wsws.org/francais

Visitez le site anglais du WSWS

SUR LE SITE :

Contribuez au WSWS

Nouvelles et Analyses
Luttes Ouvrières
Histoire et Culture
Correspondance
L'héritage que nous défendons

A propos du CIQI
A propos du WSWS

AUTRES LANGUES

Allemand

Français
Anglais
Espagnol
Italien

Indonésien
Russe
Turque
Tamoul

Singalais
Serbo-Croate

 

France: Grèves et manifestations massives pour défendre les retraites

Par Antoine Lerougetel
4 Juin 2003

Utilisez cette version pour imprimer

Plus d'un million de salariés ont fait grève le 3 juin et ont pris part à des manifestations dans toute la France. Ils s'opposaient au projet de réforme des retraites, proposé par le gouvernement du président Jacques Chirac et du premier ministre Jean-Pierre Raffarin, impliquant l'allongement de la durée de cotisation et des réductions de revenus de 30% et plus pour les retraités.

La grève fut particulièrement bien suivie à Marseilles, notamment parmi les enseignants du primaire qui ont fait grève à 71%. Les chiffres nationaux dans le secteur de l'éducation dépassaient juste les 40% de grévistes, une baisse par rapport aux 59% du 13 mai.

Il y eut des grèves dans tout le secteur public et la CGT (Confédération générale du travail) a déclaré que le secteur privé aussi avait bien répondu à l'appel. La grève de 24 heures était appelée par la CGT (la plus grande confédération syndicale de France, traditionnellement attachée au Parti communiste), Force Ouvrière (attachée au Parti socialiste), l'UNSA (syndicat de fonctionnaires, entretenant des liens avec le Parti socialiste), la FSU (principale fédération syndicale des enseignants) et la confédération du Groupe des 10 Sud.

De nombreux syndicats affiliés à la CFDT (liée à l'aile droite du Parti socialiste) dont le dirigeant, François Chérèque a apporté son soutien au gouvernement, ont aussi fait grève. Le 4 juin, des milliers de salariés n'avaient pas repris le travail et une bonne partie du service des transports et de l'éducation en France est encore perturbée.

C'était la quatrième journée de mobilisation organisée par les syndicats cette année contre les réductions draconiennes des droits à la retraite, projet qui sera présenté au parlement le 10 juin, et la dixième grève d'une journée appelée par les syndicats de l'éducation. Toute l'année durant, cependant, les syndicats ont multiplié leurs efforts pour contenir et briser l'opposition des salariés au programme de Chirac-Raffarin d'attaques des services publics en limitant les mobilisations à des actions d'une journée et la perspective inefficace qui consiste à faire pression sur le gouvernement.

Des milliers et des milliers de salariés de l'éducation sont en grève reconductible depuis plus de trois semaines maintenant pour protester contre des réductions de personnel, la précarisation et le transfert de 110 000 personnels non enseignants du service de l'éducation nationale aux collectivités territoriales (décentralisation ou régionalisation). Les syndicats de l'éducation ont annoncé encore une nouvelle grève d'une journée pour le 10 juin et envisagent de perturber le déroulement du baccalauréat, diplôme national de fin d'études secondaires, passé à 18 ans et qualification pour la poursuite d'études universitaires, et dont la première épreuve écrite, la philosophie, se tiendra le 12 juin et concerne 500 000 candidats.

La manifestation du 3 juin a montré comment les dirigeants syndicaux ont réussi à semer la frustration chez leurs adhérents. Bien que ce fut une mobilisation de masse importante, néanmoins elle fut bien inférieure à celle du 13 mai ­ qui mobilisa quelques 4 millions de grévistes et 2 millions de manifestants ­ et ne représenta pas la vague immense que beaucoup espéraient voir devenir le début d'une grève générale contre le gouvernement.

La CGT encouragea activement à briser la grève à la RATP (Réseau autonome des transports parisiens) alors que des salariés cherchaient à reconduire en grève illimitée après le 13 mai. Marc Blondel, dirigeant de Force Ouvrière a exprimé à plusieurs reprises son opposition à la grève générale car elle transformerait la grève en grève politique et appela toutes les actions syndicales à cesser dès que les propositions sur les retraites seraient présentées au Conseil des ministres le 28 mai. Il dit qu'il s'opposait à la réforme des retraites du gouvernement, mais pas au gouvernement Raffarin lui-même.

La manifestation parisienne partit de la Gare du Nord, où les manifestants organisèrent un sit-in dans la rue avant de se mettre en mouvement. De nombreux tracts de la déclaration du World Socialist Web Site « Une stratégie politique pour la défense des retraites en France » furent distribués et lus avec intérêt. Une équipe de sympathisants du WSWS distribua 5 000 tracts durant la manifestation.

On a estimé le cortège à plus de 210 000 manifestants, dont une grande majorité d'enseignants, mais il y avait aussi des contingents de salariés de Renault et EDF (Electricité de France). Le contingent syndical le plus important était celui du syndicat des enseignants FSU, mais Force Ouvrière, représentant surtout les salariés du secteur public était bien représenté. Des lycéens et des étudiants prirent aussi part à la manifestation.

En queue de cortège, il y avait des contingents défilant derrière les banderoles de groupes 'd'extrême-gauche' LCR, Ligue communiste révolutionnaire et LO, Lutte ouvrière. Il y avait aussi un contingent du Parti Communiste Français.

La manifestation s'est déroulée dans un climat de grand sérieux et des enseignants, dont bon nombre étaient en grève reconductible dans des centaines d'école dans tout Paris depuis la grande mobilisation du 13 mai, voire même avant, exprimaient une détermination inflexible. Un professeur de sports dit : « Il va falloir continuer, mais c'est un gouvernement très à droite, sur la voie du fascisme. Je n'ai pas beaucoup d'espoir. » Plusieurs enseignants dirent être fatigués mais ne pas vouloir abandonner maintenant. »

A Amiens, quelques 8 000 personnes ont défilé, dont plus de la moitié étaient des enseignants ­ une manifestation importante pour cette ville industrielle du nord comptant 135 000 habitants, mais bien moins importante que les 20 000 manifestants du 13 mai.

La revendication claire des grévistes et manifestants est le retrait total de la réforme des retraites, des réductions de personnel dans l'éducation et du projet de décentralisation de l'éducation. Mais Bernard Thibault, dirigeant de la CGT, apporta un message conciliateur pour le gouvernement au journal télévisé de 8 heures. Il n'appela pas au retrait de la réforme des retraites mais exprima sa volonté de négocier sur le projet. Encouragé par la traîtrise du dirigeant syndical, Raffarin déclara « ni retrait, ni report, ni amendement. »

Gérard Aschieri, secrétaire général de la FSU, dit à l'Agence France Presse le soir même que les quatre syndicats de l'éducation ­ la CGT, FO, l'UNSA et le sien ­ étaient « prêts à tenir jusqu'aux vacances scolaires et même au delà » et nia quelque essoufflement du mouvement. Faisant référence au report de la réforme sur la décentralisation et les universités, il affirma : « Nous avons un pied dans l'embrasure de la porte, maintenant il faut pousser la porte. »

A 3 heures de l'après-midi, une assemblée générale de 200 cheminots se réunit derrière la gare d'Amiens dans la cour de la SERNAM et vota pour la reconduction de la grève à l'unanimité moins deux voix contre. Les intervenants syndicaux annoncèrent que la grève était suivie à 47%.

Après le vote, le WSWS parla à Pierre qui est cadre au bureau d'étude de la SNCF, compagnie nationale des chemins de fer. Il dit : « En fait, moi, Je vais bientôt prendre ma retraite. J'ai trois enfants qui sont tous enseignants. C'est pour eux que je suis en grève. Je crois que pour gagner, il va falloir une grève générale. Il va peut-être falloir aller jusqu'à renverser le gouvernement. »

Quand on lui a demandé que mettre à la place de ce gouvernement, il répondit : « C'est une question très difficile. En fait, ce ne pourrait être qu'un gouvernement de gauche. Mais il va falloir réformer la gauche. »

Un groupe de salariés de la maintenance qui venaient de voter pour reconduire la grève parlèrent au WSWS. Thierry dit qu'il faisait grève contre le programme du gouvernement : « travailler plus longtemps et gagner moins. »

Willy dit: "Le gouvernement essaie de nous diviser."

Et Thierry ajouta: "En 1995, les cheminots étaient à la tête du mouvement. Si on ne se mobilise pas maintenant, ils vont nous attaquer quand nous serons isolés. Nous avons reçu des lettres du PDG de la SNCF nous disant que pour le moment nos retraites ne changeront pas. Ce qu'ils veulent c'est nous isoler pour nous avoir plus facilement. On en a fait baver à Juppé [Alain Juppé, premier ministre de l'époque], alors cette fois ils ne commencent pas par nous. Près de 49% de la population était contre Maastricht [le traité]. La politique de Bruxelles c'est le nivellement par le bas. Nous, on pense que toutes les retraites devraient être élevées au niveau de nos retraites ».

Willy dit: "Ce que l'Europe fait c'est d'essayer de rivaliser avec les Etats Unis en imitant et en important leurs conditions de vie. Ils ont fait la guerre contre l'Irak pour affirmer leur présence dans le monde, montrer qu'ils sont là. L'Europe, en s'opposant à eux, les imite ».

Thierry ajouta: "Regardez la faillite d'Enron. En Amérique ça va si vous avez de l'argent. Ici, on a une certaine couverture. Ce qu'on a encore ici, on doit se battre pour le garder. »

Willy fit remarquer: "Ce qu'ils veulent maintenant, c'est s'attaquer, en Septembre, à l'assurance maladie et à la sécurité sociale. On a dit qu'il y a eu des abus, alors maintenant ils cherchent à tout prix à faire des économies. Le remboursement de nombreux médicaments a été réduit. »

Thierry dit: "Il faut qu'on soit encore plus déterminés qu'en 1995. Ils ont compris. Raffarin communique mieux que Juppé. Et Chirac se sent plus fort qu'en 95 avec ses 82% de voix au second tour des présidentielles. [A l'issue du premier tour des élections présidentielles de 2002, il ne restait que deux candidats de Droite pour le deuxième tour : Jacques Chirac et le fasciste Jean-Marie Le Pen. Tous les partis de gauche et les syndicats appelèrent immédiatement à voter pour Chirac et rejetèrent l'appel du WSWS à un boycott actif des élections.]

"On a bien vu ce que la privatisation a donné avec le chemin de fer en Angleterre, » ajouta Thierry. « Ici le système n'est peut-être pas parfait. En France on n'est peut-être pas sûr qu'un train arrivera à temps, mais là bas on ne sait même pas si le train arrivera. »

Voir aussi :


 

Untitled Document

Haut

Le WSWS accueille vos commentaires


Copyright 1998 - 2012
World Socialist Web Site
Tous droits réservés