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France : le gouvernement Raffarin commence ses coupures budgétaires

Par Alex Lefebvre
14 août 2002

Arrivé au pouvoir promettant une grande réforme budgétaire, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin refuse d'annoncer clairement comment il va organiser les dépenses et donne surtout des précisions sur des décisions qui entraînent des sommes relativement modestes. Cependant, même le peu de nouvelles qu'il donne continuent à retourner l'opinion publique contre lui.

La décision d'annuler l'exposition internationale de 2004 sur l'image programmée en Seine Saint-Denis, jugée trop coûteuse, touche la zone de banlieue parisienne la plus défavorisée. Le projet de 395 millions d'euros allait permettre la création d'emplois en transports et en bâtiment et améliorer les recettes des restaurants. Même si la presse a parlé d'habitants « qui préféraient garder l'anonymat » et qui disaient « comprendre » la décision du gouvernement, les interviews permettaient de deviner l'opposition que la décision a suscitée : des restaurateurs se plaignaient d'une perte de revenus et les fonctionnaires du département défendaient leur préparatifs pour l'exposition, jugés insuffisants par Raffarin.

En un geste insultant, lors d'un vote de nuit le Parlement a augmenté de 70% des salaires des ministres d'un gouvernement dont la première décision budgétaire a été de refuser l'augmentation traditionnelle du salaire minimum (SMIC). Raffarin avait d'abord nié qu'il y avait la moindre intention d'augmentation (le démenti était même « ferme, net, et précis »), puis il a annoncé qu'il s'en « remettait » au Parlement.

Le ministre des affaires sociales, François Fillon, a tenté de minimiser l'affaire, remarquant que « l'harmonisation » du SMIC prônée par le gouvernement allait donner à certains une augmentation qui pourrait aller jusqu'à 12%. Mais il a dû rapidement mitiger même cette réplique peu convaincante pour apaiser le patronat, ajoutant que l'augmentation serait financée par l'Etat, qui réduira les charges sociales que payent les entreprises qui emploient des smicards.

La gauche officielle a à peine critiqué la droite : François Hollande, secrétaire-général du Parti Socialiste (PS), a dit que la droite n'avait pas choisi « le bon moment » de faire passer cette réforme, ajoutant que si la gauche était restée au pouvoir, il n'était « pas tout à fait exclu » qu'elle eût fait de même. Dans un éditorial, le journal de centre-gauche Le Monde a annoncé qu'il considérait la mesure justifiée mais qu'il lamentait la mauvaise presse que se faisait la classe politique : « Si l'opinion publique accueille mal cette décision, les hommes politiques n'auront à s'en prendre qu'à eux-mêmes ».

Les « lettres-plafonds » du premier ministre, qui indiquent à chacun de ses ministres la somme dont il disposera en 2003, ont donné un autre exemple du style du nouveau gouvernement, mélange de provocation arrogante et de dissimulation maladroite.

La presse a recueilli certains détails sur le contenu de la première série de lettres, du 6 août. On y évoquait d'importantes réductions du budget des transports (touchant l'entretien ferroviaire et des autoroutes), du logement (moins d'argent pour les immeubles subventionnés par l'Etat dans les quartiers pauvres), et de la recherche et de l'enseignement supérieur. En privilégiant plutôt la police, la justice, et les forces armées, Raffarin voulait dépenser moins sur « tout ce qui n'est pas utile aux Français ». Il a aussi mentionné la possibilité de ne pas remplacer les départs en retraite des fonctionnaires, touchant ainsi au sujet (le traitement des fonctionnaires) qui a déclenché la grève générale du secteur public de 1995.

Du 6 au 9 août, date de l'envoi final des lettres-plafonds, on n'a pas eu plus de détails sur les projets du gouvernement. Juste avant son départ en vacances, il a envoyé les lettres aux ministres, précisant qu'il n'y aurait aucune « déclaration globale » sur leur contenu avant la rentrée. Les ministres des transports et des recherches ont tous deux fermement nié que leurs budgets soient du tout touchés ; bien sûr, les assurances du gouvernement Raffarin sont, comme l'on a déjà vu, sans grande valeur. Entre-temps, il y a un silence éclatant sur le contenu des lettres : selon Libération, « Contrairement à l'habitude, rien n'a filtré des orientations gouvernementales ».

On a su que selon Raffarin, l'épreuve avait été particulièrement « rude ». Ayant réduit les recettes gouvernementales suite à la baisse de 5% de l'impôt sur le revenu et augmenté le budget de la justice, de la police, et des forces armées, le gouvernement dû faire des réductions importantes. Raffarin a annoncé que l'on ne ferait pas de déclaration globale sur le budget avant la prochaine réunion du Conseil des Ministres, le 18 septembre.

La dernière fois que le gouvernement a clairement exprimé son programme, lors de la déclaration de politique générale de Raffarin du 3 juillet, la cote officielle de popularité du gouvernement a rapidement chuté. Le secret quasi-total qui planera sur les intentions budgétaires de Raffarin jusqu'au 18 septembre le protège de l'opinion publique et éloigne la nécessité de décider comment tenter de faire avaler l'austérité budgétaire aux travailleurs.

Indiquant la frustration et le sentiment de débordement qui gagnent les milieux proches du gouvernement, le journal de droite Le Figaro a écrit que « S'il veut gagner, Raffarin ... doit réformer mais sans trop en avoir l'air, tant les résistances sont grandes ». Les commentaires dissimulateurs et contradictoires des milieux syndicaux et de la presse sur les privatisations prévues d'Air France, d'Electricité de France (EDF) et de Gaz de France (GDF) indiquent le malaise des hauts fonctionnaires, des patrons, et des chefs syndicaux.

Le Monde a cité des syndicats CFDT et CGT à Air France qui prétendaient avec une fausse naïveté que « l'on ne sait pas dans quel intérêt [serait la privatisation] pour Air France » ou qu'elle serait « inutile », tirant la conclusion que les syndicats ne sont pas « ouvertement hostiles » à la privatisation. Deux phrases plus tard, Le Monde citait un chef syndicaliste qui donnait une certaine expression aux inquiétudes des employés d'Air France, disant que Raffarin « semble favoriser la concurrence déloyale des compagnies à bas prix ».

L'exemple le plus flagrant de contradiction provient peut-être de L'Express, qui a publié plusieurs articles sur la privatisation d'EDF. En un interview avec François Roussely, le patron d'EDF installé par Jospin qui va se charger de la privatisation de la société, le journaliste de L'Express a remarqué que les travailleurs d'EDF « ne sont pas hostiles a l'ouverture [du capital d'EDF au privé] ».

L'Express publiait pourtant justement un sondage réalisé pour Roussely qui le contredit directement sur ce point : 51% du personnel se déclaraient contre l'ouverture du capital d'EDF, 64% se déclaraient prêts à faire grève, et 71% à manifester.

Le gouvernement Raffarin est tiraillé entre l'opposition de la classe ouvrière à ses mesures et l'insistance avec laquelle les milieux dirigeants les réclament. Malgré les tentatives de dissimuler ses intentions ou de semer la confusion à leur sujet, le gouvernement ne pourra pas toujours obscurcir la logique d'austérité et de répression de sa politique.

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