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Le discours d'un banquier indique des problèmes mondiaux


Par Nick Beams
01 avril 2004

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Le mois dernier, un discours de Malcolm Knight, directeur général de la BIS (Bank for International Settlements) a mis en exergue certains problèmes potentiels de l'économie mondiale, problèmes posés par l'essor des dettes gouvernementales et de la politique actuelle de taux d'intérêts faibles.

Prenant la parole au congrès annuel de la "Swiss Society for Economics and Statistics" (Association suisse pour l'économie et les statistiques) à Bâle, Knight commença par mettre en avant le paysage économique généralement plus brillant de ces six derniers mois. Il dit qu'une guérison globale était en cours, que la Chine était devenue le deuxième moteur de croissance économique aux côtés des USA, qu'il y avait des signes de reprise économique en Asie et, alors que la consommation était toujours à la traîne en Europe, qu'il y avait des signes d'un retour de la confiance. De plus, le système international se remettait d'une série de chocs, parmi lesquels la crise financière en Argentine, l'explosion de la bulle internet et les malversations de sociétés comme Enron et Parmalat.

Mais Knight tourna alors son attention sur certaines questions au coeur de cet "environnement apparemment sain". Il commença par remarquer que la croissance mondiale était portée par trois forces puissantes : des politiques fiscales très expansionnistes dans certains pays, des politiques monétaires accommodantes presque partout dans le monde et un boom de l'investissement en Chine, "littéralement sans précédent".

Dans les perspectives de Knight, le problème auquel doit faire face l'économie mondiale est qu'aucun de ces moteurs de la croissance ne peut durer indéfiniment. Les mesures fiscales dans certains pays ont fourni un "stimulus massif" à la demande globale durant les récentes années de faible croissance économique. Aux Etats Unis, l'équilibre fiscal est passé d'un surplus de 1 % du PIB en 2000 à un déficit de 5 % du PIB cette année, les déficits fiscaux en Europe se sont aussi creusés, alors que le déficit du Japon est de 5 % du PIB depuis 1998.

Les taux d'intérêts décidés par les principales banques centrales sont aussi à des niveaux historiquement bas, avec une chute "particulièrement dramatique" aux Etats Unis, de 6,5 % à la fin 2000 à seulement 1 % à ce jour.

Knight dit qu'alors que le boom des investissements en Chine était "un des signes de ce qui est à peu de chose près une nouvelle révolution industrielle" avec "des millions de travailleurs intégrés à l'économie internationale", il y avait aussi des signes de "surchauffe" dans l'économie chinoise et des risques de surinvestissement dans certains domaines. "Les capacités de production mises en place dans certains secteurs pourraient ne jamais être rentables, et la surcapacité pourrait nuire aux perspectives d'investissement à l'avenir."

Knight avertit que des "corrections abruptes" des attentes des investisseurs pourraient se traduire par des "girations sur les marchés financiers". Il dit qu'à un moment ou à un autre, les taux d'intérêts devraient revenir à un niveau plus "normal" et, avec une inflation aux USA autour de 2 %, un taux neutre se situerait autour de 5 %. Le défi était donc de changer la politique monétaire accommodante actuelle sans créer un excès de volatilité sur le marché des obligations.

Il dit aussi que les taux d'intérêts ne pouvaient être maintenus à des niveaux très bas indéfiniment, car une telle politique engendrait ses propres problèmes. Il y avait des preuves d'une augmentation des acquisitions par endettement comme les opérateurs sur le marché des changes s'engageaient à long terme, et se finançaient avec des emprunts à court terme à des taux très bas. "Et avec des taux d'intérêts à long terme aussi bas sur des bons gouvernementaux sans risques, de nombreux investisseurs, financés par l'endettement ou non, ont été de plus en plus tentés de 'chercher le rendement'. Cela a abouti à un large flux net de fonds vers des crédits à risque".

Alors qu'il semble que les institutions financières internationales clefs sont bien positionnées pour faire face à des taux d'intérêts plus élevés et que le système financier a montré une meilleure capacité que par le passé à absorber les chocs, Knight avertit que ce "tableau rassurant" ne signifie pas que la situation actuelle est sans risque.

"Il n'est pas difficile de dresser un scénario bien moins encourageant. Par exemple, un soudain désengagement des investissements par des investisseurs financés par l'endettement accentuerait de lui-même la volatilité, et déclencherait peut-être d'autres ajustements de la part d'autres investisseurs. Des taux d'intérêts plus élevés diminueraient nettement les évaluations actuelles des capitaux. Le fardeau de remboursement de dettes des ménages et des sociétés pourrait s'accentuer et mener à une détérioration de la qualité des prêts dans tous le système financier."

L'inquiétude, quant aux risques associés au régime continu de taux d'intérêts bas de la Réserve Fédérale aux USA, « la Fed », a aussi été exprimée par d'autres.

Dans un récent éditorial, le magazine The Economist commenta qu'une hausse des taux "pourrait permettre d'éviter une autre dangereuse bulle en avertissant les investisseurs et les acheteurs de maisons que les valeurs des acquisitions ne peuvent s'élever en permanence." Le New York Times a lui aussi appelé la Fed à "se lancer à" mettre en place des taux d'intérêts plus élevés.

En Février, le magazine Newsweek publia une "lettre ouverte" de l'économiste en chef de Morgan Stanley, Stephen Roach, à l'attention de Alan Greenspan, président de la Fed, dans laquelle il l'appelait à hausser le taux directeur de la Fed de 1 % à 3 % et à "restaurer un semblant de normalité sur les marchés financiers". Seulement quatre ans après l'explosion de la première bulle, Roach écrivit : "les risques d'avoir de nouvelles bulles sont nombreux".

Dans un commentaire publié le 5 Mars, Roach fit état de sa peur que "la rémission de l'explosion de la première bulle est sérieusement menacée par l'apparition - à nouveau - de bulles de capital qui pourraient bien poser les plus grands risques de déflation" avec le risque toujours plus important que "la Fed s'accroche à sa position extraordinairement accommodante".

L'inquiétude de Roach est qu'à moins que la Fed hausse ses taux dans un avenir assez proche, elle n'aura plus de marge de manoeuvre dans l'éventualité d'une crise financière, ce qui est une différence importante par rapport à la situation d'il y a quatre ans, où le taux de la Fed était de 6,5 % et où les baisses successives des taux d'intérêt avaient aidé les marchés financiers à s'apaiser.

Le procès verbal du mois de janvier du FOMC, Federal Open Market Committee (Comité fédéral du marché ouvert), instance qui décide des taux d'intérêt, , indique que les gouverneurs de la Fed partagent certaines de ces inquiétudes.

Le compte rendu notait qu'alors que les membres reconnaissaient "qu'il y avait des risques à maintenir ce qui pourrait s'avérer être une position politique trop accommodante", ils jugèrent que "pour le moment" il était "préférable de prendre des risques afin d'assurer l'élimination rapide de la stagnation économique". Mais le compte rendu révélait aussi qu'un "certain nombre de membres" avait commenté cette soumission continue aux taux d'intérêt bas comme "ayant apparemment contribué à des prises de valeur des marchés financiers ne laissant que peu de marge de manoeuvre en cas de mauvaise conjoncture ".

L'argument de Roach et d'autres est que la Fed devrait revenir à des politiques plus "normales" ou bien courir le risque d'engendrer des problèmes plus sérieux à l'avenir. Mais, comme le montrent les calculs de Morgan Stanley, nous ne vivons pas des temps normaux. Comme le nota Roach dans un commentaire publié le 8 mars, avec les 27 mois actuels de soi-disant reprise aux Etats Unis, "le nombres de salariés, mis à part les salariés agricoles, est d'un niveau de 8,2 millions de moins que dans une courbe représentant une reprise plus normale." Cela signifie que les revenus des salariés, sont à 400 milliards de dollars de moins que le niveau où ils devraient être. Cela a conduit à la situation actuelle où l'essor de la consommation des ménages n'est pas financé par un revenu plus important, mais par des allégements fiscaux et par l'argent rendu disponible par l'essor des valeurs du marché immobilier.

Dans ces conditions, une hausse des taux d'intérêts, même une hausse jusqu'au niveau souhaité par Roach de 3%, sans tenir compte donc des 5 % recommandés par la BIS, plongerait l'économie américaine, et finalement le reste du monde, en récession. Ces considérations étant clairement établies, le dilemme auquel sont confrontés les décideurs politiques découle du fait que loin de fonctionner "normalement", l'économie mondiale souffre de problèmes fondamentaux.

Voir aussi:

  • La mondialisation : le point de vue socialiste 19 juillet 2000


     

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