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France: Le gouvernement réprime violemment les lycéens en lutte

Antoine Lerougetel
16 avril 2005

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Le mouvement de protestation massif des lycéens (qui entre dans son troisième mois) contre la nouvelle loi sur l'éducation du ministre de l'éducation, François Fillon, se trouve confrontée à la violence répressive grandissante de l'état. S'élevant contre une loi qui, de leur point de vue, va miner l'égalité des chances pour tous les jeunes, est défavorable aux enfants issus de milieux défavorisés, baisse le niveau général de l'éducation pour tous, les lycéens font aussi campagne contre le manque de moyens dans le système scolaire.

Les syndicats de lycéens, la FIDL et l'UNL, ont été quelque peu mis sur la touche par des coordinations ou collectifs composés de délégués des différents lycées d'une région.

Les grèves et manifestations massives, impliquant des centaines de milliers de lycéens, n'ayant pas réussi à forcer le gouvernement à abroger la loi, ainsi que l'isolement voulu de ce mouvement par les syndicats enseignants, a fait adopter à ces comités la tactique de blocage des lycées et d'actions spectaculaires telles que des occupations de lycées et de bâtiments administratifs scolaires.

François Fillon a réagi avec la rigidité glaciale qui le caractérise. Il a donné des « consignes extrêmement claires » pour que les blocages soient dégagés. Il déclara au Sénat le 9 avril que "chaque fois qu'il y aura un blocage, il y aura une intervention avec les moyens nécessaires ».

Il a tenté de minimiser la profondeur et l'envergure du mouvement lycéen "Je ne laisserai pas une infime minorité bloquer le fonctionnement du système éducatif, à quelques semaines de l'organisation du bac". Le ministre a aussi déclaré que «La loi a été votée, jamais je n'accepterai qu'on remette en cause le travail du suffrage universel»

Dominique de Villepin, ministre de l'intérieur, et chef de la police justifia en ces termes le déploiement brutal de la police : «Je l'ai fait à la demande de François Fillon. Nous devons faire respecter l'ensemble de notre territoire national et la liberté d'accès dans les lycées, dans les écoles.» Evoquant les heurts de la veille entre lycéens et forces de l'ordre, le ministre de l'Intérieur a indiqué avoir agi à l'encontre «des nombreux groupuscules violents, agressifs qui s'en sont pris aux bâtiments publics, aux forces de l'ordre».

Au lycée Charlemagne, à Paris (IVe), les forces de l'ordre sont intervenues tôt le 8 avril pour déloger les occupants. «Les lycéens qui croyaient qu'il était interdit de frapper des personnes faisant un sit-in ont été surpris», raconte Raoul Salzberg, président de la section FCPE (Fédération des conseils de parents d'élèves des écoles publiques) de l'établissement et qui participait au blocage.

La fédération indépendante et démocratique lycéenne (Fidl), qui avait appelé aux blocages, a estimé de son côté que 370 lycées s'étaient mobilisés en France. Des incidents ont éclaté entre lycéens et forces de l'ordre notamment au cours d'une manifestation à Lille où deux personnes ont été légèrement blessés et une dizaine interpellées, et à Béziers (Hérault) lors d'une tentative d'occupation d'un lycée, qui a abouti à l'interpellation de sept lycéens.

A Paris, une lycéenne du lycée Balzac (XVIIe) a été blessée et hospitalisée après avoir été percutée par une voiture qui tentait de forcer le passage à travers un sit-in lycéen devant un cordon de CRS qui tentaient de les déloger.

Au lycée Voltaire, dans le XIe arrondissement, un conseiller principal d'éducation a été violemment agressé par un automobiliste, furieux que la chaussée soit bloquée par les lycéens. Les enseignants de cet établissement ont condamné l'absence des forces de l'ordre pour assurer la sécurité des élèves et des personnels.

Le quotidien Libération du 8 avril rapporte une scène qui s'est déroulée au Rectorat de Paris démontrant à la fois le soutien populaire dont jouissent les lycéens en lutte et le rejet des tentatives de Fillon et de Villepin de les criminaliser.

« Une employée du rectorat de Paris hurle vers ses collègues restés dans les étages : «Descendez tous ! Vos gamins sont peut-être là... Vous n'allez pas les laisser se faire castagner ?» Il est 13 heures, hier, et les forces de l'ordre viennent d'entrer. 500 lycéens occupent le rectorat depuis plus d'une heure. Sit-in au rez-de-chaussée. Ils se tiennent par les coudes. Les CRS les arrachent les uns aux autres, sous les huées : «Nous sommes pacifiques !» Un cordon d'employés du rectorat tente de les protéger. Soulevés par les jambes, tirés par les bras, filles et garçons sont traînés au sol, les bras parfois violemment pliés dans le dos. »

Le récit continue : « «C'est quoi ces manières ? crient des employés du rectorat. Il faut porter plainte contre Fillon !» Avec leurs portables, ils photographient la scène. Une femme au bord des larmes se penche vers une collègue : «C'est horrible...» Dans la rue, les jeunes se tiennent le dos, la tête. Beaucoup sont choqués. On parle d'un bras cassé. Régine Gallet, élue SUD Education en visite au rectorat, bouillonne : «Voilà la réponse de Fillon aux inquiétudes légitimes des lycéens sur l'avenir qu'il leur prépare : la brutalité, les matraques. C'est inadmissible.» Dans l'après-midi, deux cents lycéens manifestent près du ministère de l'Education. Ils prennent quelques coups de matraque. Puis, à la Sorbonne, les CRS cognent plus fort. Les lycéens font un sit-in et brandissent leurs livres de classe. »

La presse rapporte le 9 avril qu'au lycée Claude-Bernard, dans le XVIe arrondissement de Paris les cours sont bloqués depuis une semaine. «Regardez le drapeau qui flotte au-dessus du portail : liberté, égalité, fraternité. La loi ne respecte pas l'égalité», proteste Magdalena. Cette élève de terminale S craint que le projet de réforme du bac, avec l'introduction d'une part de contrôle continu, ne soit pas totalement abandonné. «Le bac, c'est sacré», renchérit Jérémie. «Nous ne bloquons pas le lycée par plaisir mais nous devons nous faire entendre», explique Sabrina, qui ajoute toutefois : «Demain je retourne en cours, j'ai le bac en juin».

Les syndicats d'enseignants et l'opposition ont dénoncé le recours à la force et appelé au dialogue. Selon la FIDL, les forces de l'ordre ont "littéralement tabassé" des lycéens, notamment à Paris, Lille et Béziers. "Le ministre n'a pas d'arguments, alors il tape sur les lycéens pour les faire taire", déplore dans un communiqué la FIDL. "Nous, lycéens, défendrons notre éducation jusqu'au bout et condamnons que le ministre se serve de matraques et de bombes lacrymogènes pour nous faire taire." "Les incidents qui émaillent les actions des lycéens sont inquiétants", déclare pour sa part dans un communiqué l'UNSA-Education. De son côté, la FSU dénonce "la répression policière" et "le refus de dialogue" de François Fillon qui donne "la pire des leçons de démocratie" aux lycéens. Le ministre "crée ainsi les conditions pour amplifier la crise".

Julien Dray, pour le Parti socialiste, a déploré un "pourrissement" de la situation et souligné "l'urgence d'ouvrir de réelles discussions". Le Parti communiste a dénoncé "les provocations" du gouvernement. "L'emploi de la manière forte ne fera qu'aggraver les choses et le gouvernement Raffarin en sera seul responsable", dit-il dans un communiqué.

Le Parti socialiste et le Parti communiste étaient partenaires dans le précédent gouvernement de la "Gauche plurielle" de Lionel Jospin, dont le ministre de l'éducation fut Claude Allègre. Jospin fut contraint de le remplacer en 1999 suite à des mouvements massifs de lycéens et d'enseignants contre ses mesures d'austérité.

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