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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Le Parti de la Gauche et la grève des conducteurs de train allemands, un échange de correspondance

5 décembre 2007

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Nous publions ci-dessous une lettre que nous a envoyée un membre de l’organisation étudiante affiliée au Parti de la Gauche en réponse à l’article Le Parti de la Gauche s’oppose à la grève des conducteurs de train. La réponse qui suit est celle de l’auteur de l’article, Ulrich Rippert.

Chère équipe du WSWS,

J’ai beaucoup apprécié l’article concernant le Parti de la Gauche et la grève des cheminots du GDL (syndicat des conducteurs de train, Gewerkschaft Deutscher Lokomotivführer). Vos arguments reflètent en grande partie les miens, mais ce que vous dites au sujet de la direction du Parti de la Gauche ne doit pas être appliqué à l’ensemble du parti. Il y a assurément dans le parti ceux qui soutiennent l’action des conducteurs de train, de nombreuses fédérations locales partagent les positions des conducteurs de train et les ont rejoint devant les gares.

De plus, il faut souligner que l’association étudiante qui est proche du Parti de la Gauche a pris ouvertement parti pour les grévistes. Ce n’est pas au GDL qu’il faut reprocher des tactiques scissionnistes, mais bien plutôt aux directions des syndicats majoritaires qui ont perdu toute relation avec leurs membres et qui se sont laissés corrompre par la direction des chemins de fer (Deutsche Bahn, DB) et le gouvernement. C’est dans ce sens que le GDL joue un rôle d’avant-garde en défendant le co-partenariat au niveau de l’entreprise [système allemand de collaboration entre les syndicats et la direction de l’entreprise] et a déjà pu engranger plus d’un succès majeur : plus de 200 conducteurs de tramway et de métro de Munich sont directement passés du syndicat Verdi dans le camp du GDL.

On peut dès lors espérer que le GDL sera en mesure d’attirer les travailleurs par son action combative en impliquant ainsi dans une lutte consciente l’arrière-garde syndicale des chemins de fer, en l’occurrence Transnet et le GDBA (syndicat des fonctionnaires, Gewerkschaft Deutscher Bundesbahnbeamten, Arbeiter und Anwärter).

Salutations socialistes

Daniel

SDS Regensburg

* * *

Cher Daniel,

Merci pour vos commentaires sur le contenu de l’article Le Parti de la Gauche s’oppose à la grève des conducteurs de train. Je suis content de voir que nous sommes d’accord sur le fait qu’il faille récuser les attaques contre les grévistes exprimées par Gysi et d’autres dirigeants du Parti de la Gauche. Mais il y a deux déclarations dans votre lettre avec lesquelles je ne suis pas d’accord.

Vous écrivez: « ce que vous dites au sujet de la direction du Parti de la Gauche ne doit pas être appliqué à l’ensemble du parti ».

Au contraire, il est nécessaire de tirer les conclusions du parti dans son ensemble, car c’est la direction et non les adhérents qui déterminent la voie empruntée par parti.

Quiconque adhère à un parti politique assume la responsabilité pour sa politique et ses conséquences. Il n’est pas possible de répondre en disant qu’un membre individuel a une opinion personnelle différente.

Précisément, dans le cas du Parti de la Gauche, il y a un fossé entre sa propagande et sa politique dans la pratique. Il déclare qu’il est opposé aux lois punitives antisociales Hartz IV (réforme de l’assurance-chômage) et dans le même temps il les applique sans merci dans tous les Länder où il est à la tête du ministère du Travail, comme c’était le cas récemment à Schwerin. Il s’oppose à la destruction des emplois dans le service public tout en soutenant parallèlement les coupes opérées par le Sénat de la ville de Berlin. Et cette liste est loin d’être restrictive. Il existe un contraste frappant entre le discours de gauche du Parti de la Gauche et qui est repris par ses membres et la politique droitière appliquée par ses dirigeants qui occupent des fonctions politiques.

En fait, il se cache une stratégie derrière cette division du travail. C’est la conséquence de la perspective et de la fonction du Parti de la Gauche. Il se réclame explicitement partisan de l’économie de libre marché et de la défense des relations de propriété bourgeoise. Sa rhétorique de gauche n’a pas pour objectif de donner une orientation socialiste à une opposition sociale grandissante. Au contraire, son but est d’éviter et d’empêcher qu’elle ne devienne une menace à l’ordre existant. Le Parti de la Gauche, tout comme le Parti social-démocrate allemand (SPD), est un parti engagé dans le maintien du statu quo. Dans les conditions où le SPD vit un fort déclin, le Parti de la Gauche tente de reprendre son rôle.

Les attaques lancées par Gysi contre les conducteurs de train, avec le soutien de son vice-président du groupe parlementaire, Bodo Ramelow et de la vice-présidente au niveau national du syndicat, Ulrike Zerhau, ne sont donc aucunement le fait du hasard. La révolte des conducteurs de train contre les accords salariaux dictés par la DB et des syndicats de cheminots tels Transnet menace de faire éclater l’ensemble du système de co-partenariat allemand. Le vaste mouvement de soutien populaire en faveur des conducteurs de train a déclenché dans les sièges des partis politiques et des syndicats allemands une inquiétude grandissante.

Gysi est très sensible à de telles évolutions. Après tout, le Parti de la Gauche est issu de la fusion de deux appareils bureaucratiques majeurs, et qui tous deux bénéficient de décennies d’expérience dans l’oppression de la classe ouvrière, l’ancien parti d’Etat stalinien en Allemagne de l’Est et la bureaucratie syndicale social-démocrate à l’Ouest. Tout espoir selon lequel ce parti pourrait jouer un rôle progressiste est absolument sans fondement.

Si vous tenez à soutenir sérieusement les conducteurs de train alors vous devez réfléchir sérieusement au rôle et à la perspective du Parti de la Gauche et ne pas vous livrer à des finasseries selon lesquelles il y aurait après tout un grand nombre d’adhérents dont l’opinion serait différente de celle de Gysi.

Le second argument avec lequel je ne suis pas d’accord concerne votre description du rôle « d’avant-garde » joué par le GDL et votre espoir qu’il contribuera à « attirer les travailleurs » des autres syndicats de cheminots dans une voie combative.

Il y a un certain nombre de raisons expliquant pourquoi l’opposition des conducteurs de train s’est développée dans le cadre du GDL. La raison la plus importante est le rôle réactionnaire joué par Transnet et le GDBA dont la servilité affichée envers la direction de la DB défie toute description. Les conducteurs de train ont vu dans le GDL le seul moyen d’échapper à cette camisole de force corporatiste.

Conclure de là que le GDL représente une sorte d’avant-garde combative est totalement faux. C’est un syndicat conservateur, corporatiste [représentant un corps de métier] et dont les perspectives ne sont pas fondamentalement différentes de celles d’autres syndicats. Durant ces dernières semaines, le patron du GDL, Manfred Schelle, a désespérément tenté de trouver un accord avec la direction de la DB.

Le fait que ceci ait jusque-là échoué est entièrement dû à l’intransigeance affichée par la direction de la DB qui est déterminée à écraser le GDL. Le but est de faire un exemple et de montrer clairement quel degré de rigidité sera mis en pratique dans le cas de la moindre opposition future aux attaques sociales et au salaire. Il existe une similitude évidente avec la destruction par le président américain, Ronald Reagan, du syndicat des contrôleurs aériens aux Etats-Unis, PATCO, en août 1981. Ceci fut le prélude à une série d’attaques massives contre l’ensemble de la classe ouvrière américaine. Une défaite des conducteurs de train aujourd’hui aurait des conséquences identiques. C’est pourquoi les attaques de Gysi contre les conducteurs de train sont politiquement tellement répréhensibles.

La grève des conducteurs de train a depuis longtemps dépassé le cadre d’un conflit salarial. Elle s’est développée en une confrontation avec l’Etat. D’un côté se trouvent la direction de la DB, l’Union européenne, le gouvernement allemand et tous les partis parlementaires, les fédérations patronales, la majorité des médias et la Fédération des syndicats allemands (DGB). De l’autre se trouvent les conducteurs de train qui jouissent de la sympathie de vastes couches de la population. De nombreux travailleurs et leurs familles sont depuis des années victimes du déclin social et en ont déduit qu’il est grand temps de réagir et de lancer une offensive.

Cette lutte ne pourra toutefois pas être gagnée sur la base limitée du point de vue syndical du GDL. Elle requiert la construction d’un nouveau parti sur la base d’une perspective socialiste internationaliste capable d’unir la classe ouvrière de par l’Allemagne et internationalement contre les forces réunies de l’élite dirigeante.

Salutations socialistes

Ulrich Rippert

(Article original paru le 30 novembre 2007)

Lire aussi :

Allemagne : Lettre ouverte du Parti de l’égalité sociale aux conducteurs de train en grève [4 décembre 2007]

La grève des chemins de fer en France et le rôle de la LCR [1er décembre 2007]


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