportages dans la presse, plus de 30 000 réfugiés de Sierra Leone au camp de réfugiés de Nyaedou, près de Guéckédou, ont supplié des représentants de l'UNHCR de les ramener chez eux, disant qu'ils préféraient mourir en Sierra Leone qu'en Guinée.

Bien que l'UNHCR ravitaille le camp de Nyaedou avec difficulté, il ne peut pas atteindre beaucoup de la région. L'année dernière, le chef du bureau local de l'UNHCR fut tué et un autre membre du personnel fut enlevé. Beaucoup d'aides ont aussi dû se retirer.

Le désastre des réfugiés a lieu au moment où les Etats-Unis et la Grande-Bretagne accélèrent leur campagne, présentant le président libérien, Charles Taylor, comme le diable en personne et la cause première des problèmes de la région. Un rapport des Nations unies, publié en décembre 2000, accuse Taylor d'aider le RUF, lui fournissant un soutien logistique et lui permettant d'utiliser le Liberia comme relais pour ses attaques en Sierra Leone. Taylor fut aussi accusé d'enfreindre aux sanctions imposées par l'Organisation des Nations unies en faisant le commerce des diamants dans les régions contrôlées par le RUF en Sierra Leone. Le rapport fut discuté par le conseil de sécurité de l'ONU le 25 janvier où un projet de résolution fut élaboré. Celui-ci appelait à un nouvel embargo sur les armements, une interdiction des exportations de bois et de diamants du Liberia, des restrictions pour les vols internationaux en direction et en provenance du Liberia et une limitation des voyages à l'étranger des fonctionnaires du gouvernement libérien. Reste à voir si la résolution qui est soutenue dans son entier par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne sera adoptée par les Nations unies le mois prochain. La France, en particulier, a protesté contre l'interdiction des exportations de bois, n'oubliant pas ses propres intérêts dans la région.

La mise hors-la-loi du Liberia est soutenue, en particulier, par la Grande-Bretagne qui a envoyé des troupes en Sierra Leone en mai dernier pour augmenter le nombre des forces gouvernementales contre les rebelles du RUF et soutenir la mission de « maintien de la paix » onusienne. A l'époque, la capture de 500 troupes des Nations unies qui furent prises en otage par le RUF révéla que les accords de paix étaient en déroute complète. Des contingents indiens et jordaniens des forces de l'ONU se retirèrent quand il devint clair qu'aucun pays occidental n'était prêt à envoyer des troupes. Le nombre de soldats des forces des Nations unies en Sierra Leone n'est que la moitié de ce qui avait été stipulé par le mandat de l'ONU et la situation demeure précaire, dépendant d'un cessez-le-feu peu sûr, négocié avec le RUF en novembre dernier.

La Grande-Bretagne a continué de faire pression sur le RUF en maintenant 600 de ses propres troupes à la fois dans le pays à tout moment, avec 300 participant actuellement à l'entraînement de l'armée sierra-léonaise En septembre prochain, un total de 8 000 troupes britanniques se seront chargées des opérations en Sierra Leone, formant un groupe de soldats familiarisés avec les conditions et le terrain sur place. Le Ministre de la défense de Grande-Bretagne a déclaré qu'il surveillait la menace présentée à la sécurité et était prêt à agir si la situation se détériorait. Le secrétaire à la défense, Geoff Hoon, dit: « La capacité de notre force de réaction rapide reste à la disposition des Nations unies, nous nous attendons à faire faire l'exercice aux troupes périodiquement en Sierra Leone pour démontrer comment nous pouvons déployer nos forces rapidement si nécessaire. »

Des comptes-rendus de presse de novembre dernier ont bien fait comprendre que la pression exercée par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne sur le RUF était faite en pleine connaissance du fait que le conflit pourrait vraisemblablement se déplacer vers la Guinée.
Les Etats-Unis ont, au début, envoyé 10 soldats des Forces spéciales pour fournir un entraînement aux troupes guinéennes. Comme l'expliquait un article paru le 6 novembre dernier dans le Washington Post: « Des troupes américaines et guinéennes disent que l'entraînement est nécessaire pour assurer que les rebelles de Sierra Leone ne puissent pas déplacer leurs bases vers la Guinée s'ils sont talonnés par les forces britanniques, onusiennes et sierra-léonaises qui soutiennent le gouvernement là-bas. »

Malgré la rhétorique humanitaire utilisée par les USA et la Grande-Bretagne pour justifier leurs interventions dans cette région de l'Afrique ­ attirant l'attention sur la brutalité du RUF et le soutien que leur accorde Taylor ­ leurs actions imprudentes ont largement contribué à la crise actuelle des réfugiés. Alors que Taylor déclare qu'il a rompu toute relation avec le RUF afin d'échapper aux sanctions que menacent de prendre les Nations unies et que le RUF dit participer au cessez-le-feu, les milices du RUF ainsi que celles basées au Liberia, opposées au régime guinéen, se sont déplacées au-delà de la frontière jusqu'en Guinée.

Selon le journal de Sierra Leone le Concord Times, des dissidents guinéens ont régulièrement fait des visites dans le territoire contrôlé par le RUF en Sierra Leone, recrutant des mercenaires du RUF pour $200 par mois avec la promesse d'un bonus de $10 000 à la fin de la mission. L'identité et l'origine de tous les groupes de milices se battant en Guinée ne sont toujours pas certaines. La BBC, par exemple, rend compte de la participation d'au moins cinq unités différentes.

Le régime guinéen, reconnu pour son traitement brutal d'opposants à l'intérieur du pays, prend pour cible les réfugiés autant que le RUF et les forces dissidentes. Un reportage produit par Human Rights Watch (HRW) fait remarquer que le président guinéen, Lansana Conte, suscita de l'hostilité envers les réfugiés à la radio, exigeant qu'ils « retournent chez eux », et appelant les Guinéens à « défendre leur pays et rassembler tous les étrangers. » Le HRW rend aussi compte du fait que, « pendant plusieurs jours, des groupes armés de milices civiles, la police et des soldats se sont introduits par infraction dans les habitats des réfugiés, les ont battus, violés et arrêtés et leur ont volé leurs biens. »

La Guinée et le Liberia se lancent mutuellement des récriminations maintenant, se dénonçant réciproquement de soutenir les groupes rebelles de l'autre. La tension croît à travers la région et menace de déborder en guerre totale. La Guinée a transmis des « confessions » de deux hommes prétendant être des rebelles du RUF. L'un d'eux déclara que Charles Taylor était le chef du Rally of Democratic Forces of Guinea (RFDG: ralliement des forces démocratiques de Guinée), l'un des groupes dissidents se battant contre le régime guinéen. Charles Taylor est cité comme disant: « Je suis le premier grand rebelle d'Afrique de l'ouest. Que Conte ne joue pas aux rebelles avec moi. »

Pendant ce temps, quelque chose des intérêts réels derrière la participation des occidentaux dans cette région fut révélé par la décision de la Sierra Rutile Company que possède la compagnie minière américaine Nord Resources Corporation, de reprendre les opérations en Sierra Leone. Le Concord Times fait remarquer que les profits principaux de l'exploitation minière en Sierra Leone ne viennent pas des diamants mais du dépôt riche de rutile (oxyde de titane). La population locale se plaint que les promesses faites par la compagnie concernant le développement local, la réhabilitation de la terre et les compensions pour les récoltes ne se sont pas matérialisées.


 

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