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Chirac cherche à apaiser Washington tout en garantissant la part de butin de la France

Par Chris Marsden
20 novembre 2004

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La rencontre entre le président Jacques Chirac et le premier ministre Tony Blair à Londres pour commémorer le centenaire de la signature de l'Entente Cordiale en 1904 relève davantage des relations entre la France et les Etats-Unis que de l'amitié historique affichée avec la Grande Bretagne.

Alors qu'il s'efforçait de souligner le terrain d'entente entre la France et la Grande Bretagne, Chirac tendait en même temps une branche d'olivier à Washington en insistant sur le fait que, à la différence de Blair, il n'allait pas se coucher devant les exigences de l'administration Bush sans avoir reçu quelque chose en retour. Dans cette optique, il s'est engagé sur le chemin de la prudence, oscillant entre compliments à l'égard de Blair pour tous les efforts déployés par ce dernier pour son intercession entre les USA et l'Europe et mise en garde sur les dangers qu'un tel rôle implique en Irak et ailleurs et demandant que M. Blair s'engage davantage dans la construction d'alliances européennes faisant contrepoids à l'hégémonie mondiale de Washington.

Avant de partir pour la Grande Bretagne, Chirac avait prononcé un verdict politiquement embarrassant sur les résultats obtenus par Blair dans ses efforts pour s'insinuer dans les bonnes grâces de Washington. Il dit à des journalistes du Times que la Grande Bretagne avait obtenu très peu en retour de son soutien pour l'invasion de l'Irak menée par les Etats-Unis. "Je ne suis pas sûr, avec l'Amérique telle qu'elle est aujourd'hui, qu'il soit possible à quiconque, même aux Britanniques, d'être un honnête intermédiaire".

Il rappela qu'il avait dit à Blair avant la guerre d'Irak qu'il devrait au moins essayer d' « obtenir, en échange de son soutien à Washington, une relance du processus de paix au Moyen-Orient ». « La Grande Bretagne a apporté son soutien, mais n'a rien eu en retour. Je ne suis pas sûr que ce soit dans la nature de nos amis américains, en ce moment, de rendre systématiquement des faveurs», conclut-il.

Chirac dit aussi qu'il « n'était pas du tout certain que l'on puisse dire que le monde est un endroit plus sûr » suite à la guerre en Iraq.

A Londres, cependant, le ton de Chirac fut nettement moins critique. Après sa rencontre avec Blair le 18 novembre, il dit de la relation étroite entre la Grande Bretagne et les Etats-Unis, « Le fait que la Grande-Bretagne puisse être un aimable compositeur dans les relations entre le reste de l'Europe et les Etats-Unis, c'est un plus pour l'Europe. Les Etats-Unis et l'Europe ont vocation naturelle à travailler ensembleet partagent les mêmes valeurs. »

Les deux continents font preuve d'« un respect et une confiance mutuels » poursuivit-il. Il se déclara « surpris » par la suggestion selon laquelle il y aurait rupture entre la Grande Bretagne et la France. « Cela ne reflète pas mon opinion et certainement pas celle du gouvernement britannique », dit-il.

Chirac décrivit l'Irak comme "le seul et unique" sujet de désaccord important entre les deux pays. « Qui a raison, qui a tort ­ l'histoire seule pourra en juger ».

Chirac et Blair sont d'accord quant au conflit israelo-palestinien. « Nous partageons les mêmes analyses et les mêmes buts », consistant à utiliser « une fenêtre d'opportunité » qui pourrait conduire à « plus de stabilité, d'ordre politique, et nous devrions tout faire pour y arriver. »

Blair s'exprima dans ce sens, avouant, "Sur la question de l'Irak, je pense que les différences au moment du conflit était bien connues. Mais nous travaillons tous deux maintenant conformément à la résolution 1546 de l'ONU ­ nous voulons tous deux voir un Iraq stable et démocratique. Et tous deux nous ferons tout notre possible pour garantir que c'est ce qui se produira ».

Il ajouta, "Sur la question de l'Afghanistan, des Balkans, la question de l'Afrique, la question du changement climatique, nous travaillons très étroitement ensemble. Sur la question de la défense européenne, nous travaillons très étroitement ensemble. Et il est important de signaler que nos forces armées coopèrent ensemble dans de nombreux endroits du monde. »

Les actions de la France sont en accord avec la posture conciliatrice de Chirac. Quoiqu'il ait dit avec force qu'il n'envisageait pas la possibilité d'une présence militaire française en Iraq, la France a bien voté aux côtés des Etats-Unis et de la Grande Bretagne et soutenu le besoin d'appliquer la résolution de l'Onu autorisant l'occupation menée par les USA.

Ses désaccords avec Blair sur la guerre en Irak, la politique au Moyen-Orient, et l'alliance avec Washington ne sont pas basés sur des principes. Chirac ne fait que marchander pour ses positions et pour une part du butin dans ce qu'il sait pertinemment être le nouveau partage impérialiste du monde et de ses ressources et marchés.

Voilà pourquoi il insiste sur la nécessité d'un monde multipolaire et une renaissance du multilatéralisme, principalement à travers l'organisation renforcée des Nations Unies.

Chirac masque ses propres ambitions prédatrices sous un discours moralisateur sur les dangers posés par les ambitions effrénées des autres ­ ou du moins sur « le danger » que leurs mobiles soi-disant plus nobles risqueraient d'être mal compris.

Dans une allocution à l'International Institute of Strategic Studies (l'Institut international d'études stratégiques), commentant la prétention de Blair et de Bush de se battre pour la démocratie au Moyen-Orient, il fit cette mise en garde :

« Nous devons éviter toute confusion entre démocratisation et occidentalisation. Car, si notre mémoire est parfois courte, les peuples jadis soumis à la domination de l'Occident, eux, n'ont pas oublié.»

Il appela de ses voeux un nouvel ordre mondial basé sur le multilatéralisme et appela à ce que les Etats-Unis et l'Europe "se rassemblent" pour promouvoir la paix au Moyen-Orient. Un monde dominé par « la logique du plus fort », est certain d'être instable et voué au conflit. Il dit que ni les Etats-Unis ni l'Europe n'étaient capables de confronter seuls les défis auxquels le monde avait à faire face. « C'est en reconnaissant la nouvelle réalité d'un monde multipolaire et interdépendant que nous réussirons à construire un ordre international plus sûr et plus juste,» dit-il.

La posture de Chirac se présentant comme opposant la force impérialiste exprime en essence sa conscience que la France et l'Europe sont incapables de défier avec succès l'hégémonie mondiale américaine, sur l'arène militaire. Il veut un ordre fondé sur la règle internationale et un élargissement des relations de force, non pas motivé par quelques vagues idéaux démocratiques, mais parce que cela permettrait à la France de mieux manoeuvrer dans la poursuite de ses propres ambitions coloniales.

Il est à noter aussi, que Chirac s'exprima juste quelques jours après que des avions militaires français eussent bombardé un terrain d'aviation ivoirien le 6 novembre, en riposte à la mort de personnels militaires français dans le conflit civil ivoirien, réduisant à néant la minuscule aviation militaire ivoirienne et provoquant des émeutes anti-françaises dans le sud du pays.

Mais cela ne coûte rien à Chirac de reconnaître que, en tant qu'homme politique impérialiste chevronné, il est réellement préoccupé par le fait que l'exercice sans contraintes du militarisme américain est déstabilisateur non seulement au Moyen-Orient, mais pour le monde entier ­ avec des conséquences potentielles désastreuses. Donc, quand il fut poussé par des journalistes à développer sa remarque antérieure selon laquelle le monde était plus dangereux suite au conflit iraquien, il ne s'est pas rétracté. Au contraire, il prévint, « Si vous observez l'évolution du monde au regard de la sécurité et du terrorisme, vous ne pouvez pas dire de façon crédible que la situation s'est améliorée. »

Voir aussi:

29 juin 2004
Visite de Bush en Europe: opposition de la population et prostration des dirigeants

8 juin 2004
France: Manifestations contre Bush et pour la défense de la sécurité sociale



 

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