Une nouvelle étape dans la contre-révolution bipartite en santé

Suite aux décrets de Trump, les démocrates proposent de «corriger» Obamacare

Au début du mois d'octobre, il y a eu escalade du complot bipartite contre les droits aux soins de santé des Américains de la classe ouvrière. Après les nombreuses tentatives ratées des membres républicains du Congrès, ces derniers mois, pour «abroger et remplacer» la Loi sur les soins abordables (Affordable Care Act, ACA), l’administration Trump a émis une série de décrets visant à amoindrir la loi communément appelée Obamacare.

Le premier décret du président a augmenté les exemptions pour les employeurs qui prétendent avoir des objections morales ou religieuses à devoir fournir gratuitement, selon l’ACA, des contraceptifs à leurs travailleurs.

Ensuite, Trump a finalisé un décret pour permettre aux «régimes association de soins médicaux» de se soustraire à la clause de l’ACA qui oblige à fournir 10 services essentiels dans la couverture de leurs régimes d’assurance.

Finalement, l’administration a annoncé qu’elle allait se débarrasser des paiements des partages des coûts (CSR) aux assureurs privés qui aident les Américains à faible revenu à s’acheter une protection médicale.

Trump a été clair qu’il cherche à rejoindre les démocrates du Congrès pour conclure un marché sur la «réforme» des soins de santé, c'est-à-dire des changements à l’Obamacare pour réduire davantage la couverture médicale. Dans un message publié sur Twitter, il a dit, «L’Obamacare des démocrates est en train d’imploser. Les subventions massives à leurs compagnies d’assurance préférées ont cessé. Les démocrates devraient m’appeler pour corriger la situation.» Il a poursuivi en qualifiant la loi de «fouillis total».

Tous les décrets de Trump auront comme effet de faire augmenter les primes d’assurances, particulièrement pour les gens âgés, pauvres et malades et de mettre fin à l’accès aux services médicaux de base pour des millions de personnes. Mais ce n’est pas ce qui préoccupe les démocrates au Congrès.

La chef de la minorité à la Chambre des représentants Nancy Pelosi et le chef de la minorité au Sénat Chuck Schumer ont publié une déclaration démagogique, réprimandant Trump pour avoir mis fin aux CSR, déclarant en partie: «Il semble que le président Trump va lui-même augmenter les primes d’assurance des Américains. C’est un acte malveillant de sabotage inutile dirigé contre les familles ouvrières et la classe moyenne partout aux États-Unis.»

Mais les dirigeants démocrates ont conclu par ce qu'ils voulaient vraiment dire, c'est-à-dire réprimander le président si ses actions indiquaient qu'il allait «s’éloigner des négociations Alexander-Murray bipartites de bonne foi et risquer les soins de santé de millions d’Américains».

Plus tôt ce mois-ci, après les tentatives infructueuses des républicains pour abroger et remplacer Obamacare, Trump a tweeté: « J’ai appelé Chuck Schumer hier pour voir si les démocrates veulent faire un excellent projet de loi sur la santé.» Schumer a répondu: «S’il veut qu’on travaille ensemble pour améliorer le système de santé existant, nous démocrates sommes ouverts à sa suggestion. Un bon endroit pour commencer serait les négociations Alexander-Murray qui stabiliseraient le système et réduirait les coûts.»

Schumer fait référence aux pourparlers des soins de santé qui sont menés par les sénateurs Lamar Alexander (républicain du Tennessee) et Patty Murray (démocrate de Washington). Ces négociations bipartites n’ont rien à voir avec l’expansion de la couverture médicale aux 28 millions d’Américains qui restent sans assurance, l’augmentation des prestations désespérément inadéquates pour de nombreuses personnes, ou le désir de freiner d’une quelconque manière le mercantilisme et le pouvoir des monopoles de l’assurance et de la pharmaceutique.

Au lieu de cela, leur «correction» d’Obamacare implique le renforcement de l'industrie des assurances au moyen de divers versements. Les démocrates ont également convenu à un «compromis» permettant aux assureurs de contourner les réglementations d’Obamacare qui exigent des compagnies d’assurance qu'elles fournissent un lot de prestations essentielles en offrant des plans «minimaux», de même que pour éviter les protections de l’ACA pour les personnes ayant des troubles de santé préexistants.

N’importe quel «compromis» entre les démocrates et les républicains sur la réforme des soins de santé est par sa nature même un complot contre la classe ouvrière. Cela repose entièrement sur la subordination des soins de santé aux profits des compagnies et au fonctionnement du marché capitaliste.

Le Gouverneur de l’Ohio John Kasish a été plus transparent sur à quoi ressemblerait une entente bipartite sur les soins de santé, déclarant cet été: «Après deux tentatives [républicaines] ratées d’une réforme, la prochaine étape est clair: le Congrès devrait tout d’abord se concentrer à corriger Obamacare avant de se lancer dans Medicaid… Une fois que ces corrections seront en place, le Congrès devrait alors s'attaquer aux améliorations nécessaires à Medicaid dans le cadre d’une réforme complète.»

Toutes les versions républicaines ratées d'Obamacare abrogent et coupent des centaines de milliards de dollars de Medicaid, le programme d’assurance maladie gouvernementale pour les pauvres, les personnes âgées, les handicapés et les femmes enceintes. Elles menaient essentiellement à la fin du programme en tant que programme de soins garantis, en imposant des plafonds par habitant aux États, ce qui forcerait ces derniers à refuser des prestations aux gens admissibles.

À travers ces mesures, Medicaid serait progressivement privé de financement jusqu'à ce qu'il soit privatisé et finalement démantelé. Il n’y a eu aucune déclaration claire des dirigeants démocrates s’opposant en principe au démantèlement de Medicaid, et tous ceux qui font partie de l’establishment politique et médiatique savent qu'il s'agit de la première étape pour démanteler et privatiser Medicare, le programme d’assurance du gouvernement pour les ainés, et la sécurité sociale, le système de pension gouvernemental.

Les plans bipartites pour «corriger» Obamacare dans l’intérêt des compagnies d’assurances – davantage de réduction dans les prestations et l’augmentation des primes d’assurance pour les familles ouvrières, tout en réduisant les coûts pour le gouvernement et les compagnies – n'entrent pas en contradiction avec l’esprit d'Obamacare. En fait, ils reflètent son essence et son objectif: que les travailleurs vivent trop longtemps à la retraite, recevant des «traitements inutiles» et coûteux, et que quelque chose doit être fait pour réduire les coûts dans l’intérêt du profit des entreprises.

Dès 2009, l’année avant que l’ACA devienne loi, le World Socialist Web Site écrivait:

«La campagne [de Barack Obama] pour une révision du système des soins de santé, loin de représenter une réforme conçue pour fournir une couverture universelle et augmenter l’accès à des soins de qualité, marque une attaque sans précédent sur les soins de santé pour la population travailleuse…

«La contre-révolution des soins de santé d’Obama est conséquente avec l’entièreté de son programme national. Elle fait suite au sauvetage financier des banques de plusieurs billions de dollars, à l’imposition de licenciements de masse et de baisses de salaire et d'avantages sociaux dans l’industrie automobile et à une attaque intensifiée sur l’éducation publique et les professeurs.»

Les politiques des démocrates sur la réforme des soins de santé ne sont aucunement une alternative à celles de Trump. Les deux mèneront à une quantité incalculable de souffrance, de misère et de décès évitables. La défense des besoins sociaux de base, comme les soins de santé, requiert un combat contre le capitalisme qui, dans sa phase avancée de crise, est incompatible avec les droits sociaux et démocratiques fondamentaux.

Une lutte pour défendre les soins de santé requiert une lutte pour le socialisme. L’industrie des soins de santé doit être retirée des mains du privé et placée sous la propriété publique et le contrôle démocratique de la classe ouvrière. Ce n’est pas une utopie irréaliste, mais bien la seule solution rationnelle à un système de santé dominé par le profit et défendu par une classe dirigeante obsolète.

(Article paru en anglais le 14 août 2017)

 

 

 

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