Les États-Unis imposent des sanctions punitives contre la Russie et la Chine à propos la Corée du Nord

Le gouvernement Trump a imposé hier unilatéralement des sanctions à des organisations et des particuliers chinois et russes à propos des activités commerciales qu’ils auraient avec la Corée du Nord. L’annonce du Trésor des États-Unis est une gifle délibérée à Pékin et à Moscou, après que tous les deux ont voté plus tôt ce mois-ci au Conseil de sécurité de l’ONU pour de nouvelles sanctions sévères contre Pyongyang quant à ses essais de missiles à longue portée en juillet.

Les sanctions visent six entreprises chinoises, une russe, une nord-coréenne et deux installées à Singapour. Six individus – quatre Russes, un chinois et un nord-coréen – ont également été affectés. En conséquence, toutes ces personnes et organisations auront leurs biens et fonds aux États-Unis gelés et ne pourront pas faire affaire avec des sociétés, des banques ou des citoyens américains.

Le secrétaire du Trésor des États-Unis, Steven Mnuchin, a déclaré qu’il était « inacceptable » que des individus ou entreprises chinoises et russes « permettent à la Corée du Nord de générer des revenus » pour ses programmes d’armements. Tout en servant en principe à renforcer les sanctions de l’ONU, la déclaration générale de Mnuchin empêche effectivement toute entreprise de faire affaire avec la Corée du Nord – bien au-delà de la portée des résolutions de l’ONU.

En outre, le Trésor des États-Unis n’a étayé aucune de ses allégations. Trois entreprises chinoises sont parmi celles ciblées, accusées par les États-Unis d’avoir violé les sanctions de l’ONU en important près de 500 millions de dollars de charbon de Corée du Nord entre 2013 et 2016. L’achat de charbon nord-coréen était assujetti à une limite annuelle et non à une interdiction complète avant les sanctions de l’ONU de ce mois-ci. Plus tôt cette année, la Chine a suspendu d’autres importations de charbon.

Les ventes de charbon valent plus de 1 milliard de dollars par an pour la Corée du Nord et représentent une part importante des exportations totales d’environ 3 milliards de dollars. En ciblant le charbon et d’autres minéraux, les États-Unis cherchent à paralyser l’économie nord-coréenne et à saper l’autorité des dirigeants de Pyongyang.

D’autres entités touchées par des sanctions incluent Dandong Rich Earth Trading, une entreprise chinoise accusée d’importer du vanadium ; Gefest-M, une société russe qui aurait acheté des métaux pour une entreprise nord-coréenne impliquée dans le développement d’armes ; et Mingzheng International Trading, une banque basée en Chine et à Hong Kong qui aurait fourni des services financiers à la ForeignTrade Bank de Corée du Nord.

En outre, le ministère de la justice des États-Unis a déposé une plainte contre deux des sociétés, Velmur Management de Singapour et la société chinoise de Dandong Zhicheng Metallic Company, demandant plus de 11 millions de dollars concernant les allégations de blanchiment d’argent pour la Corée du Nord.

L’imposition de sanctions dites secondaires, c’est-à-dire des sanctions américaines unilatérales, a été discutée aux États-Unis pendant un certain temps. Les États-Unis ont imposé des sanctions similaires en juin à la Banque de Dangong, une institution financière chinoise, qu’ils ont accusé d’aider Pyongyang dans un blanchiment d’argent, ainsi qu’à plusieurs autres personnes et organisations.

Le ciblage par les États-Unis des entreprises chinoises et russes montre clairement que Washington exploite la situation tendue avec la Corée du Nord dans le cadre de son conflit plus large avec Pékin en particulier. La prétendue menace posée par l’arsenal nucléaire limité de la Corée du Nord constitue un prétexte pratique pour l’expansion militaire du Pentagone dans la région Asie-Pacifique qui a débutée dans le cadre du « pivot vers l’Asie » du gouvernement Obama contre la Chine.

La Chine a réagi avec colère à ce dernier cycle de sanctions américaines. Son ambassade à Washington a déclaré que la Chine s’opposait à toute sanction unilatérale en dehors du cadre de l’ONU, « en particulier “la compétence internationale” sur les individus et entités chinois exercée par un pays conformément à ses lois nationales ». Un porte-parole a demandé aux États-Unis de « corriger immédiatement leur erreur » et a laissé entendre des représailles en ajoutant « afin de ne pas porter atteinte à la coopération bilatérale sur les problèmes pertinents ».

Les sanctions américaines, qui visent à forcer Pékin et Moscou à forcer Pyongyang à abandonner son programme nucléaire, ne feront qu’exacerber les tensions dans la région asiatique. Elles surviennent après une série de déclarations imprudentes du président Trump menaçant la Corée du Nord de « feu et fureur tels que le monde n’en a jamais vu » si elle menaçait les États-Unis.

Pyongyang a répondu en annonçant des projets d’essais de tir de missiles à proximité des eaux territoriales de Guam, un territoire des États-Unis, mais le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a fait marche arrière la semaine dernière en disant qu’il allait observer ce que les États-Unis comptaient faire avant d’agir.

Le secrétaire d’État américain Rex Tillerson a laissé entendre un possible chemin vers des pourparlers avec le régime de Pyongyang. S’exprimant devant les médias à Washington, il a déclaré que la Corée du Nord avait « démontré un certain niveau de retenue que nous n’avons pas vu dans le passé » en ne réalisant pas de lancements de missiles depuis la dernière série de sanctions de l’ONU.

« Nous espérons que ce soit le début de ce signe que nous avons recherché », a déclaré Tillerson, ajoutant que « peut-être que nous voyons là notre voie dans un futur proche qui débouchera sur un certain dialogue ». Il a toutefois conclu qu’ « il faut qu’ils fassent plus d’effort ».

Tillerson a déjà précisé que toutes les discussions doivent être fondées sur l’abandon total par la Corée du Nord de ses programmes nucléaires et de missiles balistiques et des arsenaux existants. Pyongyang, cependant, insiste sur le fait qu’il n’abandonnera pas ses armes nucléaires tant qu’il doit faire face à la menace persistante d’une attaque américaine.

Alors que Tillerson et d’autres responsables de Trump ont suggéré qu’une solution diplomatique au conflit avec la Corée du Nord puisse être trouvée, la menace militaire américaine est maintenue. Le Pentagone poursuit cette semaine des manœuvres militaires de grande envergure en Corée du Sud, avec des dizaines de milliers de militaires américains et sud-coréens.

De plus, à la suite d’une collision fatale lundi entre un destroyer américain lance-missiles et un pétrolier près de Singapour, le commandant des forces américaines dans la région Asie-Pacifique a mis en garde contre toute tentative de tirer profit des faiblesses apparentes de la capacité des opérations militaires des États-Unis. À la suite de la collision, le Pentagone a ordonné la suspension de toutes les opérations de la flotte américaine dans le monde pour évaluer les procédures et la formation (lire l’article en anglais).

L’amiral Harry Harris, le chef du Commandement américain dans le Pacifique (PACOM), a averti hier qu’il serait « téméraire » pour quiconque de tester militairement les États-Unis. Ses remarques faites à la Base aérienne d’Osan en Corée du Sud visaient clairement la Corée du Nord. Harris a déclaré que la collision n’a pas affecté la capacité de l’armée américaine à « défendre la péninsule [coréenne] et nos intérêts dans la région ».

(Article paru en anglais le 23 août 2017)

 

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