En Israël, Obama a parlé de « paix » tout en préparant la guerre

Dans un discours prononcé à Jérusalem jeudi 22 mars, Obama a aligné inconditionnellement les intérêts américains sur ceux d’Israël et réitéré les menaces de guerre déjà faites contre la Syrie et l’Iran

Ce discours, prononcé devant plusieurs centaines d’étudiants, avait pour intention ostensible de signaler le soutien continu de Washington pour le soi-disant « processus de paix », la pantomime moribonde jouée depuis des décennies et qui a servi de couverture à l’oppression du peuple palestinien et de moyen de promouvoir les objectifs américains dans le reste du monde arabe.

L’administration américaine a choisi cet auditoire plutôt que la Knesset de peur qu’Obama ne se fasse chahuter par les éléments sionistes d’extrême-droite qui dominent dans le gouvernement du premier ministre Benjamin Netanyahu.

Avant son discours de Jérusalem, Obama a fait un bref voyage à Ramallah en Cisjordanie, où il a tenu une conférence de presse commune avec le patron de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas.

Plusieurs centaines de manifestants sont descendus dans les rues de Ramallah pour dénoncer cette visite, mais furent tenus à l’écart du quartier général d’Abbas par une phalange de la police de l’Autorité palestinienne. Faisant face à la police, les manifestants ont commencé à scander des slogans contre Abbas, criant « à bas le régime militaire ».

Tout en proférant des platitudes sur le fait que l’extension de plus en plus rapide des colonies sionistes en Cisjordanie occupée n’était pas « constructive », Obama n’a pas répété son exigence de 2009 d’un gel de l’implantation de colonies. Au contraire, il a fait pression sur l’Autorité palestinienne et sur Abbas pour qu’ils abandonnent leur propre revendication d’un gel de l’activité d’implantation.

Obama a expliqué que la politique en Israël était « complexe » et que l’installation de colonies n’était pas « une question qui allait être résolue dans l’immédiat ». Il blâma les Palestiniens pour être d’avis que « nous pouvons seulement avoir des négociations directes quand tout est réglé d’avance, alors il n’est pas nécessaire d’avoir des négociations ».

En réalité, la soi-disant « solution des deux Etats » est devenue lettre morte, les implantations de colonies sionistes ayant déjà avalé près de la moitié de la terre occupée par Israël lors de la guerre de 1967, et qui devait prétendument devenir le territoire d’un mini-Etat palestinien. Il y a maintenant 560.000 israéliens, 60.000 de plus que lorsque Obama est arrivé à la présidence.

Le New York Times a fait état d’un document résumant les « points de discussion » dressés par l’Autorité palestinienne en vue de la rencontre avec Obama et qui suggère qu’Abbas et la clique riche et corrompue qu’il représente était prête à s’abaisser encore plus devant les Etats-Unis et Israël.

Ce document propose un accord par lequel Netanyahu pourrait « s’engager envers vous secrètement de stopper l’implantation des colonies pendant la période de négociations. »

Tant la presse israélienne que l’Autorité palestinienne ont décrit le discours d’Obama devant les étudiants israéliens comme l’adoption la plus enthousiaste de l’idéologie du sionisme par n’importe quel président dans l’histoire des Etats-Unis. Un journal israélien a pressé Obama d’émigrer en Israël et d’y être candidat à la présidence.

Obama a d’abord insisté sur le droit inconditionnel d’Israël à sa sécurité – bien que l’option d’une telle sécurité n’existe pas pour les Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza, ou pour les pays adjacents comme le Liban qui ont été soumis de façon répétée aux invasions et aux bombardements d’Israël. C’est Israël et non ces pays qui sert de bastion aux opérations contre-révolutionnaires et néocoloniales des Etats-Unis dans la région.

« Le rapport de sécurité entre les Etats-Unis et Israël n’a jamais été plus fort : plus de manœuvres entre nos armées et plus d’échanges entre nos responsables politiques, militaires et du renseignement que jamais auparavant ; le plus vaste programme jusque-là pour vous aider à maintenir votre avantage militaire qualitatif » se vanta Obama. Il annonça que des discussions avaient lieu pour prolonger d’une décennie le programme d’aide militaire américain qui fournit des milliards de dollars à l’armée israélienne chaque année.

Obama a répété la menace d’une action militaire contre la Syrie déjà faite la veille lors d’une apparition commune avec Netanyahu. « Nous ne tolérerons pas l’utilisation d’armes chimiques contre le people syrien ou le transfert de ces armes à des terroristes » a-t-il dit. « Le monde vous regarde et nous vous tiendrons pour responsables »

Il y a une abondance de preuves qui indiquent que les armes chimiques utilisées le mardi 19 mars, tuant au moins trente syriens dans une zone contrôlée par le gouvernement près de la ville d’Alep, était effectivement l’œuvre de « terroristes » -- ceux que les Etats-Unis et leurs alliés soutiennent dans la guerre menée pour un changement de régime. Le président américain ne parlait pas cependant de ces forces liées à Al-Qaïda mais bien plutôt du mouvement de masse chiite Hezbollah qui a été une force prépondérante dans le gouvernement libanais. Il exigea que tous les gouvernements étrangers se joignent à Washington pour stigmatiser celui-ci comme une « organisation terroriste ».

Obama répéta encore plus vigoureusement ses menaces contre l’Iran et son programme nucléaire, affirmant que si Washington rechercherait la soumission de Téhéran par des moyens diplomatiques « le temps n’était pas illimité ».

« J’ai dit au monde que toutes les options étaient sur la table pour remplir nos objectifs » ajouta-t-il. L’Amérique fera ce qu’elle doit faire pour empêcher que l’Iran n’ait une arme nucléaire. »

Le reste du discours était en grande partie consacré à appeler à une reprise du « processus de paix » et de la « solution des deux Etats ». Obama insista pour dire que tout accord devait comporter la reconnaissance par les Palestiniens d’Israël comme d’un « Etat juif », une définition qui renforcerait la privation de droits de style apartheid des non juifs, y compris une nombreuse population palestinienne à l’intérieur d’Israël et abrogerait tout droit de retour pour les Palestiniens.

Si les médias ont fait l’éloge de cette rhétorique pacifique la qualifiant d’« audacieuse » et de « courageuse », les politiciens sionistes droitiers du gouvernement de Netanyahu eux, balayèrent du revers de la main les remarques du président.

Netanyahu remercia Obama de son discours et de son « soutien total d’Israël ». Son nouveau ministre de l’Economie et du Commerce, Naftali Bennett exprima cependant des réserves quant à la référence d’Obama à l’occupation de la Cisjordanie par Israël, et déclara : « Une nation ne peut pas être l’occupant de ses propre terres. »

Danny Ayalon, l’ancien droitier et nationaliste vice-ministre des Affaires étrangères, dit que ce discours ne faisait « pas problème » étant donné qu’il ne contenait aucune proposition spécifique pour ce qui était des soi disant pourparlers de paix.

Depuis, le Jerusalem Post a suggéré que les propos sur une reprise du « processus de paix » n’étaient que de la poudre aux yeux pour accompagner l’objectif principal du voyage d’Obama, qui était d’intensifier la menace de guerre vis-à-vis de l’Iran.

« On a spéculé pendant des années sur le fait que les Etats-Unis retenaient Israël dans la question de l’Iran » notait ce journal. « En fait, avant la visite d’Obama on spéculait sur le fait qu’un des buts principaux de son voyage était de mettre devant Netanyahu un gros feu rouge. » Et il poursuivait ainsi: « Publiquement, cependant, retenir Israël n’a pas été le message d’Obama. En fait, c’est le contraire qui est vrai – et ce sont les mots que les Iraniens entendent également. »

Lors de la conférence de presse jointe de mercredi 20 mars, Obama a reconnu le « droit » unilatéral d’Israël d’attaquer l’Iran. « Chaque pays doit prendre ses propres décisions quand il s’agit de la terrible décision de s’engager dans une action militaire quelconque et Israël est dans une situation différente de celle des Etats-Unis, » dit-il.

« Obama espère qu’on n’en arrivera pas là avec l’Iran, il espère que les Iranien vont reculer » commenta le Jerusalem Post. « Mais s’ils ne le font pas, la menace militaire crédible que Netanyahu veut voir brandir à coté de la pression économique, politique et diplomatique déjà appliquée contre l’Iran n’est rien moins qu’Israël même. L’Iran et la communauté internationale ont été prévenues. »

Dix ans après l’invasion de l’Irak, l’impérialisme américain pose les fondements d’une guerre contre l’Iran qui a une superficie et une population trois fois plus grandes que celles de l’Irak. Les motivations sont les mêmes, le contrôle des régions les plus vitales dans le monde du point de vue géostratégique et énergétique.

Toue attaque de l’Iran par Israël entraînerait rapidement une intervention des Etats-Unis. Par son approbation publique du « droit » d’Israël à lancer une telle attaque, Obama met en marche un mécanisme qui conduit à une conflagration militaire.

(Article original publié le 22 mars 2013)

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