Lors de négociations avec l'UE, la Grèce promet de rembourser les prêts du FMI en avance

Lundi, le gouvernement dirigé par Syriza a commencé à rembourser un prêt de €750 millions au FMI, un jour avant l’échéance de remboursement alors qu’il est de plus en plus craint que l'État grec, confronté à une crise du crédit, ne fasse défaut sur ses dettes. Si l’on compte ce paiement, Syriza a remis près de €1 milliard au FMI depuis le début du mois. 

Des responsables du ministère des Finances grec ont déclaré au Guardian qu'ils faisaient des paiements immédiatement en vertu des négociations avec le FMI. « Il n'avait pas été prévu qu'Athènes rembourse sa dette avant mardi, et Athènes avait déjà demandé une extension du délai au FMI, et avait lancé des rumeurs dimanche qu'il retarderait le paiement », a écrit ce journal.

Mais finalement Syriza s’est décidé à rembourser le prêt en avance pour montrer qu’il était un serviteur fiable de l'UE, apparemment dans l’espoir que cela convaincrait l'Union européenne de débloquer des fonds affectés au plan de l'UE de sauvetage de la Grèce. Le ministre des Finances grec Yanis Varoufakis a dit à Euronews, « la Grèce honorera toujours ses obligations envers ses créanciers, et nous allons évidemment le faire à nouveau demain. »

Le remboursement du prêt lundi est venu au moment où des responsables grecs rencontraient les ministres des Finances de la zone euro à Bruxelles pour des pourparlers visant à l'obtention de la dernière tranche de € 7,2 milliards des fonds de renflouement. Syriza a besoin de ces fonds pour verser des paiements à hauteur de plusieurs milliards d'euros à ses créanciers en août. 

La tactique de Syriza a échoué, cependant. L'UE a refusé de débloquer ne serait-ce qu'une partie des €7,2 milliards. Comme condition préalable pour l’obtention de ces fonds, la troïka - l'Union européenne (UE), la Banque centrale européenne (BCE) et le Fonds monétaire international (FMI) - a exigé plus d'austérité, comme des réformes du marché du travail et des coupes dans les retraites, ainsi que la privatisation d'entreprises appartenant à l'Etat.

Selon certains rapports de la presse financière, l'UE et Syriza discutent également de payer les travailleurs du secteur public grec avec des reconnaissances de dette, c'est à dire de saisir des euros sur leurs salaires et prendre ces fonds afin de rembourser l'UE. 

L'Eurogroupe a déclaré que la Grèce avait fait des « progrès » dans l’imposition de l'austérité sous Syriza, mais que d'autres compressions étaient nécessaires. Après les pourparlers, le groupe a publié un communiqué déclarant: « Nous nous félicitons des progrès réalisés jusqu'à présent. Nous notons que la réorganisation et la rationalisation des procédures de travail ont rendu possible une accélération, et ont contribué à une discussion plus substantielle. En même temps, nous avons reconnu que plus de temps et d'efforts sont nécessaires pour combler les lacunes sur les questions en suspens ». 

Le communiqué ajoute, « Nous nous félicitons donc de l'intention des autorités grecques d'accélérer leur travail avec les institutions en vue de parvenir à une conclusion réussie de l’examen [des mesures] en temps opportun. »

Dans une situation oò la Grèce fait face à une crise sociale désespérée due à six ans d'austérité radicale imposée par l'UE et les gouvernements grecs successifs, l'engagement de Syriza à payer ses dettes en avance et en totalité flétrit ce parti comme un outil des marchés financiers ayant pour mission d'attaquer la classe ouvrière. C'est là une preuve accablante de la faillite politique de Syriza, comme de tous les groupes de la pseudo-gauche au plan international, qui ont applaudi le gouvernement Syriza comme un grand pas en avant pour la classe ouvrière. 

Aujourd'hui, Syriza saigne la Grèce à blanc afin de rembourser ses créanciers par l'augmentation des impôts et la réduction drastique de dépenses sociales vitales comme les soins de santé. Syriza a exigé que des institutions dont les fonds de pension publics, les hôpitaux et les administrations locales remettent leurs réserves de trésorerie à la banque centrale grecque pour rembourser les créanciers de la Grèce dans l'UE. 

Le maire de Thessalonique, deuxième ville de Grèce, a révélé la semaine dernière qu'il avait remis des fonds provenant des réserves de trésorerie de sa ville en réponse à l'appel du gouvernement.

Etant arrivé au pouvoir sur la base de promesses de renverser l'austérité, Syriza a répudié ses promesses électorales peu après sa victoire électorale en janvier et a signalé son soutien total aux mesures d'austérité radicales contre la classe ouvrière grecque. 

Après la réunion de l'UE, Varoufakis a déclaré qu'Athènes serait à court d'argent dans « deux semaines. » 

« La question des liquidités est une question terriblement urgente. C’est de notoriété publique, ne tournons pas autour du pot. Du point de vue [du temps], nous parlons des deux prochaines semaines », a-t-il déclaré. 

Sur les pourparlers avec les ministres des Finances de l'UE, Varoufakis a dit qu'il y avait eu « des progrès substantiels » sur des questions comme le règlement de prêts improductifs (les PNP), la réforme de la TVA et le renforcement de l'indépendance de l'autorité fiscale de la Grèce. 

Syriza et les responsables de l'UE discutent également de comment créer les conditions politiques pour continuer à imposer l'austérité. Tout en cherchant à parvenir à un accord avec l'UE et en se préparant à imposer des coupes sociales profondes, Alexis Tsipras, premier ministre et leader de Syriza, a suggéré le mois dernier l’organisation d’un référendum sur l'austérité. Cela visait à donner un faux vernis de légitimité démocratique à une politique dictée par l'UE et massivement rejetée par le peuple grec. (Voir, Syriza lance la proposition d'un référendum pour imposer l'austérité en Grèce

L'appel de Tsipras à un référendum est soutenu à présent par le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, l'un des politiciens de l'UE les plus agressifs dans ses critiques envers la Grèce. 

« Si le gouvernement grec pense qu'il devrait avoir un référendum, alors il devrait organiser un référendum », a déclaré Schäuble avant la réunion de l'UE. « Peut-être que ce serait la bonne mesure pour laisser le peuple grec décider s’il est prêt à accepter le nécessaire, ou s'il veut avoir l'autre chose ». 

Pendant que Syriza prépare un accord avec l'UE, Wolfgang Schäuble propose un référendum parce qu'il sait très bien que c'est un piège pour la classe ouvrière. On veut proposer aux travailleurs grecs un choix entre accepter des mesures d'austérité qu'ils ont cherché à rejeter en votant Syriza et refuser les termes de l'UE et se trouver confrontés à la perspective d'une expulsion soudaine et chaotique de la Grèce de la zone euro.

Les dangers posés par ce dernier scénario pourraient être immenses, y compris la faillite de l'Etat grec. Dans le scénario d'un tel effondrement financier, la classe dirigeante envisage des mesures militaires d'urgence pour réprimer les protestations populaires. (Voir, L’UE et Syriza se préparent à réprimer l'opposition populaire à l'austérité en Grèce

(Article original paru le 12 mai 2015)

 

 

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