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WSWS : Nouvelles et analyses : Europe

De nouvelles révélations sur ses liens avec les dictateurs d'Afrique du Nord gênent l'élite dirigeante française

Par Kumaran Ira
2 mars 2011

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Parallèlement aux luttes révolutionnaires d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient qui ont déjà fait tomber les dictateurs tunisien et égyptien, des détails continuent à émerger sur les liens corrompus entre ces dictateurs et des politiciens français de premier plan. Ces révélations embarrassent les dirigeants français, y compris le principal parti d'opposition "de gauche" bourgeois, le Parti socialiste (PS).

Début février, l'hebdomadaire satirique Le Canard Enchaîné avait révélé que la ministre des Affaires étrangères, Michelle Alliot-Marie, son conjoint, et ses parents, avaient passé leurs vacances de Noël en Tunisie durant les émeutes populaires. Durant ce voyage, ils ont profité de l'hospitalité d'Aziz Miled, un riche homme d'affaires ayant des liens personnels bien établis avec le président tunisien en fuite Zine El Abidine Ben Ali. Alliot-Marie et son groupe ont eu droit au jet privé de Miled et à un séjour dans un hôtel de luxe. (Lire : Le gouvernement français embarrassé par ses liens avec les dictatures d’Afrique du Nord)

La famille d'Alliot-Marie a profité de cette hospitalité ainsi que de contrats commerciaux en plein milieu d'une révolte populaire qui s'intensifiait, réprimée brutalement par le régime de Ben Ali et durant laquelle 200 personnes furent tuées. Lorsque la révolte populaire contre le régime s'est renforcée, Alliot-Marie a offert le « savoir-faire » de la police française pour aider à l'écraser.

Peu après cette révélation, ce fut au tour du Premier ministre français François Fillon d'être critiqué pour ses vacances de Noël en Égypte, offertes par le président Hosni Moubarak maintenant déposé. (Lire : Le Premier ministre français confronté à un scandale concernant des vacances tous frais payé en Égypte).

Les tentatives de Fillon d'expliquer ses liens avec Moubarak par la suite n'ont fait que souligner les liens historiques profonds entre Paris et les dictatures arabes. En visite en Arabie saoudite, le premier ministre a dit : « il s’agit de relations entre la France et l’Égypte. [Les ex-présidents] François Mitterrand, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy ont répondu, à de nombreuses reprises, à l’invitation du président Moubarak. »

Une autre révélation indiquait que la ministre française de l'Economie, Christine Lagarde, avait été hébergée durant une semaine en 2008 par le ministre du Commerce extérieur égyptien, Rachid Mohamed Rachid, l'un des hommes les plus riches du pays. Il lui avait offert à elle et à ses enfants un voyage en jet privé à Sharm El Sheikh puis à Louxor, où elle était l'invitée du ministre du Tourisme.

La semaine dernière, Le Canard Enchaîné a fait de nouvelles révélations sur le voyage d'Alliot-Marie en Tunisie. Selon ce journal, le voyage faisait partie d'un accord commercial entre les parents de la ministre et Aziz Miled, qui est un ami de la famille et avec qui celle-ci est en affaires. Toujours d'après l'hebdomadaire, les parents d'Alliot-Marie, Bernard et Renée Marie, avaient acheté des parts dans une société immobilière appartenant à Miled pour un montant de 325 000 euros.

S'exprimant sur les ondes d'Europe 1, le père d'Alliot-Marie, Bernard Marie a dit qu'ils s'étaient « tournés vers un ami qui s'appelle Monsieur Miled, que je connais depuis très longtemps et chez qui nous étions déjà allés. Il était d'ailleurs aussi venu chez moi, par le même jet. »

Ces révélations expliquent l'ambiguïté calculée des justifications initiales données par Alliot-Marie sur son voyage en Tunisie. Elle avait déclaré, « Arrivant à Noël à Tunis, un ami qui allait à Tabarka, lieu final de destination, avec son avion m’a effectivement proposé de voyager avec lui car il avait des places. »

Le Canard avait publié des extraits du registre municipal de la ville de Tabarka, où la transaction avait eu lieu entre ses parents et Aziz Miled. Le site d'information Médiapart avait relaté qu'Alliot-Marie avait utilisé le jet privé de Miled non pas deux fois, mais quatre.

La famille de Ben Ali a utilisé le même avion lorsqu'elle a fuit le pays le 14 janvier.

Avant cela, Alliot-Marie affirmait qu'elle n'avait « aucun contact privilégié » avec le régime tunisien. Elle a affirmé qu'elle s'était rendu en Tunisie pour « les vacances comme des millions d'autres gens, » et que durant ses vacances, elle n'était « plus une ministre. »

Pourtant, Médiapart a relaté qu'elle avait eu une conversation téléphonique avec Ben Ali au cours de son voyage. Cette révélation a été confirmée par la suite par le ministère des Affaires étrangères au Quai d'Orsay. Malgré ces révélations, le gouvernement conservateur français a pris sa défense et s'est opposé aux appels à sa démission.

Lorsque le scandale Alliot-Marie a éclaté, le PS (Parti socialiste) de l'opposition de "gauche" bourgeoise a appelé à sa démission pour la forme. Mais, de nouvelles informations montrent que les dictateurs africains avaient des liens non seulement avec Alliot-Marie et Fillon, mais également avec des membres haut placés du PS.

La semaine dernière, le Canard a révélé qu'il existait un lien encore plus étroit entre Aziz Miled et l'ex-ministre de la justice PS, Elisabeth Guigou, et son mari Jean-Louis, qui ont créé le think tank IPEMed (Institute for Economic Perspectives in the Mediterranean World) en 2006.

D'après le Canard, Aziz Miled est vice-président du conseil d'administration élu en 2009, et l'un des soutiens financiers de l'IPEMed. L'IPEMed avait accueilli son élection en écrivant, « l’élection à la vice-présidence de M. Aziz Miled, premier à représenter les pays de la rive du Sud, constitue un hommage significatif au rôle que joue la Tunisie sous la conduite du président Ben Ali. »

 

Jeudi dernier, peu après cette révélation, Guigou a annoncé qu'elle démissionnait de son poste de co-présidente du Comité de surveillance politique de l'IPEMed. Ce groupe comprends un certain nombre de politiciens de haut rang – en grande partie mais pas exclusivement issus du milieu social-démocrate européen – dont l'ex-Premier ministre italien Romano Prodi, l'ex Premier ministre espagnol Felipe González, l'ex-ministre des affaires étrangères français Hubert Védrine, l'ex-ministre des Affaires étrangères allemand Joschka Fischer, l'économiste libanais Georges Corm, l'ex-Premier ministre français Alain Juppé, et un ex-conseiller de Clinton, Robert Malley.

Le conseil de surveillance de l'IPEMed comprend des représentants des grandes industries françaises et des banques qui financent ce think tank, comme Gérard Mestrallet (GDF Suez) et Anne Lauvergeon (de la compagnie nucléaire AREVA). Il est également rapporté que le groupe Mabrouk – dirigé par Mohamed Ali, Ismail et Marwan Mabrouk – le finance également. Mabrouk est marié à Cyrine Ben Ali, la fille de l'ex-Président tunisien.

Guigou s'est défendu en disant que « ce think tank organise des séminaires, des colloques, mais n'a aucune espèce d'activité commerciale, industrielle ou financière. »

Néanmoins, la tâche de l'IPEMed et d'autres organisations du même genre est d'étudier comment les investisseurs français et mondiaux peuvent continuer à exploiter le travail à bas coût et les ressources énergétiques d'Afrique du Nord. Tant que les régimes dictatoriaux restaient en place, la classe dirigeante n'avait pas à s'inquiéter des violations des droits de l'Homme.

Un communiqué diplomatique publié par WikiLeaks, rédigé par l'ambassade américaine à Tunis le 30 avril 2009 affirme que « durant sa visite en Tunisie, le Premier ministre français [François Fillon] a fait moins de déclarations publiques sur la démocratie et les droits de l'Homme. Lorsque Fillon a été épinglé sur ces questions au cours d'une conférence de presse, il a dit que la France "ne donn[ait] pas de leçons" sur les droits de l'Homme, et que le monde "demand[ait] plus à la Tunisie" parce qu'elle est plus développée et "plus proche de nous". Il a ajouté que les problèmes de droits de l'Homme "apparaiss[aient] dans presque tous les pays du monde" et que la démocratisation était un "un processus continu". »

(Article original paru le 23 février 2011)

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