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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Le président Sarkozy en Syrie en quête de nouvelles alliances

Par Pierre Mabut
17 septembre 2008

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Le président français Nicolas Sarkozy s’est rendu les 3 et 4 septembre à Damas, la capitale syrienne, pour une visite de deux jours dans le but de poursuivre les pourparlers de paix entre la Syrie et Israël, sous médiation de la France, du Qatar et de la Turquie. Le but direct des négociations est d’inciter la Syrie et Israël à négocier directement et à signer un accord de paix qui mettrait fin à un état de guerre existant entre les deux pays depuis l’établissement de l’Etat d’Israël en 1948.

De façon plus générale, Sarkozy qui est aussi l’actuel président en exercice de l’Union européenne tente d’intégrer le régime syrien de Bachar Al-Assad dans la sphère d’influence économique de l’Europe en l’isolant de son allié, l’Iran.

Assad, qui préside actuellement la Ligue arabe, essaie de normaliser les relations avec l’impérialisme occidental afin d’obtenir la restitution du plateau du Golan conquis par Israël en 1967 suite à la guerre des Six Jours. La Syrie occidentale est militairement indéfendable sans le plateau du Golan, faisant de sa restitution une condition préalable à tout accord de paix sérieux entre Israël et la Syrie.

L’ambassadeur de Syrie aux Etats-Unis, Imad Mustafa, a insisté dans un commentaire fait le mois dernier à Washington sur le souhait de la Syrie de faire partie du tableau occidental : « Nous voulons la paix pour nous reconnaître mutuellement et en finir avec la guerre. Faisons la paix. »

Tout accord comporte pour Assad un obstacle, à savoir le fait que les Etats-Unis et Israël ont fait figurer la Syrie sur la liste noire des Etats qui soutiennent le terrorisme, aux côtés du Hamas palestinien de la bande de Gaza, du Hezbollah au Liban et en Iran. La volatilité des relations américaines et israéliennes avec la Syrie fut soulignée par le bombardement israélien non provoqué du 5 septembre 2007 des installations de Deïr az Zor en Syrie. Les Israéliens se sont refusés à tout commentaire sur cet incident.

Le régime syrien espère que s’il accepte un accord de paix avec Israël négocié sous les auspices de la France, Sarkozy pourrait œuvrer en faveur d’un accord entre la Syrie et les Etats-Unis. Sarkozy a accueilli la Syrie parmi les 43 pays membres de l’Union pour la Méditerranée, un groupe de pays que la France encourage dans le but d’étendre son influence économique au sud de l’Union européenne, tout en intensifiant la coopération à « la lutte contre le terrorisme » et le contrôle de l’immigration. Cela représente un changement de la politique extérieure française par rapport à celle appliquée par le président d’alors, Jacques Chirac, qui avait rompu les relations avec Damas en la tenant responsable de l’assassinat de l’ancien premier ministre libanais, Rafic Hariri.

Assad a dit que la France, la Turquie et le Qatar, « qui ont des relations normales » avec Israël, « encouragent les Américains à participer à ce processus en raison de leur statut de grande puissance et de leurs relations avec Israël. »

Le premier ministre israélien, Ehoud Olmert, a fait comprendre que le prix d’une telle paix implique que la Syrie coupe le soutien financier et militaire iranien du Hezbollah au Liban. Etant donné que le Hezbollah est la seule force politique au Liban capable de résister efficacement aux attaques militaires israéliennes, ceci donnerait les mains libres à Israël le long de sa frontière nord et augmenterait sa marge de manœuvre pour des agressions militaires contre l’Iran. Le Sunday Times a écrit le 3 août, « Il [Olmert] veut la fermeture des bureaux du Hamas à Damas et d’autres organisations militantes et la promesse que la Syrie n’appliquera pas son pacte de défense avec l’Iran au cas où Israël ou les Etats-Unis lanceraient une attaque contre les installations nucléaires de l’Iran. »

Le Times cite une source du ministère de la Défense israélien disant que « Le but principal d’Israël est de créer une barrière entre la Syrie et l’Iran et, ceci une fois fait, la restitution du plateau du Golan à la Syrie en vaudrait la peine. »

Depuis son arrivée au pouvoir en mai dernier, Sarkozy a aligné la politique étrangère française sur celle des Etats-Unis dans la soi-disant lutte contre le « terrorisme » et l’intégrisme islamique. La France a pleinement réintégré la structure de commandement de l’OTAN, à titre de partenaire associé de l’impérialisme américain dans l’occupation du Proche-Orient. Suite à une forte pression américaine, le gouvernement français avait demandé l’année dernière aux entreprises françaises de ne pas investir en Iran. Il avait voté à l’ONU pour la poursuite de l’occupation américaine de l’Irak et avait déployé ses troupes au Liban et en Afghanistan pour « le maintien de la paix » et « le soutien de la démocratie ».

Le dernier jour des pourparlers à Damas, Sarkozy a confirmé cette attitude impérialiste en défendant une fois de plus l’agression israélienne, en intimidant la Syrie par un commentaire « officieux » à se distancer de l’Iran. Selon Libération (du 5 septembre 2008) : « A la suite d’une erreur technique, les journalistes ont pu entendre une partie de l’intervention de Nicolas Sarkozy face aux trois autres chefs d’Etat et de gouvernement (Syrie, Qatar et Turquie), lors de ses discussions à huis clos. "L’Iran prend un risque majeur à continuer le processus d’obtention du nucléaire militaire [capacité], ce qui est notre certitude. Parce qu’un jour, quel que soit le gouvernement israélien, on va se retrouver un matin avec Israël qui a frappé. Il ne s’agit pas de savoir si c’est légitime ou si c’est intelligent ou pas. Qu’est-ce qu’on fera à ce moment-là ? Ce sera la catastrophe !" »

La visite de Sarkozy avait été préparée la semaine précédente par la venue du ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner qui avait posé des conditions supplémentaires visant à intimider les Syriens. Le Monde a cité les déclarations de Kouchner à Beyrouth avant son arrivée à Damas, disant que la France « veut croire dans la parole et la bonne volonté de la Syrie, mais demeure extrêmement vigilante et prudente ». Le Monde a ajouté, « A cet égard, il a qualifié de "peu rassurants" de récents propos du président syrien Al-Assad, établissant un parallèle entre l’attitude de Moscou envers la Géorgie et celle de la Syrie à l’égard du Liban. »

Cependant, Assad dans le but de défendre ses propres intérêts en est venu à faire un numéro d’équilibriste entre les intérêts de l’impérialisme américain et le nationalisme russe. En août, il a signé à Moscou des accords militaires stipulant « Nous sommes prêts à coopérer avec la Russie dans tout projet visant à renforcer sa sécurité. »

En août, peu de temps après l’attaque géorgienne en Ossétie du Sud et la réaction russe, le dirigeant syrien s’était rendu à Moscou afin de s’assurer d’accords militaires en annonçant qu’il discuterait d’un éventuel déploiement de missiles russes sur le territoire syrien. Assad a déclaré : « J’estime que la Russie doit penser à sa réponse lorsqu’elle sera encerclée. » S’alliant à la Russie contre l’encerclement par l’impérialisme occidental, Assad a hérissé les plumes de l’ancienne puissance coloniale française qui a dominé la Syrie dans les années 1920 et 1930 et dont les intérêts consistent à maintenir le Proche-Orient dans son orbite et celui des Etats-Unis et des autres.

Alors que Sarkozy était en apparence soucieux de mettre au pas la Syrie pour qu’elle réponde aux exigences des Etats-Unis et de l’OTAN de rompre avec l’Iran, le président français était également en train de promouvoir les intérêts de l’impérialisme français.

Total, le groupe pétrolier français qui est présent depuis dix ans en Syrie et la CMA-CGM, le 3e groupe de transport maritime mondial, ont accompagné Sarkozy au cours de sa visite d’Etat à Damas. Le président de Total, Christophe de Margerie, a renouvelé la licence d’exploitation des réserves de Deïr az-Zor et obtenu de nouveaux permis d’extraction de gaz jusqu’en 2021. Total, en partenariat avec la Syrian Petroleum Company a extrait 29 000 barils par jour en 2007. Les nouveaux contrats portent sur « un partenariat stratégique avec les compagnies nationales [gaz et pétrole] ». De Margerie a exprimé sa satisfaction avec les accords qui « ouvrent la voie à une coopération renforcée entre Total et la Syrie et au développement des activités du groupe en partenariat avec les sociétés pétrolières nationales de ce pays. »

Jusque-là, l’émir du Qatar avait joué un rôle clé dans le réchauffement des relations entre la France et la Syrie. Il est en bons termes à la fois avec les Etats-Unis, Israël, la Syrie et l’Iran. L’émir fut le premier dirigeant arabe à avoir été invité en France par Sarkozy depuis sa prise de fonction l’année dernière. Le Qatar, numéro 1 mondial du gaz naturel liquéfié, a signé un contrat sur l’électricité et le nucléaire à l’occasion de la visite de Sarkozy en janvier dernier. Sarkozy a également signé des accords sur le nucléaire avec les Emirats arabes unis.

(Article original paru le 15 septembre 2008)

Lire aussi :

Le président Sarkozy en visite en Israël pour jouer le rôle d’intermédiaire dans un alignement régional [3 juillet 2008]


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