Le président français soutient la guerre des Etats-Unis contre la Syrie

Au lendemain de la décision du parlement britannique de voter contre une intervention militaire en Syrie, le président français, François Hollande du Parti socialiste (PS), s’est engagé à poursuivre son soutien à la politique belliqueuse américaine contre la Syrie, une ancienne colonie française. Vendredi, dans un entretien au Monde, il a répété, tel un robot, les mensonges qui ont été concoctés pour justifier une politique guerrière bien que ceux-ci aient été anéantis par la défaite humiliante subie par le premier ministre britannique, David Cameron.

Cameron a reconnu qu’il n’y avait pas « 100 pour cent de certitude » quant à savoir qui avait commis la présumée attaque chimique à Ghouta, pour laquelle Washington, Londres et Paris ont tenté d’imputer la responsabilité au président syrien, Bachar al-Assad afin de justifier une intervention en Syrie et de soutenir leurs forces islamistes intermédiaires. Dans la panique qui régnait au sein du régime de Cameron concernant l'opposition populaire et la discussion sur le risque d’une guerre mondiale avec les alliés de la Syrie, l’Iran et la Russie, la motion en faveur de la guerre a été rejetée.

Tandis que le gouvernement Obama poursuit ses projets de guerre, Hollande cherche à mobiliser un soutien international pour l’agression criminelle de Washington. Si les Etats-Unis partaient en guerre sur la base de mensonges publiquement discrédités, il s’agirait d’un acte de gangstérisme international sans précédent depuis l’époque de Hitler et, le soutien de la classe dirigeante française serait un acte lâche de recherche d'intérêt personnel sans précédent depuis l'époque où François Mitterrand, mentor politique de Hollande, avait porté l’uniforme du régime fasciste de Vichy qui collaborait avec Hitler.

Dans son entretien au Monde, Hollande a tout bonnement rejeté la signification du vote du parlement britannique en disant : « Chaque pays est souverain pour participer ou non à une opération. Cela vaut pour le Royaume-Uni comme pour la France. »

Hollande a affirmé que la « France dispose d’un faisceau d’indices qui vont dans le sens de la responsabilité du régime, » en prétendant que l’opposition soutenue par les Etats-Unis ne contrôle pas de telles armes, et que « tous les stocks sont contrôlés par Bachar al-Assad. »

Ce sont là des mensonges éhontés. L’échec de Cameron montre clairement que ni Londres ni ses alliés n’ont aucune preuve pour étayer leurs accusations contre Assad. Quant à leurs affirmations selon lesquelles l’opposition qui est appuyée par les Etats-Unis ne possède pas d’armes chimiques, elles ont été réfutées par les observations des responsables de l’ONU en Syrie et par les forces de sécurité turques qui en mai avaient trouvé du gaz sarin dans les maisons de combattants de l’opposition syrienne à Adana, en Turquie.

En toute mauvaise foi et conscient de la vaste hostilité populaire à l’encontre d’une nouvelle guerre, Hollande cherche à minimiser l’action militaire que Washington et Paris sont sur le point de déclencher. Suite à l’invasion du Mali par la France en janvier dernier et à son rôle de premier plan joué dans la décision de lancer la guerre en Libye en 2011, une récente enquête indique que 59 pour cent des personnes interrogées en France sont opposées à une attaque contre la Syrie.

Bien que sur le point d’ordonner des frappes de missiles et de débuter une guerre contre la Syrie, Hollande a dit stupidement au journal Le Monde qu’il veillerait à ce que la réponse de la communauté internationale mette fin à la spirale de la violence.

Il a déclaré que, vu le caractère de l’opération, « Je ne parlerais pas d’une guerre, » pour ensuite menacer quelques instants plus tard que « toutes les options sont sur la table » pour attaquer la Syrie.

Un lanceur de missiles de croisière français et une frégate porte-hélicoptères ont quitté hier le port de Toulon en Méditerranée à destination de l’est de la Syrie tandis que des avions de combat français basés en France et aux Emirats arabes unis se préparent à frapper la Syrie.

Hollande a prévu pour mercredi une séance extraordinaire commune de l’Assemblée nationale et du Sénat. En vertu de la Constitution française de 1958, cette séance n’est toutefois que consultative : le président garde les pleins pouvoir pour prendre la décision de lancer une guerre et n’a qu’un devoir d’« informer » le parlement de sa décision. L’unique autorité effective du parlement découle d'une disposition stipulant qu’il doit donner son accord à toute guerre excédant quatre mois.

Le soutien de la France à la décision américaine de faire la guerre, décision qui a même été abandonnée par la Grande-Bretagne qui est traditionnellement considérée être l’alliée la plus proche de Washington, est un revirement stupéfiant signalant une forte intensification au cours de ces dernières décennies des conflits de classe en France et en Europe.

En 2003, le président conservateur, Jacques Chirac, avait refusé de s’associer à l’invasion américaine en Irak, lancée, tout comme la guerre actuelle contre la Syrie, sur la base de mensonges concernant de soi-disant armes de destruction massive. En engageant les forces britanniques dans l’invasion, le premier ministre, Tony Blair, avait mérité à juste titre le mépris de l’opinion publique et la réputation d’être le caniche de Washington.

Mais quand jeudi, la bourgeoisie britannique a momentanément décidé de s'écarter de son rôle, le Parti socialiste (PS) de Hollande s'est immédiatement engouffré dans la brèche, avec le soutien de vastes sections des conservateurs gaullistes. Ils misent tout sur une guerre irresponsable qui risque de s'intensifier en un conflit militaire régional, voire même mondial.

Ceci n’implique pas seulement le PS, le parti de gouvernement bourgeois français de « gauche », mais aussi ses divers satellites staliniens et de pseudo-gauche, comme le Parti communiste français (PCF) et le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA). Non seulement ces derniers ont soutenu avec enthousiasme Hollande l’année dernière lors de l'élection présidentielle, mais ils ont eux-mêmes présenté les forces intermédiaires de l’impérialisme, à savoir les milices réactionnaires islamistes de l’opposition, comme des révolutionnaires. (Voir : « Gilbert Achcar cherche à dissimuler son soutien pour les guerres au Moyen-Orient »).

Etant donné que ces forces réactionnaires ont étouffé l’opposition de la classe ouvrière à l’impérialisme français, le principal bénéficiaire en a été le Front national néo-fasciste de Marine Le Pen qui a été en mesure de se présenter comme l’unique adversaire de l’élite dirigeante. Dans un récent communiqué de presse, elle a critiqué les projets de guerre de Hollande en Syrie, disant qu'ils ne profitent qu’aux forces islamistes, faisant ainsi la promotion de l’islamophobie de son parti tout en adoptant l’attitude d’une adversaire populiste à la guerre.

Le ralliement de la quasi-totalité de l’establishment politique derrière une guerre désastreuse au Moyen-Orient et la montée du néofascisme soulignent le fait que les guerres ne sont pas une question de mauvaise politique pratiquée par les politiciens bourgeois quels qu'ils soient. Cela reflète le mouvement de puissantes forces de classe et l’émergence d’une crise révolutionnaire dans laquelle la classe ouvrière se trouve confrontée à un conflit fondamental et insoluble avec toutes les institutions de l’élite dirigeante.

La politique de l’ensemble de la classe capitaliste et des sections de pseudo-gauche de la classe moyenne aisée qui lui sont les plus proches, a pris un fort virage à droite. Elles considèrent actuellement les guerres de pillage impérialistes comme le moyen le plus sûr pour elles de conserver leur position sociale.

C’est ce qui sous-tendait le soutien de la bourgeoisie française et des forces telles que le NPA à la guerre en Libye en 2011, durant laquelle les champs pétroliers libyens furent confisqués et les banques internationales saisirent des dizaines de milliards de revenus issus du pétrole libyen.

L’élite dirigeante considère aussi que la guerre est une diversion utile qui fait oublier les problèmes socio-économiques pour lesquels elle n’a pas de solution. Comme l’économiste Jean-Paul Fitoussi l’a dit dernièrement dans Libération, « L’Europe est, elle, en train de plonger dans cette spirale sans fin. Avec un chômage explosif en Grèce, en Espagne et même en Italie. La démocratie peut-elle survivre quand 60 pour cent de jeunes sont sans emploi ? La probabilité d’explosion sociale augmente chaque mois. »

(Article original paru le 31 août 2013)

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