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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

Allemagne : Klaus Ernst et le Parti La Gauche soutiennent des réductions drastiques de salaires

Par Michael Regens
20 août 2009

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A la fin de l’année dernière, la famille Schaeffler et ses banques créancières avaient fait une tentative spéculatrice et désastreuse de rachat sur le fabricant de pneus et équipementier automobile Continental. La situation économique mondiale s’est ensuite rapidement détérioré et l’entreprise de la famille Schaeffler croule aujoud’hui sous des dettes s’élevant à plusieurs milliards d’euros. A présent, le syndicat allemand des travailleurs de la métallurgie, IG Metall, et ses comités d’entreprise essaient de sauver l’entreprise Schaeffler aux dépens des travailleurs.

Fin juillet 2009, l’entreprise avait publié un mémo déclarant que la direction avait finalisé un accord avec IG Metall et les comités d’entreprise pour assurer l’avenir de l’ensemble des usines Schaeffler en Allemagne. L’accord prévoit des économies internes à la firme aux dépens des salariés s’élevant à 250 millions d’euros au moyen de ruptures négociées du contrat de travail, de l’extension du chômage technique et de départ anticipé à mi-temps pour les salariés plus âgés.

Les salaires ont été gelés et une augmentation de 2,1 pour cent de salaire initialement prévue à partir du 1er mai sera repoussée à la fin de l’année. Avec une franchise étonnante, le syndicat IG Metall a annoncé sur son site web : « Les accords valables dans les usines sont basés sur des accords conclus en février dernier entre le chef de l’IG Metall, Berthold Huber, et la famille Schaeffler. »

Pour les 28 000 salariés employés par l’entreprise en Allemagne, et dont 20 000 sont actuellement au chômage technique, l’accord signifie une perte moyenne de salaire de 17 pour cent. De plus, Schaeffler a déjà réclamé l’extension du chômage technique jusqu’à la mi-2010 en se réservant le droit d’imposer d’autres licenciements et d’autres réductions de salaire au cas où la situation économique devait se dégrader.

Dans un communiqué, l’entreprise a déclaré : « Si cette prudente prévision devait se révéler intenable dans le courant de l’année, la direction et les représentants du personnel sont d'accord que d’autres mesures seront nécessaires. » Celles-ci comprennent « la mise en place de sociétés de transfert et des licenciements économiques. »

Le rôle du Parti La Gauche

Klaus Ernst, le chef de l’IG Metall de Schweinfurt en Bavière où se situe le siège de l’entreprise a décrit l’accord « comme une solution acceptable compte tenu de la situation de l’entreprise et de l’économie en général ».

Ernst est le secrétaire général de l’IG Metall à Schweinfurt depuis 1995. Il est membre du syndicat depuis 1972 et il fut un membre du Parti social-démocrate d’Allemagne (SPD) de 1974 à 2005. En 2004, il créa, ensemble avec d’autres membres du syndicat, l’Alternative électorale travail et justice sociale (Wahlalternative Arbeit und Soziale Gerechtigkeit, WASG) qui fusionna plus tard avec le Parti du socialisme démocratique (PDS), issu de l’ancien parti stalinien SED (Parti socialiste unifié d’Allemagne) pour constituer La Gauche (Die Linke). Lors du congrès de fondation en 2007, Ernst fut élu vice-président du parti et devint plus tard le vice-président du groupe parlementaire du parti. Il continue à ce jour d’occuper ces deux fonctions et peut, à juste titre, être qualifié de membre fondateur et de pilier de La Gauche.

Non seulement Ernst incarne les liens étroits entre La Gauche et la bureaucratie syndicale, il personnifie aussi le rôle cynique que joue le parti. L’on est en droit d’admettre qu’il était, en tant que secrétaire général de l’IG Metall à Schweinfurt, non seulement au courant des attaques projetées par la direction contre les travailleurs, mais qu’il a en fait collaboré à leur élaboration. Ce qui toutefois ne l’empêche pas de continuer à se focaliser dans ses discours au parti sur des « salaires équitables », sur la « justice sociale », contre « la retraite à 67 ans » et sur la nécessité « d’avoir suffisamment de courage pour défendre ses propres intérêts ».

La Gauche soutient les manœuvres des fonctionnaires syndicaux chez Schaeffler qui, tout comme dans de nombreuses autres usines, débouchent pour les travailleurs sur la réduction des salaires et des acquis sociaux tout en permettant à la bureaucratie d’étendre ses propres privilèges et d’obtenir des postes au conseil de surveillance ou de participer au capital de l’entreprise.

Le secrétaire du comité d’entreprise du groupe, Norbert Lenhard (IG Metall), qui a accepté les réductions de salaire, parle à présent de « garantie de l’avenir » en déclarant hypocritement « Nous avons empêché les licenciements économiques ».

En fait, la garantie consentie par la direction d’éviter tout licenciement jusqu’à la fin de juin 2010, est tout simplement destinée à calmer les travailleurs. Selon un article paru le 4 août dans le Financial Times Deutschland, l’entreprise anticipe en 2009 une baisse de 15 pour cent de son chiffre d’affaires tout en s’attendant à ce que « les marchés n’atteignent le niveau qu’ils avaient en 2008 qu’en 2012-2013 ».

« En cas d’urgence, des sociétés de transfert pourraient alors entrer en considération pour certains sites. Ce qui équivaudrait à des suppressions d’emplois mais sans recourir directement à des licenciements économiques », écrit le Süddeutsche Zeitung.

Des postes lucratifs au conseil de surveillance de Schaeffler furent promis aux responsables syndicaux en échange de leurs services, de même qu’une « co-participation financière » (« Mitarbeiterkapitalbeteiligung », MBK). La « garantie de l’avenir » conclue par le syndicat et la direction stipule : « Les deux parties s’accordent sur le fait qu’il soit fait usage des possibilités de la participation financière des salariés. Les associés du groupe Schaeffler sont en conséquence prêts à permettre aux travailleurs de participer au capital de l’entreprise. »

Comme dans le cas du constructeur automobile Opel, le rôle de la MKB chez Schaeffler est d’enchaîner les travailleurs à leurs « propres » usines ou lieux de travail. Les travailleurs sont censés investir leurs propres économies et leurs salaires, mais sans avoir ni le droit de parole ni le droit de vote en échange de leurs actions. Les véritables bénéficiaires sont les fonctionnaires de l’IG Metall et les comités d’entreprise qui peuvent s’attendre à occuper des postes très bien rémunérés.

Selon Werner Neugebauer, le chef de l’IG Metall en Bavière, l’argent économisé en raison de l’ajournement en fin d’année de l’augmentation de salaire pourrait être versé dans un plan de participation par actions de l’entreprise. Malgré les problèmes de finalisation inhérents à une telle participation financière, Neugebauer est sûr qu’un accord approprié pourra être trouvé : « Nous restons convaincus qu’une co-participation financière appropriée pour les employés est ce qu’il y a de mieux, aussi pour la stabilisation de l’entreprise. »

Les postes visés par la direction d’IG Metall au conseil de surveillance semblent aussi avoir été finalisés. Neugebauer a ajouté : « Je crois qu’en raison du processus avancé de la clarification interne, l’entreprise de famille et l’IG Metall seront en mesure d’établir dans quelques semaines un conseil de surveillance ou un comité ayant les mêmes tâches, la même structure et respectant la parité [c’est-à-dire pour moitié occupé par le syndicat] comme le prévoit la Loi sur la cogestion de 1976. »

La crise chez Schaeffler

Récapitulons: l’entreprise de famille avait racheté à la fin de l’année dernière, le fabricant de pneus et sous-traitant automobile Continental qui fait trois fois sa taille. La famille avait emprunté 16 milliards d’euros pour financer l’affaire, les parts acquises servant de gage auprès des banques créancières. L’objectif des propriétaires de l’entreprise, Maria Elizabeth Schaeffler et son fils Georg, était de créer le deuxième plus gros fournisseur automobile du monde après Bosch, le premier équipementier mondial.

La famille a raté sa spéculation. Suite à la crise économique, les actions de Continental avaient perdu trois quarts de leur valeur et, du jour au lendemain, Schaeffler s’était endetté de plusieurs milliards et les banques exigèrent le remboursement du capital emprunté. Selon les milieux financiers, Schaeffler n’a pas respecté les échéances convenues fin juin 2009 et est incapable de faire face aux obligations de remboursement prévu en 2009 et en 2010.

Le journal économique et financier allemand Handelsblatt avait exigé dès le début du mois d’août que : « Les banques doivent prendre les commandes chez Schaeffler. En fait, elles auraient dû l’avoir fait depuis longtemps. L’entreprise leur appartient pratiquement. » Jusque-là, les banques s’étaient abstenues de reprendre Schaeffler à leur propre compte parce que le projet aurait signifié une perte sèche de plusieurs milliards d’euros de leurs crédits. Mais c’est à présent l’épée de Damoclès qui est suspendue au-dessus des travailleurs.

Des milieux proches de l’entreprise affirment que suite au « plan d’austérité » mis en vigueur en février 2009, l’entreprise est à présent en mesure d’assurer le remboursement des intérêts à leurs banques créancières. Ces remboursements d’intérêts s’élèveraient à 70 millions d’euros par mois, voire en quatre mois à l’équivalent des 250 millions d’économies prévues par l’entreprise.

C’est à l’issue d’une réunion d’entreprise que les travailleurs de Schaeffler furent informés de la décision de ces réductions. Le 28 juillet, la direction et les comités d’entreprise avaient publié à Schweinfurt un communiqué conjoint disant que sur le personnel de ce seul site au moins 59 millions d’euros d’économies seraient réalisées.

(Article original paru le 17 août 2009)

Lire aussi :

Les travailleurs français et allemands de Continental protestent contre les fermetures d’usines [27 avril 2009]

Les travailleurs de Continental manifestent au siège français du groupe [13 mai 2009]

France : Comment « l'extrême-gauche » trahit les travailleurs L'expérience de Goodyear et de Continental [27 juin 2009]


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