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La France envoie des troupes en Centrafrique

Par Chris Talbot
Le 24 mars 2003

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A la suite du coup d'état du 15 mars en Centrafrique, la France a intensifié sa présence militaire en Afrique par l'envoi de 300 soldats dans ce pays. Selon les explications officielles les troupes y sont présentes afin de sécuriser l'aéroport et d'aider à l'évacuation de citoyens français dans la capitale, Bangui.

Bien que la France ait officiellement condamné le coup d'état, le chef de la rébellion, le général François Bozizé, exilé depuis peu à Paris, a réclamé que davantage de troupes françaises soient envoyées pour stabiliser le pays. Tout indique que la France manuvre dans les coulisses dans le but de faire réaliser ses ambitions impérialistes en Afrique.

Bozizé, un ancien chef d'état-major de l'armée centraficaine, avait marché sur Bangui avec quelque 1.000 troupes rebelles, ne rencontrant apparemment qu'une faible résistance. Le président centrafricain, Ange-Félix Patassé, participait à une conférence au Niger, le pays voisin. A son retour, son avion a essuyé des tirs alors qu'il tentait de se poser à l'aéroport de Bangui - Patassé fut contraint de se réfugier au Cameroun.

Bozizé avait, semble-t-il, reçu un accueil chaleureux de la population qui dansait dans les rues en manifestant sa haine contre Patassé. La population de Centrafrique avec ses 3,5 millions d'habitants est l'une des plus pauvres d'Afrique avec un revenu moyen de 290 dollars par an. Les salaires des fonctionnaires n'ont pas été versés depuis des mois malgré des actions de grèves répétées.

Bien que la Centrafrique dispose de richesses minières considérables en diamants et en uranium, ainsi que de zones riches en pétrole, ce pays a souffert d'une instabilité continuelle. Elle est entourée de pays ravagés par la guerre - le Soudan, la République démocratique du Congo (RDC), la République du Congo (ROC) et le Tchad. Un conflit entre le Tchad et la Libye a permis à Patassé de faire entrer un détachement de troupes libyennes à Bangui, exerçant ainsi une pression sur le Tchad par le sud.

Après que la France ait réduit son aide économique et retiré ses troupes au milieu des années 1990, il y eut des mutineries dans l'armée et des tentatives de coups d'état. La dernière tentative de coup d'état remonte à octobre 2002 quand les partisans de Bozizé attaquèrent Bangui, depuis le Tchad où ils étaient stationnés. L'attaque fut repoussée par les troupes libyennes qui continuèrent à soutenir le régime de Patassé jusqu'à la fin de l'année dernière quand elles durent se retirer sous la pression de l'Occident.

Patassé avait également été soutenu par le groupe rebelle de la RDC - le Mouvement de libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bempa. Cette organisation, basée dans le nord de la RDC et soutenue par l'Ouganda, était sous le coup d'un cessez-le-feu imposé par l'Occident et contrariant son commerce de diamants et ses ventes d'armes. Ses forces pénétrèrent en Centrafrique où elles étaient haïes de la population qui les accusait de viols de masse et de violation des droits de l'homme. Sous la pression de l'Occident, le MLC fut obligé de retirer ses forces au début de l'année.

Ne disposant plus de la protection de la Libye et du MLC, Patassé bénéficia du soutien de 300 militaires de la Communauté économique et monétaire d'Afrique centrale (CEMAC). Ces troupes, originaires principalement du Gabon et de la République du Congo, furent équipées et entraînées par la France et bénéficient également du soutien des Etats-Unis afin d'assurer une certaine stabilité à la région.

Les troupes de la CEMAC n'opposèrent aucune résistance aux forces de Bozizé; à leur entrée à Bangui, elles abandonnèrent même le contrôle de l'aéroport et du palais présidentiel pour rejoindre leurs casernes. Selon les Réseaux d'Information Régionaux Intégrés (IRIN), leur chef d'état-major a déclaré : « Notre mission n'était pas de défendre la résidence [présidentielle] mais le chef d'Etat et je pense que nous n'avons pas échoué dans notre mission. »

Bozizé a annoncé la suspension de la Constitution, la dissolution du gouvernement et de l'Assemblée nationale, mais a déclaré que son coup d'état n'était qu'une « interruption temporaire du processus démocratique» ­ une référence au fait que Patassé avait soit-disant été élu en 1999. Il a rencontré l'armée centrafricaine et les chefs de la police, qui, semble-t-il, ont offert leur soutien, ainsi que les dirigeants de l'opposition politique.

La seule difficulté qu'ait rencontrée Bozizé lors de sa prise de pouvoir semble venir du pillage à grande échelle qui eut lieu à Bangui. Des centaines de personnes avaient saisi l'occasion pour piller les bâtiments gouvernementaux et les demeures des partisans de Patassé. Des chargements entiers de nourriture furent détournés par poids lourds des entrepôts du Programme alimentaire mondial (PAM) de l'ONU. Le PAM a dû lancer un appel pour une aide supplémentaire de nourriture face à une population désespérée. Les troupes de Bozizé ont commencé à tirer sur les pilleurs, assumant la responsabilité pour une grande partie de la trentaine de victimes qu'a causé ce coup d'état.

Une condamnation officielle du coup d'état a émané non seulement de la France mais aussi de l'ONU, de l'Union africaine et des Etats-Unis. Cependant, il semble y avoir peu d'opposition à ce que Bozizé, l'homme fort des militaires, établisse son contrôle comme une alternative souhaitée au régime instable de Patassé. La France a appelé à « un vrai dialogue sans exclusive » dans le but d'établir un gouvernement en Centrafrique : un appel qui fut appuyé par les Etats-Unis.

L'année dernière, la Centrafrique avait essayé de bénéficier de l'appui de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international au moment où Martin Ziguélé, le premier ministre de Partassé, avait promis une ouverture de l'économie à un marché de type libéral et avait lancé une croisade anti-corruption. Il semblerait que les banques occidentales n'aient pas fait confiance au régime car les prêts et l'aide ont fait défaut. La principale tâche de Bozizé sera de s'assurer un soutien financier de l'Occident.

On rapporte que le Tchad a envoyé des troupes en Centrafrique et Bozizé a exigé qu'elles soient intégrées dans les forces de la CEMAC qu'il a réclamées en même temps que les troupes françaises dans le but d'aider à stabiliser le pays. Selon la BBC, Rodolphe Adada, le ministre des Affaires étrangères de la République du Congo, a fait l'éloge de Bozizé, disant que la Centrafrique « peut faire confiance à un homme qui dit le genre de choses que nous venons d'entendre». Compte tenu que la République du Congo préside la CEMAC, ceci signifierait qu'elle le soutien.

On a constaté la présence de militaires tchadiens parmi les forces de Bozizé, qui toutefois démentent leur participation au coup d'état. Leur implication pourrait bien faire naître un sentiment de dépit parmi l'élite de la Centrafrique. La France semble préconiser un rôle régional plus important du Tchad.

Durant la guerre froide, le Tchad avait été soutenu par l'Occident comme un opposant de la Libye. Ces dernières années, tout en maintenant au Tchad une garnison de 1.000 hommes, la France avait dénoncé la violation patente des droits de l'homme par le président tchadien, Idriss Deby. Selon le magazine Africa Confidential, la visite du président Chirac au Tchad à l'occasion de sa participation au Sommet mondial sur le développement durable (SMDD) en Afrique du Sud en août dernier, donne l'impression qu'une « réconciliation » est en train de s'opérer.

Le Tchad a obtenu 3,7 milliard de dollars de la Banque mondiale pour la construction d'un oléoduc Tchad-Cameroun. Malgré des protestations de groupes de défenseurs de droits de l'homme et de l'environnement, les travaux de construction de l'oléoduc sont en avance sur le programme et les premiers pompages auront lieu dans le courant de l'année. Bien que cinq pour cent seulement des recettes en pétrole sont versés à la région productrice, la production de pétrole relancera considérablement le rôle joué par le Tchad en Afrique centrale.

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