France : Dans le contexte de la crise ukrainienne, le président Hollande se rend dans le Caucase

Du 11 au 13 mai, le président François Hollande s'est rendu dans les ex-Républiques soviétiques de l'Azerbaïdjan, d'Arménie et de Géorgie. Sa visite, au moment où Washington, Berlin et Paris intensifient la confrontation avec la Russie sur la question de l'Ukraine voisine, a pour but de consolider les liens économiques de la France avec cette région riche en pétrole, tout en intensifiant l'encerclement militaire et diplomatique de la Russie par les puissances occidentales.

La visite de Hollande a commencé alors que des activistes pro-russes hostiles au régime d'extrême-droite de Kiev, soutenu par l'occident, votaient de façon écrasante en faveur d'une plus grande autonomie pour les régions ukrainiennes de Donetsk et de Lugansk et demandaient à Moscou leur intégration dans la Russie.

A son arrivée en Azerbaïdjan, Hollande a critiqué le référendum de l'est de l'Ukraine, le qualifiant de « nul et non avenu . » Il a dit que les élections à Donetsk et Lugansk « n'avaient pas de sens » et que seule comptait l'élection présidentielle prévue par le régime de Kiev pour le 25 mai

Hollande a cyniquement déclaré que les projets de l'Union européenne (UE) de « partenariat oriental » ne visaient pas la Russie. Il a dit, « Ce sont des démarches, des déplacements qui ne sont dirigés contre personne mais qui visent à renforcer les liens entre l'Europe, la France et des partenaires qui sont aujourd'hui indépendants et soucieux de leur développement. »

La visite de Hollande souligne aussi les mesures prises par Paris pour se garantir des ressources énergétiques vitales en provenance de l'Azerbaïdjan au moment où l'UE et Washington menacent de mettre fin aux achats d'énergie en provenance de Russie, exportateur clé de gaz, du fait de la crise ukrainienne.

L'Azerbaïdjan est l'un des plus importants exportateur stratégiques vers l'occident de la région caspienne et l'un des principaux exportateurs de gaz vers de nombreux pays européens. Hollande a dit que l'Azerbaïdjan est important pour la « sécurité énergétique » de la France, et a ajouté: « Notre objectif est de soutenir le développement de l'économie azérie, notamment le secteur énergétique. »

Hollande a aussi promu les intérêts des entreprises françaises en Azerbaïdjan. La France est le cinquième plus grand investisseur en Azerbaïdjan avec des actions d'un montant de 2,4 milliards de dollars, dont près de 1 milliard de dollars dans le secteur énergétique. Les groupes énergétiques comme Total et GDF-Suez vont participer à l'exploration et au développement du gisement de gaz d'Absheron. Après la visite de Hollande, le 12 mai, d'un forum franco-azéri des entreprises, les entreprises françaises ont signé des contrats d'affaires à hauteur de 2,5 milliards de dollars, dont celui de la construction du métro de Baku et la vente de 50 trains de fret d'Alstom.

Le président azéri Ilham Aliyev a dit que son pays coopère étroitement avec l'UE sur la sécurité énergétique. Il a affirmé que, « l'Azerbaïdjan fait des efforts pour soutenir la sécurité énergétique de l'Europe. Les documents signés à la fin de l'année dernière contribueront à la livraison du gaz d'Azerbaïdjan à l'Europe et je suis sûr que nos relations avec l'Europe seront encore plus étroites après la réalisation de ce projet. »

Citant des projets d'infrastructure majeurs dont le gisement de Shah Deniz, l'un des plus grands gisements de gaz naturel à condensat, Aliyev a fait remarquer que les investissements représentent près de 45 milliards de dollars.

Assurant les puissances occidentales qu'elles peuvent compter sur les ressources en pétrole et gaz d'Azerbaïdjan comme alternative aux ressources russes, Aliyev a qualifié l'Azerbaïdjan de leader de la région de la mer Caspienne pour la livraison d'énergie aux marchés mondiaux. « Les riches ressources de pétrole et de gaz de l'Azerbaïdjan, l'infrastructure de transport existant et celle qui est en construction ont grandement changé la carte énergétique de l'Europe, » a-t-il dit.

La visite de Hollande souligne la lutte acharnée pour gagner de l'influence et des avantages commerciaux que se livrent les puissances impérialistes de l'OTAN et la Russie dans tout le territoire de l'ex-Union soviétique. Le caractère réactionnaire de l'intervention des puissances de l'OTAN trouve son expression la plus forte dans leur campagne pour un changement de régime en Ukraine, en soutenant les forces fascistes qui ont mené le putsch qui a renversé le président pro-russe Viktor Ianoukovitch en février dernier.

L'intervention de l'OTAN s'étend au Caucase, région stratégiquement cruciale limitrophes des zones déchirées par la guerre au Sud de la Russie, la région de la mer Caspienne riche en pétrole d'Asie centrale, la Turquie et l'Iran. Les trois ex-Républiques soviétiques du Caucase du Sud cherchent à tisser des liens plus étroits avec l'impérialisme occidental, la Géorgie allant jusqu'à essayer d'adhérer à l'alliance militaire de l'OTAN.

Tandis que son gouvernement fomente des tensions ethniques en Ukraine en dénonçant les manifestants pro-russes opposés au régime pro-occidental de Kiev, Hollande prétend avec hypocrisie que la France fera « tout » pour aider l'Azerbaïdjan et l'Arménie. Il a dit que ces deux pays qui avaient plongé dans un conflit armé au sujet du territoire disputé du Haut-Karabakh au moment de l'effondrement de l'Union soviétique peuvent « vivre en paix. »

En visite en Arménie lundi, Hollande a encouragé l'UE à prendre part à un accord d'association avec ce pays, démarche visant à y réduire l'influence substantielle de la Russie. L'Arménie projette de rejoindre une union douanière menée par la Russie comprenant actuellement la Russie, le Kazakhstan et la Biélorussie. Hollande a dit que l'Europe doit accepter qu'un accord d'association avec l'Arménie peut s'accompagner d'une union douanière avec la Russie.

La visite peut-être la plus potentiellement explosive a été la dernière étape du voyage de Hollande mardi dans la capitale de Géorgie, Tbilisi. Hollande a été reçu par la ministre géorgienne des Affaires étrangères Maia Panjikidze qui a fait l'éloge de la visite de Hollande comme étant l'expression du soutien de l'UE. Il est prévu que la Géorgie signe un Accord d'Association avec l'UE d'ici la fin du mois. « Notamment maintenant que nous sommes très près de la date de la signature de l'accord d'association, » a-t-elle dit, « la visite du président français est un événement spécial dans l'histoire de la politique étrangère de la Géorgie. »

Hollande a dit que sa visite en Géorgie était l'expression de son soutien à l'intégrité territoriale de celle-ci et à la décision de la Géorgie de signer un accord d'association avec l'UE.

Cette déclaration est la promesse implicite d'une assistance militaire et diplomatique en cas de conflit futur avec la Russie. En 2008, Washington avait soutenu Tbilisi qui attaquait des forces russes de maintien de la paix dans la région séparatiste de l'Ossétie du sud et d'Abkhazie, en organisant des attaques aériennes et terrestres afin de s'emparer de ces régions.

En échange, le régime géorgien a accepté de soutenir les guerres de l'impérialisme français en Afrique. Hollande a fait l'éloge de la décision de Tbilisi de participer à l'intervention française en République centrafricaine (RCA), qualifiant la démarche de Tbilisi de fournir de la chair à canon pour les guerres de Paris de bon exemple de ce que la Géorgie peut faire en qualité de partenaire de l'UE aujourd'hui et d'Etat membre de l'UE à l'avenir.

(Article original paru le 16 mai 2014)

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