Des forces soutenues par les États-Unis sur le point de reprendre la ville irakienne de Mossoul

L'armée du gouvernement irakien et la police auraient repoussé les derniers combattants survivants de l'État islamique dans un petit secteur de la «Vieille Ville» de Mossoul. La ville, ou ce qui en reste, devrait être entièrement sous contrôle gouvernemental en quelques semaines, voire quelques jours.

L'offensive pour reprendre Mossoul de l'EI a débuté en octobre dernier. Pendant neuf mois, la ville a été le théâtre de combats de rue des plus intenses depuis l'invasion américaine de l'Irak en 2003. Les troupes et la police du gouvernement irakien ont progressivement avancé dans sa banlieue, soutenues par l'armée américaine et une coalition qui inclut des aéronefs et des «conseillers» des forces spéciales de l'Australie, du Royaume-Uni, de la France et du Canada.

La destruction jeudi du minaret de 900 ans de la mosquée historique d'Al Nuri symbolise la dévastation qui a été infligée à Mossoul et à sa population. La combinaison de frappes aériennes et de combats meurtriers terrestres a réduit de vastes zones de la ville à des immeubles à demi détruits et a laissé ses rues jonchées de véhicules brûlés et de décombres. Les réseaux d'électricité, de gaz, d'eau et d'assainissement ont été détruits.

Selon le gouvernement de Bagdad, l'EI aurait fait exploser le minaret pour empêcher la police d'élite irakienne de «contre-terrorisme» de le capturer intact. La mosquée Al Nuri avait une valeur de propagande importante pour les forces gouvernementales, car c'est là que le leader de l'EI, Abu Bakr al-Baghdadi, avait déclaré la création d'un «califat» en juin 2014, après que le mouvement islamiste a pris le contrôle de Mossoul.

Le groupe EI, dans sa propre propagande en ligne, a affirmé que le minaret a été détruit par une attaque aérienne américaine. Cela a été nié par l'armée américaine et une vidéo suggère qu'il a été démoli par des explosions contrôlées à l'intérieur du bâtiment.

Le gouvernement irakien refuse de publier des chiffres sur les pertes subies par ses forces. Elles pourraient atteindre jusqu'à 10.000 morts et blessés. Les reportages plus tôt dans l'année ont indiqué que certaines unités de l'armée et de la police ont subi des pertes de 50 pour cent au cours des combats acharnés pour repousser complètement l'EI hors du secteur de l'est de la ville.

Ce sont les civils, cependant, qui ont souffert le plus. Avant juin 2014, Mossoul comptait près de 2 millions d'habitants. Alors que des centaines de milliers de personnes ont fui lorsque l'EI a capturé la ville, les déplacements et le nombre de victimes ont augmenté de façon exponentielle depuis le début de l'assaut soutenu par les États-Unis.

On estime à environ 860.000 le nombre de résidents de Mossoul qui ont été faits réfugiés. Beaucoup d'entre eux survivent dans des campements surpeuplés ou ont rejoint des membres de leur famille ailleurs au pays.

Encore 500.000 personnes vivent la misère et une situation extrêmement difficile dans la banlieue est contrôlée par le gouvernement de la ville. On estime qu'environ 100.000 personnes sont toujours piégées dans les zones contrôlées par l'EI.

Il n'y a pas de nombre total exact de victimes civiles. Il est presque certain que des dizaines de milliers de personnes ont été tuées ou blessées, à la fois par les forces soutenues par les États-Unis et par les extrémistes de l'EI.

Une seule attaque aérienne américaine du 17 mars a massacré au moins 105 hommes, femmes et enfants. L'armée américaine a révélé qu'entre octobre 2016 et le 3 juin sa coalition avait bombardé la ville avec quelque 24.464 missiles et bombes.

Lorsque l'offensive a commencé il y a neuf mois, la coalition dirigée par les États-Unis estimait généralement qu'il n'y avait pas plus de 5.000, et au maximum 10 000, combattants de l'EI dans la ville. Au début de mai, les commandants irakiens ont affirmé en avoir tué plus de 16.000. Dans les semaines qui ont suivi, ils ont prétendu en avoir tué des centaines d'autres.

Le nombre gonflé de combattants de l'EI qui auraient été abattus suggère que des personnes sont faussement qualifiées de combattants pour dissimuler l'ampleur réelle des décès de civils.

Un article du 22 juin du journaliste britannique indépendant Tom Westcott, qui se trouve à Mossoul, décrit des aspects troublants du traitement que subissent des hommes et des garçons qui parviennent à traverser les lignes de combat des zones détenues par l'EI jusqu'à celles sous contrôle gouvernemental.

Un médecin français a parlé à Westcott de plusieurs hommes dont les blessures par des éclats d'obus ont été traitées. «Évidemment, a déclaré le médecin, ces opérations ont été faites par des médecins de l'EI et nous savons qu'ils ne s'occupent que des leurs, alors ces hommes étaient probablement partisans de l'EI. Il a noté que les troupes gouvernementales leur feraient subir au moins deux «examens».

Westcott a également raconté comment un homme était soupçonné de faire partie de l'EI parce qu'il avait des bleus sur son épaule – qui auraient pu être causés par le recul d'un fusil.

Tout au long de l'opération, tout homme âgé de plus de 15 ans qui est accusé d'être un partisan de l'EI a été emmené pour interrogatoire et détention. Des preuves ont vu le jour depuis octobre que des combattants présumés d'EI à Mossoul ont été soumis à une horrible torture ou exécutés sommairement par des forces gouvernementales.

À mesure que les derniers secteurs de la ville passent aux mains du gouvernement, des milliers d'hommes et d'adolescents sont confrontés à un avenir incertain. Un officier de l'armée irakienne a déclaré à Westcott: «La plupart des jeunes hommes encore à l'intérieur sont avec Daesh [EI]. Nous sommes 100% certains qu'ils font partie de Daesh».

Le secrétaire américain à la Défense, James Mattis, avait qualifié la politique des États-Unis en Irak de «tactiques d'annihilation». Il a implicitement approuvé l'exécution extrajudiciaire de non Irakiens qui sont capturés à Mossoul et qui seraient des combattants de l'EI. Il a déclaré le mois dernier dans une interview: «Notre intention est que les combattants étrangers ne survivent pas pour rentrer chez eux en Afrique du Nord, en Europe, en Amérique, en Asie, en Afrique. Nous ne leur permettrons pas de le faire.»

Les remarques de Mattis ne font que souligner que toutes les atrocités commises par les forces du gouvernement irakien se déroulent en toute connaissance de cause et avec la complicité des États-Unis et des autres États impérialistes qui fournissent des troupes aux opérations anti-EI.

(Article paru en anglais le 23 juin 2017)

 

 

 

 

 

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